6EME MOUVEMENT🍋
Debussy - Suite Bergamasque, L.75: III. Clair de Lune
La famille Hwang est une famille très riche et très respectée. Le père Hwang est le Président Directeur Général d'une grande multinationale spécialisée dans la technologie de pointe aéronaval et son épouse est une référence dans le monde artistique. En véritable experte, elle gère les achats et reventes des pièces d'art pour le compte des plus grosses fortunes du monde mais également pour les musées et autres centres culturels. Elle possède deux galeries parmi les plus célèbres du globe, une à Séoul et une à New York. Ce faisant, la célébrité de Hyunjin en plus d'être dû à sa beauté emprunte de noblesse, est en grande partie la conséquence de ses origines. Comme tout gamin de famille riche, Hyunjin ne voit que très rarement ses parents et dès lors, il vit pratiquement seul dans un immense appartement au quatorzième étage d'un building de Gangnam.
A peine la porte de l'ascenseur s'ouvre que Jisung se trouve dans l'entrée du logement luxueux, le sol en pierre obsidienne reflète en miroir les lumières des grands lustres qui surplombent le salon au bout du large couloir, ce dernier étant recouvert de magnifiques peintures de maîtres. Sur le pas de la pièce principale, à sa droite un escalier en colimaçon en fer conduit à la mezzanine où se trouvent les chambres et les salles de bains. Devant lui, un grand canapé en tissu beige en arc de cercle d'une forme rappelant étrangement un nuage, donnant sur un espace télévision et une cheminée murale moderne.
De l'autre côté de la pièce, une grande table en verre accueillant au moins douze couvert, le genre de table qu'on n'utilise jamais car a bien regardé toute cette richesse, le manque de vie évident donne presque le tournis à Jisung. Le tout à la vue d'une immense baie vitrée par laquelle Jisung peut admirer l'immensité de leur capital au milieu de la nuit dont les lumières font briller le fleuve Han.
Interrompu dans sa contemplation, Hyunjin lui fait signe de le suivre vers une grande porte sur la gauche donnant sur l'espace cuisine, aussi disproportionnée qu'on pourrait l'imaginer, aux équipements modernes, couvert de bois clair et de marbre gris avec en son centre un îlot central sur lequel Hyunjin pose une bouteille de coca.
" Qu'est-ce que tu veux manger ? Demande Hyunjin en ouvrant les deux portes de son réfrigérateur.
- Ce que tu veux, répond simplement Jisung.
- Des Ramens ça te va ?
- Maison ?
- Maison.
- Alors ça marche. Sourit le musicien."
Hyunjin est un bon cuisinier, il aime les bons repas fait maison et Jisung se porte toujours volontaire pour goûter ses recettes. Il sort un bouillon déjà préparé et plusieurs légumes ainsi que quelques tranches de viandes. Hyunjin remonte ses manches, attache son tablier et commence sa préparation sans un mot. Jisung appuie sa tête sur ses mains, observant chacun de ses gestes avec curiosité et se léchant les babines d'avance en voyant tous les ingrédients rejoindre le bouillon.
Quelques minutes plus tard, après un repas copieux et délicieux, Hyunjin laisse Jisung seul dans le salon afin de pouvoir se changer avant de partir pour l'exposition, il lui propose de lui prêter des vêtements mais il préfère rester comme il est plutôt que de porter des vêtements ridiculement trop grands pour lui.
" La mode est au oversize ! S'exclame Hyunjin en montant les escaliers.
- Ouais oversize pas on-voit-très-bien-que-c'est-trop-grand-tu-ne-trompe-personne."
Hyunjin lâche un rire franc avant d'entrer dans sa chambre. Jisung se promène dans le salon allant jusqu'à la grande bibliothèque qui longe le mur à côté des canapés et qui le sépare d'une autre petite pièce. Sur la bibliothèque d'innombrables livres et des photographies. Des photos officielles de la famille, tout ce qu'il y a de plus épuré. La beauté de la famille Hwang au grand complet, des visages souriant mais strict. Loin d'être des tyrans, les parents Hwang sont juste absent. Pourtant Hyunjin aime passer du temps avec sa mère et a toujours apprécié le retour de son père de ses longs voyages. La différence c'est qu'il est assez naturel avec sa mère alors qu'il semble craindre son père. Craindre ou respecter à outrance, la frontière est mince.
