18 • BREATHE ME
davia sters
ONSDAG
07:45
- Bon, mes valises sont faites.
Je grogne simplement, m'attachant les cheveux en un chignon à la va vite. J'observe ma mère qui s'agite pour vérifier s'il ne lui manque pas un papier ou une connerie du genre.
- À mon retour, on aura une conversation, jeune fille.
Son ton est dur et plein de reproches. Le dirlo l'a appelé hier soir suite à la bagarre entre Ava et les filles. Je lève les yeux au ciel. Hier soir, elle m'a sermonné pendant une heure, en répétant que c'était inadmissible que je me comporte "comme une sauvage", selon elle. Je l'ai écouté que d'une oreille, les pensées trop encombrées par ma vengeance sur Ava. Je compte bien lui faire payer son comportement de garce envers Solveig, et croyez-moi, je ne vais pas y aller de main morte.
- Passe voir ton grand-père dans la semaine.
Ma mère ne m'embrasse pas et s'en va vers l'Allemagne je crois, pour une nouvelle semaine. Je lance un regard sur la table de la cuisine, des billets, comme d'habitude. C'est encore tout ce qui prouve que ma mère reste ma mère. Dégoûtée, je remonte me coucher, le cœur en miettes. Tant pis pour le lycée.
Ma mère me manque.
Mon père me manque.
Et mon grand-père...
C'est comme si je n'avais plus aucune famille. Je regarde la date sur mon téléphone. Mercredi 17 avril. Six mois. Une demie-année que mon grand-père a eu son accident. Une demie-année qu'il est à demi-conscient, une demie-année que mon cœur s'alourdit à chaque fois que je pense à ce qu'il était, à ce qu'il est devenu.
Comme une gamine, je me mets à chialer, serrant mon oreiller contre moi. Je n'ai pas de peluches, ma mère n'a jamais voulu m'en acheter, elle disait que c'était important d'être fort dans la vie. Je l'étais jusqu'à ce que je me rende compte que mon grand-père, la seule personne avec mon père qui m'aimait vraiment, ne serait plus jamais comme avant.
Pourquoi je n'en ai jamais parlé avant ?
Parce que je m'efforce, chaque putain de jour, de combler leurs absconses respectives. Et bordel, qu'est-ce que c'est dur.
ONSDAG
20:30
Solveig: ça va Didi ? t'es malade ?
Eva: heeei (: rien de grave ?
Chris: beh alors chérie, tu sèches ? je m'attendais à te voir dans les couloirs ce matin...
Je ne réponds à aucun de leurs messages, j'ai besoin d'être seule. Je n'ai pas quitté mon lit de la journée et le lycée a appelé pour savoir où j'étais passée. J'ai pas répondu.
Moi: quand est-ce que tu reviens ?
Je clique sur "envoyer" les doigts tremblants. Le message s'allonge à la conversation que j'entretiens toute seule depuis de longues années, avec toujours les même questions sans réponses de sa part. T'es passé où, papa ?
Mon téléphone sonne et je décroche les doigts tremblants en voyant s'afficher le nom de ma grand-mère sur l'ecran.
- Allo ?
- Ma chérie ? C'est mamie, ça va ?
Sa voix tremble et mes mains commencent le même mouvement.
- Ouais, oui et toi ?...
- Hum, pas très bien. C'est papi, il a fait un nouveau malaise. J'ai essayé d'appeler ta mère mais elle est sur répondeur, donc je voulais faire passer l'info. On l'amène à l'hôpital.
- Oh, d'accord.
Je n'ai pas la force de dire quoique ce soit de plus. A l'autre bout du fil, ma grand-mère commence son éternel discours sur la pluie et le beau temps, les souvenirs de son enfance et les plats qu'elle a fait à manger dans la semaine. C'est sa manière d'évacuer. Malheureusement, je n'en ai aucune et je me contente de pleurer en silence pendant quinze minutes, en attendant qu'elle ai fini son monologue oppressant à force de l'user depuis de longues années.
TORSDAG
10:00
Après avoir passé tout mon mercredi sans manger et avec un gros coup de blues, je rentre en traînant les pieds dans ma salle de biologie. Je n'ai parlé à personne et le pire, c'est que j'ai maintenant cours avec Chris. Et que je sais qu'il va s'assoir à côté de moi.
