chapitre 18
18 : réchauffer l'atmosphère au sens un peu trop littérale
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- Effectivement, c'était une idée foireuse, constate Madeline
- Tu juges déjà ma surprise avant même de savoir ce que c'est ? Franchement Deli, je vais finir par être vexé, plaisante Julian en agitant son index de manière joueuse
- Si tu voulais que j'adhère plus vite à ton idée, il fallait y penser avant de me faire crapahuter dans les bois en pleine nuit ! Je n'ai pas prévu la lampe frontale, je te signale
Voilà que la blonde perd son sang-froid, ce qui ne manque pas de faire éclater de rire son ami. Un bon quart d'heure s'est écoulé depuis qu'ils ont quitté le campement endormi et qu'ils se sont engouffrés dans la forêt. Guidée par Julian et seulement par la confiance qu'elle lui accorde, Madeline suit chacun de ses pas en prenant soin d'éviter les racines en forme de croche-pied et les branches d'arbres ressemblant à des doigts qui cherchent à vous retenir en arrière.
Heureusement, la pleine lune et son intensité lumineuse leur permet d'y voir clair et de mieux s'orienter grâce à la lueur blanche et mystérieuse qu'elle projette aux alentours.
- Pardon de te décevoir mais je ne t'emmène pas faire de la spéléo, s'excuse Julian en faisant une fausse moue désolée
- Tant mieux, j'ai eu ma dose d'aventures démentes aujourd'hui pour au moins vingt ans, soupire Madeline
Une fois de plus amusé, Julian se fend d'un petit sourire en coin. Il passe tout près d'un chêne épais au tronc noueux et bifurque sur la droite, ayant apparemment rencontré un point de repère. La pianiste lui emboîte automatiquement le pas et évite une souche couverte de mousse.
- Tu t'es bien débrouillé avec ton équipe d'ailleurs, la félicite-t-il en glissant ses mains dans les poches de sa veste en jean
- Disons qu'on a fait du mieux qu'on a pu pour sauver l'honneur, relativise-t-elle en haussant les épaules
- Tu as fait plus que ça. Je t'ai vu pendant l'épreuve des troncs d'arbre ... tu as été géniale, la complimente-t-il en se tournant vers elle
Ses mots sont empreints d'une telle sincérité que la blonde sent cette phrase l'atteindre en plein cœur. La joie qui pétille en elle dessine un sourire sur ses lèvres, que les reflets de lune font s'illuminer d'autant plus.
- Merci, je me suis moi-même étonnée pour tout te dire, admet-elle
- C'est toujours une belle surprise de se surpasser, de se trouver là où on ne s'y attend pas
- C'est assez grisant oui, et tellement satisfaisant
- Comme quoi, il ne faut pas toujours se fier aux apparences ou se borner à sa première impression, lui dit-il en lui offrant un coup d'épaule malicieux
Bien malgré elle, Madeline se trouve au pied du mur. Elle comprend tout de suite de quoi veut parler son ami, elle se mordille la lèvre inférieure en réprimant une moue gênée. À sa décharge, elle n'était pas la seule qui n'éprouvait aucun emballement à l'annonce de cette sortie !
- Bon d'accord ! capitule-t-elle en levant des mains innocentes. Je dois l'admettre, l'idée de ta mère paraissait foireuse à première vue mais ça s'est révélé être une bonne surprise en fin de compte. C'est une spécialité Lington ce mécanisme foireux puis réussi ?
- Il faut croire oui ! rit Julian
Malgré les rires, quelque chose de plus profond est tapi sous la surface. Madeline avait une idée plutôt arrêtée et préconçue sur la façon cette sortie pourrait se dérouler, et désormais elle reconnaît avoir eu tort.
- Ta mère va être contente de nous, tu crois ? demande-t-elle, pleine d'espoir
- Plus que ça, je crois qu'elle va être fière, répond Julian. Et je suis content pour elle. Elle misait beaucoup sur cette sortie alors que pas grand monde n'y croyait. Elle qui garde toujours espoir de voir une cohésion se créer entre les lunaires et les immaculés, je suis content que cette journée lui ait donné raison
- Oui, acquiesce Madeline. Aujourd'hui, j'ai réussi à voir à travers les yeux de ta mère. J'y ai vu son espoir se concrétiser et c'était fantastique
Tout en continuant de marcher, le lunaire glisse un regard vers la blonde.
- Ma famille va te convertir aux bonnes surprises avant que tu n'aies vu le coup venir, méfie-toi, plaisante-t-il
- Wow, tu vas un peu vite en besogne mon coco, le calme-t-elle. Qui a dit que ta surprise serait bonne ? Je te trouve un peu trop confiant alors que je ne vois même pas le début d'un commencement de surprise !
- Ne t'en fais pas pour ça, on est plus très loin. Ça n'aurait pas été drôle d'y arriver en claquant des doigts. Et puis, marcher permet de se vider la tête quand elle est un peu trop encombrée ...
Trahie par ses propres émotions, l'immaculée ne répond rien. Julian n'insiste pas pour autant, ce qu'elle ne manque pas de constater et d'apprécier. Là maintenant, elle ne veut pas refaire face à toutes les pensées qui ont pollué son esprit alors qu'elle essayait de fermer l'œil. Le poids, venu alourdir ses épaules à cause de ses réflexions, s'est momentanément dissipé et elle ne tient pas à le sentir de nouveau.