Hyunjin est entré dans le groupe il y a seulement deux ans de ça, personne ne connaît vraiment son passé et même si Seungmin s'est vite attaché à lui – Seungmin est la bonté même, il s'attache à tout le monde – Hyunjin a toujours su mettre une certaine distance entre sa vie privée et ses amis. Jisung n'est pas sûr que ça soit volontaire mais autant l'artiste adore tout savoir sur tout le monde, autant il parle très peu de lui ou de sa famille. Jisung a déjà rencontré ses parents, il est même le seul mais ça ne signifie pas qu'il le connaît mieux que les autres. Le plus étrange c'est qu'il est persuadé que s'il lui posait la question, Hyunjin lui répondrait en toute sincérité même si cela devait lui être désagréable.
"On y va ? Arrive Hyunjin en fermant les boutons des manches de sa chemise blanche.
Jisung siffle le regardant de haut en bas. Un pantalon chino bleu marine, une chemise blanche et un grand manteau de laine camel assorti à sa ceinture.
- C'est clair que là je vais faire tache, hésite Jisung.
- Aller suis moi, je suis sûr que je peux trouver quelque chose pour toi." Sourit le grand brun qui a laissé ses cheveux détachés pour l'occasion.
Après une recherche longue mais fructueuse dans l'immense dressing du riche héritier, Jisung habillé dans un style urban chic se trouve étonnamment classe devant le triple miroir de la chambre de l'artiste. Un pantalon large beige, des basket blanches, un t-shirt blanc large et une surchemise en daim noir.
" T'es sûr de ton coup ? Demande Jisung.
- Absolument, quand j'étais à Brooklyn tous les artistes avaient ce style.
- Brooklyn ? Tu as vécu à New York ?
- Ma première année oui. J'ai fait une école de danse avant de revenir à Séoul.
- Sérieux ? C'est comme ça que tu as connu Minho ?
- Plus ou moins oui. Minho était en déplacement pour un concours de danse et on s'est rencontré là-bas."
Hyunjin prête un manteau à Jisung et ensemble ils quittent l'appartement pour rejoindre la galerie et Seungmin qui les attend depuis dix minutes devant. En voyant Jisung, comme prédit par Hyunjin plus tôt, les deux garçons fondent en excuses et en déclaration d'amitié éternelle. Hyunjin lève les yeux au ciel, presque las d'avoir toujours raison mais secrètement heureux que les choses s'arrangent. Il entre en premier dans la galerie, plongée dans une ambiance mélancolique.
Les notes d'un piano résonnent dans les salles mêlées aux murmures des visiteurs. L'exposition commence par des photos en noir et blanc. Les clichés montrent un piano à queue sous différents angles, les touches, le bois glacé, les cordes, puis une main appuyant sur une note, la silhouette d'un homme allongé sur le ventre sur l'instrument, son ombre contraste avec l'éclairage de fond. Il se dégage des photos une tristesse sourde accentuée par le son du piano qui sort des enceintes. Après les photos, des peintures, des notes dessinées abstraites, des mains frappant le clavier, une sensation plus puissante, plus poignante jusqu'à l'ultime salle. Plongé dans le noir, un piano à queue est exposé au milieu de la pièce éclairée par un unique spot, le son du piano est encore plus fort, couplé d'une chute d'eau sur le mur imitant le bruit d'une averse. Le mur opposé s'éclaire soudainement projetant une vidéo. On y voit un pianiste, assis sur son banc semblant jouer au rythme de la musique diffusée. Dos à l'objectif, parfaitement centré, faisant du spectateur un auditeur secret. En face du musicien, une grande fenêtre d'où jaillit une lumière vive, contrastant avec le piano noir. On peut apercevoir des gouttes d'eau glissées sur le verre, la pluie extérieure cadre avec la mélancolie de la scène. Pourtant rien ne semble factice ou monté de toute pièce. Plus comme une fenêtre sur un souvenir, Hyunjin n'a pas l'impression de regarder une œuvre d'art. L'ensemble de l'image est comme le reste, en noir et blanc, la seule touche de couleur vient des cheveux dorés du pianiste, presque doux à l'image. La véritable œuvre, ce n'est pas le piano, ce n'est pas le contraste, c'est lui, le pianiste. Ce pianiste qu'il ne réussit pas à quitter des yeux. Puis l'image commence à s'effriter, comme une vieille bobine, l'objectif zoom de manière saccadée, se rapproche du musicien, de son dos, sa nuque, des pommettes parsemées de tâches de rousseurs et un sourire rayonnant. Soudainement Hyunjin sent sa mâchoire tombée, ses yeux s'écarquillent.
