9.8
/!\ Assurez-vous d'avoir lu le message posté juste avant ce chapitre.
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Cela faisait maintenant deux semaines que la nouvelle du tragique départ de Jessie s'était répandue au sein du lycée comme une traînée de poudre, secouant les âmes naïves de ses élèves. En un rien de temps, pourtant, l'indifférence s'était insinuée, comme une ombre fugace, et l'oubli commençait déjà à étendre ses bras autour d'un souvenir douloureux. Avec une étonnante rapidité, le monde passait à autre chose, laissant derrière lui des cœurs meurtris par le silence des mots non prononcés.
Aujourd'hui, une conférence sur la prévention du harcèlement avait été mise en place pour sensibiliser les élèves. L'après-midi du vendredi 9 avril 2025 avait été réservé exclusivement pour cet événement, mais l'excitation des jeunes n'était pas vraiment dirigée vers le sujet de la souffrance. Au contraire, ils se réjouissaient de pouvoir échapper à l'uniformité des cours, savourant ce moment suspendu.
Mi-Rae marchait lentement aux côtés de Young-Jae, son cœur vibrant d'un mélange d'espoir et d'inquiétude. Elle tenta d'attraper sa main, mais il esquiva le geste comme si cette simple étreinte était une chaîne qui le retenait. Son cœur chuta dans son estomac, perdant sa légèreté, enveloppé par une lourdeur soudainement tangible.
"Tu... tu vas bien, Young-Jae ?" murmura-t-elle, sa voix tremblante se heurtant à son indifférence.
"Ouais, pourquoi ?" répondit-il d'un ton distant, sa voix pesante.
Voulait-il vraiment affirmer qu'il allait bien ? Ce masque de désinvolture cachait-il quelque chose, ou se moquait-il d'elle, simplement ? Cela faisait des jours qu'il l'ignorait, délibérément, comme si elle n'était qu'une ombre parmi tant d'autres. En classe, il ne lui avait même pas accordé un regard ; c'était comme s'ils étaient devenus deux étrangers errant dans le même monde, et cette vérité lui faisait mal, une douleur sourde qui s'imposait avec insistance.
"Tu ne me caches rien, n'est-ce pas ?" insista-t-elle, une angoisse glaçante se mêlant à sa voix.
"Non, rien du tout."
"Tu la connaissais, cette fille qui est morte ? Parce que tu agis bizarrement depuis qu'on nous a annoncé son décès. Tu peux me dire... Si jamais il y a eu quelque chose entre vous, c'est normal de..."
"Mais bordel ! Il n'y a jamais rien eu entre elle et moi. Je ne la connaissais même pas." Ses mots, d'abord fulgurants, percutèrent Mi-Rae comme des éclats de verre. Puis, voyant la surprise sur son visage, Young-Jae se radoucit légèrement, comme une mer apaisée après la tempête. "Je... excuse-moi. Allez, la conférence va bientôt commencer et les autres y sont déjà."
Mais le cœur de Mi-Rae, lui, était en mille morceaux. Des larmes, chaudes et salées, commencèrent à perler à ses yeux. C'était la première fois que Young-Jae la voyait ainsi, brisée, et cela le déstabilisa d'une manière qu'il n'aurait jamais imaginée.
"Le 3 avril. La semaine dernière. Tu sais quelle date c'était ?" Sa voix était un murmure à la fois fragile et ferme, un cri silencieux dans son désespoir.
"Quoi ?" fit Young-Jae d'un ton perplexe, le regard perdu.
Le couloir, désormais désert, semblait résonner du poids de son chagrin, chaque silence faisant écho à son cœur lourd.
"C'était mon anniversaire. Mais tu étais tellement occupé à je ne sais quoi que tu as complètement oublié. Tu ne me regardes plus, tu me parles à peine... Et tu crois que c'est comme ça que notre période d'essai va de l'avant ? Je ne suis pas un vêtement que tu peux porter quand ça te chante et oublier la seconde d'après. Est-ce que tu m'aimes au moins ? J'en ai pas l'impression."
