Chapitre Six - Maladie
"Aller, debout ! On se dépêche !" hurla Brouhabam. L'expression de surprise fixe sur le visage de Goupix fit éclater de rire Grimpal. "Bon sang ! J'avais presque réussi à l'oublier, celui-là. Je ne m'y ferai jamais..." gémit-elle. Grimpal se leva doucement. Ses muscles lui faisaient souffrir le martyr. Cependant, il est incapable de dire si c'était à cause de son séjour atroce dans le futur ou si c'était à cause du voyage temporel. Mais d'un autre côté, prendre son temps lui faisait un plaisir indescriptible. Ce n'était pas pour désobéir à Brouhabam, loin de là. C'était pour se sentir présent. Il était de retour. Il était explorateur. Et cette couche, c'était sa couche. Il était bien là. Il soupira comme si le réaliser avait été vital pendant un moment. Goupix le suivit dans cet esprit en jetant ça tête en arrière, rêveuse. "D'accord, j'ai menti. En réalité, il m'avait manqué lui aussi. C'est si bon d'être de retour ici." Grimpal hocha la tête, trop concentré pour pouvoir parler. Cet atmosphère chaleureuse, ces magnifiques couleurs vives et naturelles, cette vie autour d'eux. La volonté de vivre était de retour dans leur environnement. Il était clair qu'en faisant la comparaison avec le futur, le présent semblait un paradis calme alors que la guerre n'allait pas tarder à commencer. "C'est parti !" fit enfin Grimpal en se redressant, tirant un sourire de la part de Goupix.
Les deux compagnons trépignaient sur place. Entre la chasse à Massko et l'escapade dans le futur, ils avaient eu l'impression de ne pas avoir vu la guilde depuis des siècles. Ils regardaient autour d'eux pour voir si tout leurs compagnons étaient encore présents comme les jeunes pokémons agités et passionnés qu'ils étaient. Eokko leur fit tout de même signe de se calmer dans un coin de la salle mais Goupix lui renvoya le signe dans le but de la saluer ; elle n'avait pas compris qu'on leur reprochait quelque chose. Mais cet excès de bon humeur n'allait pas être puni par Pijako, au contraire. Au moment où le second du maître de la Guilde sortit, tous se mirent au garde-à-vous sauf Goupix et Grimpal. Cette réaction de la part des apprentis explorateurs étaient due à la gravité de la situation. Mais les deux compères avaient déjà assimilé la situation et avaient compris qu'il ne servait à rien de dramatiser. En prenant un peu de recul, c'est le geste nerveux des apprentis explorateurs qui étaient inhabituels. Pijako fut le premier à le leur faire remarquer en éclatant de rire, rejoignant ses deux jeunes amis dans leur bonne humeur. La plupart des prétendants au titre d'explorateur détournèrent le regard, honteux. "Bon... Ça suffit les bêtises. Grodoudou vous a expliqué la situation hier soir. Si je me souviens bien il vous a expliqué qu'il nous fallait rassembler les six Rouages du Temps pour les ramener à la Tour du Temps sinon c'est la Fin du Monde assurée. Vous comprendrez donc que tout ça ne doit pas sortir de la guilde, c'est clair ? Vous êtes aussi des apprentis aux yeux du monde. Je ne pense pas qu'on puisse vous confier la responsabilité d'impliquer n'importe quel civil dans cette affaire. Donc nous avons deux choses à faire : ramener les Rouages du Temps et trouver comment accéder à la Tour du Temps. Il nous reste six jours. Est-ce que j'ai omis quelque chose ou je peux passer à la suite ?" Pijako semblait satisfait du speech qu'il avait fait. Mais Grimpal ne put s'empêcher de pouffer en comprenant la signification du regard qu'il avait adressé à Goupix. Pijako en vient à demander implicitement si il s'en est bien tiré... Dites donc ! Il est sacrément dépendant d'elle. Grimpal se tourna vers Goupix pour l'admirer une fois de plus. Elle avait tant changé depuis qu'ils s'étaient rencontrés. Une sorte de sagesse était née en elle. Elle avait appris tant de choses que c'en était effrayant. Ce n'était pas une histoire de potentiel mais de passion. C'était cette passion qui l'avait poussé aussi loin. Voir Goupix le torse bombé, la tête droite et parfaitement sereine et réfléchie faisait naître une certaine fierté chez Grimpal. Elle n'avait plus rien à voir avec la Goupix timide, la tête et la queue basse qui avait peur de faire connaissance avec les autres êtres vivants. Autrefois, tout le monde l'ignorait, elle était seule par choix. Désormais, tout le monde l'adulait en commençant par Grimpal. Même Massko s'était lié d'amitié avec elle dans une vitesse record. Grimpal se pencha vers elle doucement et, après un cours moment d'hésitation sur la chose à faire, il vint enfouir sa tête dans le cou de sa compagne. Son doux pelage chaud était comme un refuge symbolique pour Grimpal. Sans prendre en compte la grimace de Pijako, il souffla un tendre "Je t'aime, Goupix." à sa partenaire. Son pelage semble frémir sous la douce phrase. Grimpal pouvait se la représenter fermer les yeux et poser sa tête tendrement sur celle de Grimpal. "Moi aussi, je t'aime." répondit-elle sur le même ton.
