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L'Esprit Joueur (Défi n°11)

OS écrit dans le cadre des Défis d'Ecriture Amusants que j'organise, il s'agit du Défi N° 11 "Une photo- des mots".  Il suffit d'écrire un texte inspiré par la photo ci-dessus en utilisant les mots imposés : chanter - sombre - exubérance - voiture - printemps.  (soulignés dans le texte)

Longueur du texte : 1680 mots

Bonne lecture. 

📸📷📸

Depuis le coin du café où la verrière sale donne un accès visuel limité à la gare, il est facile de surveiller les allées et venues. Un couple assez banal, une petite quarantaine, entre. Visiblement ils cherchent à échapper à la pluie printanière comme la plupart des clients de cet après-midi.

L'homme, après avoir jeté un coup d'œil à la ronde, se dirige d'un pas décidé vers l'endroit le plus isolé. Il traine une petite valise cabine grise et la femme à l'imperméable sombre le suit docilement. Ils s'assoient autour de la petite table bancale sans se parler. L'homme déboutonne et enlève son manteau mouillé. Après l'avoir déposé soigneusement sur le dossier d'une chaise métallique, il passe une main dans ses cheveux pour rectifier sa coiffure. D'un geste impérieux, il appelle, Marie, la serveuse et consulte sa femme.

— Tu prendras une infusion ?

La jolie blonde au regard las acquiesce. Elle n'a même pas grimacé en s'asseyant sur la chaise écaillée. Rien ne paraît la déranger : ni le décor vieillot de la salle, ni les exclamations bruyantes des lycéens un peu plus loin. Elle est calme et lointaine, son regard gris flotte avec détachement sur la salle avant de se fixer sur les gouttelettes de pluie qui martèlent la vitre de la verrière.

— Une infusion au tilleul pour mon épouse. Moi, je prendrais un café serré. Sans mousse. Avec un peu de lait froid. Et servez le lait à part, bien sûr.

Marie note leur commande sur son petit carnet noir et s'éloigne. Elle aussi semble épuisée.

Je m'installe à la table derrière le couple. Discrète. J'aime espionner les gens.

— Je serais de retour lundi midi. Lundi soir, au plus tard. Ne m'attends pas, on se retrouvera à la maison.

La femme lève à peine la tête de son téléphone.

— Bien. C'est noté, Pierre. Je t'ai mis dans la valise, comme d'habitude deux tenues de rechange. Ton portable aussi. Tu en auras besoin pour prendre des notes bien sûr ?

Elle a un léger sourire en parlant à son mari.

— Bien sûr. Merci Anna. Ces séminaires de formation le week-end sont pénibles... mais utiles.

Bien sûr qu'ils sont utiles, ils te permettent d'avoir un alibi pour la retrouver.

– Je serais au travail quand tu rentreras, lundi.

— Tu ne t'ennuieras pas ce week-end sans moi ?

La serveuse, revenant près de leur table, la dispense de répondre.

Me manquer ? Non ! Je pourrais regarder un film romantique avec Ryan Gosling le soir ou même plusieurs... toute la nuit, je pourrais paresser au lit le matin, sans subir tes caresses machinales. Je pourrais aussi sortir marcher sans but, prendre le temps de ne rien faire, sans avoir à me justifier en rentrant.

— Merci. Enlevez-moi ce pot de la table, ce n'est pas hygiénique. J'ai des allergies.

Accès d'autorité de l'homme sans aucune nécessité, mais habituel apparemment, car Anna ne tique même pas en entendant le ton volontairement désagréable de son compagnon.

— Très bien, monsieur.

La femme suit du regard le petit pot contenant les fleurs roses en bouton que la jeune serveuse emporte. Elle ne sait pas de quelles fleurs il s'agit. Elle n'a jamais pu retenir le moindre nom de fleur. À part les roses et les tulipes. Elle songe qu'elle s'offrira un bouquet de roses après le départ de l'homme, juste pour le plaisir, et comme une sorte d'expiation. Anna s'en veut un peu de ne pas avoir défendu ces pauvres petites fleurs qui ne faisaient rien de mal si ce n'est exprimer l'arrivée du printemps.

L'homme prépare son café au lait en dosant minutieusement les quantités. Elle s'ennuie et regarde par la baie vitrée embuée qui n'a pas connu de chiffon depuis l'ouverture du café.

Ils ne viennent jamais dans ce café, l'Esprit Joueur. Il est juste proche de la gare. Dans ce recoin de la salle, curieusement désert, le couple peut maintenir l'apparence d'être unis pendant la demi-heure qui précède le départ de l'homme pour Paris.

Ils sirotent tous deux leur boisson. Anna se demande pourquoi elle ne lui dit pas qu'elle n'aime pas le tilleul. Qu'elle préfère la camomille. Sûrement pour la même raison que Pierre ne lui dit pas qu'il préfère les petites brunes aux grandes blondes comme elle. Pour la paix des ménages.

– Tu as les clés de la voiture ?

– Oui. Tu me les as confiés lorsque nous en sommes descendus.

Si le ton de l'homme est sec et froid, elle lui répond d'un ton indifférent mais sans agacement. Elle est habituée à ses petites manies vérificatrices insupportables. Elle les supporte.

De tout façon, cela ne va pas durer longtemps. Plus que quelques mois et j'aurais une indépendance financière grâce à mon roman et je pourrais vivre. Enfin.

Les minutes défilent.

Il vérifie le passage du temps sur la montre en or qu'Anna lui a offert pour leur quinzième anniversaire de mariage.