"Felix...", il souffle.
Seungmin et Jisung en retard sur l'artiste entrent dans la dernière salle alors que la projection s'achève. Ils approchent de Hyunjin surpris devant son expression effarée.
"Felix ?" Répète Seungmin. L'ayant entendu prononcer le prénom.
Hyunjin ne répond pas, la projection recommence attirant le regard des deux autres.
***
Lorsqu'il a ouvert la porte, Hyobin a à peine reconnu Minho. Ce dernier avait le visage sombre et l'espace d'une seconde il en a presque eu peur alors qu'il fait le premier pas pour entrer dans sa chambre étudiante, saisissant sur son passage le visage du plus jeune pour l'embrasser sauvagement. Au-delà du baiser fougueux, ce dernier semble empli d'un profond désespoir, comme si ce geste allait lui redonner vie, le faire respirer, comme s'il allait apaiser le puissant sentiment qui semble l'habiter. Hyobin n'est ni stupide, ni aveugle, ce sentiment il n'en est pas la cause, il n'est que le pansement et même si ça le blesse, il s'en contente. Tout ce qu'il veut c'est qu'il lui revienne même s'il n'est pas celui qu'il regarde.
Les mains fiévreuses, pressées, retirent le peu de vêtements que porte le plus petit, la bouche de Minho s'écarte de sa bouche et vient embrasser ses joues, les mordre, puis redescend sur son cou alors qu'il saisit ses cuisses par le dessous, le soulevant avec une facilité déconcertante. Hyobin lâche un gémissement de surprise, se délectant de sa langue qui caresse sa peau, très vite reposé sur le bord de son petit bureau, Hyobin retire rapidement le pull du danseur, son t-shirt, tout ce qui le sépare de sa chair avant de reprendre possession de ses lèvres. D'un geste bref, Minho l'attire un peu plus contre lui, collant son bassin contre le sien. Leur excitation à leur paroxysme, Minho lève un peu plus les jambes du rouquin qui bascule contre le mur derrière lui, se tenant au bord du bureau alors qu'il vient mordre sa cuisse. Il retient un nouveau gémissement, sentant son érection devenir douloureuse. La torture est encore plus grande lorsque la main de Minho se referme sur le membre tendu, il ne peut plus réprimer un léger cri de plaisir alors que les vas et viens le font tressaillir.
Le prénom de son amant franchi ses lèvres alors que Minho accélère sa pression, se jouant du bout et titillant au passage l'entrée un peu plus basse. Sans s'en rendre compte, Minho a déjà récupéré le nécessaire pour le préparer, Hyobin a l'impression qu'il pourrait se libérer à tout moment, déjà à bout de souffle quand les doigts du danseur viennent le préparer. D'abord lentement puis plus audacieux, sachant parfaitement comment réagir à chaque frémissement, chaque rictus du passif, jusqu'à ce qu'il n'ait plus besoin de précaution. Hyobin murmure à nouveau son nom l'incitant à se rapprocher, à le faire sien, ce que le danseur fait sans attendre. Jusque-là silencieux, Minho lâche un râle de satisfaction, serrant les dents sous la vague de chaleur qui l'envahi couvrant tout le reste. Hyobin aimerait l'embrasser mais Minho commence des coups de reins puissants, le faisant cogner contre le mur, la main tendue tremblante, le corps parcouru de frissons électriques, Hyobin n'arrive plus rien à dire, les lèvres constamment grandes ouvertes, la sueur perlant sur sa peau. Au plus profond, avec toute sa force, déversant toute sa frustration, sa colère, exorcisant jusqu'à la plus petite des émotions qui enserrent son cœur. Hyobin l'accueille, l'oblige à se rapprocher à chaque mouvement pour l'emprisonner dans ses bras mais lorsque Minho entend sa voix dans le creux de son oreille il frissonne une seconde, sentant comme un sentiment de culpabilité le réveiller de sa transe. Ce sentiment il le balaie rapidement, décidant de retourner le plus jeune contre le bureau, et attrape ses hanches pour complètement se lâcher sous les cris de plaisir du roux répétant inlassablement son nom.
