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¹⁴ | 𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝚀𝚞𝚊𝚝𝚘𝚛𝚣𝚎
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²⁷ ⁰⁷ ²⁰²³
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²¹⁶⁶ ᵐᵒᵗˢ
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|• 𝓑𝓸𝓷𝓷𝓮 𝓛𝓮𝓬𝓽𝓾𝓻𝓮 •|
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NA JAEMIN
8 et 9 Décembre
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J'AURAIS PAS DÛ M'ASSOIR À CÔTÉ DE LUI.
J'ai les mains moites alors que je tiens entre mon index et mon pouce, le bout orangé d'une cigarette.
Elle tombe toute seule entre mes mains, elle fait le voyage d'elle même jusqu'à mes lèvres. J'ai toujours un briquet sur moi, dans la poche droite intérieure de ma parka. Il est gris et est aussi basique que n'importe quel briquet du commerce.
Je l'ai acheté en bas de la rue chez ma mère, avant. Je ne m'en étais jamais servie, j'avais jamais consommé de cigarettes avant.
C'est pas l'odeur qui me dégoûtait mais le prix qu'elles portent sur leur tête. Ça me dégoûtait de payer un truc aussi cher pour juste les voir disparaître lentement après les avoir enflammées.
C'était quelque chose que je trouvais stupide.
C'est toujours le cas, évidemment, mais d'une manière différente. J'ai pas à les payer, j'ai juste à les consommer. C'était déjà ça de gagner.
Et puis, c'est pas des conneries quand les gens disent que se bousiller les poumons avec l'odeur et le goût de la fumée ça fait quelque chose de bizarre à l'organisme.
Ça doit faire sérieusement mal au système respiratoire mais je crois que ça apaise tous les autres systèmes.
J'ai pas dis que c'était intelligent de le faire, j'ai juste dit qu'il y avait du bien dans le mauvais.
J'ai rapidement rangé le paquet de clopes dans l'une des poches de ma veste, l'image qui visualisait mon supposé future bien caché contre le tissu du vêtement.
En tenant la cigarette entre mes doigts, je sens la texture rugueuse du papier du cylindre et lorsque je l'approche, allumée, de mes lèvres, j'arrive à sentir la chaleur qui émane de l'extrémité incandescente.
Ça ne prend pas cinq secondes pour que l'odeur distincte du tabac ne s'en dégage par grosses bouffées de fumées autour de moi.
Je me demande même si elle n'est pas constamment resté sur moi. Quelque part même si ce n'est à l'intérieur de mes poumons.
Le vent l'emporte derrière moi à chaque fois qu'il me bouscule dans ma marche.
En inhalant profondément, la fumée chaude et amère entre dans mes poumons, provoquant une sensation de brûlure à l'intérieur de ma poitrine.
Je ne sais même pas quand est-ce que ça commence à devenir agréable, si c'est longtemps après, après s'être dit "tiens, j'me suis mis à fumer, j'me sens plus léger". Ou si, au contraire, ça ne dure que quelques secondes pendant que le bâton de nicotine se désagrège.
C'est souvent juste momentané.
Putain, en fait, c'est tout le temps juste passagé.
Ça me donne envie de rire.
De toute manière, avec moi, le moment il dure moins longtemps car ça m'agace de garder les mains en dehors de ma parka alors qu'il fait moins dix degrés dehors.
Je trouve rapidement une poubelle sur le chemin, même si l'endroit où je traîne actuellement m'apparaît comme plus reculé par rapport à où je vis aujourd'hui, il y a toujours des poubelles vertes en fer et j'me demande quatre-vingt dix pourcent du temps, pourquoi il y a des mégots au sol.
Il y a des cons partout. Que ce soit à la minuscule Séoul chez les riches ou à la grandiose Séoul chez les pauvres.
Les trottoirs sont plus étroits que vers le lycée, il y a plus d'habitations ici aussi, encastrées dans des murs, partout où il y a de la place. On dirait juste que les gens ont décidé d'entasser des maisons de trois mètre carré pour pouvoir donner un endroit où loger à tout le monde.
Même si c'est parfois compliqué de payer les loyers et que ça fait juste plaisir aux grandes personnes de cacher les gens qu'on estime moins présentables.
Moi, j'ai le droit de juger, j'suis un entre deux.
J'suis pas riche pour ma mère et j'suis de classe moyenne pour mon père.
Mais bon, pour mon père, je suis beaucoup de chose qu'il n'a pas envie que je sois.
On joue au chat et à la souris avec mon père.
Mais au lieu de me chercher moi, il cherche des choses qui pourraient me porter préjudice.
