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Bonjour à tous mes petits chats :)
Avant de débuter la lecture de cet OS, permettez moi de retenir un instant votre attention pour vous donner un peu de contexte historique.

Au cours des XVI et XVII siècles principalement, une majeure partie du monde connaît une époque chaotique, sur fond de religion et de spéculation, de grands épisodes de chasses aux sorcières.
Ces "sorcières" ( qui pouvaient également être au masculin, bien que la majorité fût féminine ) se voyaient accusé.e.s de toutes sortes de pratiques de magie noire et autres pactes démoniaques, généralement sur simple dénonciation sans preuve.
Généralement, il suffisait d'être vaguement marginal pour être victime d'une accusation de ce genre.

Il arrivait même parfois que de simples conflits d'intérêts poussent les uns et les autres à s'accuser à tort et à travers, pour se débarrasser d'un rival gênant, ou d'un voisin encombrant.

Dans ce contexte, durant les années 1692 et 1693, eurent lieux les impressionnants procès des sorcières de Salem, suite à une hypothétique vague de possession démoniaque, qui menèrent à l'arrestation d'une centaine de personne, ainsi qu'à l'exécution de 14 femmes et de six hommes.
Si les sorcièr.e.s plaidaient coupables, ils/elles obtenaient le droit de rester en vie, celles eux ceux qui défendaient leur innocence perdaient ce droit.

Souvent, pour prouver l'existence d'un lien entre une personne et le diable, et attester d'un pacte signé entre les deux, on recherchait sur le corps de l'accusé.e la marque du diable.
Une supposée empreinte qu'il laissait sur la peau de celles et ceux qui leur vendaient leurs âmes.
Cette "marque" se révélait en réalité être, dans la majorité des cas, de simples grains de beauté, tâches de rousseur et autre tâches de naissance.
Vous l'aurez compris, ce détail est important.

Dans cet OS, le titre Salem est simplement utilisé comme référence, ces procès étant l'événement le plus réputé et connu de ces chasses aux sorcières, mais il ne raconte pas l'histoire de Salem, et ne s'y déroule pas non plus.

Là dessus, je ne vous retarde pas plus longtemps, et vous laisse à votre lecture.
Edit : Puisque Wattpad ne me permet pas d'intégrer un lien vers une playlist, je vous mets ici le lien vers la version ultra longue de Saturn pour accompagner votre lecture.

On se retrouve à la fin de l'OS 😘

____________________________

Cette année là, semblable à n'importe quelle année, le mois d'avril s'entamait doucement sur les décors fleuris et accueillants du printemps déjà bien ancré dans l'air.
Au centre d'un village animé par la vie qui s'y épanouissait, la brise délicate et agréablement tiède soufflait discrètement les cheveux tressés des jeunes femmes, les draps blancs étendus de part et d'autre au devant des maisons, et les toutes dernières feuilles mortes que les résidus d'automne semaient, avant de tirer totalement sa révérence, cédant enfin sa place au soleil enchanté.

Sur la place publique, là où s'agitaient quelques marchands bruyants, et des poignées de villageois venus leur acheter des légumes, les oiseaux chantaient par petits groupes, baignant l'ambiance harmonieuse de leur charmante mélodie.
Sur le sol pavé, les larges roues en bois d'une calèche venait bruyamment fendre la foule, se faufilant entre les promeneurs, sans doute pour quitter la ville, ou bien pour rendre visite à de la famille.

Comme chaque année, marquant la fin définitive des dernières empreintes de l'automne et le franc commencement du printemps, le mois d'avril s'annonçait systématiquement lumineux, empreint de sourires et de la gaieté ensoleillée.

Mais, en cette année 1708, le mois d'avril annonçait aussi le dix-neuvième anniversaire de Katsuki Bakugo..
Dans une toute petite vingtaine de jours, il dépasserait ses dix-huit ans et, à l'immense regret de ses parents, celui ci n'était toujours pas marié.
Pourtant, les prétendantes ne lui manquaient pas.
Héritier de la bourgeoisie de l'époque, en plus de pouvoir se vanter du charme délicat de son visage, il constituait un bon parti pour n'importe quelle famille.

Régulièrement, des couples de tous les horizons et de toutes les classes se présentaient à la porte de sa demeure familiale, venant exposer leurs filles comme des marchandises, espérant signer un avantageux contrat de mariage avec ce garçon dont la beauté n'était plus à prouver.
Au delà des limites du village, et même de la région, ses louanges se chantaient à presque tous les coins de rues, citant évidemment, et principalement, les traits joliment dessinés de son visage, la carrure droite et solide de ses épaules, les éclats rubis de ses iris comme l'or de ses cheveux et, naturellement, la fortune associée à son nom.

Néanmoins, les courageux qui tentaient leur chance, leurs filles sous le bras avec l'espoir de ne pas repartir avec, pensant naïvement conclure un accord, se voyaient rapidement déchanter.
Car, plus caractéristique encore de sa personne, c'était le tempérament de Katsuki, et son entêtement à refuser toute proposition, qui causait le désarroi de ces familles, en plus de la sienne.

En dépit des normes et des usages, au grand dam de ses parents surtout, Katsuki demeurait éternellement hermétique aux suggestions d'union, usant parfois de son langage grossier et de son impétuosité pour souligner son mépris à l'égard des coutumes et des prétendantes.

Au cœur de cette ville, et de cette vie, il vouait une profonde aversion pour les traditions conformistes, les mœurs étriqués, et cette image horripilante de bourgeoisie qu'on lui demandait d'accorder à son apparence.
Par dessus tout, il détestait viscéralement, et refusait qui plus est, toutes tenues vestimentaires conventionnelles et aristocratiques que son rang s'obstinait à vouloir lui faire porter.

La plupart du temps, déambulant sans aucune gêne dans les couloirs de l'imposante demeure, il se montrait mal vêtu, le gilet trop long et hors du pantalon, ses bottes de cavalerie aux pieds, et la démarche vulgaire.
Esprit indomptable, la bouche en permanence remplie de contestations et de revendications, il semblait que rien ni personne ne pouvait apaiser sa nature rebelle.
Encore moins le satisfaire, de quelque manière que ce soit.

Seulement, Katsuki fêterait bientôt son dix-neuvième anniversaire, et ses parents ne pouvaient imaginer finir leurs vies sans avoir vu l'ombre d'une descendance à leur famille.
Qui plus est, leur patience atteignait ses limites et, envers ou contre le gré de leur récalcitrante progéniture, ils avaient finalement pris la décision de lui assigner une épouse, choisie par leurs propres soins, et qu'il ne pourrait aucunement refuser.

A l'annonce de cette cérémonie à venir, malgré toutes les précautions et la délicatesse démesurée de leur discours, aucune douce parole n'avait pu calmer la colère folle et bruyante du fils Bakugo, qui soit dit en passant ne s'était certainement pas gêné pour insulter ses parents, son village, son époque, et le monde tout entier en prime.

Toutefois, il n'en restait pas moins hors de question de faire machine arrière.
Il se marierait, avec la demoiselle sélectionnée par sa famille, et aucune plainte ne leur ferait changer d'avis, quitte à supporter sa rage et sa mauvaise humeur des semaines durant.
En outre, c'est auprès de la lignée reconnue des Yaoyorozu qu'ils avaient convenu d'un accord de mariage, associant ainsi leurs fortunes afin d'assurer un avenir certain à leurs généalogies respectives.

Et, en cette agréable matinée du neuf avril 1708, une importante rencontre s'organisait entre les deux parties, supposées parlementer de l'organisation de cette union.
Egalement de permettre aux futurs époux d'échanger l'un avec l'autre, apprendre à se connaitre, découvrir leurs visages.
Seulement, cette seconde moitié des prévisions se trouvait bien compromise puisque, fidèle à sa propre personnalité, Katsuki n'y était tout simplement pas.

Ayant quitté sa propre demeure aux aurores ce matin là, afin de s'éviter tout supplice, ses parents n'avaient pas été en mesure de le retrouver à temps, contraints de se rendre chez les Yaoyorozu sans leur fils.

Avant même de les unir, le futur marié prouvait déjà son impolitesse et le manque évident de considération qu'il portait à cette pauvre jeune femme, qui soit dit en passant n'avait rien demandé pour en arriver là.

Comme tout un chacun, elle ne pouvait qu'accuser les traditions et les usages conformisés sans se plaindre et, si Katsuki possédait la chance d'être un homme pour se révolter, sa position de femme ne lui permettait pas ce genre de folie dangereuse.

Alors, pendant que les deux familles discutaient malgré l'absence d'un élément crucial de la conversation, Katsuki profitait de sa liberté volée et passagère dans les rues de son village.
Dans sa tenue en inadéquation avec son statut bourgeois, et la démarche nonchalante, il vagabondait simplement au milieu de la place du marché, balayant les étales du regard sans jamais s'arrêter nul part.
Ici, il se doutait que tout le monde pouvait le reconnaitre, et s'insurger de sa grossière posture, tout à fait incorrecte pour son rang, mais il ne s'en formalisait d'aucune manière, ignorant les yeux offusqués et désapprobateurs braqués sur sa personne.

C'est ainsi qu'il se retrouvait là, à déambuler dans la foule plutôt que de préparer son mariage arrangé, la brise tranquille du printemps dans ses cheveux blonds et mal coiffés, laissant flotter le tissu tombant de son gilet mal taillé, le tout dans ses bottes de cavalerie désaccordées au reste de sa tenue.
Contournant les étals, qui ne l'intéressaient pas le moins du monde du reste, il baladait simplement son insolence au vu et au su de tous, absolument pas inquiet des conséquences de sa fugue lors du retour de ses parents à la fin de la journée.

Quittant la place du marché pour s'aventurer dans les rues moins empruntées, passant devant quelques maisons malmenées par le temps et les intempéries, ses pensées vadrouillaient sans but dans son esprit, le regard vagabond et la bouche silencieuse.
Sous ses pas, à mesure qu'il s'éloignait des zones peuplées de la petite ville, les pavés désertaient le sol, graduellement remplacés par une simple couche de terre battue alors que les habitations se montraient de plus en plus rares.

Le décor bientôt vide de toute forme de civilisation, sa ballade improvisée le menait sur la périphérie du village, là où se trouvait la naissance d'une forêt de sapins, troquant le paysage animé pour celui des grands arbres calmes et fiers.
Katsuki avait toujours vécu ici, pour autant, il n'avait jamais mis les pieds sur ces terres inhabitées.
Principalement parce que, et il le savait parfaitement, il était particulièrement déconseillé et mal vu de s'y rendre, pour une raison qu'il ignorait cela dit.

Véritable frontière à ne pas franchir, la lisière de ce bois semblait affoler toute personne s'en approchant d'un peu trop près et, trainer dans les parages pouvait rendre quiconque suspect.
Cela dit, Katsuki, à son habitude, se moquait bien des légendes et du folklore de son époque, bien convaincu qu'il ne s'agissait là que d'une hystérie sans fondement, créée de toute pièce pour il ne savait quel raison.

Le lieu ne paraissait aucunement dangereux qui plus est, une simple forêt de sapins comme il en existait déjà beaucoup d'autre et, en dehors de l'écho lointain du vent soufflant entre les branches, il ne remarquait strictement rien de particulier ici.
Rien qui ne puisse le dissuader d'y entrer, donc.

Loin des regards indiscrets, tournant une fois sur lui-même pour s'assurer une dernière fois qu'aucun témoin ne le suivait, un sourire indiscipliné s'étirait sur son visage pendant qu'il s'avançait pour franchir l'imaginée frontière du bois.

Posant un pied sur le sol laissé en friche, ses bottes s'enfoncèrent légèrement dans la terre meuble et, marchant sous les épines hautes des immenses sapins qui le surplombaient de plusieurs mètres, il observait simplement les mouvements des branches au rythme du vent discret.

Aux pieds des interminables troncs, des pommes de pins reposaient tranquillement sur l'humus, roulant sur elles mêmes quand Katsuki les frappait du bout de ses bottes, et d'épaisses couches de mousse verte s'étendaient de part et d'autres de son chemin.
Le mélange harmonieux des couleurs de la nature adoucissaient ce décor apaisant, baigné du chant de quelques oiseaux et de rayons clairs de soleil se faufilant entre les arbres.

