Chapitre 13
Je me jette dans ses bras et sans un mot il referme la porte. Je m'assois sur son lit, blottie contre lui en pleurs. Cette fois, je ne me retiens plus. Je ne peux pas ! Nil reste silencieux et respecte ma douleur. Par moment, il me caresse les cheveux ou le dos.
— Qu'est-ce qui s'est passé ?
Je plonge mon regard dans le sien, la vue brouillée par les larmes.
— Je suis amoureuse de Shôji...
Il ne semble pas étonné de ma révélation.
— Et Jô ?
— Je l'aime plus que tout...
Il acquiesce.
— Alors, ne lui en parle pas...
Je suis étonnée par ses propos, mais je dois avouer que c'est la seule solution possible pour l'instant.
Au bout d'une heure, mes larmes se sont stoppées. Mes yeux sont rougis et mon visage tordu par la souffrance. Maya et Gin passent chercher Nil pour le repas, mais il refuse pour continuer à me consoler.
Il me propose d'utiliser sa douche et d'aller manger un petit truc. J'ai besoin de compagnie alors je ne décline pas l'invitation.
On dîne sur la terrasse extérieure de l'hôtel, tout en haut de celui-ci. De nos chaises, on aperçoit la Tour Eiffel illuminée, la lumière est tamisée, quelques lampes accrochées aux murs et une bougie sur chaque table. De quoi masquer ma mine effroyable. Nil me lance un sourire compatissant.
— Tu vas mieux ?
Je hoche la tête, affirmative.
— Anna, si tu veux vivre ta relation avec Jô sans embûches, tu dois t'éloigner de Shôji et par la même occasion, de Mariko...
Je sais qu'il a raison, tant qu'ils seront ensemble, je dois prendre mes distances.
— Je me suis toujours dit que c'était impossible d'aimer deux personnes en même temps.
— Ce qui me semble impossible c'est de les aimer tout les deux de la même manière, il y a toujours une différence, en faveur d'un et défaveur de l'autre. Tu as fait le bon choix.
Je souris. Je peux enfin parler de ça sans retenue et sans jugement, ça me fait un bien fou.
Le reste du repas se passe dans le calme, Nil réussi à me décrocher quelques sourires et rires. Je me rends compte de la chance que j'ai de l'avoir à mes côtés ce week-end. Je le remercie gentiment pour son réconfort et sa compagnie lors de cette journée. Il m'invite à dormir dans sa chambre. Je ne refuse pas, je n'ai pas d'autre possibilité. Il s'est permis d'aller me chercher de quoi dormir dans ma chambre et de me l'apporter. Il me laisse son lit et lui, prend le canapé.
Cette nuit, j'ai un sommeil agité, mais je m'apaise étrangement, quand je sens Nil se glisser à côté de moi en pleine nuit.
Au petit matin, j'envoie un message à Mariko lui demandant si je peux passer dans notre chambre. Elle me confirme que oui, mais que Shôji dort encore.
J'entre dans ma chambre pour récupérer mes affaires. Je vais dans la salle de bains prendre ma trousse de toilette et l'enfonce dans ma valise. Je ne jette pas un regard à mon amie, qui m'observe assise du canapé. Shôji, lui, dort profondément dans le lit.
Froidement, je lui demande :
— Vous passez la journée avec nous aujourd'hui ?
Elle paraît embarrassée.
— Si ça ne te pose aucun problème...
Je la fusille du regard.
— On était censé passer un week-end entre amis donc...
Ma réponse ne la tranquillise pas, mais elle ne trouve rien à redire à ça.
J'attrape ma valise et claque la porte en partant.
Une longue journée nous attend, n'ayant pas le temps de visiter le Musée du Louvre, on se contente des Pyramides du Louvre. Celles-ci sont en verre, une grande entourée de trois petites et de fontaines. Ils prennent le temps de poser devant l'édifice et me forcent à les accompagner sur les photos. Nil grimpe sur un petit bloc pour avoir le rendu qu'il touche la pointe de la grande Pyramide sur sa photo. Je les regarde rire et faire les imbéciles, assise au bord de la fontaine.
On traverse ensuite le jardin des Tuileries, non loin de là. Ce parc est très grand, il se compose de bassins propices à la détente. Certaines statues sont magnifiques dont celle de Rodin. Le musée de L'Orangerie abrite des œuvres de Monet et se situe au sud du jardin. Au loin, on peut contempler la grande roue, qui s'installe souvent près de la place de la Concorde. Concorde que nous découvrons également.