Au bout de plusieurs minutes de silence seulement troublé par le bruit de leurs pas sur des brindilles cassantes ou sur des feuilles mortes, Madeline cède une nouvelle fois.
- Ta surprise, elle n'existe pas c'est ça ? C'était juste une excuse pour me traîner dans-
- Tais-toi Deli, on est arrivés
La jeune femme s'arrête de marcher au même moment que son ami. Elle se tourne sur elle-même pour tenter de comprendre mais elle ne voit rien, rien d'autre qu'une butte.
Une butte en roche leur fait face, d'une hauteur d'environ un mètre cinquante. Un arbre couché forme une sorte de marche permettant d'y grimper afin d'accéder à une partie plus élevée de la forêt. Avec dextérité, Julian pose son pied sur le tronc et se hisse en haut de la butte en s'aidant de la branche d'un autre arbre. Une fois là-haut, il se penche et tend aussitôt la main à Madeline.
Elle exécute le même enchaînement, mais en profitant du geste galant de Julian. Grâce à sa main dans la sienne, le lunaire l'aide à grimper en haut de la butte.
- Et voilà, tu peux découvrir ma surprise maintenant, sourit-il en ne retirant pas sa main pour autant
La blonde détourne ses yeux verts de ceux de Julian pour balayer son nouveau champ de vision. Et elle s'en trouve le souffle coupé.
Une sorte de clairière s'étend autour d'eux, les arbres se font moins nombreux mais bien plus majestueux. Leurs branches sont aérées, laissant passer la clarté de la lune au travers. Et ces branches sont le clou du spectacle.
Julian et Madeline se trouvent au-dessous d'un champ de cerisiers absolument somptueux. De petites fleurs roses recouvrent entièrement leurs branchages et offrent une vision enchanteresse à leurs spectateurs. L'éclairage amené par la lune apporte une touche velouté à ces délicats pétales, d'une beauté à nulle autre pareille. Transportée par ce ciel floral qui s'étend au-dessus de sa tête, la jeune femme ne parvient pas à décrocher son regard de ces merveilles printanières.
- Alors, que penses-tu de ma surprise finalement ? lui demande Julian avec douceur
- J'en dis que je ne douterais plus jamais de tes idées foireuses. C'est vraiment ... magnifique
Le nez toujours levé vers la multitude de fleurs planant comme une voute végétale en apesanteur, Madeline ne se rend même plus compte que son cerveau s'est enfin mis sur pause. La technique de Julian a parfaitement fonctionné, et c'est terriblement agréable.
- J'adore les fleurs de cerisiers, avoue-t-elle en souriant sans s'en rendre compte. Elles font partie des premières fleurs à éclore, ce sont elles qui annoncent l'arrivée du printemps et qu'un nouveau cycle va bientôt commencer. Quand on regarde une fleur, une seule, elle paraît jolie mais très simple, presque timide. Par contre, quand on les voit par centaines, c'est là qu'on mesure combien ce tableau est sublime
- C'est parmi les autres qu'elle irradie de beauté, murmure Julian
Si Madeline n'était pas absorbée par la contemplation des cerisiers, elle aurait certainement remarqué que les yeux bleus de Julian ne l'avaient pas quitté un seul instant. En particulier lorsqu'il prononce cette dernière phrase lourde de sens.
- Je suis venu ici avec ma famille, quand j'étais gosse. On avait pique-niqué tous les quatre sous les branches couvertes de fleurs, lui raconte-t-il. Je me souviens que Zadig avait râlé quand une fleur était tombée dans son verre de limonade, j'ai bien cru qu'il allait porter plainte !
- Certaines choses ne changent jamais apparemment. Drama queen un jour, drama queen toujours, raille la blonde en baissant la tête vers son ami
- Tout ça remonte mais je me suis toujours rappelé de cet endroit, et j'ai eu souvent envie d'y revenir
- Ce sont souvent les meilleurs moments de notre enfance qui forment nos plus beaux souvenirs d'aujourd'hui, dit la blonde avec nostalgie
Ses mots flottent quelques secondes entre eux, tandis que de faibles craquements résonnent parmi la forêt. Certainement des animaux voulant profiter de la tranquillité de la nuit pour sortir librement. Une brise se lève et s'engouffre entre les branches, soulevant les pétales délicats des fleurs. Ce souffle frais s'enroule autour de Madeline, qui frissonne malgré elle. Elle passe ses mains sur le tissu de son sweat pour frictionner machinalement ses bras. Son geste n'échappe pas à Julian, il ôte aussitôt sa veste en jean et la dépose sur ses épaules avec délicatesse.
- C'est vrai. Même si certains souvenirs d'aujourd'hui peuvent être tout aussi beaux ..., souffle-t-il
L'immaculée le remercie d'un sourire et glisse ses bras dans les manches, évidemment trop longues, de la veste. Une odeur d'amande et de musc émane du vêtement, emplissant avec délice les sens de la blonde.
- Merci d'avoir partagé cet endroit avec moi. Il fera partie de mes beaux moments d'aujourd'hui, sans aucun doute, lui avoue-t-elle
- De rien. Il pourrait devenir ton refuge, quand tu en as besoin. Ça l'a été pour moi en quelques sortes, après la séparation de mes parents
- Ah oui ?
