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⁴⁰ | 𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝚀𝚞𝚊𝚛𝚊𝚗𝚝𝚎
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¹⁰ ¹² ²⁰²⁴
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⁴⁵⁷⁵ ᵐᵒᵗˢ
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|• 𝓑𝓸𝓷𝓷𝓮 𝓛𝓮𝓬𝓽𝓾𝓻𝓮 •|
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NA JAEMIN
15, 16, 17 Mai
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HYE-SUN M'A APPROCHÉ au beau milieu d'un chemin du lycée. Je lui ai souri, sans arrière pensée, en pensant qu'elle allait juste passer. Mais en un regard mi-mauvais mi-triste ses jolies lèvres rosées se sont décollées, une mimique sérieuse sous les quelques grammes de maquillage qui rendaient parfait son visage.
— On peut parler ?
Silence. Pas de silence autour de nous, y'avait toujours un boucan en plein milieu de la cour. Mais silence dans ma tête, à l'intérieur de moi. Je lui adresse un léger sourire, j'acquiesce, la boule au ventre.
Elle m'emmène un peu en retrait, vers l'entrée de l'établissement où y'a jamais trop de monde. Les seuls personnes qui s'y rendent c'est pour fumer une cigarette ou deux. Et aujourd'hui, le temps maussade qui nous surplombe ne donne pas envie de s'aventurer dehors.
Elle s'arrête d'un coup, sa veste qu'elle ferme à l'aide de ses mains pour camoufler au maximum sa peau découverte. Peut être que s'il n'était pas question d'elle, j'aurais aimé lui prêter ma veste. À la place, je me pose face à elle, mes mains au chaud dans les poches de mon bas.
C'est la première fois qu'Hye-sun était aussi proche de moi, qu'elle y était pour moi et pour personne d'autre. J'essaye de ne pas paraître trop froid, trop désinvolte. Mais ça n'a pas l'air de lui plaire, son visage fermé me donne juste envie de partir et de ne pas écouter ce qu'elle a à me dire.
— Ne me regarde pas comme ça, Jaemin, je sais tout.
Ça l'agace de le dire, ça l'agace.
Mon air étonné que je tente tant bien que mal de camoufler sous un rire désabusé. Cette épée qui attend au-dessus de ma tête que je ne fasse qu'un seul faux pas. Aussi minime soit il.
— Je ne sais pas de quoi tu parles ?
J'en avais déjà fait, plein, des pas de travers.
— Pour toi et Jeno... Jaemin arrête de faire le malin s'il te plaît...
La désillusion, cette sensation amère qui se mélange au sucre doux d'une boisson. La fleur fanée au milieu du bouquet qui empoisonne celles tout autour d'elle. Cette intruse, mauvaise, qui s'invite comme un parasite.
Ce sourire de façade qui disparaît aussitôt ses mots assez ancrés quelque part dans ma tête.
— Je... Euh...
Je me trouve ridicules, des mots que je n'arrive pas à dire. Et dire que j'étais l'expert des mensonges avant, quand j'étais chez ma mère, y'avait pas un jour où je ne racontais pas une fausse vérité.
Elle déteste me voir sourire mais elle déteste encore plus me voir désarmé.
— Tais toi s'il te plaît. (Elle sert contre elle une seconde fois sa veste, plus brusquement) Je ne dirais rien à personne si tu nous laisses tranquille.
Cette sensation qui m'arrache un tremblement, ce stress, cette excitation contradictoire, cette soudaine adrénaline qui me dit à voix haute que c'est trop tard. J'avais plus de marche arrière, maintenant faut savoir jouer avec les cartes que j'ai.
— Tout le monde le sait déjà pour moi, j'ai rien à perd-
Et moi, ne n'ai jamais eu d'As ou de Roi dans ma manche.
— Lui si, il a tout à perdre.
Il a tout à perdre.
Évidemment qu'il a tout à perdre. En n'ayant rien gagné en traînant avec moi, le retour était plus violent. On perd tout quand on a déjà tout.
Moi je l'avais gagné lui, un moment, quelques semaines. J'allais le perdre, donc moi aussi, j'allais tout perdre.
Je n'ai rien su répondre, ses mots qui ont résonné un long instant au beau milieu de mes pensées. Cette voix douce amère d'Hye-sun mélangé au tintement de la cloche qui résonnait en écho dans ma boîte crânienne.