Une fois ses mots expulsés, elle se retourna, le souffle coupé, et s'éloigna presque en courant vers la sortie du lycée. Chaque pas qu'elle faisait était lourd de désespoir, une ombre de mélancolie l'enveloppant comme un manteau.
Young-Jae resta là, immobile, le choc de ses paroles résonnant dans sa tête. Son cœur faisait écho aux battements d'une tempête intérieure. Il la regarda s'éloigner, un élan de regret faisant trembler son âme. Que faire quand le silence d'un amour qui se dissipe hurle plus fort que toutes les paroles du monde ? Ses pensées tourbillonnaient, tourmentant son esprit alors qu'il réalisait qu'il avait laissé s'évanouir une belle histoire, un lien précieux, dans une mer d'indifférence.
À mesure qu'il se sentait sombrer dans ce vide qu'il avait creusé, une volonté nouvelle naquit. Peut-être, dans cette douleur partagée et dans cette tempête de larmes, il pourrait retrouver le chemin vers elle. Il inspira profondément, réalisant que les mots qu'il n avait pas su dire pourraient bientôt devenir son salut. Dans le tumulte, la vérité d'un cœur meurtri pourrait encore trouver une place pour aimer, pour panser, pour guérir.
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Les pas de Mi-Rae résonnaient dans le couloir vide alors qu'elle s'éloignait de Young-Jae, le cœur lourd. Chaque battement de son cœur semblait lui rappeler la douleur des mots qu'elle avait lâchés. Elle feignait l'indifférence, mais au fond, elle sentait l'amertume déchirer son être, le poids du malheur s'imposant contre sa poitrine.
Soudain, un souffle chaud dans son dos la fit s'arrêter. "Mi-Rae ! Attends !"
Un frisson d'espoir et d'inquiétude parcourut son échine. Young-Jae, visiblement essoufflé, l'avait rattrapée. Son visage, habituellement serein, était marqué par une profonde anxiété qui l'éloignait de l'éclat habituel qu'elle avait connu.
"Je... Je suis désolé," balbutia-t-il, ses yeux cherchant les siens avec une intensité douloureuse. "Je ne voulais pas que ça se passe comme ça."
Mi-Rae, la tête tournée, s'attarda un instant sur la lueur dans ses yeux. "Tu es désolé ? Pour quoi exactement ?" Sa voix était à la fois redoutable et tremblante. Elle ne voulait pas céder, elle voulait sentir que sa douleur ne passait pas inaperçue.
"Pour mon comportement... Ce n'est pas normal, et je n'aurais jamais dû t'ignorer comme ça. Je t'aime, Mi-Rae, vraiment." Sa voix se brisa, chargée d'émotion, comme si chaque mot prononcé était une promesse faite à elle et à lui-même.
"Alors pourquoi es-tu si distant ? Qu'est-ce qui t'arrive ?" interrogea-t-elle, une lueur de tristesse dans l'intensité de son regard. "Tu me laisses tout le temps dans le flou."
"Je veux passer du temps avec toi," continua Young-Jae, ses yeux pétillants de sincérité. "Je veux que tu saches que je suis là. Ce n'est que... Je me sens perdu parfois. Pardonne-moi mon indifférence." Il s'avança, cherchant à établir une connexion, une tendresse fondamentalement humaine, mais elle l'observait, perplexe.
"Young-Jae... est-ce que tu me caches quelque chose ? Parfois, je sens qu'il y a plus sous ta surface." Ses mots, lourds de prudence, flottèrent dans l'air entre eux.
Il se figea, une vague d'inquiétude assombrissant son regard. "Non, je ne te cache rien." Il était déterminé, mais il y avait une fissure dans sa voix, un écho de mal-être masqué.