A la libération, il ne reste que les souffles haletants, Minho se retire titubant jusqu'au lit derrière lui. Hyobin peine à se redresser à son tour, lorsqu'il tente de s'approcher du plus âgé, ce dernier se lève brusquement et se rhabille. Perdu, encore tremblant Hyobin aimerait l'arrêter mais il voit bien que l'état de Minho ne lui permet pas d'insister. Sans un mot le châtain quitte la chambre, son pull dans ses bras, reboutonnant son jean dans le couloir et courant maintenant pour sortir de l'immeuble.
L'acide dans sa bouche lui donne envie de hurler, il a les yeux qui lui brûlent, le cœur toujours aussi douloureux et la tête pleine de remord, de rage.
Une fois dehors, il court à nouveau dans une direction aléatoire, jusqu'à ne plus pouvoir, jusqu'à ce que ses jambes cèdent et que son souffle lui manque. Dans une ruelle au milieu de Séoul, il s'appuie contre le mur essayant de retrouver son souffle et d'effacer ses souvenirs mais il en est incapable. Il ne veut pas rentrer, il ne veut pas se retrouver au milieu du silence son appartement et de revoir inlassablement le visage de Jisung hurlant de colère et rouge d'embarras. Se rendre compte que sa douleur ne le quittera jamais.
Il était persuadé qu'avec le temps il oublierait cet amour de jeunesse qui n'avait aucun sens, qui le faisait se sentir coupable mais il faut se rendre à l'évidence, ça n'est jamais passé. Il a eu beau tenter de se taper tous culs potables de Séoul, il n'a jamais réussi à se sortir Jisung de la tête. Savoir comment c'est arrivé, il ne saurait l'expliquer, il sait simplement qu'il l'a toujours eu dans la peau, au point d'en avoir peur et de se mentir à soi-même. Il voulait garder son amitié, quoi qu'il en coûte, faire taire sa jalousie devant le plus jeune, ne rien montrer et se défouler sur ses histoires d'un soir. Bien sûr, Jisung a eu plusieurs relations, mais elles n'ont jamais duré assez longtemps pour vraiment l'inquiéter. A vrai dire il savait d'avance que ça ne durerait pas, Jisung était un cœur d'artichaud, il s'attachait rapidement et se faisait larguer tout aussi vite. A chaque rupture, il était là, prêt à sécher ses larmes et ça le consolait de savoir que peu importe les hommes dans sa vie, Jisung reviendrait toujours vers lui. Jusqu'au dernier en date...
Minho était d'une humeur massacrante et quand Jisung s'est à nouveau fait larguer, le voir en larmes lui avait brisé le cœur, encore. Au lieu de simplement le soutenir, il avait fini par lui dire des mots blessants, des mots qu'il a regrettés aussi vite qu'ils sont sortis mais il était trop tard. Depuis Jisung, non pas par vengeance mais plus par honte, avait cessé de se confier à lui et Minho n'avait pas encore réussi à s'excuser. Pas étonnant qu'il n'ait pas parlé de son nouveau mec, ça le blesse davantage que Chan et Changbin semblaient parfaitement au courant et s'ils n'en ont pas parlé avec lui c'est qu'ils savent aussi pour ses sentiments. Il se sent tellement stupide. Tellement ridicule.
La colère ne descend pas, le froid de la nuit, sa petite course et maintenant ses pas longeant les rues de ville ne réussissent pas à le calmer. Il se sent tellement mal qu'il aimerait juste pouvoir frapper un mur jusqu'à s'en faire péter les os, ressentir autre chose pour réussir à faire taire tout le reste. Ca ne passera jamais et il devra vivre avec ça toute sa vie. Minho sent sa mâchoire se serrer à cette pensée, une envie furieuse de pleurer l'étouffe mais il n'en fera rien, continuant de marcher jusqu'au lever du jour.
Ce n'est que lorsque les premiers de soleil lui touchent la peau qu'il se rend compte qu'il a passé toute la nuit dehors. Son cerveau semble d'un seul coup réagir et son corps entier s'alourdit sous la fatigue et le froid. Ses yeux lui font mal, il sent venir la migraine. Il devrait maintenant rentrer, s'endormir des heures mais il a cours ce matin et aussi râleur soit-il, il aime beaucoup enseigner. Il se diriger donc vers un abribus, repère son appartement sur la carte et soupire en voyant qu'il a bien une heure trente de bus avant d'arriver chez lui.