Qu'est-ce-que je devais faire maintenant ?
Quand je suis retourné en classe, Jeno m'a adressé un sourire, les yeux de sa copine qui ne quittait pas mon visage.
J'avais juste envie de pleurer. Plus qu'hier mais peut-être moins que demain.
Peut être que c'est Jeno qui a tout raconté à Hye-sun. Mais alors pourquoi il me sourit ?
Peut être que c'est lui, qu'il ne sait pas qu'elle m'en a parlé. Mais alors pourquoi il me sourit ?
Peut être qu'il voulait qu'elle m'en parle, qu'elle me fasse comprendre que tout était trop compliqué, à sa place.
Peut-être qu'elle ne le savait pas réellement, que c'est moi qui lui ai confirmé en agissant bizarrement. C'est moi qui ai, peut-être, tout fait foiré.
Et s'il l'apprend ? Évidemment qu'il va l'apprendre.
Je dois lui dire ?
Jamais. Si je lui dis, c'est moi qui vais mourir. Déjà que j'ai du mal à retenir mes larmes quand je me pose à ma place, à côté de Chenle. Alors si je devais affronter son regard, ses réactions, ses suppositions, sa décision. Je n'aurais l'air que plus faible.
Peut être que je préfère avoir l'air lâche que faible.
Ça allait juste passer, toute cette histoire, elle allait juste passer dans quelques jours, non ?
Il m'a promis qu'il était là. Avec moi.
C'est pas son genre, à lui, de briser ses promesses ?
J'allais pas me retrouver seul, non ?
Il faut que mes dents s'implantent contre mes lèvres pour que l'envie de pleurer disparaisse derrière une légère douleur. Une légère gerçure.
J'avais l'habitude d'avoir mal physiquement, pas d'avoir mal au cœur.
Et c'est ça, sans doute, qui a été ma plus grande perte.
J'avais l'habitude de tout mais pas de ça.
Ou peut-être qu'au contraire, j'en avais trop l'habitude que ça en était devenu lassant.
J'ai cru que Jeno allait venir me chercher ce matin, qu'il allait attendre à mi-chemin entre le lycée et l'appartement de Lucas. Il n'y avait eu ni Jeno, ni son sourire qui m'était habituelle adressé en arrivant au lycée. Tout le monde était déjà en classe quand j'ai traversé le portail de l'établissement. Il y avait bien quelques personnes encore dehors mais la plupart était rentrée avant même que la cloche ne sonne.
J'ai attendu Jeno, un peu, peut-être quelques minutes avant de me résigner et de me diriger vers le lycée.
J'ai compris qu'il ne m'avait pas attendu volontairement quand je l'ai vu, posé à sa place dans la salle de classe. Il avait le visage baissé vers ses cahiers ouverts, un stylo entre ses mains. Mais, je sais qu'il m'avait vu rentré, tout le monde l'a fait. Juste une seconde, ce regard furtif qu’il a lancé dans ma direction avant de s’enfermer dans son mutisme. C’était suffisant pour me détruire. J’avais l’impression qu’il se dérobait, qu’il s’échappait dans un monde où je n’avais plus ma place.
Il y a eu une poignée de chuchotements quand je me suis assis sur ma chaise, tout devant. Des regards, aussi, beaucoup, avant que je ne me tourne pour ne plus affronter l'image que j'avais de Jeno. Cette douleur vive qui s'est accrochée.
J'ai de suite compris que quelque chose n'allait pas. L'atmosphère de la pièce était étouffante. Personne ne parlait réellement, les gens se contentent de murmurer, de discuter dans un silence plombant.
Je savais que quelque chose n'allait pas.
Même ma voisine de classe qui ne veut habituellement qu'avoir des bonnes notes me regardait méchamment, avec dégoût. Ce regard de haut en bas, ce visage qu'elle tourne immédiatement pour ne pas avoir à trop me regarder. Je me suis senti mal à l'aise, étourdi.
J'ai posé mon sac sur mes cuisses, la fermeture éclair que j'ai lentement remonté. J'ai sorti ma trousse quand le professeur est rentré. Il a fait se taire tout le monde de sa présence, des regards ci et là et plus personne ne parlait. C'est bien le seul qui ne m'a pas dévisagé, avec Jeno. Lui ne m'a même pas regardé.
