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Je me suis mis dans une merde monumentale.
Je n'ai pas su résister à l'envie d'envoyer un message à Liam, et je dois avouer que je l'ai carrément harcelé. Mais ça n'a pas eu l'air de le déranger, puisqu'il a répondu à chacun de mes sms.
Parallèlement, le mec de la douche m'a parlé. Genre, parlé. Plus que trois mots à la suite. Et c'était pour me proposer de l'accompagner à un festival pendant un week-end. Et comme le gros con que je suis... j'ai dit oui.
MAIS JE NE SAIS MÊME PAS QUI C'EST !
Et ce week-end-là, j'ai aussi dit à Liam que j'allais le voir. ALORS JE FAIS QUOI ?
Quand je dis que je suis con. Là je bats des records.
Je ne sais pas comment m'en sortir. Je ne peux pas annuler le mec de la douche, puisque je ne peux pas lui parler. C'est toujours lui qui mène nos conversations – si on peut appeler ça comme ça – et qui les clôt en disparaissant. Et Liam, je ne peux pas l'annuler non plus, à moins de lui mentir, et je ne veux pas mentir. Et la vérité, c'est totalement exclu, ce serait avouer que je joue sur deux tableaux, et rien que cette pensée me donne envie de vomir.
Argh, je me dégoûte maintenant... beurk.
Je sors de la cabine abattu. Si j'avais encore une once d'espoir de pouvoir annuler Monsieur Nutella, ça vient de tomber à l'eau. Il n'est pas venu.
Je pars de la piscine, monte dans ma voiture et démarre. Arrivé chez moi, j'ai la surprise de trouver Liam devant la porte. Je me mets à paniquer : je l'avais invité ? J'ai oublié quelque chose ?
Je sors de ma voiture et il me sourit.
- Hey ! Ca va ?
- Oui, et toi ? je demande troublé. Qu'est-ce que... enfin...
- Y a quelque chose qui cloche ? demande-t-il en fronçant les sourcils. C'est parce que je suis là ? Je pensais pas que...
- Non ! Enfin, j'ai eu peur d'avoir oublié quelque chose.
- Ah, non, c'est moi, je suis venu à l'improviste. J'avais rien de spécial aujourd'hui, alors je me suis dit que je pourrais venir te voir. Si ça ne te dérange pas ?
- Non, pas du tout.
Oh mon dieu, cette conversation est une honte monumentale. J'ai l'impression qu'on est hyper gênés l'un comme l'autre, et ça c'est ma faute. Parfois, j'en ai marre de moi.
- Sauf que normalement j'ai un truc à faire à cette heure... j'avoue timidement
- Quoi ? Prendre ton goûter ? demande-t-il avec son sourire magnifique
- Entre autre.
- Oh, explique-moi, tu m'intrigues.
Il me dit ça avec un sourire qui pendant un court instant me donne l'envie de lui arracher ses vêtements. Puis, j'ai honte de moi, et je me sens bouillir de gêne.
- Euh... Tu veux entrer ? je propose. Je t'offre le goûter.
- Je ne peux pas refuser ça.
On entre chez moi, et on s'installe à table. Je pose le Nutella et la Chantilly sur la table, et, quand je relève les yeux et qu'ils croisent les siens, j'ai juste l'impression qu'il me déshabille du regard. Il a cet air espiègle qu'il n'essaie même pas de camoufler, et ça c'est... terriblement excitant. Et terriblement gênant.
- Tu comptes faire quoi avec le Nutella et la Chantilly ? me demande-t-il finalement
- Bah... préparer le goûter. T'aimes ça non ? Par contre, j'ai pas de banane.
Il me regarde en se mordillant la lèvre, ayant certainement quelque chose en tête, mais il ne le dit pas. Je pars vers le frigo et sors la pâte à crêpes. Puis, je prépare la poêle, et je cuis deux crêpes. Je les ramène à table, et on s'installe pour manger.
- Mhhhh, tu fais ça comme un chef.
Je me sens rougir suite au compliment. Et au sous-entendu. J'ai rêvé ce sous-entendu ? Ses yeux me dévorent, ou c'est peut-être mon imagination qui me joue des tours.
