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𝐒𝐜𝐞̀𝐧𝐞 𝟏𝟎


𝕮𝖍𝖆𝖓𝖘𝖔𝖓 𝖇𝖔𝖍𝖊̂𝖒𝖊


« 𝕷𝖊𝖘 𝖙𝖗𝖎𝖓𝖌𝖑𝖊𝖘 𝖉𝖊𝖘 𝖘𝖎𝖘𝖙𝖗𝖊𝖘 𝖙𝖎𝖓𝖙𝖆𝖎𝖊𝖓𝖙 »

« Installez-vous, je vous en prie. »

Le couple Hwang prit place, sans un mot, l'air grave. De son côté, Hyunjin n'osait même pas les saluer, de toute façon, il était trop occupé à tordre ses doigts dans tous les sens.

« Je vous ai déjà dit la raison pour laquelle j'aimerais qu'on échange et je vous remercie d'avoir pu vous libérer pour venir aujourd'hui.

- C'est normal, c'est dans notre devoir de parents. »

Le père de Hyunjin avait parlé le premier, mais sa femme reprit rapidement derrière.

« Et nous le regrettons.

- Je le regrette également. »

La maîtresse avait lancé un regard au seul enfant présent dans cette pièce, tandis qu'elle avait lâché ces mots lourds de sens.

Hyunjin était brillant dans toutes les disciplines, elle regrettait d'en arriver là, mais si le devoir des parents était de venir, le sien était la sécurité de ses élèves. Elle avait déjà assisté à des scènes semblables, mais jamais avec un tel mépris, elle était encore jeune dans le métier. Elle n'arrivait pas à passer outre l'air supérieur de Hyunjin alors qu'il riait d'un Jisung en larmes, assis sur le sol froid de la classe. Son cœur s'était serré et elle avait ordonné à toute la classe de sortir.

Seungmin l'avait rattrapé dans le couloir, à bout de souffle.

« Maîtresse, c'est urgent ! Hyunjin, il dit des mots méchants à Jisung et tout le monde rigole autour de lui ! Venez, s'il vous plaît ! »

Elle n'avait jamais vu Seungmin dans cet état. D'ordinaire si calme, il avait peine à respirer correctement, sûrement à cause de sa course dans le couloir. Mais par-dessus tout, il avait l'air profondément inquiet. Et « dénoncer » son ami, ce n'était pas chose facile. C'est précisément ce détail qui l'avait poussée à faire demi-tour en courant à son tour. Evidemment, elle avait promis à Seungmin qu'elle n'évoquera pas l'implication du jeune garçon dans son intervention. Des « balances » personne n'aime ça, encore moins les enfants qui ont une confiance quasi aveugle en leurs amis. L'amitié est si fragile à cet âge, et pourtant elle est le pilier de leur vie.

Alors pour que Seungmin en vienne à lui courir après pour parler du comportement de son ami l'inquiétait fortement.

Elle ralentit quelques mètres avant l'entrée de la classe pour reprendre son souffle. Ainsi, elle put entendre les mots qu'elle aurait préféré ne jamais entendre de la bouche d'un enfant. C'était bel et bien la voix de Hyunjin, et les rires des autres enfants.

« Tu mérites même pas d'être avec nous ici, t'es qu'un idiot !

- Hwang Hyunjin ! »

Elle avait crié pour se faire entendre par-dessus les rires des enfants. Elle se demandait pourquoi ils se mettaient tous contre ce pauvre enfant. Il paraît que se mettre tous contre quelqu'un renforce les liens, c'est ce qu'elle avait appris en études universitaires. Elle en avait la preuve sous les yeux, et avec effroi elle constata que les enfants n'étaient pas épargnés. Est-ce naturel, ou essaient-ils d'imiter les adultes qui les entourent ? Elle n'avait pas de réponse et de toute façon, elle n'avait pas le temps de s'adonner à des questions philosophiques.

Sur le chemin jusqu'à la salle, Seungmin lui avait brièvement raconté. La maîtresse avait invité tout le monde à sortir pour la récréation de l'après-midi, elle avait donc pris congé avec quelques élèves, dont Seungmin. Ce dernier avait oublié quelque chose dans son sac, il était alors revenu sur ses pas. Et c'est à ce moment-là qu'il entendit les propos de son ami.

« Hé, Han Jisung !

- Mh ? »

Il avait toujours l'air innocent, mais Seungmin n'était pas dupe, le blondinet était terrorisé par la violence des mots de Hyunjin. Il les subissait depuis des mois, seulement Seungmin n'avait rien dit aux adultes, préférant en parler directement au concerné. Ils s'étaient d'ailleurs disputés à ce sujet.

« Pourquoi Minho, il joue avec quelqu'un comme toi ?

- Minho ?

- Tu l'as obligé, hein, c'est ça ?

- Mais, mais non !

- T'es trop nul et t'es trop bête ! Minho il est intelligent et c'est le plus fort ! C'est impossible qu'il veuille jouer avec toi ! Tu l'as forcé !

- Arrête ... »

Le blondinet avait commencé à sangloter.

« Ô le pleurnichard ! T'es un gros bébé, en fait ! »

Et toute la classe avait ri.