Je n'ai rien trouvé de réellement ridicule à cette situation, mais ce que j'ai le plus détesté, ça a été mes yeux larmoyants. J'avais l'impression d'avoir perdu ce regard qui empêchait les autres de me regarder avec dédain. J'étais devenu cet animal sauvage que tout le monde était prêt à huer.
L'heure est passée lentement, il n'y avait que quelques élèves qui discutaient et les autres étaient plus distraits qu'attentifs.
Quand l'heure de la pause s'est annoncée, je n'ai pas osé me retourner. Y'avait trop de regard à affronter et j'étais pas con, je savais que les gens qui parlaient, ils parlaient de moi.
J'attends quelques secondes. Et bien que la plupart des élèves étaient sortis de la classe en me jetant de rapide œillades, je savais que Jeno était toujours dedans. Donghyuk, lui, m'a adressé un sourire bancal avant de courir jusqu'aux toilettes. Et Chenle s'est réveillé, je le sais, seulement quand Jisung a fait irruption dans la classe. Ça m'a choqué autant que lui.
Son visage timide, rougit, surtout inquiet.
Jisung n'osait jamais visiter les classes voisines, il m'a toujours confié trouver ça gênant de se pointer dans un endroit où toutes les têtes de dressent en ta direction.
Pourtant, c'est d'une posture légère qu'il s'est approché de moi. Ma voisine était toujours là, elle le regardait avec de grands yeux, son bento à peine ouvert. Il n'y faisait même pas attention.
— Tu viens on va manger ?
Ses yeux m'ont sondés. Je me suis senti déshabillé par sa voix, son air solaire qui laissait déborder toute la bonne volonté du monde.
Mes lèvres, pâteuses, me menaçaient de parler. Si je lui répondais, elles étaient en train de promettre qu'elles ne pourraient plus retenir l'expression de mes yeux. J'étais heureux de voir Jisung, il faisait comme si de rien n'était, ça se voyait comme le nez au milieu de la figure, mais il donnait tout son possible pour le faire correctement.
Je savais que quelque chose n'allait pas.
Chenle s'est levé de sa chaise, il l'a fait grincer sur le sol, ses affaires qu'il a laissées étalées sur sa table. Il avait ce regains d'énergie. Et pour ne pas perdre cette bonne humeur qu'ils me donnaient gentiment tous les deux, je faisais tout pour ne pas lancer de regard de l'autre côté. À Jeno.
— On t'attendait Jisung ! Il est où Mark ?
Il était debout, lui aussi, derrière Chenle, son regard posé partout sauf sur moi.
— Il nous attend avec Hyuk.
Sauf sur moi. Tout le monde avait son regard sur moi mais pas lui.
On est descendus rapidement jusqu'à la cour, les gens se battaient pour réussir à se rendre faire la queue devant la cafétéria. Et c'est ce qu'on était aussi en train de faire, Mark et Donghyuk à nos trousses. Mais on s'est arrêté. Pour dire la vérité, je me suis arrêté en premier et les autres se sont calés à mon niveau. Il y a quelqu'un, un peu plus loin, qui a dit mon prénom.
Je savais que quelque chose n'allait pas.
Il s'est pressé jusqu'à nous, ses cheveux en pagaille sur son front. Il avait la même carrure que les amis d'Hye-sun. Ce survêt scolaire qu'il ne revêtait qu'à moitié.
Il s'est placé juste en face de moi sans faire attention à ceux qui l'entouraient. Il leur a bien jeté un regard en biais, presque moqueur, mais ça s'est arrêté là. Puis, il y avait ce regard, ce trait que ma voisine m'a jeté plus tôt. Ce jugement, mal dépeint ou plutôt parfaitement peint.
— C'est vraiment pas contre toi, Jaemin hein, genre perso j'm'en fou, mais t'as entendu ce qu'il se dit ? ( Il attend une réponse, une seconde, deux et il reprend ) Je veux te prévenir on sait jamais. Ya une meuf qu'a dit, un soir en soirée, que son mec l'avait trompé avec toi. On sait pas de qui il s'agit mais toi même tu sais, tout se répand très vite, au lycée.