Fouillant dans sa mémoire, Madeline essaye de se remémorer les souvenirs qu'elle a de cette époque. Tout est un peu flou, à ça s'ajoutent les rumeurs qui circulaient dans les couloirs de l'école au moment où la séparation des parents du trio Lington s'est répandue comme une traînée de poudre à Cherryton.
- Tu ne t'en souviens certainement pas mais on s'est absentés un petit moment à cette période. Ma mère nous a emmené ici quelque temps après qu'elle et mon père se soient séparés. Elle voulait qu'on se crée des souvenirs rien qu'à nous, avec notre famille nouvelle génération. Je n'avais même pas dix ans à l'époque, j'en étais encore au stade où je projetais des glaçons partout quand j'éternuais, se rappelle-t-il avec nostalgie. Ma mère m'apprenait à maîtriser mes dons, Blair était là pour m'épauler et Zadig ... il était encore plus jeune que moi et avait encore plus besoin de son frère et de sa sœur pour surmonter cette épreuve. Mais dès que ma mère nous a emmené ici, c'est comme si tout le reste s'était envolé. Plus de pouvoirs, plus de crise familiale. Il n'y avait plus que nous quatre et c'est tout ce qui comptait
Avec cette explication, Madeline prend la mesure de l'importance qu'accorde Julian à cet endroit. Elle est d'autant plus touchée qu'il ait voulu le partager avec elle.
- À partir de là, je n'avais d'yeux que pour ma mère, forte, toujours debout, capable de tout endosser sur ses épaules. Et surtout de supporter avoir trois garnements toujours dans les pattes, s'amuse-t-il
- Vous étiez l'incarnation humaine des Aristochats, plaisante Madeline
Le lunaire éclate de rire, brisant le silence de la nuit de la plus joyeuse et mélodieuse des façons.
- Quoi ? Ne me dis pas que tu ne vois pas la ressemblance ?! lui lance-t-elle
- Pour tout te dire, je n'y avais jamais pensé avant, rit-il
- Oh je t'en prie, c'est votre portrait craché ! Une maman solo et sacrément charismatique accompagnée de ses trois enfants aux caractères complètement différents. Ça crève les yeux, raille la jeune femme
Elle plisse les yeux pour se donner un air profond, tandis qu'elle décompte petit à petit avec ses doigts.
- Zadig, c'est Marie : chanteur et petites manières de princesse évidemment. Ensuite ... Blair aime toujours peindre ?
Surpris qu'elle se soit souvenue de ça, Julian ne répond pas de suite et dévisage un instant son amie, un sourire en coin.
- Oui, elle aime toujours peindre, acquiesce-t-il finalement
- Alors c'est Toulouse, définitivement
- Et moi ? J'ai bien peur d'être le seul de la famille à être dépourvu de talents artistiques, se lamente Julian en feignant une moue déçue
La blonde fait mine de réfléchir en se tapotant le menton.
- Avec un peu d'entraînement, je peux peut-être réussir à faire quelque chose de ton niveau en piano. Bon, tu ne seras sûrement pas à la hauteur de Berlioz mais ça sera suffisant pour ma métaphore, sourit-elle
D'autres rires échappent à Julian, amplifiant le sourire de l'immaculée. Un silence agréable s'installe entre eux, leur permettant simplement d'apprécier la compagnie de l'autre. À l'heure actuelle, c'est tout ce qui compte. Eux, la lune et des fleurs de cerisiers.
- Qu'est-ce qui te trottait dans la tête, Deli ? lui demande-t-il dans un souffle bienveillant
- Pas maintenant, je ne veux pas gâcher ce moment, lui dit-elle en secouant la tête
Parce que oui, eux, la lune et ces magnifiques fleurs de cerisiers sont tout ce dont elle veut avoir à se préoccuper en ce moment.
Alors les deux amis restent ici, simplement, de fins sourires sur les lèvres.
Jusqu'à ce qu'une chose vienne briser le confort de leur petit cocon.
- Il n'y a pas une odeur étrange ? dit Julian en fronçant les sourcils
- Ça sent le feu, constate Madeline, nez plissé
Le coup d'œil qu'ils s'échangent se fait dubitatif et tend vers une inquiétude naissante. Une ombre capte le regard de la blonde, qui s'avance de quelques pas entre les cerisiers en fleurs. En plissant les yeux, elle parvient à déceler une lueur orangée à travers les branches. Irrégulière, tremblotante, cette lueur s'accompagne de bruits de crépitements et de craquements loin d'être rassurants.
- Il y a un feu de forêt, et ça vient de là, déclare-t-elle en montrant du doigt ce qui lui fait face
- Ici aussi
Elle se retourne vers Julian et suit son regard. Un peu plus loin, ces mêmes ombres incandescentes progressent à travers la nuit. L'odeur âcre de la fumée s'intensifie à mesure que le feu se rapproche d'eux.
- Merde, il faut qu'on se tire d'ici et vite, lance Madeline, tout à coup sur le qui-vive
- On doit aller prévenir les autres, maintenant, approuve Julian sur un ton grave
Les mains du lunaire se referment sur les bras de l'immaculée de manière protectrice, afin de l'entraîner loin de la lumière orange de plus en plus menaçante. En alerte, les deux amis s'éloignent du champ aux cerisiers en fleurs en pressant le pas.