Après deux changements et une longue marche sur la rue en pente qui monte jusqu'à son petit immeuble, il ouvre sa porte dans un profond soupire. Il quitte ses vêtements dans le salon lui servant aussi de chambre et s'engouffre dans sa petite salle de bain pour prendre une douche brulante. Ses muscles endoloris se détendent doucement mais la fatigue se décuple et l'écrase sous l'eau ruisselante. La journée va être longue. Il prend une petite boisson énergétique dans son réfrigérateur avant de sortir et reprendre la direction de l'université. Entre temps il se souviendra avoir éteint son téléphone la veille, en l'allumant il se rend compte que Chan et Changbin l'ont appelé des dizaines de fois, qu'il a des messages et des vocaux auquel il ne souhaite pas répondre.
Il les verra bien à la fac, ils auront tout le temps de se rendre compte de leurs propres yeux qu'il n'est pas mort.
Moribond, il se traine jusqu'à sa salle de danse, les premières années sont déjà en train de s'échauffer lorsqu'il referme la porte derrière lui. Sans un mot, tandis que tous le saluent, il s'avance et entame son propre échauffement. Une heure plus tard, après quelques observations sur les pas et donnant quelques conseils le cours se termine dans des chuchotements inhabituels. Même ses élèves ont remarqué qu'il semblait ailleurs, il a été moins tyrannique que d'habitude. Certains s'en portent bien, d'autres en revanche appréciant beaucoup le directeur de la troupe, se demandent s'il ne serait pas malade. Lorsqu'ils ont tous quitté la salle, Minho range ses affaires dans son sac et s'apprête à la quitter pour rejoindre des cours magistraux plus théorique, il en profitera pour essayer de dormir un peu cacher derrière son sac.
Jeongin suivant le même cours, même en étant dans une année différente, viendra s'asseoir à côté de lui remarquant à son tour ses cernes et son manque évident d'énergie. Lorsqu'il est aussi fatigué il est inutile d'essayer de comprendre, Minho est toujours à fleur de peau mais s'il n'est pas dans son assiette c'est une véritable bombe à retardement, autant le laisser tranquille. Il se contentera de lui donner son thermos de café qu'il acceptera avec beaucoup de gratitude avant d'entamer sa sieste.
Ce n'est qu'au moment de la pause que Jeongin osera le réveiller. Ouvrant les yeux assez facilement - Minho n'est pas un gros dormeur - il se relèvera sans un mot et sans attendre le hoobae pour se diriger vers le réfectoire. Ensemble ils entreront dans la grande salle déjà bondée, Jeongin ira seul jusqu'au comptoir pour prendre son plateau tandis que Minho se dirigera vers la table, sans appétit particulier.
En le voyant arriver Bangchan s'apprête à l'interpeler, il fronce automatiquement les sourcils remarquant le visage blafard, les cernes et toute la fatigue qui transparait par tous les pores de sa peau. Changbin regardera presque de la même façon son ami qui s'écroulera sur sa chaise sans même lever les yeux vers eux, mystérieusement intéressé par tous les autres élèves qui grouillent tout autour. Bangchan retourne donc à son plateau, dans un silence de mort. Il est inutile d'essayer de lui parler, il ne répondra pas, voire il s'enfuira. Le silence s'estompe lorsque Jeongin les rejoint avec son plateau, souriant et saluant ses aînés. Rapidement ils sont rejoints par Seungmin, Jian et Jisung.
" Salut les gars ! Sourit Jian en s'installant à côté de Minho.
- Salut Jian ! Lui répond Jeongin tout sourire.
- Tu m'as l'air de bonne humeur, lui dit Chan.
- De très bonne humeur. J'ai une audition dans un mois pour jouer avec le philharmonique de Séoul, je suis trop contente !
- C'est génial ça ! Lui dit aussi tôt Bangchan. Ca serait juste pour un concert ?
- Oui pour l'instant, mais si ça marche bien je pourrai peut être postulée l'année prochaine.
- Je suis fier de toi.
Jian rougit toute excitée à l'idée de pouvoir se produire avec le philharmonique, elle travaille tellement dur que c'est une vraie récompense pour elle.
- En parlant de philharmonique, tu nous avais pas dit Jian, que Felix c'est LE Lee Felix, dit Jisung à l'attention de Jian.