Pijako regarda la scène quelques secondes, partagé entre la jalousie et l'attendrissement, avant de faire un pas et de rompre ce doux et long moment. Mais un apprenti lui coupa la parole avant même que le volatile puisse former un mot complet.
-En fait, nous nous demandions quelque chose tous les trois... fit un Ponchiot sans grande conviction.
-Je t'écoute. Parle.
-Qui est-ce qui partira remettre les Rouages en place ?
-Ah... C'est la question qui fâche. J'espère qu'aucun d'entre vous n'y a vu une opportunité. Je vous rappelle qu'il y a un risque de faire face à Dialga et pas dans le bon sens du terme. Je ne peux pas laisser des apprentis sans expérience et, pour la plupart, à l'aube de leurs vies aller se faire déchiqueter par un pokémon légendaire dans plongé dans une rage sanguinaire. On en a pas l'air mais nous prenons soin de nos apprentis au sein de notre guilde.
-Pardon Pijako.
-Il n'y a pas de mal, Ponchiot. Je suis sûr que beaucoup d'entre vous se posait cette question mais que personne n'a tenté de demander. C'est une bonne chose que tu aies fait preuve de courage. Autre chose ?
Ponchiot secoua la tête vivement, le pelage gonflé de fierté et de réconfort. Tous regardaient les interlocuteurs avec des yeux ronds. Depuis quand Pijako s'est attendri ?! songea Goupix, à la fois choquée et amusée. Au fond, il reprend peut-être plaisir à diriger les garnements que nous sommes... C'est bien. Je suis contente qu'il retrouve des raisons au bonheur, lui aussi. Goupix avait aussi remarqué qu'on ne parlait pas de Massko ni des Rouages qu'il avait dérobé. Pijako ou Grodoudou leur avait sûrement expliqué qu'ils avaient récupéré les trois Rouages du Temps qui manquaient à l'appel. Pijako commença donc à répartir les tâches. Trois Rouages et un emplacement-mirage à trouver. Une partie de plaisir. "Ne vous en faites pas, nous avons déjà tout prévu. Eokko, tu iras prendre une équipe de policiers avec toi et vous irez chercher le Rouage du Temps de la Forêt de l'Est. Grodoudou a demandé à Créfadet, encore en convalescence ici, de contacter les deux autres gardiens pour qu'ils amènent leur Rouage personnel. En bref, je veux que tous les autres apprentis se dépêchent dans les quatre coins du continent à la recherche d'un moyen d'accéder à la Tour du Temps. Est-ce que c'est clair ?!"
"Oui !" répondirent les apprentis en cœur. "L'exploration : le savoir par l'aventure !" scandèrent-ils ensembles. Une chose était sûre, ce n'était pas la motivation qui manquait. Goupix avait toujours trouvé la devise de la guilde particulièrement belle et vraie. Elle était toujours ravie de pouvoir la prononcer avec force et fierté. L'esprit de la guilde était ancré profondément en elle. Goupix vivait de sa passion, celle qu'elle éprouvait pour Grimpal et celle qu'elle éprouvait pour l'exploration et l'aventure. Et ces possibilités lui étaient offertes par des personnes comme Pijako.