- Tu crois que le campement n'est plus en sécurité à l'heure qu'il est ? s'interroge la pianiste
- Aucune idée. Par contre, je sais que ce n'est pas la saison des feux de forêts
Cette phrase plane au-dessus d'eux presque aussi lourdement que la menace des flammes dans leurs dos. Madeline ne peut s'empêcher d'avoir une pensée quant à l'origine d'un tel feu ... Mais le moment est très mal choisi pour nourrir des soupçons.
Ils rejoignent à la hâte le bord de la butte, Julian descend le premier en s'aidant du tronc d'arbre couché comme un peu plus tôt dans la soirée. Il se retourne rapidement vers Madeline en lui tendant la main. Elle jette un dernier regard par-dessus son épaule pour admirer la beauté des fleurs de cerisiers au beau milieu des bois. Une beauté qu'elle aimerait garder gravé dans sa mémoire, avant que celle-ci ne parte en fumée.
Mais déjà, le orange se fait bien plus vif et les crépitements beaucoup plus sonores, signifiant que l'incendie progresse vite, très vite. Sans plus attendre, elle se saisit de la main de son ami et descend de la butte. Arrivés en bas, ils ont une vue directe sur les flammes. À une vingtaine de mètres d'eux, elles se répandent d'arbres en arbres en ne laissant que cendres et braises rougeoyantes sur leur passage.
- Merde, il faut vraiment qu'on se grouille, lâche Julian
- Je n'aurais pas dit mieux !
Ni une ni deux, Madeline s'empare de la main de son ami et se met à courir. Tous deux détalent à toute vitesse à travers les bois, bien que l'odeur de la fumée devienne de plus en plus tenace. En seulement une minute, une nouvelle vague brûlante se manifeste sur leur gauche tandis que leur droite est de plus en plus bouchée par l'incendie qu'ils ont aperçu en quittant la butte. Les voilà poursuivis de part et d'autre par une marée ardente des plus agressives.
Le feu dévore la forêt, engloutit les arbres sur son passage et ravage avec une faim insatiable les alentours. Rongées par les flammes, certaines branches cèdent sous l'assaut incandescent et s'écrasent au sol en soulevant des particules de cendres. La chaleur qui se dégage du brasier rend l'avancée des deux jeunes gens suffocante, périlleuse et très dangereuse.
- Traverser une forêt en flammes, ce n'est pas tellement l'idée du siècle, râle Madeline
- On n'a pas le choix, il faut qu'on retourne au campement, lui répond Julian
Jeff, Phoebe, Zadig ... et tous les autres, songe-t-elle. Est-ce que tout le monde va bien à l'heure qu'il est ?
Les flammes se resserrent autour d'eux, à une allure dévastatrice. Bien qu'elle tente de contenir sa panique, l'urgence de la situation n'aide pas Madeline à réfléchir normalement. Elle est incapable de se rendre compte de la distance qu'ils ont parcouru depuis le champ aux cerisiers, ni s'ils sont encore loin du campement. Tout ce qu'elle comprend, c'est que l'incendie forme un étau bien trop étroit autour d'eux.
- C'était une putain d'idée foireuse en fin de compte ! lâche-t-elle
- Ça ne faisait pas partie du plan, je-
Julian n'a pas l'occasion de terminer sa phrase. Un arbre immense, ravagé par les flammes, s'effondre juste devant eux, créant une muraille embrasée infranchissable. Madeline émet un cri de surprise tandis que son ami la tire précipitamment en arrière, la serrant contre lui pour l'éloigner du danger.
Mais le danger est partout. Ils se tournent et se tournent sur eux-mêmes, avant d'aboutir à la même conclusion. Les flammes les encerclent et la seule issue vient d'être bouchée par la chute de cet arbre.
- Bon ... qu'est-ce qu'on fait ? Je n'ai jamais été fan des barbecues alors mourir comme ça ..., ironise Julian
- On ne va pas mourir, il est hors de question qu'on meurt dans les bois comme des âmes perdues
- Tu as une suggestion pour sortir de ce merdier ?
Ce merdier enflammé gagne du terrain, la fumée s'épaissit et les fait tousser tandis que de la suie se dépose sur eux. Madeline dévisage le lunaire, comme s'il avait laissé ses neurones dans le champ aux cerisiers.
- J'ai une suggestion oui : tu vas nous sortir de là, affirme-t-elle
- Je te demande pardon ?
- Ce n'est pas toi qui sais jouer avec la glace ? réplique-t-elle en penchant la tête sur le côté
- Ça n'a rien à voir ! Je ... je ne suis pas assez fort pour arrêter un incendie !
D'autres branches calcinées chutent tout autour d'eux, la tranquillité et le silence qui régnait dans les bois n'est plus qu'un lointain souvenir. Ne reste plus que l'urgence et l'instinct de survie.
- Bien sûr que tu l'es ! s'écrie la blonde après une quinte de toux. Sers toi de la pleine lune pour atteindre ton plein potentiel. Et puis, le moment est mal choisi pour avoir un complexe d'infériorité !
- Non, je ne peux pas ! Je n'ai pas assez de puissance pour ça ...
Le stress émanant de leur position précaire a raison de la patience de Madeline, elle fonce droit sur Julian et encadre son visage de ses mains.