En route pour un peu de détente, on foule les Champs Elysées. On rentre dans quelques boutiques de luxe, par curiosité et non pour se ruiner, malheureusement. Chanel, Louis Vuitton, le Disney Store ! C'est juste des boutiques incroyables ! Heureusement, pour l'instant nous passons tous un bon moment ensemble et sans prises de têtes, je me surprends même à rire avec mes amis.
Mes parents nous attendent pour treize heure trente chez « Le Cinq » pour prendre le déjeuner. On traîne un peu des pieds. Avoir autant marché sur deux jours n'est pas dans nos habitudes, j'entends même Maya râler derrière moi.
Quand on entre dans ce restaurant chic et luxueux, on ne se sent pas à notre place. Intimidés, on avance à la table où se trouvent mes parents. Les plats sont hors de prix et les quantités pas monstrueuses, mais il paraît qu'on y mange bien. Nous ne sommes pas habillés convenablement pour un restaurant de cette envergure, mais je suis heureuse de revoir mes parents. Ma mère entame la conversation.
— Commandez ce que vous désirez, nous vous invitons.
Je suis surprise et ne mâche pas mes mots.
— C'est extrêmement coûteux maman, je vais payer une partie !
Elle refuse catégoriquement. Et mon père commence son interrogatoire.
— Où est Jô ?
— Il avait des réunions et n'a pas pu venir.
Mon père se tourne alors vers Shôji, qu'il n'a pas encore rencontré et dit :
— Jô est un homme en or, il est parfait pour ma petite princesse.
Je suis morte de honte et Shôji reste imperturbable.
— Oh ! Je n'en doute pas.
Nil se racle la gorge.
— Vous n'étiez pas au barbecue, qui êtes-vous ?
Nil répond à sa place.
— C'est le petit-ami de Mariko, Shôji.
Mon père semble chercher Mariko des yeux, celle-ci indique qui elle est, en levant légèrement son doigt.
— Heureux de faire votre connaissance Shôji.
Celui-ci sourit sincèrement et dit :
— C'est réciproque, Monsieur.
Côtes de chevreuil au charbon de bois, pigeon laqué et ses abattis, noix de ris de veau gratinée, bar de ligne, anguille de la Somme à peine fumée, rouget en écailles, salade de saison et semoule d'agneau au parfum citron. Voilà les plats que nous avons commandés et qui sont, au passage, délicieux.
À en juger par la carte, notre note doit s'élever autour des mille euros, je n'en reviens pas que mes parents dépensent autant pour mes amis.
Après avoir passé un agréable moment en compagnie de mes parents, nous sommes repartis terminer nos visites de la ville.
En route pour la place Charles de Gaulle, où on part visiter l'Arc de Triomphe, évidemment ! Cet édifice se trouve en plein milieu d'un rond-point et pour y accéder, il faut passer par des souterrains réservés aux piétons. À la base de l'Arc, il y a la tombe d'un soldat qui rend hommage aux soldats morts pendant la Première Guerre Mondiale. Il a été enterré en dessous de la Flamme Eternelle, qui est rallumée tous les soirs.
Les sculptures en reliefs au pied de chacun des quatre piliers sont d'une beauté à couper le souffle. La construction de L'Arc de Triomphe s'est étalée sur plus de trente ans et celui-ci fait plus de cinquante mètres de haut. On grimpe presque trois cent marches pour atteindre la plateforme et profiter de la vue splendide. Je contemple les nombreuses avenues qui se trouvent sous mes yeux. La nuit commence à tomber, les façades brillent sous les lumières. Je n'ai pas encore vue Paris, d'aussi haut, de nuit.
Mes amis me réservent une derrière surprise pour ce week-end. C'est Gin qui me l'annonce.
— Tu m'avais dit, une fois, que tu adorerais voir un de leur spectacle et tu sais comment je retiens tout...
Maya lui coupe la parole, impatiente.
— Bon sang Gin, dépêche-toi de lui dire.
C'est Nil qui crache le morceau.
— On t'emmène Au Moulin Rouge, pour manger d'abord et profiter du spectacle.
Je saute de joie au cou de mon amie Gin et puis remercie les autres. Étant petite, je rêvais de voir danser ses personnes hautes en couleur et découvrir l'univers magique de ce lieu de légèreté et d'insouciance.