Ici, loin des jugements et des coutumes, libéré du poids de la bourgeoisie insupportable, l'air frais et les parfums discrets du bois dissipaient comme par magie son éternelle colère, apaisant ses muscles habituellement si tendus.
La température ni trop basse ni trop élevée couvrait sa peau d'une agréable sensation de légèreté et, seul dans ce décor parfait, il voguait sans direction définie entre les arbres.
L'endroit lui plaisait, et déjà, l'envie de revenir plusieurs fois se dessinait à son esprit.

Pour lui, et en observant cet environnement détendu, les inquiétudes que ce lieu inspiraient lui paraissaient tout à fait absurdes, alors qu'il s'y sentait plus à l'aise encore que dans ses quartiers personnels de la demeure familiale.

Déambulant ainsi pendant de longues minutes, s'enfonçant dans cette forêt injustement interdite, il se retrouvait entièrement entouré par les arbres, le paysage de la ville maintenant bien loin derrière lui.
Sous ses pas, quelques branchettes craquaient en s'écrasant sous ses bottes, ses semelles foulant le sol parsemé de quelques fleurs sauvages aux couleurs variées, et ce silence presque complet berçait ses pensées jusqu'à les faire complètement taire.

C'était beau.
Et il se sentait parfaitement épanoui, seul ici, au milieu des sapins muets.

Toutefois, ses jambes le guidant toujours plus profondément dans cette nature sauvage, son attention fut subitement attirée par la silhouette commune d'une ruine, effondrée entre deux tronc à quelques mètres de lui.
Découvrant ce détail inattendu, sa curiosité soudain piquée, il s'arrêta un petit moment sur place, figeant sa posture l'espace de quelques secondes pour mieux l'observer.

Affalée comme une âme abandonnée, ce qui devait certainement être une maison par le passé ne ressemblait plus qu'à un tas de pierres claires, entassées les unes sur les autres.
Seuls quelques petits morceaux de murs frêles tenaient encore à peu près debout mais, au dessus d'eux, la charpente moisie n'existait presque plus, complètement avachie sur elle même.
Le long des parois survivantes, la nature avait repris ses droits, faufilant des branches plus ou moins naissantes au milieu des décombres et, inclinant la tête sur le côté, Katsuki s'attarda un long moment à scruter cette ruine oubliée.

De mémoire, il restait convaincu de n'avoir jamais entendu parler de quelconques habitants dans ces bois, même jadis, mais il semblait pourtant que cette maison détruite attestait de l'existence passée de villageois dans ces lieux.

Désormais outrageusement intrigué par cette découverte, une soudaine envie d'aventure secrète jaillissait au cœur de sa poitrine, lui murmurant au creux de l'oreille de se lancer à la recherche d'éventuelles autres ruines.
Après tout, il n'existait aucune raison pour que cette maison fut seule au milieu de nul part.
Sans doute en trouverait-il d'autres aux alentours.

Alors, décrochant enfin son regard des décombres, la curiosité chantant dans ses veines, il entreprit d'entamer une exploration de ces bois, passant près de la maison morte dans l'espoir de lui trouver des semblables un peu plus loin.

Arpentant le terrain chaotique, esquivant quelques ronces agressives menaçant de s'accrocher à ses jambes sur son passage, il évoluait au milieu des reliefs sauvages en scrutant chaque détail autour de lui, convaincu qu'une découverte intéressante se cachait sous les hautes épines des sapins centenaires.

Il avait raison.

Et il ne lui fallut que quelques dizaines de pas supplémentaires pour la trouver, sa découverte, et apercevoir finalement une colonie entière de ruines.
Décharnées, agressées par les années d'abandon et détruites par la force de la nature opérant sur la pierre, une poignée de maisons éteintes s'alignaient les unes près des autres sur plusieurs centaines de mètres.
Dessinant l'esquisse d'une ancienne zone d'habitation occupée, les briques couchées sur la terre semblaient reposer ici depuis de très nombreuses années, trahissant un passé oublié, ou volontairement effacé des historiques.

Finalement, peut-être existait-il une véritable raison aux craintes des villageois, et cette forêt renfermait-elle un sombre secret qu'il valait mieux ne pas chercher à examiner.

Mais Katsuki, certainement pas effrayé pour si peu, préférait continuer de contourner les règles.
La curiosité dansant dans le fond de ses iris au couleur des flammes, son visage se recouvrait d'une expression opaque de détermination, alors bien décidé à étudier sa découverte de plus près.

Le vent frais dans ses cheveux décoiffés, les mèches blondes en désordre sur les lignes de son front, ses pas intrigués le guidèrent au plus près des décombres, s'approchant d'eux comme d'un animal paniqué, silencieusement, précautionneusement.
Ignorant les potentiels dangers auxquels il s'exposait, il se permit de monter sur un petit tas de pierres bordant un reste désagrégé de façade, et la structure s'affaissa légèrement sous son poids, manquant de le faire tomber une première fois.

Ecartant ses bras pour gagner de l'équilibre, stabilisant ses bottes entre deux blocs caillouteux, il s'éleva tout en haut d'un amas imposant de ruines, surplombant les maisons cassées pour en examiner l'intérieur.

Malheureusement, en dehors de quelques bancs de fleurs sauvages ayant élu domicile entre les effondrements, il ne restait visiblement plus rien de cette ancienne vie ravagée.
Pas même un meuble, une gamelle en fer, plus la moindre bougie.

_ Vous ne devriez pas trainer ici.

Sous le tressautement soudain de ses jambes, son perchoir instable manqua de s'écrouler complètement.
Faisant rouler quelques pierres supportant le poids de ses bottes, il s'évita la chute de justesse en s'accroupissant pour agripper ses phalanges à tout ce qu'il pouvait trouver, sentant alors son cœur s'accélérer subitement.
La surprise agitant ses palpitations, un vertige menaçant sur le crâne d'avoir failli se retrouver tout en bas de sa pyramide de cailloux, il cligna plusieurs fois des yeux en portant lentement une de ses main contre ses côtes.

Sentant les pulsations frapper sa cage thoracique, le souffle saccadé par la stupéfaction et la confusion, il lui fallut avaler doucement sa salive pour se remettre de ses émotions, avant d'envisager de se retourner pour chercher du regard la silhouette de l'intrus venu perturber son exploration.
Perché sur ses ruines, les sens aux aguets, il tournait et retournait sa tête dans plusieurs directions, balayant les environs du regard à la recherche d'un individu.

Restant malgré tout sur ses gardes, ignorant l'identité de son visiteur, il entreprit de descendre prudemment de son tas de pierre, prenant le temps de caler ses appuis pour s'éviter la chute inopinée en chemin.
Dévalant la structure, les yeux vigilants et les épaules contractées, prêt à se battre si la situation l'exigeait, il atteignit la terre ferme en quelques dizaine de secondes, reposant ses deux pieds sur le sol stable.

Puis, tournant une fois sur lui même pour examiner ses alentours, il interrompit son mouvement en repérant, enfin, une silhouette.
Timide et inconnue, légèrement dissimulée derrière le large tronc d'un sapin, et semblant vouloir rester discrète.
Mais sa cachette n'empêchait pas totalement Katsuki de la détailler partiellement, apercevant des courbes jeunes et masculines, grimpées sur deux jambes longilignes.
Sur ce corps sorti de nul part, des vêtements vraisemblablement cousus à la main camouflaient la cambrure de son dos, les lignes de ses bras, celles de ses hanches également.
Néanmoins, son pantalon s'arrêtait en dessous de ses genoux, dévoilant des mollets visiblement sculptés pour la marche.

Aussi, au dessus de ses épaules, l'ombre d'un visage se devinait malgré l'imposante présence d'un tronc juste devant, et Katsuki s'autorisa un pas en avant, bombant son torse en relevant le menton, faisant jaillir sa forte voix hors de sa gorge.

_ Vous êtes qui ?

Au milieu du silence des sapins, transperçant le vent frêle et les discrets piaillements d'oiseaux, sa question résonnait entre les épines, soulignant l'environnement calme et presque vide.
Cependant, aucune réponse orale ne lui parvint et, accusant l'impatience et la curiosité qui agitait sa poitrine d'une forme d'euphorie vaguement inquiète, il fronça brusquement les sourcils, avant de se décider à s'avancer encore davantage.

Faisant un pas vers l'inconnu du tronc, la bouche entrouverte et les pupilles intriguées, il évitait soucieusement de faire craquer les branches mortes sous ses bottes, comme si le moindre bruit risquait de faire fuir la silhouette cachée derrière le sapin.
Ou bien de la mettre en colère.

_ Je vous ai posé une question !

S'approchant comme un prédateur de sa proie, étirant son cou pour mieux le voir se profiler dans son champs de vision, il s'arrêta net quand le visiteur des bois consenti à se dévoiler davantage.
S'extirpant de sa petite cachette en se décalant de deux pas sur sa droite, la simple silhouette se transforma en une véritable personne, sous les rayons fins de la lumière à travers les branches au dessus de leurs têtes.

Le visage inexpressif, les lèvres bien fermées et le regard droit, l'inconnu osa planter ses yeux dans ceux de Katsuki, demeurant muet malgré tout.

Près de son front, une épaisse chevelure brune et grossièrement entretenue encadrait les lignes de son crâne et, sous la lumière claire du ciel, les pointes de ses mèches semblaient refléter le vert des sapins.
Au centre de ses paupières, ses iris brillaient d'une teinte impérial et d'éclats de jade, s'accordant presque trop bien avec le décor, comme s'il en faisait partie intégrante.
Un être né de la forêt.

Mais surtout, tapissant ses joues d'étranges tâches claires et foncées à la fois, des constellations anormales couvraient sa peau, et Katsuki ne put qu'émettre un léger mouvement de recul en les apercevant.

_ Il est arrivé quoi à votre visage ?

Parce qu'il n'avait absolument jamais rien vu de tel.
Non pas que ça le rendait laid, à vrai dire, cela s'apparentait plus à une sorte de décoration, inhabituelle certes, mais pas effrayante.
Il n'empêche qu'il ne savait pas identifier ces marques sur ses joues.

Devant lui, l'inconnu fronça les sourcils, marquant enfin une expression sur ses traits jusqu'alors impassibles, avant de porter ses deux mains sur ses joues, palpant sa peau comme s'il cherchait une blessure quelque part.

_ Mon visage ? Qu'y a t-il avec mon visage ?

Demeurant légèrement sur ses gardes malgré la voix claire et douce de son interlocuteur, qui ne semblait dangereux d'aucune manière du reste, Katsuki hésita un court instant avant d'oser un nouveau pas en avant.
S'approchant de trois ou quatre mètres supplémentaires pour mieux observer les fameuses constellations de sa peau, il pointa du doigts ses propres joues, tentant de se faire comprendre.

_ Là, les taches. C'est quoi ça ?

_ Les taches ? Vous parlez de mes taches de rousseur ? Je suis né avec.

Naitre avec un visage marqué de la sorte, il semblait à Katsuki n'avoir jamais entendu une telle chose et, arquant un sourcil incrédule, il dévisagea son inconnu, une pointe de condescendance dans la voix.

_ Vous êtes sûr de ça ?

Soudain, un rire absolument cristallin vint se répandre à travers les branches et les épines, jaillissant hors de la gorge de l'inconnu du tronc, et Katsuki resta pantois un long moment, à le regarder se moquer de sa question sans aucune gêne.

_ Bien évidemment que j'en suis sûr.

Puis, marquant une pause, alors que Katsuki se montrait vexé par sa réaction, il finit par ajouter :

_ Et ce dont je suis également certain, c'est que vous ne devez pas vous trouver ici. Rentrez chez vous maintenant.

Sous les sapins, l'inconnu recula doucement de deux pas, amorçant son départ pour inciter Katsuki à en faire de même.
Sous sa démarche gracieuse, les branches mortes du sol grinçaient à peine, supportant son poids avec une facilité presque surnaturelle, comme si elles étaient habituées à sa présence.

Les rayons du soleil à travers les épines de sapin éclairaient intimement la scène, couchant leur lumière le long des arbres, alors que la silhouette de l'inconnu semblait se fondre dans leurs scintillement.

Mais Katsuki, refusant d'obéir aux ordres d'un simple garçon apparu de nul part, étira ses lèvres d'une grimace passablement méprisante.

_ Vous aussi vous êtes là, je ne vois pas le problème.

