La nuit

t

o

m

b

e

Dans le bois
Endormi.

L' oiseau veille,
Guette et attend,
Patient pour dénicher
La proie qui sommeille.

L' odeur de la terre remuée
Et de la sève chaude qui coule
Dans les troncs sombres et alignés
Envahit tout et partout en silence.

Immobile, muet et le visage grave,
Un homme marche.

Sous ses pieds, des branches craquent.
Mais il n'entend pas. Il n'entend plus.
Cet homme est sourd aux bruits de la vie.

Il marche, seul,
Il marche,
c
o
u
r
b
é,
Il marche, t r i s t e.

Il ne s'arrête pas pour écouter
le bruissement du vent dans les feuilles,
Le chant de la terre et le brame d'un cerf.

Il refuse de contempler les reflets argentés
de la lune sur les flaques d'eau, les teintes belles et sombres qui luisent de partout et
l'obscurité claire qui surplombe la forêt.

Sa fille est morte ce soir,
et il ne veut plus admirer la vie.

Seuls subsistent dans son coeur une rancoeur amère et une colère sourde contre le temps.

Elle l'avait pourtant.
Elle aurait pu vivre encore
l o n g t e m p s.
Lui, non.

Il pense qu'il aurait pu,
qu'il aurait même aimé prendre sa place.
Lui, il est seul depuis si tellement d'années.

Elle avait une vie devant elle.
Pourtant, elle est morte.

Et cette réalité le frappe si fort qu'il s'appuie contre un arbre. Il sent les aspérités rugueuses sous ses doigts et la douceur de la mousse.

Soudain, il pleure ;
et la forêt saigne avec lui.