- Comment ça ? Demande Jian.
Bangchan et Changbin regarde à leur tour le jeune musicien.
- Le pianiste. Continue Jisung.
- Il était pianiste ? Demande Jeongin quelque peu choqué.
- Pas n'importe quel pianiste, renchérit Seungmin. C'était un virtuose. Une sorte de Mozart de notre époque.
- C'est vrai Chan ? Se tourne brusquement Jeongin vers l'aîné.
Evidemment en tant que pianiste, il devait savoir et Jian semblait trop gêné pour répondre. Felix lui avait fait promettre de ne pas en parler tant que les autres ne lui posaient pas la question.
- Ouais, répond simplement Chan du bout des lèvres se souvenant de la dernière fois qu'il a vu Felix.
En voyant tous les visages sombres autour de la table qui semblent comprendre la situation d'un pianiste virtuose devenu sourd, il comprend mieux pourquoi il a fui. Minho avait raison, personne n'aime qu'on nous rappelle à quel point nous ne sommes plus rien.
- Et comment vous l'avez appris ? Demande Jian curieuse.
- On était à une exposition, il y avait une vidéo sur lui, répond Jisung. Enfin Hyunjin est persuadé que c'était lui parce qu'on voyait jamais complètement son visage mais en regardant un peu sur internet, ça lui ressemblait quand même beaucoup et c'est là qu'on a vu qu'il était très connu.
- Attends, attends, l'arrête Jian. Une exposition ?
- Dans la galerie de la mère de Hyunjin, c'était l'expo d'un photographe...Comment il s'appelait déjà ? Interroge Jisung en regardant Seungmin.
- Un truc ski...Un Noah truc-ski ?
- Noah Lemanski, souffle Jian devenu blême.
- Ouais c'est ça ! S'exclame Jisung. Noah Lemanski, un polonais.
- Autrichien. Rectifie Jian.
Bangchan se tourne vers la jeune fille qui semble gagné par la panique puis soudainement elle se lève laissant son plateau.
- Je dois trouver Felix.
- Il doit être à l'atelier avec Hyunjin." Lui dit Seungmin surpris.
Elle remercie le sculpteur puis court hors du réfectoire ne laissant pas le temps aux autres de lui poser plus de questions. Changbin regarde Bangchan du coin de l'œil, tout aussi intrigué mais aussi un peu inquiet. La violoniste est devenue livide et la peur se lisait dans ses yeux. Minho jusque-là silencieux se redresse soudainement sous les yeux surpris des autres, puis les mains dans les poches, il quitte à son tour le réfectoire. Jisung remarque qu'aucun plateau n'était posé devant lui. Troublé, il suit le dos du danseur qui contourne les étudiants sur son passage avant de franchir la porte et disparaître.
Jian court dans les couloirs à la recherche de son meilleur ami, en arrivant vers les ateliers elle constate avec effroi qu'il n'est pas là. Ni lui, ni Hyunjin d'ailleurs. Aussi tôt elle sort son téléphone, lui envoie des messages et lui ordonnant de lui répondre. Elle essaie d'ailleurs de l'appeler en visio mais personne ne décroche. Une fois, deux fois, cinq fois. Pas de retour.
Elle retourne à l'intérieur du bâtiment, parcourant toutes les classes d'art jusqu'à ce que sonne l'heure de retourner à ses cours. Elle se mord la langue, frustrée et stressée, il faut qu'elle le retrouve avant qu'il ne le découvre, il faut qu'elle soit présente car si Noah est de retour à Séoul alors il ne va pas tarder à venir le voir, ici.
***
Dans le parc de l'université, à l'ombre d'un grand érable couvert de bourgeons, Hyunjin tend un sandwich à Felix qui le saisit le remercier d'un signe de tête. Tous les deux assis sur une table en bois, celle qu'ils ont l'habitude de fréquenter avec le groupe quand ils ont des pauses et surtout l'été pour profiter du soleil.
Aujourd'hui l'air est doux et agréable, et comme les deux sculpteurs ont continué à travailler sur leur œuvre, Hyunjin a proposé un sandwich rapide à Felix avant de retourner à l'atelier. Felix a accepté sans trop hésiter, appréciant la compagnie calme de Hyunjin et surtout désireux de ne pas revoir trop rapidement Bangchan. Depuis leur dernière discussion, il se sent toujours assez gêné à l'idée de croiser à nouveau son regard.