- Tu es assez fort pour ça, j'en suis persuadée, lui dit-elle avec hargne. C'est comme pour les roses givrées ... tu n'as qu'à emprisonner le feu dans ta glace. Tu n'as peut-être pas confiance en tes capacités mais moi, j'y crois. Je crois en toi Julian, j'ai confiance ...
Les prunelles bleues du lunaire s'ancrent dans celles vertes de l'immaculée, ne se lâchant pas un seul instant. La conviction avec laquelle Madeline a déclaré ces phrases et l'étincelle palpitant dans ses yeux suscite bien des choses chez Julian. Il la dévisage longuement en déposant délicatement ses mains autour des poignets de la blonde.
- Tu le penses vraiment ? souffle-t-il, sur un ton fébrile
- Tu me connais, je ne suis pas du genre langue de bois juste pour flatter l'égo de quelqu'un. J'ai confiance en toi et en tes capacités, je suis prête à mourir pour le prouver
Les flammes poursuivent leur progression funeste, l'anneau qu'elles forment autour des deux amis devient de plus en plus étroit. La chaleur est suffocante, la fumée de plus en plus dense, les cendres volent dans toutes les directions ...
- Mais si je pouvais éviter d'en arriver là pour booster ta confiance en toi, ça m'arrangerait, ajoute la blonde dans un petit rire
- Non. Je ne laisserais jamais une telle chose arriver, jamais, promet Julian avec fermeté
La pianiste dépose brièvement son front contre celui du lunaire, un geste tendre qui contraste grandement avec la brutalité qui les entoure et qui vise à transmettre une dernière vague de force à son ami. Ce qui semble bien marcher, Julian se redresse en prenant une profonde inspiration.
Le bleu de ses yeux prend une teinte froide, endurci par sa détermination. Il fait quelques pas pour s'approcher de la barrière mouvante que forment les flammes et lève les bras, paumes tournées vers le feu.
D'abord, rien ne se passe. Les traits de Julian se tendent sous l'effort de sa concentration, déterminé à les sortir de là. Mais le feu est plus rapide, une énième branche incandescente craque et tombe tout près de Madeline. Trop près.
Le petit cri de la blonde attire l'attention de Julian, qui, paniqué, fait volte-face vers elle. La branche a enflammé le bas de son pantalon et ronge le vêtement comme un prédateur s'acharnant sur sa proie.
- DELI !
- Ça va, je vais bien ! lui assure-t-elle
Avec précipitation, elle tape sur sa jambe pour étouffer les flammes. En quelques secondes, l'affaire est réglée, même si la peau de sa cheville en dit toute autre chose. Inquiéter Julian et le détourner de son objectif est la dernière chose dont elle a envie, alors elle se rapproche de lui en lui agrippant le bras.
- Là maintenant, c'est toi qui comptes. Alors donne tout ce que tu as pour nous sortir de ton idée foireuse
Le petit sourire en coin de la blonde permet au lunaire de se détendre un peu. Un tout petit peu.
- C'est le moment d'être fantastique alors, dit-il en se fendant d'un petit sourire
Il relève son bras gauche et le replace de la même manière que précédemment. La main toujours posée sur le bras droit de Julian, Madeline observe intensément son ami se dévouer à leur survie.
De plus en plus menacés, l'urgence est complète. Résolu, Julian met tout ce qu'il a pour rendre justice aux mots de son amie. Il pousse un cri, chargé de force et de résilience. Tout son corps est tendu, chaque fibre de son être dévoué à faire se surpasser ses pouvoirs.
Et puis, près de la position de sa main, les flammes se figent. Une coque de glace d'un bleu clair polaire prend la forme d'un cercle et emprisonne l'indomptable incendie. Ce cercle s'agrandit, s'étale au-dessus du niveau de leurs têtes et rejoint le sol calciné. La glace s'étend jusqu'à l'arbre étendu au sol qui les a empêché d'avancer plus loin à cause de sa chute. Une voie est à présent ouverte, de manière éphémère.
Estomaqué par ce qu'il vient d'accomplir, Julian tourne aussitôt la tête vers Madeline en laissant un grand sourire illuminer son visage.
- La vache, j'ai réussi ! s'exclame-t-il
- C'est génial, tu as été génial ! sourit la blonde. Il faut dire que tu as eu de super paroles d'encouragement ...
- C'est fou ... je n'ai jamais ... c'est la première fois que je fais quelque chose d'aussi grand
Mais ce n'est pas parce qu'il est parvenu à ouvrir une brèche que l'incendie est réduit au silence, bien au contraire. Il continue de s'étendre, inlassablement.
- C'est super mais il faut toujours qu'on dégage de là et vite fait
- Oh oui, bien sûr
Julian glisse sa main droite dans celle de Madeline et l'entraîne derrière lui. La main gauche du jeune homme reste tendue droit devant lui, répandant son pouvoir givrant sur les flammes. Ils peuvent se remettre en marche en détalant quatre à quatre, grâce à la glace de Julian qui fend les flammes en deux. Il crée une barrière protectrice, le feu devient dompté par la puissance de la glace. Exactement comme avec la rose givrée.