Tout se répand très vite.
Tout s'est déjà répandu.
Mais ça doit être le silence de ceux à qui je tiens le plus qui me fait le plus mal. Ils savaient déjà. Ça se voit qu'ils en avaient déjà connaissance. Quelqu'un leur avait dit, mais personne ne m'avait prévenu, à moi.
Ça tourne à mille à l'heure dans ma tête.
Hier, Hye-sun a dit qu'elle ne dirait rien. Mais en réalité, elle l'a promis pour Jeno, pas pour moi. C'est Jeno qu'a une réputation à tenir, certainement pas moi.
Je sais que ce type là, le seul qu'a osé me le dire en face, il a raison. Je suis persuadé aussi que c'est Hye-sun elle-même ou un ami à eux qui lui a demandé de venir me voir. Ça devait être drôle, de leur point de vue. Ils avaient raison, c'est sans doute ça le pire en réalité.
Jeno était écarté, personne ne saura jamais qu'il était question de lui et tout va me retomber dessus. Si tant est qu'il y a réellement un "tout". C'est vrai, je m'en fou que les gens autour de moi me trouvent dégueulasse si Jeno reste de mon côté.
Mais ce n'est pas le cas. Évidemment que ça n'allait pas être le cas. Jeno, c'est un rêve.
Je n'ai pas de rêve moi.
Mes pas crissent sur les dalles de la cours, l'aller où tout le monde est rangé.
— Tu vas pas me dire que c'est pas suspect que tu te barres comme ça ?
Il hausse son ton, moqueur, essaye d'attirer mon attention avant que je ne m'éloigne trop d'eux. Il tente de m'énerver plus que je ne l'étais déjà.
Mais je suis déjà parti, mon sac sur le dos, je suis déjà parti. J'entends juste, en bribe derrière, Jisung prendre la parole. C'est le seul à le faire et c'est ça qui me conforte plus encore dans l'idée de me foutre à chialer.
— Laisse-le tranquille !
Jeno n'a pas parlé, je ne sais même pas s'il m'a regardé partir ou s'il a gardé son visage baissé tout au long de l'échange.
Comme si y'avait que moi dans cette histoire. Comme si j'ai toujours été le seul fautif.
•
J'insère la clé, la porte en métal qui coulisse que je referme immédiatement derrière moi. J'ai ouvert la porte de l'ascenseur, la cage métallique qui s'est fermée derrière moi. Le miroir qui m'écrase de sa présence, de la mienne. Ce bout de visage, cette lèvre que j'ai fendu par mes soins bien que légèrement, visiblement. Je vois le dos de mon reflet, cette silhouette, ce bout d'humain. Qu'est-ce-que j'avais réellement à perdre ?
Tout ce que j'ai et ait toujours eu a sans arrêt été sur moi.
J'avais une clope hier, j'en ai plus depuis quelques jours.
J'ai mon portable, oui, j'hésite, je me bat chaque instant avec moi même pour ne pas finir par le jeter au sol, dans un coin de Séoul. Laisser quelqu'un le trouver.
J'ai mon portefeuille, de l'argent que j'ai gagné chez ma mère. Je me demande si j'ai assez pour prendre l'avion et ne plus jamais revenir.
L'ascenseur s'arrête, les portes en fer coulisse et je m'en extirpe. J'insère cette fois ci la clé de l'appartement, la porte qui coulisse et qui bute contre un colis. Ça réveille Lucas de sa léthargie, assis dans le salon, son visage qu'il tourne vers moi. Il me lance un regard, sans un mot, me demande explicitement ce que je fais là.
— T'es pas en cours ?
Non. Je crois que ça se voit.
Je pousse la porte jusqu'au bout pour la rabattre. Ma tête baissé à mes pieds, je passe à côté et part m'enfermer dans ma chambre sans rien répondre.
Je regretterai plus tard. Plus tard, quand j'aurais toutes ces autres choses déjà à regretter d'avoir fait.
Quand je me pose sur mon lit, que mon regard tombe sur ma fenêtre et sur celle de l'immeuble d'en face. C'est seulement à ce moment là que je me rend compte dans quelle merde je me suis mis.