Pijako leur fit signe d'approcher. Grimpal se doutait qu'il avait prévu quelque chose de différent pour eux deux alors il avait empêché Goupix de se précipiter dehors. Pijako prit tout de même le temps de saluer personnellement les deux compères. Grimpal fut plus touché qu'il l'aurait imaginé : ce geste si franc montrait que Pijako le tenait en haute estime. Il avait toujours eu des doutes sur la façon de considérer le volatile mais il était désormais clair qu'il était digne de confiance et même d'amitié. Inconsciemment, Pijako lui faisait penser à Massko. Les deux avaient des qualités similaires : la fougue, la hargne, l'élocution, le charisme, la force d'âme, des émotions puissantes et franches. C'était sûrement pour cette raison que Grimpal se sentait si proche de lui malgré les raisons qui auraient pu les séparer définitivement.
-Pijako, moi j'avais une question.
-Ah. Eh bien, vas-y. Je t'écoute.
-Nous avions parlé des attaques menées contre les oracles... Jusque là, je pensais qu'elles avaient été causées par Ectoplasma. Mais après réflexion, Ectoplasma travaille encore avec Massko et les oracles n'étaient pas des cibles. Alors je me suis posé la question de qui ça aurait pu être.
-Et tu en penses quoi, maintenant ?
-Je pensais que c'était Noctunoir qui couvrait l'arrivée de la Fin du Monde en zappant les oracles mais il était avec nous alors que l'assassin agissait encore. Je pense donc à un de ses acolytes. Mais ce n'est pas logique non plus. Noctunoir est fort, il l'aurait fait lui-même. Quelqu'un dans le camp de Noctunoir a pris cette décision de manière indépendante. Pour moi, il n'y a qu'une seule personne capable de faire ça.
-Qui ça ?! s'emporta Goupix. Je te rappelle que c'est ce sale type qui va peut-être tuer mon père !
-Du calme Goupix. Nous savons que Feunard ne mourra qu'après la Grande Paralysie. Il nous suffit simplement de l'empêcher. J'essaie juste de recoller les morceaux.
-Et donc ? Qui serait-il ? insista Pijako.
-Celui qui est derrière tout ça. Celui qui a manipulé Dialga, Noctunoir, Gobou et Goupix. Je ne sais pas qui il est et sans ma mémoire, je ne peux pas le déduire. Je doute que Massko soit en possession de la réponse sinon il nous en aurait parlé en premier.
-Alors si nous n'en savons rien, nous ne pouvons rien faire.
-Mais... ! commença furieusement Goupix avant de se faire interrompre.
-Très bien Pijako. Alors, que faisons-nous aujourd'hui ?
-Ce matin, vous irez refaire des provisions. Je doute que vos sacs soient parés à un nouveau voyage après ce lourd épisode.
-Oui, tu as raison. Nous sommes en rades de tout... fit douloureusement Grimpal en penchant la tête.
-Ensuite, vers midi, vous reviendrez. C'est l'heure à laquelle il n'y a personne à la Guilde. Massko pourra donc vous rejoindre ici sans être vu par qui que ce soit. Ensuite, Grodoudou vous informera de la suite des événements.
-D'accord ! firent les deux compagnons ensembles.
Grimpal hocha la tête accompagné d'un sourire amical qui réchauffa le cœur du second. Goupix donna un coup de langue rapide sur le bec de son ami qui recula sous le choc de la gêne. Les deux amants s'éloignèrent en riant avec légèreté. Et quelques secondes plus tard, ils avaient disparus. Pijako souffla dans le but d'évacuer la pression qu'il avait emmagasiné. Il était particulièrement touché par l'affaire dont ils s'occupaient. On parlait ici de fin du monde et c'était ce contre quoi Pijako avait juré de lutter avec Grodoudou il y a des années de cela. L'aube était encore orangée dehors mais la semaine était loin d'être d'une couleur aussi rassurante. Pijako le sentait. Du sang et des larmes allaient couler. La Fin du Monde n'arrive jamais sans plan de secours. Le petit volatile se retourna. Il respira un grand coup avant de pénétrer dans la sombre salles aux trésors, demeure de Grodoudou et de Mystcliff.