Au bout d'une traversée qui leur a semblé durer une éternité, Madeline et Julian parviennent à rejoindre le campement. Ou du moins ce qu'il en reste. Bien que l'incendie n'ait pas encore complètement encerclé la zone, il est suffisamment proche pour avoir suscité une vague de panique dans chaque tente. Tout est sens dessus dessous, tout le monde court dans toutes les directions pour rassembler ses affaires et pouvoir mettre les voiles le plus rapidement possible. Le sentiment d'urgence plane dans l'air, aussi lourdement que les effluves écœurantes de la fumée.
Au milieu de cette agitation frénétiquement, deux personnes sont détachées du reste du groupe et demeurent immobiles. Jusqu'à ce que Madeline et Julian entrent dans leur champ de vision.
- Oh nom de dieu, vous voilà enfin ! soupire Jefferson en accourant vers eux
- Bordel de merde, où est-ce que vous étiez bande d'imbéciles ?! s'écrie Zadig
Ils n'ont pas le temps de répondre ni de se justifier, le mannequin enlace brièvement son frère, à la surprise générale. Mais le plus surpris reste le principal concerné, Julian lui rend timidement son étreinte en fronçant les sourcils de stupéfaction.
- Quand on a vu l'incendie et que vous n'étiez nulle part, on a flippé, ajoute Jefferson en serrant sa jumelle contre lui
- Vous avez bien choisi votre moment pour faire une balade en amoureux au clair de lune, râle Zadig sur un ton de reproche qui trahit grandement l'inquiétude l'ayant habité
Avant qu'ils n'aient pu protester sur le choix de mot du cadet Lington, la professeure Campbell et Donovan Elder arrivent à la hâte dans leur direction.
- Mademoiselle Harvey, Monsieur Lington, ravie que vous vous joigniez enfin à nous ! lance sarcastiquement Odella
- Ce qu'elle essaye de dire, c'est qu'on est soulagé de vous avoir retrouvé, précise son collègue
- Maintenant que tout le monde répond présent à l'appel, on va pouvoir évacuer la zone au plus vite
Même « au plus vite » ne semble pas suffisant, l'intensité du feu gagne en puissance et en terrain à chaque seconde. Des lueurs rougeoyantes s'élèvent dans le ciel, éclairant les bois presque autant que le soleil le ferait.
- Et comment vous comptez vous y prendre ? Le feu progresse anormalement vite, il a bien failli nous coincer là-bas, explique Julian, la mâchoire crispée par le stress
- Si Julian n'était pas intervenu, on aurait pris un bon coup de chaud, raille Madeline en se grattant nerveusement la tempe
- PARDON ?! s'époumonent Zadig et Jefferson
Les deux frères dévisagent leur membre de la famille avec de gros yeux ronds, le même air ahuri presque comique sur le visage. Si la situation n'était pas aussi catastrophique, la blonde aurait certainement éclaté de rire en charriant l'expression de son jumeau.
- Passer par la forêt est trop dangereux, on pourrait se retrouver coincé et se blesser. Ou pire, renchérit Julian
Et comme pour illustrer ses propos, d'autres chutes d'arbres et de branches incendiées se manifestent autour du campement. Les flammes ont continué de gagner du terrain et semblent l'avoir fait avec une voracité décuplée, encore plus menaçante. Bientôt, leur campement sera à son tour piégé dans un étau incandescent et ne ressemblera plus qu'à un tas de cendres le lendemain. Les flammes progressent sans relâche et lèchent déjà un côté du campement.
- Je crois que je peux aider, intervient une voix dans le dos des professeurs
Tout le monde pivote en direction de Phoebe. Mains fourrées dans les poches de sa veste en cuir, la métisse les fixe avec une étincelle déterminée qui se reflètent dans ses yeux sombres.
- Ou du moins, je peux essayer avant qu'on ne finisse tous en marshmallows grillés
- Mademoiselle Saunders ... vous êtes sûre de vous ? interroge Donovan en plissant les yeux, soucieux
- Pas vraiment mais on n'a pas tellement d'autres options sous la main, répond-elle en haussant une épaule
La solution paraît claire à présent, si évidente qu'elle saute aux yeux. Madeline se rapproche de sa voisine de palier, la jeune femme extraordinaire avec qui elle a noué les liens les plus complices depuis son arrivée à l'Académie.
- Bien sûr que tu peux le faire, affirme la blonde
- Je me dis surtout que je n'ai pas passé des heures à m'entraîner pour que dalle, ironise la brune
- Ça c'est impossible, tu as tout ça en toi. Ça ne demande qu'à être libérer, lui assure Julian avec conviction
Toutes les paires d'yeux sont rivées sur elle, expectatives. Phoebe inspire une grande goulée d'air en coulant un regard à l'arrière-plan enflammé qui les menace.
- Je ne pourrais sûrement pas transporter toute la classe d'un seul coup mais je peux essayer d'ouvrir un portail, suggère-t-elle
L'immaculée se souvient très bien de la dernière fois qu'elle a pu voir son amie fabriquer un portail. À ce moment-là, c'était une sorte de fenêtre qu'elle avait ouverte sur Cherryton pour remonter le moral de la blonde.
- Tu l'as déjà fait, tu peux le refaire
- Oui, acquiesce Phoebe. Même si cette fois, c'est carrément plus stressant. Surtout que je vais devoir mettre le bouton puissance mille, ce qui ne m'est jamais arrivée mais pas de pression à part ça
-
C'est un soir de pleine lune ... c'est le moment où jamais d'enclencher le mode badass, dit Madeline
Les deux amies arborent un même sourire en coin. Remontée à bloc par la confiance de l'immaculée, la lunaire hoche la tête de nouveau, convaincue.