J'arrive pas à arrêter de penser à lui, à tous ces mots qu'il m'a dit pendant des mois. J'arrive pas à penser à autre chose qu'à ses lèvres, qu'à son corps, qu'à son sourire, à ses yeux.
Je suis tellement amoureux de lui que ça me détruit de le savoir.
Et, en parallèle, je revois le Jeno d'aujourd'hui. Il savait, évidemment qu'il savait. Son regard fuyant, son absence de sourire, de présence. Pas de mot. Peut être que s'il m'avait dit, la pilule serait passée moins douloureusement.
Et peut-être que si je lui avais dit, hier, qu'Hye-sun était venu me parler, ça aurait changé quelque chose.
Ou peut-être que tout est voué à ne pas changer. À retourner, lentement, comme avant.
Avant que je ne sois là, avant que mon regard ne se pose sur lui, qu'il découvre que j'existe.
Mark m'a envoyé un message me demandant si "ça va". Je n'y ai pas répondu.
Fallait que je lui dise quoi au juste ? Que j'avoue ce que j'ai fait, que je me confie à lui, que je lui raconte tout. Maintenant, ils savent que c'est vrai, sinon je ne serais pas parti comme ça.
J'aimerais juste savoir comment Jeno a réagit.
S'il s'en est inquiété, s'il a culpabilisé.
S'il n'a rien fait.
Je n'ai reçu qu'un message dans l'après-midi après que les cours aient d'abord repris puis se soient terminés. Un seul unique message venant de lui.
Je mentirais si je disais que je n'avais pas immédiatement appuyé sur la notification. Si je ne m'y étais pas jeté dessus à corps perdu.
| Je suis désolé Jaemin
| Pour tout
| Tout ce qu'il se passe
Il n'était pas désolé, personne n'est jamais désolé pour moi.
Mais il allait revenir, hein ?
Ça allait juste passer, toute cette histoire, elle allait juste passer dans quelques jours, non ?
Tout allait redevenir comme il y a quelques jours... J'allais revoir Jeno, c'est vrai, j'allais le revoir. Il m'a dit m'aimer ce n'était pas pour me laisser tomber dès que tout ne se passait pas comme prévu ?
"Comme prévu."
Je ricane amèrement.
Rien n'était prévu, tout était soudain, dû au hasard.
| Juste, laisse moi un peu de temps pour que j'y réfléchisse
| Je t'aimes Jaemin, vraiment.
Mon cœur qui se met à battre après sa déclaration me fait grimacer. L'adolescent stupide qui croit aux comptes de fées. Cette histoire parfaite sortie d'on ne sait où et qui, on ne sait pourquoi, s'adresse à moi.
Pourtant, depuis le début, dans son histoire y'a toujours eu la Princesse et le Prince, je ne sais pas, en premier lieu, pourquoi je me suis convié aux festivités.
Abrutis.
Mon téléphone grimace entre mes doigts, une force minime que j'appuie sur ses bords.
Un excès de colère et il finit, écrasé, face contre terre sur le parquet.
Les chiens ne font pas des chats, putain, les chiens ne font pas des chats.
— Comment tu savais que j'étais là ?
Je m'adresse à elle mais c'est la seule qui n'y répond pas. Même son regard, il est penché sur le côté, intéressé mais pas réellement. Elle est là pour y être, ses amis qui m'entourent, elle les regarde avec appréhension.
Ça se voit qu'elle a plus peur que moi de ce qu'ils sont capables de faire. Elle les regarde, attentive, prête à fuir ou à les arrêter si ça part dans tous les sens.
Je suis à quelques pas de chez Lucas, je suis allé lui faire les courses. Il accepte que je n'aille pas en cours pour l'instant du moment qu'il me donne des tâches ménagères et que je les accomplisse.
— On t'as vu ici, une fois, t'attendais Jeno.
Alors eux aussi, depuis le début ils savent qu'il est question de Jeno. Pas que de Jeno, mais de lui et moi.
— J'imagine que t'habites dans le coin du coup ?
C'est un deuxième gars qui dit ça, il jette des regards à droite et à gauche. Il s'arrête même, un instant, à fixer la poche qui repose à mes pieds coincée précédemment entre mes bras.
— Je sais que Jeno t'a envoyé un message, il me l'a dit.