Pourtant, au fond de lui, un abîme de secrets s'étendait. Les souvenirs obscurs d'abus, les nuits passées à se battre contre ses démons internes, le visage d'un homme masqué par la douleur qu'il n'avait jamais osé révéler. La thérapie, bien que salvatrice, était une réalité qu'il n'était pas prêt à partager. Et pourtant, chaque mot qu'il disait maintenant était empreint d'une vérité tordue, sa promesse un instant déformée.
Mi-Rae scruta ses prunelles, cherchant la lumière de la vérité, mais elle ne trouva que des reflets d'incertitude. Son cœur s'alourdissait, une pression insurmontable. "Young-Jae, je ne veux que ta vérité. Je suis fatiguée de l'incertitude !" Sa voix tremblait, oscillant entre espoir et désillusion.
Lorsqu'il la regardait, elle pouvait sentir la tension dans l'air, la distance incommensurable entre ce qu'il voulait lui dire et ce qu'il restait silencieux. C'était une lutte, une danse douloureuse entre l'amour et la peur, entre l'honnêteté et la cachette.
Finalement, ce qu'il avait prononcé, profond et sombre, s'inscrivit de manière indélébile dans leur quotidien. "Je te jure que je ne te cache rien," répéta-t-il, mais ce n'était pas uniquement des mots. C'était une promesse détournée, un aveu d'illusions qui s'effrita lentement.
La déception se peignit sur le visage de Mi-Rae, chaque nuance de son expression racontant l'histoire d'un cœur brisé, une déception profonde. "J'aimerais te croire, Young-Jae, vraiment. Mais tant que tu n'es pas honnête avec moi, je ne peux pas..." Elle secoua la tête, une larme glissant le long de sa joue.
La tristesse emplit l'espace entre eux, une mélancolie palpable qui l'enveloppa, et dans un dernier regard plein de regrets, Mi-Rae se détourna, choisissant de s'éloigner. Chaque pas qu'elle faisait était chargé de la certitude qu'elle ne pouvait lier son cœur à quelqu'un qui ne se révélerait pas véritablement.
Elle le laissa là, où l'ombre de leurs promesses flottait, un endroit où l'indécision grandissait comme une plante grimpante, s'enroulant autour de leurs âmes. Young-Jae, seul et immobile, ressentit l'absence de Mi-Rae comme un cri de désespoir, une résonance désagréable qui lui rappelait avec force ses propres démons. Les murs du lycée devenaient un écho de sa solitude, un légion de souvenirs qu'il s'efforçait de garder à distance.
°
Assis sur le vieux fauteuil lézardé que ses pères lui avaient offert, Jungkook caressait doucement les cheveux de Taehyung, qui, avec sa tête posée sur ses genoux, semblait trouver un répit momentané. Ces dernières semaines avaient été rudes, les cauchemars troublant les nuits de Taehyung à cause du suicide de Jessie, mais grâce à la présence indéfectible de Jungkook, une lueur d'espoir avait commencé à se faufiler entre les ombres de son chagrin.
"Je ne comprends toujours pas, Taehyung," commença Jungkook, son regard se posant sur Young-Jae, allongé sur son lit, les traits tirés par la mélancolie. "Qu'est-ce qu'il fout là, lui ?"
"Il n'est pas bien en ce moment," répondit Taehyung, réfléchissant à ses mots, une inquiétude palpable dans sa voix. "Je n'ai pas envie de le laisser seul. Avec Jimin, on se relaye un peu comme une sorte de garde. On préfère ne pas le laisser trop longtemps à l'écart, et aujourd'hui, Jimin a son cours de danse, donc je l'ai emmené."
"Pourquoi vous occupez-vous d'un grand garçon comme ça ? Il a 18 ans, je vous rappelle," rétorqua Jungkook, une note d'exaspération dans son ton.
"Tu ne comprends pas. Il a besoin de soutien," insista Taehyung, ses yeux exprimant une compassion sincère. "Il se sent perdu."
Un soupir déchirant s'échappa des lèvres de Young-Jae, qui, depuis le lit, murmura d'une voix abattue : "J'suis sûr qu'elle m'a quitté. Ça fait trois semaines qu'elle ne me calcule plus."