On rentre à l'hôtel pour se laver et se changer, tenues correctes exigées.
Une fois arrivée sur place, j'admire la devanture. Le rouge est complètement dominant, mais je suis plus époustouflée par ce moulin... La file d'attente ne paraît pas trop longue. On y entre une heure plus tard.
C'est la soirée Mistinguett, au programme : Champagne, repas succulent, plumes flamboyantes et nous !
Je suis terriblement excitée de découvrir le spectacle et après le repas, je ne suis pas déçue.
La troupe monte sur scène, leurs costumes sont recouverts de plumes et de strass ! Pour les femmes, tenues volumineuses et légères, qui subliment leurs corps. Et costumes à paillettes pour les hommes. Le tout dans un décor magnifique. Ils ondulent sur des musiques originales et conçues spécialement pour nous en mettre plein les yeux.
Je suis en totale admiration devant ce spectacle éblouissant ! L'ambiance est énorme et mes amis semblent être heureux d'être là.
Nil me crie :
— Alors Anna, tu es contente ?
Les yeux pétillants et un sourire jusqu'aux oreilles, je réponds :
— Très ! Merci à tous !
Shôji me dévisage, apparemment heureux de ma réaction.
— Je vais faire un petit tour aux toilettes !
Je me lève et m'en vais aux WC. Il est vingt-trois heures ici et six heures au Japon. Je décide de passer un coup de fil à Jô.
Il décroche rapidement, impatient de m'entendre.
— Bonsoir, chérie !
— Bonjour toi, tu vas bien ?
— Mieux maintenant que j'ai de tes nouvelles ! Je commençais à m'inquiéter.
— Tu t'inquiètes pour rien, je n'ai pas eu beaucoup de temps libre depuis notre arrivée, on a visité des tas de trucs !
— Quoi donc ?
— La Tour Eiffel, l'Arc de Triomphe, et plein d'autres sites. On s'est baladé sur les Champs-Élysées, en bateau-mouche, c'était magnifique ! Et puis j'ai vu mes parents !
— Il faudrait que tu rencontres ma mère très bientôt.
L'angoisse s'empare de moi.
— C'est nécessaire ?
Il éclate de rire.
— Elle est très gentille, tu verras !
J'avale ma salive difficilement.
— Et tu partages ta chambre avec qui ?
— Euh Nil...
Un silence s'installe.
— Sérieusement ?
— Et bien Mariko a préféré partager sa chambre avec son nouveau petit-ami, Shôji.
Il s'étrangle.
— Pardon ?
— Mmmh oui, tu as bien entendu.
— Tu rentres quand ?
— Et bien l'avion est demain à six heures...
— Donc minuit au Japon.
— Tu viendras me chercher ?
— Il ne fallait même pas me poser la question, je t'attendrai.
Au bout de cinq minutes supplémentaires, je raccroche et rejoins mes amis.
La soirée se termine dans une ambiance bon enfant et arrosée.
On retourne à l'hôtel, presque heureux que notre journée soit terminée. Mariko propose un dernier verre dans sa chambre, mais je refuse poliment. Contrairement à moi, les autres ont accepté.
Je me retrouve enfin seule pour un bon moment depuis quelques jours et ça me fait du bien. Je prends ma trousse de toilette dans ma valise et me dirige vers la salle de bains. Je fais couler l'eau du bain et y verse du gel moussant, offert par l'hôtel. Je me déshabille et m'enroule dans une serviette. Je prends mon portable et cherche de la musique apaisante à écouter. J'ouvre les portes du balcon et admire la Tour Eiffel.
Je vais vérifier mon bain. La baignoire est remplie à moitié. Je me glisse rapidement à l'intérieur après m'être débarrassée de la serviette. L'eau est brûlante, mais j'adore ça. Je me détends totalement. Je ferme les yeux et profite du moment.
Au bout de trente minutes environ, je me réveille en sursaut. Nil frappe à la porte pour savoir s'il peut entrer dans la chambre. Ne voulant pas entrer et me voir nue à travers les parois vitrées de la salle de bain.
Je m'enroule dans ma serviette et vais ouvrir. C'est Mariko.
— Oh, c'est toi.
Je tourne les talons et file enfiler ma nuisette.
— Anna, tu comptes me faire la tête ?
Je reviens vers elle, et m'assois dans le canapé, en face d'elle.