Goupix s'était assise devant une masure vide, forçant Grimpal à faire une pause. La porte était fermée et verrouillée, ce qui était plutôt rare au Bourg-Trésor. "C'est la maison de Vigoroth ! Je veux le voir !" avait lancé Goupix, confirmant le fait qu'elle ne comptait pas bouger d'ici avant de le croiser. Vigoroth était le maire du village et, si Grimpal se souvenait bien, le premier et le seul ami qu'avait eu Goupix avant l'arrivée de Grimpal. C'était étonnant comme son esprit le chatouillait quand il pensait à tous ceux qu'il avait connu depuis son réveil sur la plage. Pourquoi Pijako me rappelle Massko ? Maintenant que je connais mon passé sans m'en souvenir réellement je devrais être capable de comprendre pourquoi j'ai cette bizarre impression dès que je pense aux habitants du Bourg-Trésor... Grimpal essayait de recoller les bouts avec sa mémoire comme il le faisait pour comprendre la Grande Paralysie. Grimpal savait une chose : cette impression de lien entre Pijako et Massko était la base de ce qu'il cherchait. Alors qu'est-ce que c'est ? Pijako... Vigoroth... Grodoudou aussi. Et puis Noctunoir... J'ai cette même impression avec lui, bien qu'il soit un ennemi. Pourquoi tout me paraît si familier ? Grimpal avait pensé au fait qu'il les connaissait d'avant la Fin du Monde mais Goupix affirmait ne jamais avoir croisé Grimpal avant. Ce n'était pas ça.
Et puis soudain, la réponse éclata. Il n'y avait pas de raison à ça et c'était peut-être une simple surinterprétation de la part de Grimpal. Mais il était sûr d'une chose : il connaissait cette situation. C'est ça. Si Pijako me fait penser à Massko, c'est parce que je l'ai revu et ce que je pensais autrefois de lui a reprit vie de manière naturelle. Alors... Par déduction... Noctunoir... devrait me rappeler Ectoplasma ! Et Grodoudou pourrait être assimilé à Alakazam. Ce qui explique pourquoi je le respecte au-delà de ce que je devrais... A ce moment là... Vigoroth serait, par rapport à mon ancienne vie, Médhyéna ?! Et Azurill et Marill devraient être les Hélédelles alors. Et Eokko, ce serait Kirlia ? Non. Non ! C'est impossible... Ça n'a aucun sens. Mais c'est trop de coïncidences ! Tout ce que je sais de mon ancienne vie concorde avec celle-ci ! C'est comme si le destin voulait que je revive mon ancienne vie ! Pourquoi ?! Je voulais la quitter... Je voulais vivre une nouvelle vie avec Goupix... C'est ça... Goupix serait Givrali. Autrefois timide et rêveuse, aujourd'hui forte et passionnée. Je mettrais ma queue à couper que Givrali avait été comme ça avant. Mais qu'est-ce que ça veut dire ? Est-ce juste une coïncidence ? Ou est-ce... Gobou ! Grimpal savait. Ces douleurs lorsqu'il s'était réveillé sur la plage. Tout. Tout. Tout avait été organisé par Gobou. En réalité, Grimpal était revenu dans le présent bien plus tôt qu'il le pensait. Gobou avait préparé la vie que Grimpal avait déjà vécu dans le but qu'il se souvienne. Ce qui voulait dire que ça maladie venait des effets provoqués par le changement répétitifs entre Grimpal et Gobou et non pas à sa perte de mémoire. Ses maux de têtes, ses hallucinations, ses divagations, tout venait donc de Gobou, verrouillé à l'intérieur de son corps par Noctunoir. Grimpal avait envie de hurler. Tout ce qu'il vivait depuis tout ce temps avait été programmé. Il y avait des chances pour qu'il se soit réveillé sur un autre continent suite à l'attaque de Noctunoir dans le couloir temporel. Gobou, fidèle à l'Equipe de secours Bleue, avait manipulé Grimpal pour qu'il bâtisse sa vie autour de personnes qui lui rappelaient son passé. Est-ce qu'une fois, rien qu'une fois, mes sentiments envers tous ces gens ont été vrais ? Est-ce que ce ne sont pas ces souvenirs qui me manipulent ? Est-ce que j'ai remplacé le secourisme par l'exploration ? Est-ce que mon envie d'explorer a été créée par mon envie de secourir ? Est-ce que... Est-ce que j'aime vraiment Goupix ? Ou est-ce que j'aime plutôt la façon dont elle ressemble à Givrali ?
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