"Bah, appelle ou écris-lui et demande. Comme ça, t'es fixé et tu ne nous embêtes pas." Rétorqua Jungkook.
"Elle ne répond pas à mes messages ni à mes appels !" Young-Jae se leva légèrement, son visage déformé par la frustration.
"Elle lit tes messages ?"
"Quoi ?"
"Est-ce qu'elle ouvre tes messages ?" Jungkook répéta sa question, une lueur de détermination dans son regard.
"Ouais."
"Alors, propose-lui un rendez-vous. Je ne sais pas quelle bêtise t'as faite, mais promets-lui que tu vas arranger les choses si elle accepte de venir. Comme ça, si elle vient, tu saura qu'elle t'aime encore, et si elle ne vient pas, alors tu sauras que c'est mort pour toi." L'esprit pragmatique de Jungkook se mettait en marche, ne laissant guère de place à l'émotion dans ce moment critique.
Young-Jae, les yeux illuminés par une idée qui commençait à germer, s'empara de son portable. "Ah ouais... Pas bête du tout... T'es un pro." Son sourire délicat était un rayon de soleil dans la tempête de son chagrin.
"J'ai appris ça d'une personne qui a été importante pour moi à une époque mais... nous avons complètement perdu contact," répondit Jungkook, sa voix prenant une teinte nostalgique, comme si chaque mot était une note de mélancolie. Le souvenir de cette personne le hantait, une ombre douce-amère dans son histoire.
"J'y vais, et j'espère qu'elle viendra aussi. Merci Jungkook..." Young-Jae était déjà debout, la détermination sur son visage éclairant sa silhouette fragile.
Une fois Young-Jae parti, Taehyung tourna son regard vers Jungkook, curieux. "De qui tu parlais ?"
Jungkook soupira, laissant échapper un flot de souvenirs. "C'était un garçon que j'ai rencontré quand j'étais plus jeune. Jaehyun. Il se battait souvent, mais il était là pour moi. Grâce à lui, je n'ai plus été harcelé par les autres gamins du quartier. Mais... son père était un ivrogne qui battait sa femme et lui."
Les yeux de Taehyung s'élargirent, captivés par le récit de Jungkook. "Et alors ?"
"Un jour, après avoir reçu une raclée de trop de son père, il a volé une voiture. Il voulait juste s'éloigner, fuir. Il m'a récupéré en passant, et nous avons rêvé de fuguer ensemble. Mais... nous avons été arrêtés par la police avant même d'avoir un vrai plan." La voix de Jungkook se brisa légèrement, poignante. "On a été envoyés en centre de redressement pour mineurs. C'était la dernière fois que je l'ai vu."
Une tristesse profonde enveloppa la pièce alors que les mots de Jungkook s'imprégnaient de la poussière du passé. Taehyung pouvait presque ressentir la douleur de son ami, la solitude d'un lien brisé à jamais. "Ça a dû être difficile," murmura-t-il, conscient qu'un beau souvenir pouvait aussi être une blessure.
"Oui," admit Jungkook, une mélancolie palpable dans ses yeux. "Mais c'est ce qui m'a fait réaliser l'importance de se battre pour ceux qu'on aime. Jaehyun était un survivant, comme beaucoup d'entre nous." Son regard se perdit dans l'horizon, le poids des souvenirs l'enveloppant comme une couverture.
Les deux amis restèrent silencieux un moment, le poids des émotions ruisselant autour d'eux, collant à la conscience de leur propre douleur, mais faisant battre le cœur de leur amitié d'un rythme partagé. Ils savaient que la vulnérabilité était leur seule échappatoire, et qu'ensemble, ils avanceraient, pas à pas, contre la tempête qui continuait à les menacer.
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/!\ le chapitre 98, 99, 100 et l'épilogue ont été postés en même temps donc assurez de les lire.
Ainsi que les remerciements.
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