_ Evidement que j'y suis. C'est ici que je vis. Mais pas vous.

Regardant à nouveau autour de lui, scrutant ce décor désolé et abandonné, Katsuki se permit d'émettre des réserves quant à cette information, convaincu que personne ne pouvait résider au milieu de ces décombres.
Scrutant les lignes déconstruites des maisons brisées sous les immenses sapins, l'incompréhension et le doute vint remplir ses yeux alors qu'il jetait une œillade suspicieuse à l'inconnu du bois.

_ Y'a que des ruines ici. Je peux pas croire que vous y vivez. En plus, y'a personne d'autre.

Soupirant un peu plus loin, affaissant ses épaules en signe de dépit, le garçon aux cheveux reflétant le vert des arbres secoua la tête de droite à gauche, avant de concéder à faire un pas dans sa direction.
S'approchant de Katsuki sans s'aventurer trop près pour autant, il vint croiser ses bras sous sa poitrine en pinçant ses lèvres l'une contre l'autre.

_ Je vis ici, et je n'ai aucunement besoin de m'en justifier auprès de vous.

_ Alors je reste aussi. Je ne vous dois aucun compte non plus.

Désemparé, et accessoirement doucement agacé par son entêtement, l'inconnu souffla une seconde fois, suppliant son intrus du regard.

_ Vous allez nous faire avoir des ennuis à tous les deux si le village apprend que vous êtes venu ici et que nous nous sommes parlé. Je vous assure que c'est aussi pour votre bien que je vous demande de partir.

_ Ils n'ont pas besoin de le savoir que je sache. Je fais bien ce que je veux après tout.

Borné, et peut être un peu également par simple esprit de contradiction, Katsuki refusait catégoriquement de quitter les lieux, d'ailleurs bien trop intrigué par l'existence de cet homme vivant seul au milieu d'un tas de ruine, sous les sapins d'un bois semblant terrifier la population.

Il lui fallait en apprendre plus sur ce garçon, l'interroger, le faire parler, et découvrir les secrets qu'il semblait vouloir cacher derrière ses incitations à décamper.

_ Je ne plaisante pas. Partez.

_ Je ne plaisante pas non plus. Je bougerai pas.

Subitement, une pointe d'amertume dans le regard, l'inconnu soupira lourdement en décroisant ses bras.
Puis, s'éloignant d'un premier pas en arrière, il lança un dernier coup d'œil à Katsuki avant de faire volte face, vraisemblablement décidé à abandonner, le laissant seul ici sans plus de cérémonie.

Mais, alors qu'il le regardait s'éloigner dans les bois sans plus rien dire, Katsuki racla bruyamment sa gorge pour faire résonner sa désapprobation, bien décidé à ne pas le laisser filer si facilement.
Sans aucune forme de gêne, il s'empressa de le suivre, même sans son accord, et s'engagea derrière lui pour marcher dans ses pas.

_ Puis-je savoir pour quelle obscure raison me suivez vous ? Je vous ai pourtant dit de ne pas rester ici.

_ Je vous suis parce que je le décide. Je fais ce que je veux.

_ Dans ce cas, vous êtes prié d'aller faire ce que vous voulez ailleurs.

Naturellement, tenter de chasser Katsuki revenait peu ou prou à parler à un mur, ce dernier ne se laissant certainement pas convaincre pour si peu.
La démarche assurée, il persistait à suivre son inconnu entre les grands troncs d'arbres, déambulant sous les hautes épines vertes pour ne pas le perdre de vue.

Devant lui, le garçon aux cheveux bruns ne se retournait plus vers lui, ignorant sa présence sans pour autant accélérer ses pas.
Peut-être avait-il abandonné l'idée d'essayer de le raisonner en voyant sa persévérance.

En silence, marchant l'un derrière l'autre, n'échangeant plus aucune parole depuis plusieurs minutes, ils s'enfonçaient au cœur de la forêt de sapins, s'éloignant progressivement des veilles ruines intrigantes.
Katsuki se sentait bien trop curieux à l'égard de cet étrange bonhomme vivant seul ici, sans compagnie ni aucune forme de civilisation, pour le laisser filer sans mettre tous les moyens en œuvre pour lui soutirer des informations.

Alors, attendant le bon moment pour repasser à l'assaut, il se contentait pour le moment de le suivre de près, le regardant se déplacer agilement dans ce décor qui semblait n'avoir aucun secret pour lui.
De toute évidence, il connaissait ces lieux comme sa poche, et Katsuki s'étonnait de voir que l'on puisse se repérer et s'orienter si facilement dans un environnement pourtant si répétitif.
Pour lui, les arbres étaient tous les mêmes, et rien ne permettait de distinguer une zone d'une autre.

Mais le garçon, le pas assuré, avançait sans hésitation dans une direction définie et, après plusieurs minutes d'escapade, il s'arrêta enfin près d'un sapin, pourtant semblable à mille autres sapins.
S'agenouillant aux pieds du tronc, palpant la mousse verte qui s'y développait, il hocha doucement la tête avant de cueillir une fleur, poussant juste à côté.

La petite plante, décorée de multiples pétales blancs, s'élevait sur une quinzaine de centimètres tout au plus et, la secouant un peu pour la débarrasser de ses saletés, le garçon l'observa de plus près un petit instant.
Semblant l'analyser pour s'assurer de sa bonne santé, il sourit pour lui même après quelques petites secondes, se redressant ensuite sur ses jambes en gardant la fleur dans sa main.

Attentif et indiscret, détruisant la distance qui les séparait encore, Katsuki vint se poster tout près de lui, la mine inquisitrice.
Puis, arquant un sourcil en détaillant la jolie plante, il se permit d'interroger son cueilleur.

_ C'est quoi ?

Sans vraiment lui répondre, semblant ignorer volontairement sa question, le garçon se contenta de sourire encore pour lui même, jetant un nouveau coup d'oeil à sa trouvaille dans le creux de sa main.

_ Elle est en avance, la floraison n'est pas pour tout de suite normalement. C'est rare d'en trouver aussi tôt dans la saison.

_ Vous m'en voyez ravi. Mais c'est quoi ?

Une pointe de sarcasme dans la voix, plus intrigué par l'intérêt qu'il portait à la fleur que par la fleur elle même, Katsuki n'hésita aucunement à se montrer insistant, pointant les pétales du doigt en répétant sa question une troisième fois.

Soupirant, l'inconnu du tronc roula des yeux avant de ranger son trésor dans le fond de la petite poche de son pantalon artisanal, se préparant déjà à repartir.

_ C'est une fleur. Je vous ai dit de partir.

_ Ca je vois bien que c'est une fleur, je ne suis pas stupide. Et je ne partirai pas. Pourquoi vous cueillez cette fleur ?

_ Si je vous le dit, vous partirez ensuite ?

_ Certainement pas.

Son apparition dans ces bois paraissait bien trop intrigante pour ça.

Mais son entêtement sembla fonctionner, puisque le garçon finit par céder à son caprice, soufflant bruyamment en affaissant ses épaules.
Posant sa main sur sa poche, désignant indirectement la plante qui s'y cachait, il détailla un instant le visage de son poursuivant dans un dernier signe d'hésitation, avant de finalement cracher le morceau.

_ L'achillée constitue un remède efficace contre les maladies respiratoires. Elle est utile pour soigner les blessures également.

_ Vous faites de la médecine ?

_ Entre autre.

Pour Katsuki, qui vivait bien loin de toute forme de travail manuel, bien au chaud dans sa demeure qu'il détestait, voir quelqu'un savoir utiliser la nature pour la transformer à sa guise lui faisait découvrir tout un monde inconnu.
Il ne se plaisait pas dans sa vie d'oisiveté et de luxure, forcé de ne jamais se salir les mains pour l'image de son nom de famille, et cette nouvelle révélation l'encourageait encore plus à s'intéresser à ce garçon.

_ Quoi d'autre alors ?

Près de lui, souriant à son enthousiasme mal dissimulé, le cueilleur écarta ses bras, lui montrant tout ce qui les entourait, un éclat ravi dans le regard.

_ On peut tout faire avec ce qu'on trouve dans cette forêt.

_ Dites m'en plus. Je veux savoir.

Soudain, l'expression de visage du garçon aux yeux de jade se déforma sans transition, transmettant un désarroi complet, et son regard se fit tout à coup plus fuyant.
Se refermant brusquement sur lui même en amorçant un pas en arrière, il secoua la tête de droite à gauche, prêt à s'enfuir d'une seconde à l'autre.

_ Non. Vous ne devez pas rester ici. Rentrez chez vous.

_ Vous êtes borné, j'ai dit que je ne partirai pas. Je vais continuer de vous suivre avec ou sans votre accord.

Et il fallait plutôt le prendre au sérieux, Katsuki n'abandonnant jamais une idée qu'il avait en tête, quelque soit le chantage qu'on pouvait lui faire pour l'en dissuader.
Qui plus est, ce garçon et ses étranges pratiques l'intéressaient bien trop pour qu'il fasse demi tour maintenant.

La matinée touchait seulement à sa fin, en témoignait le soleil tout en haut du ciel, crachant ses rayons au sommet des cimes des hauts sapins, mais la journée réservait encore de longues heures devant elle, et Katsuki comptait bien profiter de tout ce temps pour en apprendre plus.

_ C'est vous qui êtes borné. - s'agaça doucement l'inconnu -D'ailleurs, qui êtes vous donc pour trainer seul ici ? Personne ne s'approche habituellement.

Pour une fois, Katsuki se sentait fier d'exhiber son nom de famille, croyant naïvement que son statut finirait de convaincre son interlocuteur en l'intimidant.
Même au fond des bois, il supposait que son rang avait de l'influence.

_ Katsuki. Katsuki Bakugo.

Pourtant, l'annonce eut l'effet tout à fait inverse, et l'inconnu de la forêt émit un soudain mouvement de recul, se braquant encore davantage sur lui même.
Ses yeux se remplissant de méfiance, il s'éloigna maladroitement de lui, faisant craquer sous ses pieds quelques branches couchées au sol.

_ Partez d'ici maintenant. Je ne veux pas vous parler.

Puis, sans prévenir, il fit volte face pour s'échapper rapidement, le pas pressé et nerveux.
Sans plus se retourner, fuyant littéralement, il s'enfonça encore plus dans cette nature sauvage, les yeux vers le sol et les épaules tendues.

Mais, si la surprise le figea sur place un court instant, le temps de cligner trois fois des cils, Katsuki ne se laissa pas complètement distancer pour autant, s'élançant une nouvelle fois à sa poursuite jusqu'à rattraper sa hauteur.
Marchant juste derrière lui, ses bottes de cavalerie foulant ses empreintes, il haussa la voix, contrarié et agacé de courir.

_ Quel est le problème avec moi ? Je ne vous ait rien fait de mal que je sache.

S'arrêtant brutalement sans avertissement, le garçon aux cheveux sombres l'obligea à stopper également sa course d'un geste du bras, avant de se retourner pour lui faire face.
Plantant son regard aussi profond que vert dans le sien, il pinça ses lèvres en fronçant les sourcils avant de soupirer lourdement.

_ Je ne tiens pas à avoir des ennuis si notre rencontre s'ébruite. Votre famille a de l'influence, et je préfère rester discret.

_ Mais je ne le dirai à personne. De toute façon, je me moque bien de mes parents.

Une vague d'incertitude flottait sur le visage de l'inconnu, le doute l'assaillant vraisemblablement mais, insidieusement, un sourire sarcastique vint briser l'harmonie de sa mâchoire.

_ Êtes vous bien certain d'être un héritier Bakugo ?

_ Pourquoi cette question stupide ? Evidemment que j'en suis certain.

Haussant une épaule insolente, le garçon le dévisagea de haut en bas, avisant sa silhouette toute entière avant de remettre ses yeux dans les siens.

_ Votre tenue est bien vulgaire pour un héritier. Et votre langage est grossier.

_ Si vous voulez, mais votre jugement m'est bien égal ! Et vous, qui êtes vous pour vous permettre de telles critiques ?

_ Je m'appelle Izuku.

Puis, l'impertinence au visage, celui dont il connaissait désormais le nom s'empressa de faire volte face, reprenant son chemin comme si de rien n'était.
Avançant, sûr de lui, entre les immenses troncs des sapins gigantesques, il semblait constamment chercher à semer Katsuki derrière lui, sans jamais y parvenir ceci dit.