- Normalement, c'est le moment de mettre une musique épique en fond sonore, suggère Zadig
- C'est surtout le moment de vous rendre utile et de rassembler tous les autres, lance leur professeure d'histoire
La rousse repart en direction des autres élèves disséminés à travers le campement, suivie par Donovan. Jefferson et Zadig finissent par leur emboîter le pas, sans broncher ... l'heure est vraiment grave.
Seuls Julian et Madeline restent auprès de Phoebe, comme une vieille habitude instincte ressurgissant d'elle-même.
- Ça va aller ? s'enquit la pianiste
- Je sais ce que j'ai à faire, répond la pâtissière avec un sourire empli de conviction
- « Savoir où aller, c'est savoir comment s'y rendre ou choisir de ne pas traverser », n'est-ce pas ? dit Julian
- Exactement
La métisse ferme les yeux pour mieux dévouer toute sa concentration à son objectif. Madeline dépose une main amicale sur l'épaule de la lunaire, l'encourageant d'un geste.
Des étincelles vertes apparaissent autour des mains de Phoebe, leur intensité grandit si vite que des filaments s'enroulent le long de ses bras en quelques secondes. La jeune femme rouvre les yeux à l'instant où un cercle d'étoiles vertes apparaît face à elle. Les traits de son visage se durcissent tandis qu'elle doit fournir des efforts immenses afin que le cercle puisse s'agrandir.
- Continue comme ça, tu y es presque, lui intime Madeline
- Souviens-toi : laisse-toi porter, ajoute Julian
Les mots d'encouragements et les conseils de ses amis la renvoient directement aux heures d'entraînement qu'ils ont passé ensemble. Ces souvenirs l'aident visiblement à faire tomber toutes ses barrières mentales, puisque le cercle s'allonge et s'élargit à vue d'œil. Bientôt, les étincelles vertes ont pris la forme d'un portail aux dimensions parfaitement adaptées à l'usage qu'ils doivent en faire. Une vue sur la cour du château trône au milieu des petites étoiles crépitantes, un souffle de vent s'engouffrant à la jonction des deux endroits.
- Magnez-vous, je ne sais pas combien de temps je vais pouvoir tenir ! s'exclame Phoebe, contractée par les efforts qu'elle doit fournir
Sans tarder davantage et un à un, les élèves franchissent le portail créée par Phoebe. L'incendie progressant encore et toujours sur leur zone de campement est une motivation suffisante pour écarter toutes envies de protester.
- Ne traînez pas ! leur dit Odella Campbell avant de s'engouffrer dans la brèche
Ne restent plus que Madeline, Julian et Phoebe. La métisse est de plus en plus épuisée par sa prouesse, son corps tendu atteste de sa fatigue. La blonde échange un regard avec le fils Lington, comme pour lui dire de passer le premier. Ce dernier lui renvoie le même regard en secouant presque imperceptiblement la tête de gauche à droite, ses prunelles d'un bleu rendu froid par la décision irrévocable qu'il a prise, signifiant clairement « pas sans toi ».
- On se revoit de l'autre côté ? plaisante Phoebe
- C'est tous les trois qu'on a voyagé la première fois, c'est tous les trois qu'on rentre ce soir ! déclare son amie
En une seconde, Madeline s'empare de la main de Julian et de celle de Phoebe et les tire avec elle à travers le portail. Le flou les avale tout entier, avant que les choses ne se stabilisent de nouveau. Leurs pieds retrouvent le sol, mais ce moyen de locomotion un peu brutal leur fait perdre l'équilibre. Ils tombent tous les trois à la renverse ou sur les genoux, dans l'herbe et les feuilles.
Étouffant un grognement, l'immaculée s'appuie sur ses paumes afin de se redresser légèrement. Elle prend quelques secondes, assise par terre, pour se remettre la tête à l'endroit. À ses côtés, Phoebe est étendue sur le dos tandis que Julian s'assoit, les fesses sur les talons.
- Putain ... ça c'est ce que j'appelle du voyage par portail spatial, rit la brune en reprenant son souffle
- Un voyage par portail spatial de pro, madame, la félicite la blonde
- Tu as tout déchiré, le félicite Julian
Tandis qu'ils s'aident les uns les autres à se redresser sur leurs jambes flageolantes, Madeline fait courir un regard circulaire aux alentours. Disséminés un peu partout dans la zone d'atterrissage - entre la cour, les jardins et la rivière serpentant en contrebas du château - , tous les élèves ainsi que les accompagnateurs reprennent peu à peu leurs esprits suite à cette évacuation express.
- Au moins, ce calvaire bouillant est terminé, observe Amaury en tentant de discipliner ses boucles brunes en pagaille
- Tant mieux, je ne rêve que d'une chose : une douche pour me débarrasser de cette suie dégueulasse, râle Zadig en se frottant frénétiquement sa joue
Si la plupart des élèves semblent soulager, ce n'est pas le cas des professeurs. Odella et Donovan demeurent sur le qui-vive, l'air grave.
