
Chapitre 53
Arrivés chez lui, je me rend compte à ce moment seulement que je suis transi de froid, et que mes vêtements trempés n'arrangent rien. Yann glisse un regard vers moi, puis me suggère de filer prendre une douche bien chaude et je m'exécute sans hésiter.
Une fois douchée, j'enfile le tee-shirt qu'il m'a prêté, ainsi qu'un de ses pantalons de jogging. Je m'installe ensuite sur le canapé, en attendant que qu'il sorte de la salle de bain à son tour.
Je ne pensais pas remettre les pieds ici ce soir, j'étais même persuadée que Yann mettrait plus de temps pour revenir vers moi, et ne plus m'en vouloir. Mais, apparemment, et même si je n'en doutais pas vraiment, je compte plus que toute ces histoires et la tête de mule que je suis, a eu raison de persévérer.
Maintenant, reste à savoir ce que Yann entend par trouver un arrangement avec Echo. Je ne peux m'empêcher de culpabiliser... Je suis consciente que ce que j'ai fait, va lui apporter plus d'ennuis qu'il n'en a déjà, mais j'étais aussi loin d'imaginer ce qu'il se cachait vraiment derrière tout ça.
Toujours est-il que le mal est fait, et que cette fois, puisque je suis consciente de tout ce qui se passe, je compte faire ce qu'il me demande, ne serait-ce que pour l'aider un minimum.
Lorsque Yann ouvre la porte de la salle de bain, je me surprends à sursauter. Toute cette histoire me met sous tension et le voir à ce point nerveux n'arrange rien. Il a encore une fois verrouillé toutes les entrées à double tour, en précisant que c'est juste au cas où, mais je sais qu'il est plus inquiet que ce qu'il veut bien laisser paraître, et qu'il ne veut pas m'effrayer.
Lorsqu'il me voit sursauter, il fronce les sourcils, s'approche de moi, et s'assoit sur le canapé à mes côtés.
- Ça va aller, assure-t-il, en plantant son regard dans le mien.
- Pourtant tu fermes tout à double tour.
- T'es avec moi, chez moi, je suis responsable, c'est juste une précaution.
Je l'observe, sceptique, même si je ne doute pas qu'il soit du genre responsable, il n'en reste pas moins sur ses gardes, et c'est ce qui le trahit.
- Echo est pas bête au point de se pointer ici, affirme-t-il.
- Pourquoi ? demandé-je, en voyant cet air si sûr, sur son visage.
- Parce qu'il me connaît, il sait comment je suis, et qu'il a besoin de moi.
- Pour ces trucs qu'il organise, tu veux dire ?
Il hésite un instant à répondre, mais il semble ne plus vouloir me tenir à l'écart, du moins plus autant qu'il le faisait.
- Je lui rapporte du blé, et Echo, le fric, c'est tout ce qui lui importe, enfin mis à part sa sœur.
- Chloé ?
- Ouais, il est très proche d'elle, il veille sur elle comme un grand frère est censé le faire, mais il cède à tous ses caprices.
- Et tu fais partie de l'un d'eux, supposé-je.
Il laisse échapper un rire nerveux, et soupire légèrement.
- C'est un peu ça, ouais, même si c'est un peu plus compliqué... Elle est persuadée qu'entre elle et moi y'a un truc. Bref, c'est une peste, et elle arrive toujours à ses fins, mais sans son frère elle est rien.
Je fronce les sourcils, j'aurais eue des mots bien plus fort pour la qualifier, mais je ne préfère pas relever. Je me demande surtout pourquoi Yann accepte de l'accompagner en soirée et tout ce qui s'en suit. Après tout qu'il rapporte du blé a Echo c'est une chose, mais qu'il cède au caprice de Chloé en est une autre. Je m'interroge aussi sur le fait qu'il participe à des combats organisés... Je suppose qu'il a ses raisons. Qu'est-ce qui peut pousser quelqu'un à en arriver là ?
Je ne lui poserai pourtant pas ces questions... Lui et moi on a eu notre lot de rebondissements pour aujourd'hui, et il arrivera bien un moment où on abordera le sujet.
Nous décidons de regarder un peu la télévision, histoire de nous changer les idées. Je m'installe sous le plaid, car malgré la douche, j'ai du mal à me réchauffer. En temps normal, je me serais déjà blottie contre lui, mais... Est-ce que j'en ai encore le droit après ce que j'ai fais ?
Alors qu'il zappe de chaîne en chaîne a la recherche de quelque chose à notre goût, il se tourne vers moi.
- Quand même, je pensais pas que t'irais jusqu'au bout, lâche-t-il.
Je le regarde en biais, et affiche un sourire en coin.
- Comme quoi, tu ne me connais pas aussi bien que tu le crois.
- Il y a une partie de toi qui reste un mystère, se moque-t-il.
- Tu peux parler !
Il hausse les épaules, puis m'observe brièvement avant de changer encore de chaîne.
Malgré tout ce qui s'est passé, la dispute que l'on a eue, la distance que l'on a mise entre nous ces derniers jours, le fait que je ne suive pas ses conseils, et que je m'entête à vouloir tout découvrir... Nous nous sommes de nouveau retrouvés. J'ai même l'impression que tout ça, ne fera que nous rapprocher encore plus, que notre amitié sera enfin comme elle doit être.