_ Izuku ? Et c'est tout ? Pas de nom de famille ?

_ Vous n'avez pas besoin de le connaitre, et c'est bien mieux ainsi d'ailleurs.

_ Admettons. Et donc, Izuku. Qu'est-ce que tu fais ici, à vivre tout seul au milieu des bois. C'est tout de même bizarre.

Sans s'arrêter de marcher, slalomant dans la végétation, ledit Izuku haussa la voix en passant entre deux amas de ronces, poussant délicatement les branches pour s'éviter les épines.

_ Ah ? Nous avons décidé de nous tutoyer ?

_ Je l'ai décidé, c'est déjà suffisant.

_ Mais c'est qu'il est modeste en plus.

Déambulant dans le bois, suivant un trajet visiblement bien connu d'Izuku mais totalement étranger à Katsuki, ce dernier se trouvait alors bien incapable de retrouver son chemin jusqu'au village.
A force de lui courir après sans prendre le temps d'observer son environnement, il réalisait à quel point cette forêt s'étendait, et à quel son sens de l'orientation lui faisait défaut, également.

_ Ca ne répond pas à ma question. Tu es seul ici ? Y'a même pas de maisons qui tienne encore debout.

_ Bien sûr que si, il y en a une.

_ La quelle ?

Enfin, s'arrêtant de nouveau, se tournant de trois quart pour lancer un regard audacieux à la sangsue qui le suivait partout depuis un long moment, Izuku tendit son bras vers sa gauche, pointant une zone non loin de là au bout de ses doigts.

_ La mienne.

Inclinant la tête pour suivre la direction que sa main indiquait, Katsuki s'étonna de trouver, effectivement, une maison.
Parfaitement debout, dans un état tout à fait correct, bien que minuscule, et surplombée d'une charpente bien en place.

Ici, un petit logement en pierres bien serrées les unes aux autres, agrémenté d'une unique fenêtre sur sa façade visible, trônait seul entre les arbres, bien éloignée des ruines que Katsuki venait de découvrir quelques instants plus tôt.
L'endroit paraissait toutefois légèrement lugubre, ainsi isolé, mais Izuku observait son petit domicile avec un sourire si fier à son visage, que Katsuki ne put que l'admirer lui aussi.

_ Mais .. Tu es vraiment tout seul ici ?

_ C'est moi qui l'aie construite, quand l'ancienne ne tenait vraiment plus debout. J'ai préféré m'éloigner des vieilles ruines. C'était fatigant de trainer la pierre jusqu'ici, mais je suis content. C'est plus joli ici.

Décidemment, Izuku ne lui rendait pas la tâche aisée, le forçant à répéter ses questions avant d'obtenir des bribes de réponses au compte gouttes.

_ Ca t'ennuierait de répondre à mes questions ?!

_ Quelles questions ?

Ce garçon le décontenançait dans sa manière de contourner la conversation l'air de rien, avec son sourire pendu à ses lèvres et son expression innocente comme s'il ne voyait véritablement pas de quoi il parlait.
Mais Katsuki ne comptait certainement pas le laisser se défiler ainsi et, sentant un début d'exaspération lui monter à la tête, il s'avança de deux pas furieux.

_ Tu le fais exprès ! Je te demande si tu vis seul ici ?!

_ Ah ? Non je ne fais pas exprès.

Puis, sans rien ajouter de plus, évitant une nouvelle fois la question, Izuku lui offrit un sourire tout à fait provocateur avant de se diriger vers l'entrée de sa maison.
Poussant la petite porte en bois sans serrure, un léger grincement significatif des gonds qui ont fait leur temps transperça le silence nouvellement installé.
Puis, dans l'entrebâillement, un décor simple se dessina timidement.

Au centre d'une petite pièce, que Katsuki interpréta comme une sorte de salon, une table presque trop grande pour la maison occupait une grande partie de la place, recouverte de tout un tas de bazar plus ou moins organisé.
Des pots en verre alignés les uns aux autres, remplis à différents niveaux de liquides ou de poudres aux couleurs variées, et de fleurs séchées en tous genres.

Deux carnets de notes posés là montraient des pages abîmées par le temps et une manipulation régulière, froissés et tâchés de s'en être trop servi, et des ustensiles en bois s'éparpillaient un peu partout entre les autres éléments.
Sous la table, des sacs en tissu vraisemblablement assemblés à la main dégageaient une forte odeur florale, visiblement remplis de plante de toutes les sortes et, s'approchant de la porte pour observer discrètement, Katsuki fronça les sourcils en détaillant l'ensemble.

Le sol, outre les quelques pots vides qui le jonchaient ici et là, paraissait relativement propre pour une maison perdue au milieu d'une forêt de sapins.
Contre un mur, une petite cuisinière à bois se dressait, juste à côté d'une jarre en argile, peut-être contenait-elle une réserve d'eau.
Une unique chaise plaquée contre un mur, juste en dessous d'une seconde fenêtre que Katsuki n'avait pas repérée depuis l'extérieur, et un vieux fauteuil datant du siècle passé complétaient la pièce sans décoration superficielle.

_ Entre, maintenant que tu es là. Tu ne vas pas faire le timide alors que tu me suis partout depuis une heure.

S'avançant alors sans gêne, entrant dans la maison sur les talons d'Izuku, Katsuki se permit d'explorer davantage l'environnement nouveau, discernant une petite porte, fermée, dans le mur à sa gauche.
Y devinant une chambre, ou au mieux une pièce pour se reposer, il garda sa curiosité dans sa bouche, se contenant de s'approcher de la grande table pour regarder de plus près les contenants de verre.

_ Qu'est-ce que c'est tout ce bazar ?

Izuku, déposant précautionneusement sa fleur précédemment cueillie à côté d'une cuillère en bois, lui offrit un sourire discret, plantant son regard au fond du sien comme s'il cherchait à lire dans ses intentions à travers ses yeux.

_ Il y a différentes choses.

_ Comme quoi ?

Un rire délicat et mesuré franchit les lèvres, somme toute pulpeuses soit dit en passant, d'Izuku, avant qu'il ne s'éclaircisse la voix, touchant des pots du bout des doigts.

_ Ceux là contiennent des remèdes utiles pour le corps. Comme l'ortie ou la mélisse. D'autres soignent les plaies, comme l'achillée que j'ai ramassé. Et certaines plantes soulagent l'esprit quand il est trop fatigué. Le millepertuis par exemple.

Concentré, suivant du regard la main d'Izuku présentant différents contenant en récitant ses connaissances, Katsuki se sentit rapidement absorbé par son récit.
De son rang d'héritier, on lui avait appris à tenir le dos droit, à marcher comme un homme, à manier les mots avec élégance, quand bien même il ne le faisait pas, ou encore à diriger une troupe de domestiques.
Mais jamais à dompter les plantes.

Il ne savait pas reconnaitre les bien faits d'une fleur, ni la nommer, encore moins la transformer en remède quelconque, et cet horizon nouveau qui s'ouvrait à son esprit désireux de découverte captait toute son attention.
Alors, intéressé, il pointa du doigt un autre pot au contenu inconnu, la voix intriguée.

_ Et lui ?

_ Tu es bien curieux. C'est impoli de la part d'un héritier. D'ailleurs ...

S'éloignant de la table en lui adressant un regard doucement indiscret, Izuku le dévisagea longuement, détaillant sa carrure entière avant de reprendre.

_ Que fait un héritier Bakugo dans la forêt ? N'ont-ils pas des choses plus nobles à faire ? Comme se regarder dans un miroir ou entretenir leur manucure impeccable ?

Sa remarque, aussi vexante fût elle, ne fit pourtant qu'encourager Katsuki à lui offrir son sourire le plus désinvolte, étirant ses lèvres jusqu'à montrer toutes ses dents, gonflant aussi sa poitrine en levant le menton.

_ Envieux ?

_ Ah ?! Pas le moins du monde.

_ Tant mieux. - commença-t-il avant de s'écarter de quelques pas, visitant sans pudeur le reste de la pièce dans ses moindres détails. - Je déteste aussi cette vie là. Elle n'a rien d'intéressant à offrir.

Et c'était vrai.
Les longs couloirs luxueux de son immense demeure ne l'impressionnaient pas, pas plus que les draps de soie de son lit, ni même les immenses tableaux peints de ses ancêtres décorant des murs entiers comme des trophées de victoire.
La nourriture, aussi délicieuse soit-elle, remplissait certes son ventre, mais certainement pas son cœur, préparée par des domestiques dont ils ne retenait même pas les noms.

Katsuki aimait participer à la préparation des repas.
Enfant, ses parents le laissaient faire, et il s'amusait dans les cuisines, entourés du personnel de maison qui prenait plaisir à lui enseigner l'art gustatif.
Mais en grandissant, il perdit ce droit.
Sa noblesse ne lui permettait pas de s'abaisser à de tels travaux, c'est en tout cas ce qu'on lui disait.

Il s'ennuyait, et les seuls instants qui trouvaient grâce à son âme restaient les escapades à cheval, quand il s'évadait pour quelques heures au-delà de son domaine résidentiel.
Le monde semblait avoir tant de choses à offrir et, bien que l'on pourrait croire que son statut lui donnait accès à tout, il n'en était rien.
Katsuki voulait explorer des horizons nouveaux, quitte à salir ses mains et travailler de ses bras.

Alors, cette fatalité mélancolique serrant sa poitrine d'un désir refoulé d'aventure, il s'arrêta devant la petite fenêtre opposée à la porte d'entrée, promenant son regard sur les sapins dominant l'espace comme on règne sur un monde.

_ Mes parents préparent mon mariage à l'heure qu'il est.

_ Et tu n'y es pas ?

_ Bien sûr que non !

Se retournant subitement pour faire face à l'habitant de ces lieux, le visage soudain couvert de haine et de rancœur, Katsuki sentait la rage bouillonner tout au fond de son ventre, s'élevant comme un geyser prêt à tout détruire sur son passage.
Ce mariage lui donnait la nausée, à la simple évocation de celui ci, l'urticaire lui démangeait la peau.

_ J'en veux pas de ce foutu mariage ! Il n'est signé que pour pérenniser notre nom, conclure un accord d'intérêt entre famille qui se valent. Je la connais même pas, cette femme qu'il veulent me faire épouser.

Face à sa soudaine colère haussant sa voix et durcissant ses traits, Izuku se montrait incroyablement calme, l'écoutant cracher ses rancœurs avec un regard discret.
Sans s'offusquer de le voir s'énerver de la sorte, il hocha la tête sans brusquerie, avant de parler doucement.

_ Peut-être devrais-tu la rencontrer quand même. Il se pourrait que vous vous entendiez bien, voire qu'elle te plaise.

_ Non. Vraiment.

Et il s'agissait là d'une absolue certitude.
Des femmes, Katsuki en avait vu par centaines, alors qu'elles se présentaient à sa porte dans l'espoir de se faire passer la bague au doigt, et jamais une seule d'entre elles n'avait suscité son intérêt.
Pour cause, leurs corps ne lui inspiraient rien, pas plus que les traits féminins de leurs visages maquillés.

Lors de certains repas mondains, il lui arrivait d'entendre les hommes parler des courbes de leurs maitresses, vantant les plaisirs d'une poitrine ferme et ronde après de longues semaines à supporter leurs officielles épouses.
Mais Katsuki se demandait à chaque fois ce qui pouvait bien déclencher chez eux un tel intérêt, là où il trouvait bien plus de charme sur un torse plat, et le tracé délicat d'une paire de hanches masculines.

Il va de soi qu'il n'en disait rien à personne.
Enfant, un peu avant ses dix ans, il se souvenait avoir assisté à une exécution, sur la place publique, d'un homme accusé d'entretenir des relations charnelles avec un autre homme.
Pour ce crime, que Katsuki ne considérait bien évidemment pas comme tel, le pauvre bonhomme s'était vu monter sur le bucher.
Les religieux du village affirmant que ce supplice purifierait son âme salie.

Alors, Katsuki savait qu'il lui fallait taire ses attirances personnelles, conscient qu'un trop grand nombre de personne restait incapable de comprendre ce sentiment pourtant si pure.

Lentement, sur ses dernières paroles, un silence s'installa.
Lourd, oppressant, et vibrant d'une atmosphère fort pénible.