- Alors, tu as quoi de prévu ? me demande-t-il
- Je dois voir quelqu'un.
- Oh.
Il a cessé tout mouvement, il a même arrêté de manger.
Meeeerde, il croit que je vois un gars !
- C'est une fille, je m'empresse d'ajouter
- Oh.
Et merde, maintenant il croit que je sors avec une fille.
- Tu veux venir ?
C'est la seule chose que j'ai trouvée à dire. Et là, au regard qu'il me fait, je peux dire qu'il me prend pour un fou.
- Euh... Ouais ? C'est où ?
- Pas loin.
- Je peux te demander pourquoi tu m'expliques pas tout simplement ?
- J'y arrive pas...
Mais elle le fera.
C'est horrible à dire, et je me sens coupable de le dire, mais elle le gère beaucoup mieux que moi.
- J'y vais à 18h en général.
- D'accord, on y va alors.
Je me sens bizarre, parce que je sais bien qu'il ne doit rien comprendre, mais il n'y a rien à faire, les mots ne veulent pas sortir de ma bouche. Alors c'est la meilleure solution, qu'il voie de ses yeux. Ça ira mieux après.
On sort de chez moi et on monte dans ma voiture. Je conduis, pendant quelques minutes, puis je m'arrête. Quand on est entré dans le parking de l'hôpital, j'ai vu la surprise sur le visage de Liam, mais il n'a rien dit. On sort de la voiture, puis on entre dans le bâtiment. On prend l'ascenseur, puis on longe le couloir, et, enfin, on arrive.
- T'es vraiment sûr que je peux venir ? me demande finalement Liam alors qu'il est resté silencieux jusqu'à maintenant
- Oui, t'inquiète pas.
Je frappe à la porte et entre.
- Hey Stella. Je te présente Liam.
Stella, blanche comme la mort, les yeux entièrement entourés de bleu, me sourit et suit mon regard.
- C'est...
- Le mec qui mange des crêpes avec quatre tonnes de Nutella et de Chantilly, complète-t-elle. C'est ça hein ? J'ai retenu.
J'ouvre la bouche pour répondre, mais Liam me devance.
- Et les bananes, n'oublie pas les bananes.
- Bah oui, les bananes, évidemment, dit-elle. Enfin, moi je suis plus kiwi.
- Ah ? J'ai jamais essayé. J'y penserai.
- Stella a une passion pour les kiwis, j'explique à Liam
- Liam a une passion pour les bananes, réplique-t-elle. Apparemment.
- Mais non, c'est juste sur les crêpes, avec le Nutella, dit-il
Je m'assois et les laisse parler, un peu hébété de constater qu'ils s'entendent aussi bien. En même temps, j'aurais pu m'y attendre ; Liam est quand même le gars qui m'a abordé en s'invitant à ma table et qui m'a parlé comme s'il me connaissait depuis toujours, et Stella, la fille qui n'a pas de filtre, et qui dit n'importe quoi à n'importe qui.
- Bah Zynou tu parles pas ! dit Stella au bout d'un moment
- Hein ? J'étais dans mes pensées.
- On a vu, dit-elle en rigolant doucement
On reste un moment, puis Stella nous fout carrément dehors, parce que c'est la fin des visites, et sûrement qu'elle en avait marre de voir nos têtes. On sort de la chambre, et, sur le chemin de la voiture, je repense à tout ça. A Stella et Liam qui s'entendent magnifiquement bien, comme s'ils se connaissaient depuis toujours. Au moment qu'on vient de passer, où ils n'ont pas cessé de rire. J'étais vraiment heureux de la voir comme ça, ça m'a fait un bien fou, et à elle aussi je pense. Elle a besoin de joie dans sa vie, elle n'a rien d'autre. Mais, je suis malgré tout étonné et perturbé. C'est étrange qu'ils s'entendent si bien. C'est étrange qu'ON s'entende si bien. Il se passe quoi avec Liam, pour qu'il s'entende si bien avec tout le monde ?
- Elle est jolie, me dit-il lorsqu'on entre dans l'ascenseur
Je me tourne vers lui et fronce les sourcils.