Ça brise quelque chose en moi.
L'idée qu'elle ait pu lire nos conversations. Toutes nos conversations. Le nombre de fois où il me confiait m'aimer, où je lui répondais, sans le faire, la même chose.
Elle a vu toutes ces choses ?
Ces choses que je ne dis habituellement à personne par honte mais que j'ai dis à Jeno ?
Pourquoi ça me donne la nausée rien que d'y songer ?
"Il me l'a dit." Jeno lui a dit, Qu'est-ce-qu'il ne lui avait pas dit ?
— J'ai besoin que tu lui fasses comprendre toi, que... Que c'est plus possible.
Ses yeux implorent. Elle me regarde certes avec pitié mais en réalité, elle me supplie de faire quelque chose. Un type l'a décalé sur le côté, gentiment pour que je me reconcentre sur lui.
— Elle peut même te donner de l'argent si tu veux.
J'essaye de capter son regard à elle, eux ne m'intéressent pas. Ses yeux qu'elle pose désormais sur moi sans trop le faire.
— On sait pas ce qu'il s'est passé entre vous mais J'suis sûr que ça va pas prendre longtemps à s'arrêter.
— Et on n'a pas envie de savoir surtout !
Ils ricanent bruyamment, je retrouve ici l'image des hyènes qui me souriaient dans les couloirs. Ces types font deux mètres, ils m'encerclent comme s'ils avaient peur que je puisse m'échapper.
— ...
J'essaye de garder le visage fermé, mes lèvres sont liées, même si je le voulais, je n'arriverai pas à répondre.
— Réfléchis-y Jaemin, je peux te donner ce que tu veux ! Je peux même faire passer le mot pour une école !
Mais moi, ce que j'ai toujours voulu, c'est Jeno.
Je déteste penser comme ça, mais c'est la seule chose qui me vient à l'esprit.
Quand un type voit que je ne suis pas réceptif à leur discours, il commence à essayer de m'intimider grossièrement. Sa main qu'il pose sur mon épaule, ses doigts qu'il enroule autour de mon os. Ça fait battre mon cœur à mille à l'heure. Je commence lentement à paniquer et c'est cette idée qui m'effraie le plus.
Il y a trop de gens que je déteste qui ont posé leur main sur mon épaule.
Je la dégage d'un fin geste, sans brusquer mon vis-à-vis.
Mais il le prend mal, cet abrutis le prend mal, comme un signe de guerre. Le drapeau blanc qu'ils brandissaient fièrement qu'il abaisse d'un seul coup.
— Par contre tu vas te comporter autrement, on n'est pas pote et de nous deux c'est toi qui te tapait un mec qui n'avait rien demandé.
— ...
Mon coeur bat plus vite que fort.
J'ai toujours détesté mon père pour mille et une raisons. Mais celle qui revient tout le temps c'est le fait qu'il me préparait toujours à la panique avant de me blesser. C'est pareil ici, des mots crus et blessants et je ne me prépare qu'à attendre la venue d'un premier coup.
— T'as perdu ta langue en plus ?
— Arrêtes.
C'est pas moi qui le dit, c'est Hye-sun, d'une petite voix, une main qu'elle dépose sur son bras qui fait deux fois la taille de sa main.
Ça l'a fait paniqué, cette pièce de théâtre, bien plus que moi.
Il y a ses yeux et les miens, on les croise, j'y lis, peut-être pour la première fois, toute cette méfiance qu'elle m'adresse. Elle m'en veut énormément. Elle m'en veut à en mourir peut-être mais ce qui se lit dans son regard, c'est rien d'autre que de la tristesse.
— De toute manière, Jeno sais ce qu'il doit faire. Nous on va rien lui faire hein, mais si ses parents l'apprennent et le reste du lycée on verra bien.
Elle le regarde comme elle me regarde, ce garçon qui parle à sa place. Il délie tout son venin sur Jeno en le faisant d'une discrétion presque implacable. Pourtant, Hye-sun le voit. Elle le voit très bien, ce regard que je lance à ce type après ses mots, elle lui renvoie le même. Identiquement le même. Jusqu'à la couleur de ses yeux et des miens.