- Il faut à tout prix prendre contact avec des professionnels pour venir à bout de cet incendie, dit Donovan en composant déjà un numéro sur son portable
- Quelque chose ne va pas ... il n'y aucune lumière dans le château, constate Odella, la mine tiraillée par l'angoisse
À quelques mètres de là, une silhouette fait tressaillir l'obscurité, son contour contrasté fendant la forêt. Puis un peu plus loin, une seconde imite cette attitude. Puis une autre et encore une autre ... jusqu'à ce qu'une dizaine d'ombres aient quitté les abords des bois pour encercler leur groupe. Et enfin, un cri.
Ensuite, tout se passe très vite. Les ombres se mettent à attaquer de toutes parts
L'une d'elle se rue précipitamment sur Madeline en brandissant un poignard à la lame aiguisée. Surprise par cet assaut soudain, la blonde ne réagit pas assez vite pour éviter la pointe qui vient entailler la peau de son cou. Elle parvient en revanche à repousser des deux mains son ennemi.
- MADELINE ! crient Julian et Phoebe en même temps
Avant que ses amis ne puissent lui venir en aide, Madeline mobilise toutes les techniques que le professeure Dofrost leur a apprises. Elle parvient à arrêter le bras de son assaillant - qui se révèle être une assaillante - en agrippant avec force son poignet. D'un coup de pied circulaire, elle frappe la femme au ventre avec puissance. Cette dernière émet un sifflement plaintif en titubant en arrière, avant de repartir de plus bel. En poussant un cri un peu primaire, elle cherche de nouveau à atteindre l'immaculée de sa dague. Madeline la repousse une fois encore, en lui assénant un violent coup de poing au visage. La folle furieuse recule en posant une main sur son nez visiblement douloureux.
- Désolée mais la soirée a été un peu longue, ironise la blonde
- Et ce n'est que le début, crache sa rivale
- Fais gaffe à tes fesses, Harvey ! lui crie Zadig tandis qu'il se bat lui-même contre un autre assaillant avec Andrea
- Harvey ? répète dans un souffle perplexe la folle dingue
Son moment de trouble ne dure pas, elle ne renonce pas à son attaque et, comme mise sur pilote automatique, allait s'élancer une fois encore vers Madeline. C'était sans compter sur l'intervention de Julian. L'assaillante essaye d'avancer mais n'y parvenant pas, baisse la tête vers ses pieds qui refusent d'avancer. Et pour cause : ils sont bloqués au sol, piégés par la glace.
- Ça ressemble plutôt à la fin pour toi et tes petits copains, ajoute Julian en la fusillant du regard
L'expression de ses prunelles changent radicalement lorsqu'elles se posent sur Madeline, le lunaire s'approche d'elle immédiatement en la scrutant de la tête aux pieds avec inquiétude.
- Tu vas bien ? s'empresse-t-il de lui demander en entourant son visage de ses mains
Ses doigts survolent l'égratignure qui zèbre la gorge de Madeline au moment où cette dernière allait le rassurer d'une réponse positive. Mais les yeux verts de la jeune femme capte un flamboiement métallique par-dessus son épaule, la panique s'engouffre en elle et emporte tout sur son passage.
- JULIAN ! s'écrie-t-elle, les yeux écarquillés
Son instinct l'a fait réagir en un quart de seconde. Elle enroule ses bras autour de son ami et le pousse de toutes ses forces, l'éloignant au maximum du trajet funeste effectué par la dague de leur ennemie. Ils s'effondrent tous deux au sol, tandis que l'assaillante manque sa cible. Pour faire bonne mesure, Phoebe fonce droit sur elle et l'assomme à l'aide d'une grosse bûche. La folle dingue s'écroule, assommée pour un petit moment.
- C'est ça, tu n'as qu'à faire une sieste, espèce de tarée, balance la métisse en lâchant son arme de fortune
Toujours allongés dans l'herbe, Madeline et Julian reprennent leur souffle en faisant se rencontrer intensément le bleu clair et le vert émeraude. Leurs corps sont si proches l'un de l'autre que leurs nez se frôlent, permettant à la blonde de respirer la même odeur d'amande et de musc qu'elle a pu sentir sur la veste du jeune homme. Veste qu'elle porte encore d'ailleurs.
- Merci de m'avoir sauvé, lui dit-il. Ne refais plus jamais ça
- Toi d'abord, réplique la blonde avec un sourire en coin
Phoebe les aide à se remettre debout, leur permettant de voir ce qu'il se passe autour d'eux. Leurs camarades semblent en être au même point qu'eux, la plupart de leurs assaillants sortis de la pénombre sont maîtrisés ou sur le point de l'être. Chacun s'est allié à son voisin afin de se défendre, de se protéger mutuellement et de combattre la noirceur.
Arnie donne un coup de main à Rosalynn Berringham et à Jesse pour venir à bout de l'un des opposants. Kleo et Jefferson soutiennent Amaury, blessé à la jambe gauche. L'entraide, plus belle que jamais dans les pires moments.
- Et bien ... ça fait beaucoup en une soirée, soupire Phoebe en écartant une mèche ondulée de ses yeux
- Ça confirme sûrement une chose : ce n'est définitivement pas la saison des incendies, ajoute Julian
- Pour être honnête, il n'y a qu'une chose qui m'intéresse là maintenant : une douche pour me débarrasser de cette suie dégueulasse, déclare Madeline en reprenant les mots de Zadig
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