- Si tu comptes te la taper, évite. Elle a souffre déjà assez, elle a pas besoin qu'un abruti lui brise le cœur.
- Merci de me traiter d'abruti, dit-il en faisant une tête bizarre
- Mais non, je parle pas de toi, mais en général, je dis en levant les yeux. C'est arrivé trop de fois qu'un mec lui fasse du mal. Et comme tu le vois, elle est pas vraiment en état de subir ça. Je parle de tous ces connards là.
- Bah... Moi, j'allais pas lui faire de mal. Je suis pas un de ces connards.
Je le regarde en fronçant les sourcils. Il est intéressé par Stella, ou il ne l'est pas ? Je ne suis pas sûr de comprendre.
- Zynou, dit-il en levant les yeux et prenant une voix perchée, je ne sais pas si tu es bien au courant, mais j'aime les garçons.
- Oh.
Il pouffe, et reprend son air normal.
- Bon, allez Zynou, tu me ramènes à ma voiture.
Je hausse un sourcil.
- Quoi ? demande-t-il
- Tu vas m'appeler par ce surnom ridicule pour le reste de nos vies ?
- Un instant j'ai cru que ça te posait problème que je veuille rentrer chez moi, dit-il faussement déçu. Et oui, tu as tout compris.
On sort de l'hôpital, et on marche jusqu'à ma voiture.
- Alors Stella c'est ta meilleure amie ? Et elle t'a appris à nager ? dit-il avec un petit sourire
- Oui, je dis un peu honteux
- C'est mignooon.
Il me tire la joue comme à un enfant, puis on arrive à la voiture et il s'installe comme chez lui. Je lève les yeux ; ce mec, c'est Stella en homme. J'espère quand même qu'il va être un peu différent d'elle sur certains points, parce que moi, je ne compte pas être amoureux de ma meilleure amie !
Je m'installe au volant et conduis jusqu'à chez moi.
- Bon, bah... A ce week-end ? me dit-il
Je bloque un instant, et je le vois qui attend ma réponse. Et moi, je suis en surchauffe. Ce week-end, je serai au festival ! Comment je fais ? Qu'est-ce que je réponds ?
- Ouais, euh... en fait... J'ai...
- Autre chose de prévu ? devine-t-il
Il a l'air déçu, mais il me sourit gentiment.
- C'est pas grave. C'est mieux que tu me préviennes, comme ça je vais avoir le temps de trouver autre chose à faire. On se voit lundi alors ?
- Lundi ?
- Bah... Tu vas bien à la piscine le lundi, non ?
Là, gros bug de ma part.
- Ouhou ? Zynou ?
- Hein ? Oui ?
- Lundi je serai à la piscine, et comme je sais que tu y vas aussi, je me disais qu'on pourrait se voir là-bas.
- Oh, bah oui, sûrement.
MAIS MERDEEE, comment je vais faire avec Monsieur Nutella ?
Et Liam n'y est pas d'habitude. Donc je suppose qu'on n'y va pas à la même heure.
- Mais je sais pas si on y va à la même heure.
- C'est bien pour ça que je t'en parle, dit-il en levant les yeux. T'es vraiment à la ramasse ce soir, qu'est-ce qui t'arrive ?
Un mensonge, trouve un mensonge.
- C'est... Stella. Elle m'inquiète. Elle avait pas l'air bien.
- Ah bon ? Je pensais qu'elle était malade... genre, tous les jours.
- Oui, elle l'est. Euh, tu veux qu'on se voie à quelle heure ?
- Tu y vas jusqu'à 16h30 non ?
- Oui, comment tu le sais ?
- Stella l'a dit tout à l'heure. T'étais là ou c'était ton fantôme ?
- Mon fantôme.
- Ah la la. Je te laisse avant que tu disjonctes pour de bon. Et va te coucher, ça vaut mieux.
- Et pour la piscine ? je demande alors qu'il sort de ma voiture
- Je te rejoindrai.
Il me fait un signe de la main, et monte dans sa voiture. Et moi... Je suis sonné. Il a raison, je ferais mieux d'aller dormir.
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