" Dis Felix, tu étais pianiste avant ?"
Felix cligne des yeux se demandant s'il a bien compris. Jian l'avait prévenu et il avait déjà pu le constater, Hyunjin est perspicace et franc. Il savait qu'il finirait par le savoir mais le sortir de la sorte lui a coupé le souffle. Le grand brun continue de manger tranquillement son sandwich, pas plus perturbé que ça. Felix déglutit, inutile de mentir.
D'un signe répétitif de la tête et baissant légèrement les yeux, il confirme à Hyunjin.
" Je te demande ça parce que je t'ai vu hier. Je suppose qu'il y a des centaines de vidéos sur internet mais je parle pas d'un concert ou d'un spectacle, quel qu'il soit. Je te parle d'une vidéo presque plus intime...Je te le dis parce que j'ai bien senti que c'était pas une œuvre comme d'habitude, c'était intrusif. J'avais l'impression d'épier la vie de quelqu'un, c'était aussi fascinant que désagréable parce que je te connais..."
Felix est perdu, il pose soudainement sa main sur le poignet de Hyunjin l'interrompant dans sa tirade. Hyunjin plante ses yeux dans ceux mordorés de Felix, il prend une profonde inspiration avant de sortir son téléphone, il pianote deux minutes puis il montre l'écran à Felix. Un dernier regard vers l'artiste, Felix récupère le téléphone, se lève et appuie sur play. Lorsque la vidéo se lance, il remarque qu'il s'agit d'une projection. Il n'entend évidemment pas de son mais il voit un homme, visiblement un pianiste et brusquement il comprend. Lentement sa bouche s'écarte, sa respiration s'arrête. Le souvenir, la pluie, les notes de piano, une voix masculine, un rire, une journée d'automne. Une belle journée qui a une odeur de brûlé, de gâché. Ses mains se mettent à trembler et une vague d'émotion remonte dans tout son corps jusqu'à sa poitrine, l'aveuglant. Soudainement il ne tient plus.
" AAH !!! PUTAIN !!!"
Le vrombissement tonitruant de sa voix fait sursauter Hyunjin. Alors qu'elle résonne, se casse, se brise autour de lui Hyunjin sent son cœur battre à tout rompre voyant le visage du pianiste se déformer sous la colère, hurlant, s'arrachant les cheveux. Cette voix, celle qui s'extirpe de sa gorge est si puissante qu'il ne peut s'empêcher de murmurer un "ouaah", complètement sous le choc.
Jamais il n'aurait pu imaginer un tel son, un tel cri.
" PUTAIN ! PUTAIN ! ENFOIRE DE MERDE ! "
Hyunjin revient sur terre et se lève pour essayer de calmer le pianiste, sa mâchoire serrée, il peut presque entendre ses dents grincer sous la rage alors que des larmes de colère se déversent sur ses joues, le visage complètement rouge sous ses vociférations.
"Calmes toi, Felix, calme toi..." Dit il en essayant de le calmer mais Felix n'entend évidemment rien.
Dès lors il s'approche, le saisit par les épaules et l'oblige à le regarder. Il lui fait signe de respirer, Felix essaie de le repousser mais Hyunjin le maintien, regardant ses yeux complètement noyés, ses lèvres maltraitées par les morsures de frustration. Felix passe grossièrement sa manche sur ses yeux, inspire, expire. Lentement il reprend son souffle, la colère devenue plus sourde mais prête à exploser de nouveau. Hyunjin récupère son téléphone de sa petite main puis tire sur cette dernière pour le traîner vers la sortie du campus. Felix se laisse aller, le corps lourd, l'esprit encore des années en arrière se retenant de jurer à nouveau.
D'un geste rapide, Hyunjin avertit Seungmin qu'ils quittent l'université pour le reste de la journée, de ne pas s'inquiéter et de prévenir les autres.
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Hello ! Guten tag amigos (trilingue !)
Noah Lemanski, c'est le nom de notre grand méchant...Enfin...Grand méchant...
Donc non, ce n'est pas le mec de Jisung, le monde serait vraiment petit (mais c'était une idée très intéressante). On sera bientôt plus sur son mec, rassurez vous.
Pour ce qui est de Minho, il va encore être dans le mal un petit moment...Parce que je suis une vraie sadique !
:D
Aller, à bientôt
D.
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