Il fait sombre dans la pièce, et il n'y a que la lumière de l'écran de télévision qui nous éclaire. Je l'observe à cette lueur, un instant, discrètement... J'espère qu'un jour, il m'expliquera tout.
Alors que nous avons enfin trouvé un programme qui nous plait, et que nous sommes tous les deux plongés dedans, je m'adresse à lui, brisant le silence.
- Et maintenant ?
- Et maintenant quoi ? demande-t-il.
- On est censé faire quoi ?
- Toi rien, tu me laisses gérer, annonce-t-il, très sérieusement.
Je reporte mon attention sur l'écran, et ne répond rien, puis il se tourne vers moi.
- Je déconne pas, ajoute-t-il.
- Non ça je sais, et t'en fait pas ce qui s'est passé, ça m'a servi de leçon, affirmé-je.
Il se redresse, l'air grave, appuie les coudes sur ses genoux, et joint ses mains, avant de me regarder de nouveau.
- Et ça va sinon ? Enfin, je veux dire, tu le prends comment ? me demande-t-il un peu stressé, comme s'il avait peur que je le juge.
- Quoi, le fait que tu participes à des combats de rue ?
Il hoche la tête légèrement, puis m'observe avec une lueur différente dans le regard, comme s'il était en attente de mon jugement et qu'il le redoutait.
- Je t'ai dit que peu importe ce que tu cachais, je ne te jugerais pas... Tu dois avoir tes raisons, je suppose, confié-je. Après je vais pas sauter de joie en criant que c'est cool...
- J'me doute, lâche-t-il, avant de fuir mon regard et de le poser sur ses mains.
J'observe alors ses phalanges abîmées, tandis qu'il sert et desserre son poing droit, faisant penser qu'il a mal.
- Ta main, ça va ? m'inquiété-je.
Il sourit légèrement, détourne les yeux de ses blessures, et le pose de nouveau sur moi.
- Ouais, j'ai connu pire, grimace-t-il.
- Personne n'aurait voulu être à sa place, affirmé-je.
- Mmh ?
- Le rideau, il t'avait rien fait, précisé-je.
- Valait mieux que je me défoule sur lui, plutôt que sur Echo.
- Vu comme ça.
Après cette discussion, nous passons un moment à regarder la télévision en silence, jusqu'à ce que la fatigue nous gagne.
Tandis que je me glisse dans le lit, je vois Yann saisir le plaid et se diriger sur le canapé. Je l'observe faire avec insistance et il le remarque.
- Quoi ? me demande-t-il.
- Faut que je te répète qu'à la base c'est ton lit et qu'il est assez grand pour deux ?
- J'veux pas être envahissant. Et je veux pas que tu croies que je profite de la situation.
Sa réponse me fait sourire. Je sais bien qu'il ne fait pas partie de ce genre de mec... Il a certaines valeurs et une éducation qu'il respecte, et moi-même j'admire ça. À vrai dire, s'il n'était pas comme il est, je ne serais pas là dans son lit en ce moment.
- Parce que moi je suis pas envahissante peut-être ?
- Carrément, si !
Je reste bouche bée en entendant sa réponse, et il laisse échapper un léger rire.
- Ça va, j'déconne, j'aime ton côté envahissant... Et tête de mule ! Même si parfois ça me rend dingue.
J'esquisse un sourire, puis remonte la couette sur moi, mais me redresse lorsque je constate qu'il ne vient pas. Il s'approche du canapé, amusé.
- Bah, alors tu viens ? m'agacé-je.
- OK, OK, si t'insistes !
Je lui adresse une grimace qui le fait rire de plus belle. Je préfère le voir ainsi, cet air lui va tellement mieux que cette expression si sérieuse, qui le suit partout.
Après un moment à essayer de m'endormir, et à bouger sans cesse, Yann allume la petite lampe sur la table de nuit.
- Qu'est-ce qu'il y a tu remues comme un ver de terre ? lâche-t-il.
Charmant la comparaison, j'ai envie de dire...
- J'arrive pas à dormir, soufflé-je.
- Tu réfléchis trop, lance-t-il, en fronçant les sourcils. Dors, pour le moment, on peut rien faire de plus.
Je l'observe, et me demande comment lui il peut être aussi calme en cet instant. Je veux bien qu'il connaisse ce genre de situation et que ça fait partit de son quotidien, mais quand même...
Il me jette un regard en biais, puis remarque certainement que je ne suis pas sereine et que trouver le sommeil va s'avérer être compliqué pour moi. Il déplie alors son bras, et me fait signe de la tête.
- Allez viens, me propose-t-il.
Je le l'observe à mon tour, amusée.
- T'es sûr ? Je voudrais pas paraître envahissante !
Il soupire, puis sourit, tandis que je me rapproche pour me blottir contre lui. Il replie son bras sur moi, et me serre contre lui, en prenant soin de faire attention à mon épaule, encore un peu douloureuse.
- T'es vraiment une chieuse, lâche-t-il, amusé par ma réplique.
- Je sais, et j'assume, affirmé-je.
- Ça, j'en doute pas !
Je soupire d'aise, et c'est comme ça, que je m'endors une fois de plus, bercée par sa respiration et les battements de son cœur. Rien ne m'aurait fait penser que j'aurais pu être là, ce soir, avec lui, après tout ce qui s'est passé aujourd'hui.
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