Soupirant finalement le premier, se retournant à nouveau pour fixer le paysage à travers la petite fenêtre au verre abimé par les années, Katsuki cligna trois fois des yeux avant de porter son attention sur le tronc abimé d'un très vieux sapin.

_ Eh, Izuku. Apprend moi à utiliser les plantes.

_ Non.

Pivotant vivement sur lui même, il fit presque siffler l'air dans son mouvement brut et soudain.
Le regard mauvais, sourcils froncés et mâchoire crispée, la frustration qui lui bouclait le ventre le rendait susceptible.
Le ton acariâtre, il se laissa emporter par son insatisfaction, haussant la voix sur Izuku en secouant la tête de désaccord.

_ Pourquoi ?!

Lentement, sans faire de vague, ni se faire intimider par la soudaine contrariété de son invité, Izuku soupira en baissant les yeux, croisant ses bras sous sa poitrine, avant d'avaler sa salive.
Cherchant ses mots, semblant vouloir inspirer le calme à Katsuki pour se faire comprendre, il s'approcha d'un pas discret, presque invisible, pour parler le plus doucement possible, à la limite du chuchotement.

_ Tu n'as pas conscience des risques que tu nous impliques en demandant une chose pareille. Ta famille va forcément s'interroger, si tu viens ici souvent.

_ Eh bien alors explique moi ! Pourquoi ne faut-il pas que je sois vu ici ?

Il y avait une forme de mystère à travers ce garçon, dans sa manière de toujours rester vague et imprécis dans ses réponses, ou justement parfois dans les réponses qu'il ne donnait pas.
Il vivait ici, tout seul entre quatre sapins, au cœur d'une forêt craint par tous les habitants de la ville, dans une maison construite de ses propres mains à partir des ruines d'une ancienne zone d'habitation, et Katsuki semblait ne pas parvenir à obtenir d'explications de sa part.

_ Tu es là depuis un moment maintenant. Tu devrais rentrer avant que ta famille ne se lance à ta recherche. S'il te plait ne reviens plus.

Tout paraissait étrange chez lui, ses conditions de vies, les tâches inédites de son visage, le calme olympien du ton de sa voix face à la colère de Katsuki, les éclats d'absinthe du fond de ses iris, et son talent irrévocable à posséder la nature.
L'environnement entier semblait lui appartenir, comme s'il faisait partie d'un tout dans ce coin de monde sauvage, et Katsuki se fit une mission de percer les secrets de l'existence de cet homme.

_ Pourquoi est-ce que tu t'obstines à ne jamais répondre à mes questions ?!

_ Pourquoi est-ce que tu t'obstines à rester ici ? Il n'y a rien d'intéressant à y voir.

_ Parce que je l'ai décidé, et c'est tout. Tu ne peux pas m'empêcher de rester, ni de revenir si j'en ai envie de toute manière. Je fais encore ce que je veux.

Ainsi, la colère au bout des ongles, jetant sur l'habitant des bois un regard hargneux et déterminé, sa frustration le guida jusqu'à la porte d'entrée de la maison.
A l'image d'un enfant contrarié, rejoignant l'extérieur d'un pas puérilement vif, il cogna symboliquement du pied dans une herbe haute, se tournant une ultime fois vers l'occupant des lieux.

_ Et je reviendrai !

A cet instant là, il ne savait pas encore vers quoi le menaient ses décisions.

Peut-être, au final, aurait-il aimé être prévenu de ce qui se préparait.

Mais ce soir là, après la fraiche rencontre avec ce garçon, il ne ressentait rien d'autre qu'une immense frustration, une touche de confusion aussi, et beaucoup de questionnements sans réponse noyaient son esprit.
Sur le chemin du retour, alors qu'il n'avait pas pris soin de repérer le trajet emprunté pour rejoindre cette habitation au milieu de nul part, il lui fallut se perdre trois ou quatre fois entre les sapins tous identiques les uns aux autres, s'agaçant régulièrement sur son sens de l'orientation peu formé.

Le soleil brillait encore à l'horizon quand il atteignit la sortie des bois, mais il fallait reconnaitre que la journée touchait malgré tout à sa fin.
Sans avoir pris le moindre repas, ressurgissant de nul part après sa disparition, Katsuki s'attendait parfaitement à se faire réprimander par ses parents au moment de remettre les pieds dans leur demeure.
Du reste, il n'y réchappa d'aucune manière.

En plus de s'être volatilisé à l'aube sans prévenir personne de sa destination, il leur avait fait l'affront de se défiler pour échapper à la rencontre avec sa future épouse inconnue.
Son attitude, naturellement, n'était pas restée sans conséquence lors de ce rendez vous, et le père de la prestigieuse famille Yaoyorozu n'avait pas manqué de faire des réflexions à ses parents à son sujet.
Rattraper la situation leur avait demandé un effort de diplomatie considérable et, ce soir là, Katsuki paya les frais de leur contrariété.

Le sermon s'étendit sur de longues, très longues, dizaines de minutes, alors qu'il demeurait silencieux, debout près de l'immense table de la salle à manger, à subir les vociférations de sa mère sans lui rétorquer quoi que ce soit.
Se contentant de se laisser se faire insulter sans se défendre, encaissant la violence de ses mots sans rien dire, il gardait la tête baissée, fuyant le regard de ses deux parents en espérant que tout ça se termine vite.

Le ventre affamé de sa journée sans le moindre repas, les jambes fatiguées d'avoir parcouru les bois pendant des heures, et l'esprit préoccupé par ce garçon qui vivait là bas, il ne rêvait plus que d'un bain, puis de son lit.
Tant pis pour le diner.

Alors, laissant patiemment passer l'orage, il n'essaya même pas de défendre sa position, encore moins ses convictions.
Clamer qu'il refusait ce mariage ne lui servait à rien de toute manière.
Personne ne l'aurait annulé pour ses beaux yeux.
Les intérêts financiers et diplomatiques qu'il représentait pour sa famille passaient bien avant son avis.

Mais cette longue séance de morale ne l'aura pas découragé pour autant et, après une simple bonne nuit de sommeil, un petit déjeuner trois fois plus copieux qu'à l'habitude pour compenser sa journée sans repas de la veille, il ne perdit pas une seconde de plus pour s'éclipser à la première occasion le lendemain matin.
Veillant à ne pas attirer l'attention de ses parents sur lui, soudoyant un domestique témoin de son départ pour lui faire garder le silence, il rejoignit à nouveau la grande forêt de sapin.

Ce matin là.
Et puis les suivants aussi.

C'est vrai, au départ, Izuku ne lui laissait rien passer, le regardant de travers à chaque fois qu'il se présentait aux abords des ruines, ou à la porte de la petite maison quand le trajet pour y parvenir lui devint naturel.

Il ne le chassait plus, mais il ne lui adressait pas la parole pour autant, se contentant de le laisser le suivre de loin dans le silence, passablement remonté de le voir désobéir à ses mises en garde.
Mais Katsuki ne le lâchait pas d'une semelle, observant ses cueillettes, détaillant sa manière délicate de déraciner les plantes sans les abimer, ou son étrange façon de tâter la terre par endroit pour une raison qu'il ignorait.

Izuku se révélait être un homme doté d'une immense douceur à l'égard de son environnement, respectant l'ordre du vivant jusqu'au moindre champignon entre deux brins de chardons.
Il arpentait les allées improvisées au milieu des interminables sapins, listant tout ce qu'il voyait, prenant même parfois soin des écorces agressées par les parasites.
Il portait sa délicatesse en lui, sur lui aussi, elle se lisait sur les traits de son visage quand, au hasard d'un rayon de soleil sauvage, les reflets de jade de ses iris s'illuminaient à la lumière.

Ses yeux scintillaient, littéralement.

Ses mains adroites ne pouvaient en aucun cas faire du mal à qui ou quoi que ce soit, elle ne savaient donner que des caresses et des attentions bienveillantes.
Comme une évidence, sa sensibilité transcendait les lignes de son visage, se peignant sur les taches de rousseur de ses joues, sur le sourire attendri de ses lèvres aussi, quand il croisait une colonie de petites fleurs bleues entre deux sapins.

Ces fleurs, aussi nombreuses soient-elle par endroit, semblant s'étendre comme des invasions, Izuku ne les ramassait jamais, se contentant de les regarder, les admirer même sûrement.
Et Katsuki, osant parfois s'approcher de lui de temps à autres, finit par lui poser la question, une après midi, après plus de dix jours à marcher sur ses talons sans jamais s'adresser la parole.

_ C'est quoi ?

A l'habitude quand il se tenait trop près de lui, Izuku lui lança un regard en biais, une moue contrariée couchée sur le visage, avant de soupirer en fermant les yeux.

_ Tu ne me lâcheras jamais, n'est-ce pas ?

_ Je n'en ai pas l'intention tout du moins.

_ Je vois ..

Puis, grattant l'arrière de son crâne comme s'il pesait le pour et le contre avant de répondre à sa question, il finit par faire roules ses yeux, capitulant pour la première fois.

_ Ce sont des myosotis.

_ Pourquoi tu n'en ramasses jamais ? Elles servent à rien ?

Offusqué par sa remarque, Izuku bondit presque sur ses deux pieds, le foudroyant d'un regard médusé, absolument outré même, avant d'hausser la voix comme s'il venait de se faire injurier.

_ Elles ne servent pas à rien ! Aucune plante ne sert à rien !

_ Alors pourquoi tu n'en cueilles jamais ?

A l'image d'un père protecteur, semblant vouloir consoler ces pauvres fleurs après la remarque de Katsuki, Izuku engloba tout le par terre du regard, admirant leur beauté simple.
Du plus profond de lui, il semblait les aimer comme on peut chérir un enfant.

_ Elles symbolisent l'amour et l'éternité. Elles sont efficaces pour traiter la fatigue aussi. Mais ma mère disait toujours qu'elles ont bien trop de choses à dire et d'amour à transmettre pour les arracher à leur terre. Alors je ne les ramasse pas. Je les observe. Elles servent à ça aussi. A être belles. A porter du réconfort.

Après tout, n'était-ce pas là le rôle de l'amour éternel qu'elles transmettaient ?

Détaillant les enchevêtrements de leurs racines, les tas de pétales serrés les uns contre les autres comme une immense famille soudée, Katsuki se demandait comment Izuku pouvait détenir autant de connaissances à leurs sujets.

_ Ta mère ? Où est-elle ?

A l'habitude, Izuku lui offrit un sourire discret, pivotant sur ses talons pour reprendre son chemin en ignorant sa question.

_ Tu sais, il n'y a pas que les myosotis qui sont utiles pour traiter la fatigue. Le Rhodiola le fait très bien aussi.

Derrière lui, Katsuki ne sut pas réagir tout de suite à ce qu'il lui disait, d'abord surpris de l'entendre lui parler de ces plantes dont il ne connaissait rien.
Mais, en tentant de ne pas le perdre de vue, pressant le pas pour rester à proximité de lui, il saisit malgré tout la perche qu'il lui tendait, semblant accepter sans le dire de lui enseigner une partie de ses connaissances.

_ Comment on fait pour la transformer en remède ?

_ Voudrais-tu apprendre ?

Bien sûr qu'il le voulait, il n'attendait même que ça depuis des jours.
A le suivre partout, cherchant à l'apprivoiser comme on s'approche lentement d'un animal sauvage, il ne rêvait que de ça, sortir des ses habitudes détestables de la bourgeoisie, et explorer des horizons nouveaux.

_ Je croyais que tu ne voulais pas me l'apprendre.

_ Si je ne le fais pas, tu continueras de me suivre jusqu'à la fin de tes jours. Alors, autant céder j'imagine.

Soudain, un sourire victorieux vint barrer toute la mâchoire de Katsuki, dévoilant ses trente deux dents blanches alors qu'un sentiment d'accomplissement lui remplissait la poitrine.
Malgré tout l'acharnement dont il avait fallu faire preuve pour y arriver, Izuku acceptait enfin sa présence à ses côtés et, même s'il continuait de contourner habilement ses questions, il n'empêche qu'il concédait à lui inculquer ses connaissances, tout du moins une partie.