Comme des préservatifs usagés dans une corbeille ou d'autres qui sont neuf dans mon tiroir.
Des feuilles de contrôle dont les notes sont trop basses.
Comme l'historique de mon ordinateur si ça lui fait plaisir de regarder aussi ce que j'aime bien visionner.
Des cahiers, des photos, des mots.
Je sais pas moi, des trucs qui le rendent puissant contre moi dans sa quête de me faire chier.
Comme un paquet de cigarettes entamé dans la poche d'un de mes blousons.
Comme une feuille où j'aurais écris quelque part mon attirance pour les mec.
Comme mon téléphone avec des numéro, des photos, des messages suspects.
Plein de petits trucs dans le genre.
Plein de petits trucs que j'aime personnellement mais qu'il se plaît à détester avec moi. Sur moi, pour moi.
C'est pour ça que je prends soin de cacher mes paquets de clopes sous les lattes de mon lit, loin des yeux indiscrets de mon père quand je quitte la maison.
J'aime pas particulièrement fumer mais je le fais quand même. Je ne sais même pas comment ce n'est pas devenu une addiction.
Peut être que ça en est une en fait, que je ne m'en rends juste pas compte.
Que je ne me pose simplement pas la question.
Je me contente de cacher ces paquets de cigarettes pour ne pas que mon père ne les trouve.
Autant que c'était stupide que je ne tombe pas dans l'addiction à la nicotine, le fait que mon père n'est jamais remarqué que je fume est autant un exploit.
Je sais qu'il désapprouve complètement la cigarette et je préfère éviter les conflits inutiles.
Étant donné qu'il y en a actuellement déjà trop.
Pourtant, je ne peux m'empêcher de fumer en secret.
Peut être que c'est comme un moyen de me rebeller discrètement contre l'autorité paternelle.
Comme un adolescent agacé le ferait.
Je ne sais pas. Je sais bien être un adolescent mais aucune idée de si je suis agacé.
Peut être aussi car, j'le dis toujours mais, j'suis pas très malin.
Je me suis déjà fait attrapé par le chat une fois, une deuxième fois, ça deviendrait catastrophique.
Ou normal, qui sait ?
Juste et banalement normal.
Mais ça me tente. Ça me tiraille de le tester, d'essayer de l'attirer dans mes filets alors que je sais pertinemment que c'est moi qui me ferais capturer, emprisonner, enfermer.
Je suis la souris.
Il est ce gros chat fort et rusé qui attend patiemment que je sorte de la cachette en sachant pertinemment où elle se trouve.
Sauf que j'en ai pas.
Je n'ai aucune cachette.
Je suis juste indéniablement attiré par toutes les choses qui pourraient me cacher dans l'ombre.
Me donner un moment de repos, de répit.
J'ai besoin d'adrénaline, d'une stupide et illogique poignée d'adrénaline.
J'aime trainer chez des inconnus pour penser à autre chose le temps d'une soirée, d'une après-midi sans pour autant que quelqu'un ne pense à moi.
J'aime marcher jusqu'à pas d'heure dans les nouvelles rues de Séoul que j'ai tout de même pris un certain temps à apprivoiser.
C'est juste plaisant de traîner dehors, quand il fait nuit alors que je sais pertinemment que dès que mon minuscule museau de souris dépasserait du trous de ma soi-disante cachette, j'allais me faire croquer par mon père.
Je me demande si, hypothétiquement, ma cachette, ce n'est pas l'extérieur en général. Et que, quand je passe sous la lumière du pas de la porte de chez mon père, je quitte cet endroit de tranquillité.
C'est ce que je ressentais ce soir là.
Tout absolument tout s'apparentait à ça.
L'adrénaline. Le repos. La sensation d'être ailleurs sans y être.
L'énigme aussi.
Surtout l'énigme.
J'avais eu envie de l'approcher, d'essayer de lui parler.
Pas forcément de l'apprivoiser mais juste de l'approcher.
J'avais envie de l'approcher car c'est quelqu'un que tout le monde regarde de loin et que seul une meuf avait réussi à caresser de sa présence.
Je jure que j'avais juste envie d'être proche de lui, pas forcément de forcer avec ma présence mais simplement d'être là, de l'écouter de plus près s'il se mettait à parler.
Jeno s'était assis dans le cercle juste après Mark, il y avait tellement d'endroits où j'aurais pu m'installer.
Mais je ne sais pas, c'était juste trop alléchant.
Jeno était resté dans son coin pendant la soirée entière. Il restait dans un angle du salon avec son verre en plastique à regarder dans notre direction quand on faisait une connerie avec Donghyuk.