Ce sont des menteurs. Pour ses parents je ne sais pas, mais au lycée, les seules personnes qui prennent de haut ce sont bien elles. S'ils levaient la main sur Jeno je pense que ça me ferait plus mal que s'ils le font sur moi. Jeno n'a rien demandé, il m'a menti lui aussi, oui, mais il n'a jamais rien demandé.
Ils s'éloignent finalement, l'un d'eux, avant de partir, s'est penché vers moi, deux légères tapes moqueuses qu'il fait tombé sur mon visage.
— Fais attention à toi, hein ?
Je me recule immédiatement, pétrifié par le bout de sa peau qui s'est collé à ma joue comme si j'étais son clébard.
Et peut être que ce qui m'agace le plus, c'est la colère qui débarque à l'improviste quand je les vois tous partir à l'opposé de moi. Ils marchent sur le trottoir, l'un derrière l'autre comme un troupeau de moutons. Moi derrière, impuissant.
Je me dépêche de récupérer mon sac de course et de faire les quelques pas qui me séparent de chez Lucas. Il y a la voisine du palier du dessous qui me tient la porte en souriant quand elle me voit arriver. Je passe derrière elle, un merci tout juste craché.
Je déteste tellement ce lycée. Cette ville, tous les cons qui la peuplent.
Quand j'arrive à l'appartement, il n'y a pas Lucas mais il y a Jungwoo. Il prépare le repas, de la musique qu'il laisse jouer en arrière plan. Je dépose le sac sur la table sans le déranger. Et je suis sûr qu'il ne s'est tourné vers moi que quand il a entendu la porte de ma chambre claquer.
La fenêtre grande ouverte, y'a les rayons de dehors qui s'écrase sur le bureau.
Y'a rien à casser dans cette foutue pièce. Tout est figé au sol ou au mur. J'attrape violemment mon sac de cours que je jette sur mon lit. La trieuse qui s'éventre, les feuilles par dizaines qui s'envolent sur le matelas et sous le lit.
Ça a fait un grand bruit, quand je m'écrase à mon tour au sol, ça fait un second grand bruit. La froideur du parquet qui s'agrippent à mes chevilles. Mes mains qui se posent sur mes yeux, impuissant.
— Putain !
Putain, putain, putain,
Mais pourquoi ?
Pourquoi je l'ai approché, pourquoi je n'ai pas tout arrêté avant que ça ne parte trop loin ?!
Y'avait rien à gagner ici, tout à perdre.
Ma tête se relève d'un coup quand j'entends de légers coups tombés sur la porte.
— Jaemin ? Tout va bien ?
Je me retiens de l'insulter, lui aussi.
Il devrait me détester lui aussi, lui aussi il devrait être répugné, haïr ma présence. Je dors sous le même toit que son copain comme si tout allait bien.
Je pose une main sur mon front, la chaleur mesquine de ma peau m'irradie un instant.
— Tu me laisses rentrer ?
Non. Bien-sûr que non.
Le silence s'installe. Sa respiration couplée à la mienne de chaque côté du bois. Je ne bouge pas pour ne pas faire de bruit. Mon regard fixé à la porte, elle n'est même pas verrouillée, il a juste à faire coulisser la poignée pour pouvoir rentrer. Pourtant, il ne le fait pas.
Au bout de quelques secondes, je l'entend soupirer de l'autre côté.
— Lucas rentre dans moins d'une heure, je t'interdis de ne pas venir goûter à mes pâtes carbo !
Il le dit d'une voix calme, rassurante, se donnant un air amusant.
Je m'en veux de ne pas lui répondre, de savoir que ce soir, en plus de ne pas sortir, je n'allais pas manger.
Quand j'entends ses pas s'éloigner dans le couloir, je m'empresse de me lever de sur le sol, des pas discrets que j'emmène jusqu'à la porte. Le loquet que j'attrape entre deux de mes doigts, le verrou que je tourne, dans un claquement bruyant.
___☀︎︎___
5h d'écriture !
J'ai tellement hâte de retourner au présent mdrr ça me soule d'écrire à la première personne
TXT QUI ONT DU REPOS OUAISSSSS
faudrait faire passer le mot à Enha aussi ce serait cool et pourquoi pas même à skz qui enchaîne littéralement les comeback. Genre le but d'un cb c'est pas de faire une pause de quelques mois entre temps ?
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