Ainsi, fier de sa réussite, il emboita ses pas dans ceux d'Izuku jusqu'à atteindre sa petite maison du fond de la forêt, repassant par cette petite porte aux gonds fatigués, pour retrouver le paysage de cet intérieur modeste, mais finalement accueillant par ses effluves florales.
Sur la large table en bois trainaient encore des tas de bocaux de verre, une poignée d'ustensiles, et quelques carnets de notes, à l'instar de la fois précédente.

Sous le plateau, les sacs remplis de plantes et autres pétales semblaient avoir été déplacés, manipulés sûrement, pour y piocher des matières premières, et Katsuki s'impatientait déjà d'en savoir plus.
Pas que les fleurs l'intéressait particulièrement par nature, mais la manière dont Izuku les dompter pour en faire des choses nouvelles et pleines de vertus l'impressionnait.
Il prenait de simple brindille, insignifiantes aux yeux de tout ignorant, et les transformait en don de la nature.

De mémoire, Katsuki ne connaissait personne d'autre capable d'une telle prouesse.
Du reste, son entourage ne se composait que d'incapables, tout juste bons à porter des vêtements somptueux pour lever un verre d'alcool au nom de l'argent et du pouvoir.
Rien d'intellectuel dans tant de vanité.

Izuku, lui, ne portait que la modestie sur sa peau.

_ Regarde Katsuki.

S'agenouillant près des sacs entassés sous sa table, Izuku fouilla un petit moment dans toutes ses trouvailles, secouant les pétales, faisant circuler leur odeur partout autour de lui, avant de se redresser, les mains remplies de ce que Katsuki ne savait qualifier que d'herbe quelconque.

_ Qu'est-ce que c'est ?

Un sourire légèrement taquin au visage, Izuku secoua la tête de droite à gauche, semblant se retenir de se moquer de son manque cruel de connaissance pourtant simple.
La vie de château, au détriment de tous les privilèges qu'elle pouvait apporter, empêchait finalement surtout de s'instruire au delà des règles de bienséances.

_ C'est juste de la menthe !

_ Et ça sert à quoi ?

_ A soigner les maux de tête, principalement. Mais on peut la consommer aussi, elle fait un excellent thé.

Secouant les feuilles vertes dans ses mains, s'approchant de Katsuki avec un sourire discret au visage, Izuku vint lui présenter la fameuse herbe sous le nez, répandant sa senteur forte et subtile à la fois.

La menthe sentait bon, elle renvoyait des parfums aussi délicats que puissants, qui semblaient posséder le don d'apaiser le cœur par leurs douceurs réconfortante.
A l'aspect pourtant, elle ne valaient pas grande chose, leur couleur toute verte de simplicité n'attirait pas l'oeil sur leurs tiges, la beauté ne faisait pas partie de leurs attributs.

Pourtant, en dépit de ça, elles en avaient, des choses à offrir.

Le remède à la migraine oui, le thé sûrement aussi, mais surtout ce rapprochement nouveau, alors que, de part et d'autres du bouquet, deux presque inconnus s'autorisaient à échanger des mots, des connaissances, des regards également.

_ Je les ai ramassé hier. Maintenant, nous allons les faire sécher, pour pouvoir les conserver et les utiliser quand nous en aurons besoin.

_ Comment ?

_ Je vais te montrer, ça n'a rien de compliqué.

Ce jour là, en guise de toute première leçon, Katsuki apprit à rincer correctement les feuilles de menthe sans les abîmer, utilisant l'eau de la jarre en argile à l'extérieur de la maison.
Frottant la fleur dans ses doigts sans la déformer, suivant les instructions d'Izuku, il s'appliqua en suivant à nouer le bouquet avec un morceau de ficelle, retenant solidement l'ensemble avant d'aller le pendre au dessus de la cuisinière éteinte.
Quelques goutes d'eau résiduelles coulaient encore contre le mur, et Izuku lui expliqua qu'il fallait maintenant faire preuve patience, et les laisser sécher ici pour une quinzaine de jours.

Quand elles seraient prêtes, il ne resterait plus qu'à les émietter dans un bocal et, par la suite, il suffirait d'en récupérer au besoin, pour la faire infuser et pouvoir l'utiliser.

Et puis, au fil des jours, pendant que la menthe séchait progressivement dans la maison, elle se faisait témoin des apprentissages de Katsuki, une matinée après l'autre, une après midi après l'autre.
Dans la maison d'Izuku, il s'entrainait à écraser les racines de raifort, les yeux piqués par son odeur âcre, mais qui, selon son professeur improvisé, possédait des dizaines de bienfaits.

Il s'efforçait aussi de retenir les innombrables listes de choses à savoir, pour ne pas confondre la cigüe et le persil sauvage, ou pour ne pas se laisser tenter par les fleurs aussi belles que toxiques de l'aconit.

Aussi, entre deux leçons, il retrouvait le plaisir d'utiliser une cuisine le midi, quand bien même Izuku n'utilisait que peu d'ingrédients culinaires.
De toute évidence, bien que Katsuki en ignorait toujours la raison, l'accès au village ne lui était pas possible, et vivre de quelques pièges de chasse et de ce qui poussait aux abords de sa maison restaient ses uniques ressources alimentaires.

Mais Katsuki aimait aussi cette atmosphère de simplicité, le calme apaisant de la petite maison dans les bois, le chuchotement discret de quelques souffles de vent derrière les fines fenêtres.
Il prenait beaucoup de plaisir à se tenir près de cette table trop grande pour la pièce qu'elle occupait, partageant un repas entre les bocaux éparpillés, dans de la vaisselle usée par les utilisations répétées.

Et puis, au centre de tout ça, il se perdait aussi dans les reflets de jade du regard de l'occupant des lieux, quand ses iris reflétaient les brins de soleil aux chaudes heures de l'après midi.
Quand la brise du mois d'avril soufflait dans ses mèches aux reflets de sapin, quand son sourire étirait les courbes de sa mâchoire, soulignant les tâches de rousseur de ses joues devant chaque nuée de myosotis.
Sa voix aussi, chantait des mélodies involontaires dans ses échos délicats, encore plus quand il riait.

Oui, parfois, de plus en plus souvent, il riait.
Il lui arrivait de se moquer gentiment des gestes quelque peu maladroits de Katsuki, mais aussi, surtout, il riait d'une simple joie.

Ensemble, il parlaient de la menthe qui séchaient au dessus de la cuisinière, mais aussi de la douceur candide des nuages à travers le ciel, de la mélancolie qui attaque le cœur au début de l'hiver froid, des peurs profondes qui font trembler les hommes quand l'orage frappent les arbres endormis aux heures de la nuit.

Ils échangeaient leurs craintes sournoises, mais leurs sourires aussi, les bonheurs du quotidien, les désillusions parfois.
Katsuki, doucement, se confiait sur les déboires de sa vie de bourgeoisie, ce mariage qu'il haïssait avant même qu'il ne se produise, les colères insurmontables de sa mère et ce monde sur le chemin de la décadence.

Chaque matin, il marchait jusqu'à la petite maison en regrettant de ne pas pouvoir y rester à chaque instant de son existence, et il en repartait chaque soir en rêvant déjà du lendemain.

Régulièrement, il arrivait que ses parents l'interroge sur ses ballades quotidiennes, qui s'étendaient sur les journées entières, et dont personne ne savait rien.
Mais Katsuki, même s'il n'en connaissait pas la raison, savait que le secret d'Izuku se devait de rester le leur, lié à leur unique relation, dépourvu de témoin extérieur.
Alors, mentant chaque soir un peu plus, il justifiait ses escapades d'une manière ou d'une autre, sans se douter que, dans son dos, la curiosité pousserait bientôt ses parents à le démasquer de force.

Il n'ignorait pas non plus que, en dépit de la double vie de douceur et d'apaisement qu'il cultivait de l'autre côté de la frontière de sapins, son union avec l'héritière de la famille Yaoyorozu s'approchait dangereusement de lui, chaque jour un peu plus.
Mais il comptait sur l'apaisement qu'Izuku et sa petite maison des bois lui apportaient pour le lui faire oublier autant que possible.

Parce qu'il trouvait un réel réconfort à travers lui, les sourires de ses jolies lèvres allégeaient le bouillonnement de la haine et des rancœurs à la surface de son cœur.
Le sentiment qui naissait, juste en dessous du bouquet de menthe, nourrissait les émotions douces et passionnées de sa poitrine, dansant jusque dans ses yeux quand il se perdait dans la contemplation des taches de rousseur de son visage.

Entre deux par terres de myosotis, quand leurs pas les guidaient à travers la forêt de sapins pour explorer les plantes à cueillir, la puissance infinie et singulière d'un amour expansif nouait ses racines à travers chaque pore de sa peau, s'emmêlant dans ses os, s'ancrant à sa chair comme autant de déclarations retenues secrètes à l'intérieur de sa bouche.

Cet après midi là, après tout une journée à trier toute sorte de plantes autour de la grande table, alors qu'Izuku terminait tranquillement d'avaler une infusion de mélisse, Katsuki se posta juste devant le bouquet de menthe pendue contre le mur.

Les feuilles, qui se débarrassaient de leur humidité depuis quatorze jours, présentaient maintenant de véritables signes de sécheresse.
Elles avaient perdu leur fraicheur d'antan, mais Katsuki savait qu'elles conservaient toutes leurs vertus et que, très bientôt, ils pourraient les émietter dans le fond d'un bocal.

De là où il se tenait, il ne sentait plus leur odeur réconfortante, mais il suffisait de les toucher du bout des doigts pour récolter un peu de parfum délicat.

_ Katsuki ?

Les yeux demeurant portés sur le bouquet pendu, il se contenta d'hocher silencieusement la tête en guise de réponse, alors que ses pensées se regroupaient toutes entre les feuilles de menthe, et leur couleur semblable aux reflets brillants des iris d'Izuku à la lumière du soleil.
Dans son dos, il percevait les mouvements de ce dernier, se rapprochant de lui pour venir se poster à ses côtés, admirant le même bouquet.

_ Elles seront prêtes demain. Tu as l'air pressé.

Il y avait la délicatesse affectueuse dans sa voix, celle qui trahissait le sourire de ses lèvres même sans les regarder, et qui transmettait la sincérité de cette relation partagée autour d'un bouquet de menthe séchée.
Sur les par terres colorés de myosotis, aussi.

Mais, parce qu'il craignait d'abimer l'instant avec des mots mal choisis, Katsuki ne lui répondit rien, tournant simplement son regard vers lui sans parler.
En trouvant l'éclat enjôleur de ses yeux, un sourire instinctif naquit au coin de ses lèvres.
Puis, parcourant les constellations de ses joues, il échoua ses pupilles sur les contours tracés de sa bouche.
Elle semblait l'appeler, c'est vrai, les reflets encore humides de l'infusion sur sa peau rose brillaient comme des invitations lumineuses.

Face au mur, devant la cuisinière à bois, derrière la porte fermée de la petite maison, le silence absolu couvait cet instant d'égarement tout à fait délicieux.
Entouré de loin par des milliers de sapins protecteurs, le temps et le monde s'effritaient en dessous d'eux, disparaissant comme des données inutiles et superficielles.

Emporté par la vibration aussi douce que folle du fond de sa poitrine, alimentée par le pulsations sereines et envoûtées de son cœur, Katsuki pouvait sentir son corps crépiter du besoin urgent de détruire les centimètres de distance qui les séparait.
Pourtant, il connaissait les risques de ses propres sentiments, il savait.
Il savait vraiment, mais il savait surtout, comme une évidence susurrée au coin de sa gorge, qu'il ne se mettait pas en danger auprès d'Izuku.

Alors, parce que l'envie et l'attraction brûlaient sa langue jusqu'à mettre le feu dans ses veines, il amorça un mouvement aussi discret que lent, tournant légèrement sur ses talons pour mieux lui faire face.
Puis, obéissant seulement aux palpitations sous ses côtes, il laissa simplement sa main venir se perdre près des mèches folles du front d'Izuku, glissant ses doigts dedans pour les effleurer.
Entre ses phalanges, il les sentait douces, pareilles à leur propriétaire.

Posté ainsi devant lui, il ne craignait pas sa réaction en touchant ses cheveux.
Du reste, il ne fût que partiellement surpris, bien que fortement fiévreux, quand Izuku s'approcha de lui le premier, mêlant ses pupilles tout au fond des siennes, jusqu'à ce que leur souffles puissent se mélanger entre leurs deux visages.