– Anna, il est temps que je rejoigne le quai.

– Tu as raison.

L'homme place le prix de leur consommation, pas un centime de plus, comme d'ordinaire, dans la coupelle et se lève. Il a hâte de prendre son train. Ses pensées sont déjà à Paris.

Je me demande si Sylvie m'attendra nue sur le lit ou si elle ouvrira la porte de la chambre d'hôtel dans la nuisette que je lui ai offerte. Sexy dans les deux cas.

Ils sortent comme ils sont rentrés, l'un tirant sa valise, l'autre suivant avec indifférence. Ces deux-là ne m'amusent pas. Quoique... je pourrais éventuellement...

Je n'ai même pas le temps de réfléchir à un éventuel petit jeu que, bizarrement, la table est à nouveau occupée. Ah ! C'est Élodie. Une petite habituée. Le lycée n'est pas loin et apparemment elle n'a pas cours les vendredi entre quinze heures et dix-sept heures. La jeune fille n'a pas peur de moi non plus, on dirait, car chaque vendredi, elle s'assoit à cette table. Comme d'ordinaire, elle a sorti un livre et Marie lui apporte sans attendre une assiette avec la pâtisserie du jour, un mille-feuille industriel, et une canette de soda.

– Merci Marie, tu vas bien ?

– Comme d'habitude, ma petite. Désolée pour le gâteau, c'est ce qu'on a de mieux aujourd'hui.

– T'inquiète pas. J'viens pas ici pour la bouffe.

Élodie sourit, arrache un morceau de glaçage marbré qu'elle suce doucement.

Elle se replonge dans sa lecture alors que la serveuse repart au travail.

Curieuse, je m'approche et lit par-dessus son épaule.

« Vous avez oublié pourquoi ? Il parlait avec la gentille exubérance qui anime les reproches des enfants. »

Je fronce les sourcils. Cela me rappelle quelque chose.

Lorsque Élodie, qui lit sans s'occuper de moi évidemment, tourne la page, le prénom de Miles imprimé ranime ma mémoire défaillante. Elle lit le roman fantastique de Henry James, "Le tour d'écrou" avec les deux jeunes enfants, Miles et Flora, leur candide gouvernante et... leurs fantômes. Choix intéressant. La gamine s'installe toujours dans mon coin pour dévorer sa pâtisserie et ses bouquins, mais en plus, elle lit des histoires d'apparitions maléfiques. C'est vraiment le genre de situation que j'apprécie.

Sans aucune gêne, je m'assois devant elle pour observer ses traits si facilement déchiffrables alors qu'elle poursuit le récit anglais.

Aucune pensée consciente n'apparaît : elle est dans sa réalité virtuelle. Elle a oublié qu'elle avait une dissertation sur le rôle de résistance française pendant la seconde guerre à rendre à dix-sept heures. Je grimace. Elle est gentille. C'est un jeu amusant, non ? Je peux le faire. J'étais aux premières loges même si j'étais très jeune. Le réseau local à Amiens n'a pas pu sauver tout le monde, mais nous avons fait au mieux, avec nos maigres moyens. Si la Gestapo m'a repéré, c'est la faute de personne. Une gamine, même pas de l'âge d'Élodie, n'aurait pas dû attirer l'attention. Je dois me concentrer.

Quelques minutes plus tard, je ressens un curieux épuisement, mais je visualise avec satisfaction les pages manuscrites dans le sac d'Élodie. Je me lève et retourne à ma table quelques mètres plus loin. Qu'elle avance tranquillement dans sa lecture, elle le mérite.

L'homme, Pierre, par contre. Je bougonne et imagine le plaisir que je ressentirais à provoquer... un déraillement. Mais il y aurait trop de dégâts collatéraux. Ce genre de petit jeu ne plairait pas, Là-Haut. Déjà, je ne suis pas certaine que la dissertation... Je pourrais le faire chanter peut-être ? Pesant le pour et le contre, je grimace, j'ai pas envie de m'abaisser à cela, à d'avoir un nouveau contact avec lui. Je hausse les épaules. Tant pis je ne m'amuserai pas avec lui.

Quelques heures plus tard, la nuit est tombée depuis longtemps et le café s'est vidé de ses clients. Il n'y a eu personne dans mon coin. Marie range avec efficacité la pièce avant de quitter son service. Elle replace la plante sur la table et caresse doucement les petits boutons rouges qui se sont fermés dès le crépuscule.

Elle termine comme d'habitude en vidant les carafes d'eau dans les pots des arbustes et me frôle en passant. Cela la fait frissonner. Depuis trois ans, qu'elle travaille ici, c'est la seule réaction qu'elle ait à ma présence. Mais c'est une réaction.

Je l'aime bien. J'étais plus jeune qu'elle quand ils m'ont ôté la vie, juste ici. Depuis, c'est le seul endroit où je peux être et surtout m'amuser un peu avec la vie de ceux qui en ont encore une.

Le regard de Marie fait une dernière fois le tour de la salle. J'ai l'impression qu'il s'arrête une seconde de trop sur moi, mais non, comme d'habitude, elle appuie sur l'interrupteur. La serveuse sort et ferme la porte à clé derrière elle.

Je me dirige vers la verrière et fixe sans les voir les lumières de la gare. Je dois attendre jusqu'à demain pour trouver de nouveaux jeux. 

📸📷📸

Merci d'être arrivé jusqu'ici. Alors défi relevé ou pas ?

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