Il n'en fallut pas plus pour Seungmin, c'était trop. S'il ne pouvait pas le raisonner, alors peut-être que les adultes pourront faire quelque chose. Il ne comprenait pas, son ami était d'ordinaire si gentil et affectueux. Oui, il était hautain, tout tournait autour de lui, mais il avait été là pour ses amis, pour les faire rire quand ils avaient du chagrin. Hyunjin, il avait un cœur sensible, il était chaleureux et aimait apporter de la joie à son entourage. Alors, il ne l'aurait jamais cru capable d'humilier un autre enfant pour amuser la galerie et se sentir supérieur.

Le jeune garçon avait une obsession pour Minho. Ils avaient grandi ensemble, c'était son aîné, comme un grand frère qu'il connaissait depuis ses premiers jours de vie. Et l'égocentricité de Hyunjin le poussait à s'approprier le brunet comme s'il avait peur de le perdre. En vérité, Hyunjin avait ses insécurités, il devait être à la hauteur des compliments de ses parents. Alors, il avait trouvé un certain réconfort à humilier Jisung, il ne s'était jamais senti aussi puissant. Le jeune garçon avait tant de charisme que les autres enfants avaient tendance à le suivre.

Dans leur petite bande, ils avaient tous un peu une attitude de leader et c'est sûrement ce qui les unissait. Bien-sûr, l'influence de leurs parents y était pour beaucoup. Pourtant, chacun avait son propre charisme.

Chan était le leader qui prenait soin des autres.

Minho était le leader qu'on idolâtre.

Hyunjin était le leader qu'on suivait à la lettre.

Et tous les autres avaient également une facette différente.

Tous ensembles, ils étaient impressionnants. Certains les admiraient et d'autres les craignaient sans savoir pourquoi, leurs cerveaux étaient comme programmés sans qu'ils ne s'en rendent compte. Mais dans cette amitié, quelque chose d'autre les unissait, ils avaient tous bon cœur, ils avaient tous un bon fond. C'était sûrement la raison pour laquelle ils tenaient les uns aux autres depuis tant de temps. Secrètement, chacun espérait que cette amitié dure pour l'éternité.

Les parents de Hyunjin n'arrivaient pas à croire ce que leur racontait la maîtresse. Non pas qu'il n'avait pas confiance en l'institutrice, mais ils ne reconnaissaient pas leur propre enfant. Pourtant, au fond d'eux, ils savaient.

« Comment tu as pu dire ça, Hyunjinie ? »

Sa mère était inquiète, elle tombait de haut.

« J'y crois pas, on va avoir une discussion tous les trois. »

Son père n'était pas dans un meilleur état.

Cette phrase avait fait terriblement peur à Hyunjin, tout simplement car ce n'était jamais arrivé mais que c'était inévitable. Toutefois, monsieur Hwang n'avait pas de mauvaises intentions, la violence le répugnait, principalement à cause de son propre père violent. Il aurait pu répéter le schéma, seulement il avait décidé adolescent de protéger sa mère. Et tout avait basculé.

Alors, encore une fois, il se sentait démuni. Pourtant, il n'utilisera jamais la violence, il l'avait juré ce jour-là. Il avait vingt ans et la pluie avait inondé la nouvelle terrasse de ses parents. Il ne voyait même plus la marée de sang, les pompiers et la police. Des cris, des pleurs, il voyait flou et refusait de comprendre.

« Je ne vais pas vous retenir plus longtemps. En revanche, sachez que Hyunjin sera exclus trois jours à la demande du directeur. Il vous attend dans son bureau, au fond du couloir à votre gauche quand vous entrez dans le préau. Par contre, Hyunjin, je te demanderai de rester ici. »

Le couple acquiesça.

Pendant l'entretien de ses parents avec le directeur, il était resté dans la salle de classe avec l'institutrice qui lisait un livre. Elle avait donné des feuilles et des crayons au jeune garçon, il avait pris un crayon noir et avait rempli la feuille de cette couleur en faisant des ratures.

Il avait déçu ses parents.

Il avait blessé ses amis.

Il avait été convoqué par la maîtresse.

Tout le monde était inquiet, et lui il restait là, assis sur sa chaise à tâcher sa feuille de toute sa frustration. Car, de toute évidence, il faisait face au plus gros échec de sa courte vie.

« T'es trop nul et t'es trop bête ! »

Pourquoi avait-il dit ça ?

Il avait peur.

Jisung allait lui voler Minho, n'était-ce pas ça ?

Alors, pourquoi se sentait-il coupable ? Pourquoi c'était bien plus que la déception de ses parents, plus que blesser ses amis, bien pire que la convocation. Un tourbillon d'émotions l'envahit, il ne comprenait plus rien, Hyunjin. Pourquoi il a un chagrin dans le cœur qui pèse si lourd ? Pourquoi il a envie de pleurer ? Pourquoi il a envie de revenir en arrière ? Il veut juste tout recommencer.

Alors c'est ça, la culpabilité ?

Il avait retourné sa feuille pour écrire en majuscule chacune des lettres de ce mot jusqu'à lors inconnu. 

C'est étrange comme sentiment, la culpabilité. 


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