Enfin, et parce que le besoin grondait sous leurs diaphragmes, le filet de lumière qui séparait les courbes distinctes de leurs lèvres disparut derrière l'union fusionnelle de ces dernières.

Sa bouche découvrant la sienne comme une nouvelle partie de lui même, un peu comme si elles étaient faites pour tenir ensemble, Katsuki sentait la chaleur et la douceur courir sous sa peau, faire vibrer les organes de l'intérieur de son ventre.
Déclencher à sa poitrine un immense glissement d'émotions.
Un tremblement d'amour, une tempête de passion.

Ses doigts toujours emmêlés dans une mèche sauvage de la courbe de sa tempe, il déposa la paume entière de sa main sur le côté de son crâne, arrimant son visage contre le sien, craignant sans doute de s'échouer à la moindre séparation.
Ses lèvres folles et enivrées déposaient des baisés par dizaines sur la texture pulpeuse de sa bouche, goutant la saveur intime qu'elles portaient sur elles.
Tous ses sens s'emballaient au contact brûlant de sa peau, consumant chaque muscles et chaque os alors qu'Izuku vint enlacer son corps près du sien, refermant ses bras à ses hanches pour le retenir contre lui.

Il semblait presque que, tout à coup, la maison et la forêt n'existaient plus, pas plus que le village un peu plus loin, ou que la bienséance hypocrite d'un verre levé en l'honneur d'un mariage mensonger.
Ne restait alors plus que le bouquet de menthe, le bleu éternel du myosotis, et les pulsations de leur cœurs en harmonie.

Finalement, le souffle envolé, en perdition entre deux baisés sauvages et avides de toujours plus de saveur intime, un mouvement commun les emporta un peu plus près de la grande table, marchant à l'unisson sans séparer leurs bouches parfaitement fusionnées.
Izuku, le coccyx en appui contre le bord du plateau en bois, basculait légèrement son dos vers l'arrière sous les pression des lèvres de son amant, l'effervescence du désir faisant trembler leurs mains sur le corps de l'autre.

Sous leurs gestes, quelques bocaux poussés malgré eux tintaient les uns contre les autres, sans pour autant les atteindre réellement, leurs esprits bien trop embrumés par le souffle exaltant de l'instant.
Bien loin de toute forme de préoccupation, Katsuki laissait sa peau frissonner sous la caresses aventurières des mains d'Izuku en dessous de son gilet trop grand et mal taillé.

Ses doigts effleurant la ligne creuse de sa colonne vertébrale secouaient des spasmes d'émoi à son échine, un séisme de sensations incandescentes dans le creux de ses reins.
Son exploration douce remontait les reliefs de ses vertèbres, soulevant le tissu de ses vêtements dans sa remontée et, caressant ses omoplates du plat de ses mains, Izuku étalait la chaleur de sa peau dans la sienne.

Les yeux fermés, Katsuki aventura sa langue à la rencontre de la sienne, cherchant un contact nouveau, maladroit sûrement un peu, mais qui allumait le feu à sa poitrine comme un brasier sans fin.
S'accrochant à lui, les deux mains agrippées au tissu cousu qui recouvrait le haut de son corps, il souleva le vêtement avec la volonté de le faire passer au dessus de sa tête, séparant momentanément leurs lèvres incandescentes pour permettre son passage.

A moitié nu, le torse d'Izuku révélait enfin ses courbes, et Katsuki se perdit une seconde sur la contemplation de ses lignes proprement dessinées, passant un index curieux sur les plages douces de son abdomen.

Ce corps l'attirait à lui, à l'instar de deux éléments d'un même ensemble, ils se complétaient comme deux pièces d'un puzzle, prédécoupées spécialement pour s'assembler.

Et puis ...

Et puis, le fracas.

Soudain, la bruyante secousse d'un gond malmené, le craquement d'une porte qui se fend en frappant le mur adjacent, et les voix tonitruantes d'une colonie d'hommes.
Le cri d'une menace jetée soudainement, et la violence d'une entrée agressive vint interrompre l'union jusqu'alors harmonieuse de l'intérieur de la maison.

Brutalement, dans un sursaut, Izuku repoussa Katsuki, plaquant ses deux mains à plat sur son torse comme si sa peau le brûlait tout à coup.
Leurs yeux soudain remplis d'une terreur sourde, ils regardaient, impuissants, le désastre qui s'étendait juste là.
Tous les deux surpris en plein pêché, dans le creux d'une forêt.

Dans la petite pièce, une dizaine d'hommes tout à coup sortis de nul part piétinaient le sol de la maison, des villageois pour certains, des religieux pour d'autres, hurlant à tout va entre les quatre murs sans qu'aucun mot clair et intelligible de se démarque de la cohue.

Une effervescence nouvelle, vibrante d'un danger imminent, agitait soudain l'espace alors que Katsuki s'approchait à nouveau d'Izuku, refusant finalement de s'écarter de lui.
Sans doute l'espoir naïf et totalement vain de le protéger, lui dont la douceur et la bienveillance n'avaient d'égal que la brutalité humaine.

La folie s'étalait partout autour d'eux, alors plaqués contre la table, espérant sans véritable espoir d'échapper aux prises de l'armée colonisant les lieux.
Même en nouant solidement leurs mains l'une à l'autre, le cœur battant jusqu'à la rupture, le souffle coupé par la peur griffant leurs ventres, ils ne purent que retarder l'échéance d'une poignée de secondes.
Séparés de force, piégés à trois mètres l'un de l'autre dans des paires de bras différentes, personne ne semblait véritablement leur adresser la parole, les hommes conversant entre eux des démarches à suivre presque comme s'ils ne se trouvaient pas là.

Tout allait si vite, trop vite.
Katsuki ne pouvait qu'à peine comprendre la situation qu'il vivait, oubliant de réfléchir, incapable de même se demander qui et comment les avait dénoncés pour en arriver là.
Les bras croisés dans son dos, solidement maintenus par des mains bien plus larges que les siennes, une douleur agressait ses poignets malmenés alors que son geôlier hurlait trop près de ses oreilles.
Les pupilles fuyant dans toutes les directions, il voyait l'agitation renverser les bocaux de la table, salir le sol de la pièce, effriter les feuilles de menthe au dessus de la cuisinière.

Mais, surtout, oui surtout, ses pupilles cherchaient Izuku, alors que deux religieux trainaient ce dernier hors de la maison sans délicatesse, brutalisant son corps sans état d'âme pour le faire avancer plus vite.
Puis, le trainant presque sur la terre alors que ses jambes ne le retenaient plus, ils vinrent nouer une corde autour de son buste nu, bloquant toutes tentatives de mouvements.

La panique enveloppant ses côtes jusqu'à embraser ses poumons, Katsuki cherchait dans sa gorge la force de parler, de hurler, de cracher sa haine et ses peurs profondes.
Pourtant, la pression lourdes des mains qui maintenaient ses bras et de la catastrophe qui pesait sur ses épaules ne lui permit que de souffler un misérable murmure, que seul lui pouvait entendre.

_ Ne le touchez pas.

Une bien maigre défense en somme, alors que le cortège imposé les emmenait sans douceur à travers les bois, retraçant le chemin jusqu'au village sans leur laisser la moindre chance de communiquer entre eux, conservant une distance démesurée entre leurs escortes respectives.

Entre deux sapins, Katsuki eut le temps de suivre du regard une allée de myosotis, juste avant d'atteindre les anciennes ruines des maisons écroulées et, à la frontière de la forêt, une agitation féroce les attendait sur place comme un public affamé d'un macabre spectacle.

Au milieu de la foule, ses parents le regardaient s'approcher, prisonnier des mains de ces hommes et, sentant son cœur frapper ses os, Katsuki resta confus et sans explication en voyant l'inquiétude et l'affection dans leurs yeux.
Au pas de course, sa mère s'empressa de venir le chercher, le récupérant dans ses bras comme un enfant blessé, alors que l'attroupement emportait Izuku dans les allées du village.

_ Mon Dieu, mon fils. Tout va bien se passer, je te le promet.

Non loin d'elle, à deux ou trois pas tout au plus, un homme d'église surveillait la scène, le menton relevé et les bras croisés sous sa poitrine.

_ Faites attention Mitsuki. L'ensorcellement n'est pas encore rompu, nous ne savons pas quels risques nous prenons d'ici là.

C'est seulement à partir de cet instant là que Katsuki réalisa combien la situation lui échappait, alors qu'il ne comprenait rien à la conversation qui se dessinait autour de lui.
Dans les bras de sa mère, qui le contenait presque de force contre elle, il tentait en vain de suivre du regard les pas contraints d'Izuku, le voyant seulement s'éloigner jusqu'à disparaitre, entourés d'hommes tous bien plus forts que lui.

_ Je sais mon père, je sais.

Puis, venant coincer le visage de son fils entre ses deux mains, une larme inquiète au bord des yeux, elle susurra en plaquant son front contre le sien.

_ J'aurai dû me douter qu'il se passait quelque chose de grave. Je suis désolée que ce garçon s'en soit pris à toi de la sorte.

La voix cassée par la peur et brouillée par un sanglot remontant sa gorge, Katsuki planta son regard dans ses yeux, les paupières battantes de confusion et d'effroi quant au sort qu'ils réservaient à Izuku.

_ Je comprends rien à ce que tu dis. Il ne m'a rien fait du tout.

_ Oh, mon chéri .. Je sais que tu ne peux pas comprendre, mais tu retrouveras bientôt la raison ne t'en fais pas. Le sort disparaitra.

Puis, alors qu'un silence pesant et menaçant s'étendait, l'homme d'église s'approcha discrètement d'eux, posant une main rassurante sur l'épaule de Mitsuki.

_ Nous devrions le conduire à la chapelle. Cela me parait plus raisonnable.

Ainsi, perdu et totalement effrayé, Katsuki ne put que suivre sa mère sur les chemins de la ville, leurs pas les conduisant jusqu'à la haute chapelle du centre du village, là où ils s'enfermèrent tous les trois comme des réfugiés de guerre.

Le cœur prêt à s'arrêter d'une seconde à l'autre, la tête martelée d'une angoisse mordante, Katsuki eut besoin de s'y reprendre à trois fois pour faire parler ses mots, la voix engluée de larmes menaçantes.

_ Où est-ce qu'ils l'ont emmené ? Dîtes moi où il est.

Sans même prendre la peine de lui répondre, Mitsuki se contenta d'un simple regard attristé sur sa personne, avant de se tourner brutalement vers l'homme d'église à ses côtés, hurlant tout à coup une colère ouvertement manifestée.

_ Je vous l'avais dit ! J'étais certaine que cela arriverait ! Je savais que vous faisiez erreur !

Spectateur égaré dans une situation qu'il ne comprenait pas, Katsuki regardait ses deux ainés se disputer soudainement, étalant au milieu de leur conversation un passé qu'il ne comprenait pas.

_ Calmez vous Mitsuki. Personne ne pouvait-

_ Bien sûr que nous pouvions ! Je le savais déjà il y a dix ans ! Je vous avait prévenu, déjà à l'époque, que vous preniez une mauvaise décision en épargnant ce gamin sous le prétexte qu'il s'agissait d'un enfant ! Vous savez qui est son père !

La rage de sa mère résonnait entre les parois hautes de la grande chapelle, courant entre les bancs jusqu'à faire vibrer l'autel.
Les échos agressifs de sa voix cognaient surtout aux tympans de Katsuki qui, s'embourbant dans une angoisse envahissante et douloureuse, peinait à trouver encore de l'oxygène à mettre dans ses poumons.

Parce qu'il ne comprenait pas, il ne comprenait rien de ce passé que sa mère étalait devant lui.
Alors, fermant les yeux comme s'il pouvait par ce geste disparaitre de l'église, il planta ses dents dans sa lèvre inférieure, là où trainait encore le gouts de la bouche d'Izuku.
Les cris continuaient de danser autour de lui, sans qu'il ne puisse en interpréter un seul, la panique le rendant sourd à l'agitation environnante, alors que ses côtes semblaient se briser.

Il lui fallait savoir où se trouver Izuku, il lui fallait surtout le protéger, le sortir de là.