— Écoute, j'ai pris une décision et je crois qu'il vaut mieux qu'on arrête de se voir un moment...
Elle est stupéfaite par cette décision.
— Pourquoi ?
Je soupire.
— Parce que de toutes évidences, je ne supporte pas que tu sois proche de Shôji, donc pour prendre mes distances avec lui...
Elle termine ma phrase.
— Tu dois prendre tes distances avec moi...
Je tends le bras et pose ma main sur la sienne.
— Je suis désolée, je n'ai pas envie de te faire du mal ou de perdre ton amitié, mais tu es consciente qu'il faut que ça se calme entre nous...
Elle ne réalise pas.
— Je ne comprends pas pourquoi tu réagis comme ça...
Je la dévisage.
— Je fais ça pour toi aussi... Je veux que ta relation fonctionne et si je suis dans les parages, ça risque d'être compliqué.
Elle me toise.
— C'est toi qui la rends compliquée. Tu es avec Jô et moi avec Shôji, pourquoi tu ne peux pas accepter ça ?
Je secoue la tête, elle ne comprendrait pas.
— Je pensais que Shôji ne te plaisait plus, mais apparemment je me suis trompée...
Je garde le silence.
— Juste une chose Anna... Ne bousille pas ta relation avec Jô pour une attirance. C'est quelqu'un de bien.
Elle se lève et s'en va.
Je finis par m'endormir dans le canapé. J'entends Nil entrer et marcher sur la pointe des pieds vers moi. Pensant ne pas me trouver là, il me prend dans ses bras et me dépose sur lit, puis me recouvre des draps. Il s'allonge à mes côtés et s'endort à son tour.
Le lendemain, c'est la course. Il faut préparer les sacs, je reprends toutes mes affaires dispersées un peu partout et les fourre dans la valise.
On rejoint les autres dans le hall et on part vers l'aéroport.
Une fois dans l'avion, je retrouve mon sourire. Je vais revoir Jô !
On arrive au Japon vers une heure du matin, j'ai hâte de le retrouver. Je le cherche des yeux et quand je l'aperçois enfin, je lui cours dans les bras. Il me fait tournoyer.
— Tu m'as manquée ma chérie !
Je me blottis contre lui, heureuse.
— C'était long sans toi ! La prochaine fois, on n'y va que tous les deux !
Il me sourit.
— Je compte t'emmener partout où tu voudras...
Mes amis passent à nos côtés, ils nous disent au revoir, tous sauf une. Mariko. Elle me nie complètement et part sans se retourner. C'était la meilleure solution pour nous quatre.
Je plonge mes yeux dans ceux de Jô et l'admire.
— Je t'aime...
Il semble surpris, mais apprécie mes paroles.
— Je t'aime encore plus...
Maya en retrait toussote légèrement pour nous faire remarquer sa présence.
Jô nous raccompagne chez nous.
Sur le chemin, je n'ai cessé de penser à ce week-end, à Shôji, ce baiser, Mariko, notre dispute, Nil et notre rapprochement. Je crois avoir pris la bonne décision en ce qui concerne Jô. Bien sûr que je l'aime et il est temps de me consacrer pleinement à lui et à son bonheur. Je garderai mes distances avec les deux autres, il est hors de questions que je gâche tout pour une amourette.
Shôji me complique la vie depuis le début, j'ai toujours eu un penchant pour les rebelles, mais celui qui m'apportera de la stabilité et de l'amour, c'est bien Jô. Je suis prête à ce que notre relation devienne plus sérieuse. La prochaine étape serait de rencontrer sa famille. Cette idée me fait peur, mais me réjouit à la fois.
C'est quand même étrange d'avoir l'impression d'être revenue à la réalité et à sa place en présence de Jô, comme-ci ce que je vis avec Shôji n'est qu'un simple rêve.
Je me rappelle ce que Nil m'a dit. Il y a toujours une différence et cette différence est que je ne vois pas ma vie sans Jô, je suis terriblement attirée par lui dès qu'il m'approche, comme par des aimants. Et j'aime ça, cette sensation d'avoir trouvé la personne qu'il nous faut et de s'en rendre enfin compte.
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Coucou,
Le titre du livre a été remplacé par le titre définitif, vous voilà prévenu :)
N'hésitez pas à me dire ce que vous pensez de ce chapitre.
Le prochain sera mit en ligne d'ici deux semaines, environ.
Bisous !
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