Sans jamais venir vers nous.
J'avais l'impression que ce jeu était un don du ciel.
Qu'il l'était encore plus quand je m'étais rendu compte que Jeno allait aussi y participer.
Je trouvais le jeu pas forcément intéressant. Je préfère quand les choses sont plus spontanées, moins encadrées par un règlement.
Mais jeno était là et le regard étonné qu'il m'a lancé quand je me suis placé à côté de lui valait plus que ma fierté à participer à un jeu.
J'étais si proche de lui que si je me tournais ne serait-ce qu'un peu, j'aurais eu la possibilité de voir son visage de plus près.
Et nom d'un chien qu'est-ce-que j'aime ce genre de visage.
J'avais oublié dans le tas qu'il avait une copine.
J'avais oublié dans le tas qu'il était certainement, très certainement hétéro.
J'avais oublié dans le tas qu'il était dans mon lycée, dans ma classe, qu'il côtoyait mes nouveaux amis et que sa copine était au centre des types qui propagent des rumeurs.
J'avais surtout oublié, sur le moment, qu'habituellement, je ne m'intéresse pas aux gens que je connais. Pas quand c'est pour faire des choses qu'on ne fait pas entre potes.
Mais putain. Qu'est-ce qu'il est beau.
Son visage est si droit, ses lèvres si irritantes, ses yeux si silencieux à regarder ce monde si bruyant.
Il avait tout d'un être éthéré qu'on admire de loin.
Et moi, j'étais le pêcheur qui avait besoin de le voir de plus près.
— Tu t'es fais mal ?
J'ai cru que s'il allait me parler ça allait pouvoir être pour mille raisons différentes. Pour les cours, pour ma présence ici, pour faire rapidement connaissance, pour me dire une connerie. J'sais pas moi.
Que j'avais renversé mon verre sur mon haut, que quelqu'un l'avait fait à ma place. Que j'sentais la cigarette même si j'avais éteint l'odeur plus tôt avec du parfum et des bonbons à la menthe.
Qu'il n'aimait pas que je sois là, à côté de lui, à prendre inutilement de la place à côté de lui.
Pour tellement de raison différentes.
Mais pas pour celle là.
En fait, pour celle là, même un regard aurait suffit.
Je ne sais pas si c'est parce que j'avais pas mis assez de fond de teint. Que j'l'avais pas assez caché derrière la manche de mon vêtement.
Parce que j'avais la tête ailleurs, que j'y ai pas pensé.
J'étais pourtant persuadé d'y avoir pensé.
Peut être que c'était Donghyuk, qu'en se jetant stupidement de l'eau, la couche de maquillage était partie.
J'en sais trop rien.
Mais personne n'avait remarqué.
Sûrement car tout le monde ou presque était alcoolisé et que Jeno, lui, ne l'était pas.
Qu'il avait toutes les cases de son cerveau pour réfléchir. Qu'il ne voyait pas flou ou comme un fou bercé par l'alcool.
Parce qu'il m'a regardé.
Momentanément, longtemps, juste un instant, trop gravement, trop précisément.
Parce qu'il me regardait.
Je n'ai pas de suite répondu, j'ai même hésité à ne pas le faire. À faire croire que je ne l'avais pas entendu, que je ne l'écoutais pas. Que, moi aussi, j'avais plus de quelques millilitres dans le sang.
J'allais vraiment le faire si je n'avais pas croisé son regard.
Ses yeux étaient noirs et même s'ils le sont tout le temps. Je me risque à dire qu'à ce moment là, ils avaient plus de profondeur qu'habituellement.
Qu'ils étaient le reflet de la marque sombre que Jeno dévisageait sur mon bras.
Je sais très bien que tout le monde pouvait avoir des bleus, que tout le monde pouvait tomber, chuter, se cogner, se battre ou juste se disputer.
Mais putain pas quand je m'appelle Jaemin et que dans tous les murs du lycée les gens pensent impunément que j'me fais bousiller par mon père.
Alors, j'ai pris un certain temps à réfléchir.
À penser avec la tête explosée par l'alcool qui gangrénait mon cerveau, mon mode de penser.
J'ai finalement croisé ses yeux. J'ai dévisagé au passage les mèches brunes qui brouillaient son regard, qui le rendait plus beau.
— J'me suis pris un mur.
J'ai tellement tardé à répondre que même s'il ne me le disait pas en face, je savais qu'il ne me croyait pas.
Et franchement, pour qu'il n'ait pas rigolé, c'était un exploit.
Je pense que si j'avais été à sa place, j'aurais éclaté de rire tellement l'excuse était bidon.
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