Il ne sut pas véritablement combien de temps la dispute dura juste devant lui.
Tout ce dont il souviendra, c'est le fracas soudain de la lourde porte lorsque sa mère disparu de la chapelle, le laissant seul avec cet homme en tenue religieuse.
La tête baissée, les yeux encore fermés, il s'évertuait à conserver une respiration pour ne pas s'effondrer sur lui même, la brûlure de l'asphyxie et de la peur à travers la gorge.

_ Dis moi, sais tu vraiment qui est cet homme que nous venons d'emmener ?

Avalant sa salive, la langue couverte d'acide nauséeux, Katsuki dût plisser son front pour parvenir à lui répondre.

_ Oui.

_ Connais tu son histoire et celle de sa communauté ?

Et, malgré la folle confusion qui noyait ses pensées, il eut soudain une forme de révélation, se rappelant tout à coup de la discrétion d'Izuku à chaque fois qu'il tentait de lui faire parler de ses origines et de sa famille.
Toutes ces questions qu'ils contournaient, refusant de s'exprimer sur les ruines de la forêt, sa solitude entre les sapins, ses mises en garde concernant les risques qu'ils prenaient en se côtoyant.

_ Non ..

_ Je m'en doutais. Je savais bien que tu ne pouvais être conscient de ce que tu faisais. Je comprends ce que tu peux ressentir en cet instant, mais je te le promet, dès que le sort se sera dissipé, tu retrouveras tes moyens. Tu n'as pas à t'en vouloir pour ce qu'il t'a induit à faire.

_ Je comprends rien à ce que vous dîtes.

Lentement, l'invitant à prendre place sur le bout d'un banc vide, l'homme vint ensuite s'installer sur l'assise juste devant la sienne, souriant d'une prétendue bienveillance.

_ Il s'appelle Izuku Midoriya. Il est issu d'une communauté de femmes maudites tu sais, bannie de notre village il y a bien longtemps.

_ Pourquoi ?

_ Pour la sorcellerie dont elles étaient accusées. Ces femmes furent condamnées à vivre loin de nous, en échange de notre grâce pour leur laisser la vie sauve. Mais, alors que leur clan ne comportait aucun homme, l'une d'entre elle portait ce garçon en elle.

Katsuki le découvrait avec autant de stupéfaction que d'inquiétude, alors que l'homme en face de lui s'élançait dans un récit qui ne lui inspirait que plus peur.
Personne ne lui avait jamais parlé de ces femmes vivants dans les bois.
Il ne pouvait pas se souvenir non plus de cette femme qui, ayant eu l'audace de concevoir un enfant hors mariage, d'un père inconnu dont elle refusait de révéler le nom, fût accusée d'être la maitresse du diable.

La vérité de cette histoire semblait plutôt indiquer une relation adultère, entre cette pauvre innocente et, probablement, un homme haut placé de la bourgeoisie qui, ne souhaitant pas ébruiter ses infidélités avec une prétendue sorcière, tenait à ce que son implication ne soit jamais révélée.
Elle payait alors seule les frais de l'absurdité religieuse d'un monde cruel et stupide, accusée d'un prétendu pacte avec une entité imaginée de toute pièce par les hommes eux mêmes.

Il ne pouvait pas savoir non plus qu'elle et sa communauté de bannies étaient à l'origine des maisons en ruine de la forêt de sapins.
Le village improvisé de celle qui s'était présumément laissée aller à pactiser avec le démon pour obtenir un enfant maudit, portant sur son visage les marques constellées de son hypothétique père.

Et puis, il ignorait également les événements qui avaient secoués la ville dix ans plus tôt alors que, dans une tentative de rébellion, la colonie bannie avaient essayé de se faire entendre, envahissant la place centrale du village, pour finalement ne réussir qu'à se faire exécuter les unes après les autres.

Ainsi, elles laissaient un enfant seul au milieu de la forêt, abandonné à un village de fortune qui finirait par s'écrouler, avec pour seule arme, les connaissances inculquées par sa mère.
Un enfant qui, plus tard, se verraient accusé d'avoir emprisonné Katsuki par une quelconque sorcellerie, supposément pour se venger du sort de son clan.
Les bocaux de plantes pour prétendues preuves de magie noire.

_ Il n'est pas .. Vous vous trompez, vous dites n'importe quoi.

_ Je sais que tu ne peux pas comprendre pour le moment, ton esprit reste prisonnier. Mais nous faisons actuellement le nécessaire pour te libérer, je te le promet.

Le ventre lacéré, effrayé par les mots de son interlocuteur, Katsuki se voyait presque régurgiter son repas du midi sur le sol de la chapelle, la nausée acide remontant sa gorge jusqu'à piquer le fond de sa langue.

_ Qu'est-ce que vous allez lui faire ?

_ Le faire monter sur le bucher. C'est le seul moyen de détruire le sort, et de purifier son âme pervertie.

Finalement, son repas ne tenant plus à sa place, Katsuki n'eut presque pas le temps de pencher son corps en avant, renvoyant le contenu de son estomac aux pieds du banc sur lequel il se tenait.
Les larmes au bord des yeux, le sanglot étranglant sa gorge, il sentait chacun de ses muscles se tordre, ses os se fendre aussi, et sa poitrine imploser dans sa cage thoracique.
Un sentiment d'urgence, mais surtout d'impuissance, brutalisait son crâne alors qu'il réalisait combien son obstination à demeurer auprès d'Izuku se trouvait à l'origine de cette immonde fatalité.

La rancœur gonflait sous ses côtes, la rage autant que la haine aussi et, au travers d'un cri tout droit sorti du fond de son cœur, sa voix hurlante d'une douleur incontrôlable fendit presque les vitraux de la structure.
Sa vision se troubla, en même temps que sa respiration lui échappait totalement, et il ne savait plus dire s'il était sur le point de mourir, ou bien s'il était déjà complètement mort.

_ Je vais te conduire à son exécution, lève toi.

D'un geste délicatement hypocrite, son gardien vint presque affectueusement saisir son épaule, l'aidant à se redresser sur ses jambes pour l'accompagner dans l'allée principale de la chapelle.
Passant la porte, alors que Katsuki suivait sa direction sans même regarder son chemin, l'âme déjà décrochée de son corps, leurs pas les conduisaient directement vers la place centrale, là où, il le savait, les hommes montaient sur l'échafaud.

Dans les rues du village, alors que le soleil entamait sa redescente, couvrant le paysage d'ombres oranges sur le déclin, l'écho de ses bottes contre les pavés semblait le conduire à sa propre mise à mort.

Sans doute était-ce un peu le cas.

Sans souffle, les poumons fermés, et sans rien voir devant lui, ses yeux bien trop remplis de larmes et de feu pour ça, il remarqua en premier la foule agglutinée, tous serrés les uns sur les autres, prêt à regarder un homme mourir comme un véritable spectacle.
Dans un monde comme celui ci, la mort elle même se trouvait des airs de divertissement.

Son guide derrière lui, il fendirent la foule pour rejoindre le premier rang, et atteindre le point central de leur regroupement.
Là où, ligoté contre un poteaux en bois, Izuku attendait en silence de se faire dévorer par les flammes rouges de l'ignorance.

Debout aux premières loges, Katsuki trouva quelque part au fond de lui la force de lever les yeux, cherchant le regard de son amour bientôt exécuté, seul face à une foule qui n'attendait que d'assister à son sacrifice.

Dans les reflets de jade d'Izuku, une lueur humide baignait la ligne de ses paupières, alors qu'il semblait chercher à rassurer son amant dans l'attroupement.
Ses pupilles silencieuses chantonnaient des mélodies muettes, et Katsuki cru l'entendre murmurer au creux de son cou.

"Tout ira bien, ne pleure pas."

Pourtant, son cœur ne lui répondait déjà plus, déchiré de l'intérieur, arraché à la structure de sa cage thoracique, alors que la douleur insidieuse de la culpabilité, de la haine et de la rancœur griffait l'intérieur de son ventre comme un animal fou détruisant tout sur son passage.
Sa gorge se remplissait de sanglots hurlants, alors que son visage se noyait sous les larmes qu'il ne sentait même plus arpenter sa peau usée par le sel agressif.

Autour de lui, quelques hommes s'agitaient près du poteau de bois, préparant le futur brasier comme on allume une simple cheminée, ignorant finalement la présence d'une vie humaine entre les premières flammes naissantes et silencieuses.

Lentement, la fumée vint se répandre autour du tas de bois, et les ombres rouges, dansantes et menaçantes, se déployaient pour venir s'agripper aux jambes de leur proie.

Katsuki voyait la mort s'insinuer dans ses iris, le feu attaquer les genoux de son amant qui, le front baissé, étouffait les cris de sa gorge derrière sa mâchoire serrée.
Presque silencieux, finalement élégant et délicat même dans le brasier, Izuku laissait le monde brûler sa vie comme si elle ne valait rien de plus qu'un simple tronçon de bois.

Et Katsuki, témoin forcé de l'immolation de l'homme auprès duquel il se prenait à rêver d'une autre vie, pensa finalement qu'il ne lui resterait rien d'autre après son départ.
Dans cette existence de mensonges et faux semblants, plus rien ne le retenait.

Non, non, il préférait encore courir vers l'amour sacrifié à la cruauté plutôt que de se tenir là.
Il préféra, oui vraiment, s'échapper à la prise de la foule, ignorant les appels alarmés qui tentaient de le retenir, et mettre ses deux pieds dans la braise.

Jetant son propre corps entre deux flammes destructrices, la douleur le fit presque tomber quand la brûlure mordante décolla sa peau de ses talons.
Mais il faisait le choix de se joindre à leurs crépitements, pour une ultime seconde de sentiments sincères.

Oui.

Le feu fit fondre ses jambes, il sentait sa chair fusionner avec ses vêtements mais, pour venir confondre une ultime fois son corps avec celui d'Izuku, il pouvait subir autant de supplices qu'il peut en exister.
Il pouvait oui.

Alors, pendant qu'il s'embrasait, il vint encadrer le corps toujours à moitié nu et retenu attaché d'Izuku dans ses bras, cognant son front contre le sien.
Autour d'eux, le feu asséchait immédiatement les larmes de leurs yeux à peine passaient-elles leurs paupières, et les cris d'effroi du village leur parvenaient comme des échos lointains et sans importance.

_ Pardonne moi ! Je suis désolé ! Je suis désolé !

Izuku, le corps déjà presque détruit de l'intérieur, semblait chercher la force de lui répondre, sans doute aussi de le supplier de sortir de là, pourtant, plus rien ne pouvait encore sortir de sa gorge calcinées par la chaleur environnante.

Et, ici, brûlant dans les flammes qui emportaient leur histoire au delà de la frontière de la vie, un dernier souffle de cœur vint souder leurs bouches asséchées par le feu, scellant l'éternel baiser de l'injustice et de l'ignorance.

Personne ne saura dire combien de temps il fallut pour que les cordes d'Izuku cèdent au feu, ni pour que leurs corps s'écroulent en cendres.
Tout comme personne ne raconta jamais les jours et les mois qui suivirent.

Sans doute n'avaient-ils plus d'importance.

Mais le baiser de l'éternel, lui, restera dans l'histoire.
Il y restera longtemps.

Comme leurs corps, l'année 1708 se volatilisa, tout comme celles qui lui succédèrent, puis le siècle entier, et le suivant.
Pourtant, sortie de nul part un matin que personne ne saurait situer dans le calendrier, une statue de marbre raconte aujourd'hui l'histoire du baiser éternel sur la place centrale de la ville désormais moderne.

Le paysage n'est plus le même, entourant les deux corps sculptés et réunit dans un baiser infini, de hauts bâtiments et d'enseignes lumineuses.
Mais, au pied du monument, frayant la vie dans le béton inerte, poussent encore chaque année des nuées de myosotis.

Quelques fois aussi, entre les pétales, un peu de menthe sauvage.

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.Salem.

Bonjour, bonsoir !

J'ai l'impression d'avoir tout donné sur cet OS.
Je sais qu'il est très long, et que j'avais dis que je le couperai à la base.
Mais je n'ai pas réussi à trouver un bon endroit pour le couper en deux sans péter un passage.

Alors, j'espère que vous n'aurez pas eu trop de mal à le lire malgré tout, qu'il n'est pas trop lourd, et surtout qu'il vous a plu !

Pensez à me donner vos retours, j'y tiens vraiment ❤

Mille bisous 😘

Prenez soin de vous ❤

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