Je sors mes affaires en silence, le regard perdu dans le vide et les pensées absorbées par le coup de fil que j'ai reçu hier soir. Je n'ai même pas bougé mon cul pour aller à l'hôpital, c'était trop dur. Les élèves commencent à rentrer et je regarde par la fenêtre sans me préoccuper du reste. Une main se pose sur mon épaule et un frisson parcourt mon corps.
- Hei, souffle Chris en s'installant. Tu vas bien ?
C'est comme s'il percevait quelque chose d'anormal chez moi. Je refuse de le regarder sinon j'vais pleurer une nouvelle fois. Je ne réponds rien et je pense qu'il abandonne, puis le cours commence.
- Nous allons étudier les maladies cardio-vasculaires chez l'être humain. Y a t-il eu des cas dans la classe ?
C'est une putain de blague ? Le karma est une pute. Je soupire en tremblant mais ne lève en aucun cas la main, essayant de penser à des choses agréables pour ne pas me concentrer sur le cours. Mais c'est pourtant plus fort que moi. La salle devient oppressante, la voix du prof me vrille les tympans et j'ai des bouffées de chaleur, sans compter que le moindre souvenir empoisonné peut me faire éclater en sanglots à tout moment. Franchement j'ignore ce qui m'arrive depuis hier, mais c'est comme si j'avais besoin d'évacuer toute la pression.
Au milieu du cours je ne tiens plus, je lève la main et demande au prof pour sortir, prétextant un malaise. Dix secondes après, je suis dans les couloirs et je descends au rez-de-chaussée, m'appuyant contre les casiers. J'essaie de retenir mes larmes mais c'est putain de dur.
Soudain, quelqu'un me retourne, me prend par la main et m'emmène de force avec lui, direction une salle que je connais que trop bien, puisqu'il s'agit de la salle 34. Au moment où la porte se referme brusquement, nous plongeant dans une obscurité totale, j'éclate littéralement en sanglots.
- Wow, Davia...
Sa voix est rauque et remplie d'inquiétude. En moins de deux, je suis contre lui et je m'accroche limite à sa taille comme si ma vie en dépendait, tandis que ses bras me serrent le plus fort possible. Les lèvres de Chris se posent délicatement sur ma tempe.
- Hei, dis-moi ce qui se passe. C'est pour ça que t'as manqué hier ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
- R... Rien, soufflé-je le souffle court. Je... j'me sens tellement seule, Chris.
Et mes sanglots redoublent, alors son étreinte se ressert un peu plus.
- Ne dis pas ça. Solveig et Eva sont là. Et... Je suis là Davia, je suis là.
- Ma mère bosse la moitié de l'année à l'étranger, je la vois jamais, sangloté-je comme si toute l'histoire devait sortir d'un coup. Et mon père est parti y a deux ans sans rien dire, alors que c'était l'une des deux seules personnes qui m'aimaient vraiment... Et la seconde c'était mon grand-père mais c'est devenu un putain de légume Chris ! Un putain de légume qui ne pense qu'à bouffer du sucre et à dormir, qui ne tient pas en place deux secondes et qui refuse de rester avec moi parce qu'il ne parle pas et que tout l'ennuie !
Je crois que je crie, au final. Chris sèche mes larmes avec ses doigts et sans rien dire, m'entraîne avec lui hors de la salle, puis hors du lycée, dans un quartier qui m'est totalement inconnu.
- Chris... Qu'est-ce que tu fais ?... soupiré-je en reniflant.
On arrive alors dans une rue que je reconnais, puis quelques minutes après je me retrouve dans l'appartement de Christoffer Schistad.
- Le prof va nous tuer.
Il me sourit juste et m'entraîne avec lui dans sa chambre. On s'allonge sur son lit et il me reprend dans ses bras.
- T'es pas seule, je te promets que t'es pas seule Davia. Tu ne seras plus jamais seule t'entends ? chuchote t-il en déposant des baisers sur mon visage. J'suis là. Je te promets que tu pourras toujours compter sur moi.
Je souris faiblement avant de fermer les yeux.
- Dors princesse, ça te fera du bien.
- Tu restes ? soufflé-je les yeux fermés.
Ses lèvres se posèrent au coin de mes lèvres et je frémis.
- Oui chérie, je reste près de toi. Ne pleure plus s'il te plait, j't'avoue que ça m'a fendu le cœur.
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