Baekhyun s'était empressé de quitter la salle du club de Duel, sa démarche hâtive le conduisant à l'extérieur du château.

La fraîcheur du vent vint fouetter ses joues, les colorant d'une légère teinte grenadine contrastant avec la neige recouvrant son épiderme. L'aquilon frappait ses vêtements, faisant s'envoler sa robe de sorcier qui semblait déployer ses ailes dans son dos, alors que ses boucles chocolatées se faisaient lisser par la force du souffle du nord. Tremblant, Baekhyun ne se décourageait pas, malgré l'hostilité de la bourrasque. Ses pieds s'enfonçaient dans l'herbe couchée au sol, piétinant la terre sans se soucier de la pression exercée sur son corps projeté en arrière.

Il avait besoin de prendre l'air, même si son environnement actuel ne rendait guère la ballade improvisée agréable. Ses yeux lacérés par les griffes du vents ne tardèrent pas à s'emplir de larmes, les perles glacées coulant parallèlement sur ses joues pour finir leur course au loin, balayées par la force de l'expiration nordique.

Les lèvres de Baekhyun tremblaient sous les assauts de la rafale. Lui qui avait toujours été frileux, il fallait avouer qu'il avait mal choisi son moment pour profiter des jardins de Poudlard. Malgré tout, il ne recula pas pour autant. Il ressentait l'envie urgente de s'aérer les idées, de s'évader quelques minutes de l'ambiance chaleureuse du château pour faire le ménage dans son esprit tourmenté. Il avait besoin d'un coup de fouet, et quoi de mieux que la morsure du vent pour l'aider ?

Baekhyun s'immobilisa un instant, ses pensées s'imposant à lui aussi vivement que le râle de l'aquilon.

Passé l'euphorie et la satisfaction que lui avait apporté son affrontement, il réalisait désormais à quel point sa démonstration avait été effrayante. Le petit brun comprenait qu'il avait franchi une limite lors de son duel, que quelque chose de fondamental avait été brisé. Il pouvait ressentir le changement au plus profond de sa chaire, une métamorphose qui semblait se mouvoir au plus profond de lui pour s'étendre à l'ensemble de ses organes. Cette chose remuait, elle broyait son estomac, perforait son coeur, remontait lentement le long de son oesophage, lui déchirait la gorge et...

Pris de nausée, Baekhyun eut à peine le temps de réaliser son mal être que déjà, il se vidait au sol, son visage hagard se crispant sous l'assaut de la douleur.

Sa poitrine se tordit dans un mouvement convulsif, faisant écho à son estomac hurlant sa peine. L'épisode fut bref, mais terriblement intense. Durant ce court laps de temps, il eut l'impression de se dessécher sur place, que toutes les substances alimentant son corps le désertaient progressivement pour le laisser à l'état de carton rêche. Fébrile, Baekhyun s'essuya les lèvres, ses jambes tremblantes paraissant être sur le point de se dérober sous son poids.

Incapable de soutenir la vision répugnante que lui présentait le sol à ses pieds, il se détourna prestement, ses paupières closes attestant d'une envie de demeurer aveugle face à son propre faiblesse.

Il n'avait rien pu faire lorsque les images de son affrontement lui étaient revenues en tête. Il avait vécu la scène à nouveau, dans le rôle d'un misérable spectateur incapable d'agir pour empêcher son double de commettre une erreur. Lorsqu'il avait vu Harry, se noyant dans une prison d'eau, son visage violacé tordu par la souffrance, il avait compris qu'il était allé trop loin. De même, quand il avait vu son corps chuté au sol, puis être fauché par un sortilège de découpe totalement dispensable, il avait été dégoûté par ses propres actions. De toute évidence, le Gryffondor avait perdu le duel à partir du moment où il avait été pris au piège dans les flots. De ce fait, faire durer la torture n'avait été rien d'autre que de la pure cruauté, une véritable démonstration de sadisme. Pire encore, le blesser davantage alors qu'il tombait au sol, plongé dans l'inconscience, avait été un acte barbare et totalement inutile.

Mais, le paroxysme de l'écoeurement, le comble de la monstruosité, résidait dans le plaisir qu'il avait pris en infligent du mal à son camarade.

Il pouvait se remémorer l'allégresse qui l'avait envahi, les frissons d'extase qui avaient roulé sur son épiderme transpirant de délice, l'excitation provoquée par la vue de la souffrance de son adversaire. Il en aurait gémi de bonheur s'il n'avait pas été aussi concentré sur sa tache, il pouvait d'ailleurs imaginer sans peine ses orbes voilées par la luxure, ce voile immoral mais ô combien plaisant.

Il se mordit la lèvre, comme plongé dans un état second.

La sensation avait été indescriptible. Il avait eu l'impression renversante de détenir une existence au creux de ses mains, d'être investi d'un pouvoir incommensurable, celui de trancher entre la vie et la mort. Le pouvoir s'était déployé en lui, emplissant ses veines de félicité, noyant ses poumons dans le liquide de la délectation, transperçant son coeur qu'un sentiment de jouissance foudroyant. Baekhyun s'était senti surpuissant, il avait cru, l'espace d'un instant, être devenu un être supérieur, un véritable dieu asseyant sa domination la plus totale.

Il se reprit bien rapidement, effaré par les pensées impures qui avaient pris possession de son esprit.

Baekhyun attrapa ses cheveux entre ses doigts crispés, se demandant pourquoi diable il agissait ainsi. Le petit brun peinait à se reconnaitre, il voulait bien avouer que, comme tout être vivant normalement constitué, il avait sa part d'ombre, ses propres réflexions inavouées et malsaines qu'il prenait garde à conserver pour lui. Néanmoins, il ne s'était pas attendu à ce que cette facette de sa personnalité soit d'une obscurité aussi profonde. Se connaissait-il réellement finalement ? Il avait toujours cru détenir un contrôle absolu sur cette partie de lui, il avait pensé que sa propre personne n'avait aucun secret pour lui, il avait pourtant été persuadé tout savoir à son sujet ! Mais, en dépit d'une conviction sincère, il avait désormais la sensation de n'avoir, jusqu'alors, qu'effleuré du bout des doigts cette face sombre qui le caractérisait. Il avait cru en premier lieu qu'il ne s'agissait que d'une tache dissimulée dans un coin son esprit et n'avait, en conséquence, jamais cherché plus loin. Cependant, maintenant qu'il avait osé plonger sa main dedans, il comprenait qu'il s'agissait d'un gouffre béant renfermant quelque chose de terrifiant.

À moins que, sans que Baekhyun ne s'en soit rendu compte, une force extérieure ait élargi sciemment ce qui n'avait été au départ qu'une malheureuse fêlure ?

La respiration de jeune sorcier se fit soudainement saccadée, se matérialisant devant son faciès tordu par l'anxiété, telle une brume fantomatique.

Baekhyun, bien qu'il lui était difficile de l'avouer, était terrifié. Il avait l'horrible impression qu'un inconnu avait pris possession de son être. Faisant face pour la première fois à une partie dissimulée de sa personnalité, il ignorait comment l'appréhender. Devait-il l'accepter, la nier, la rejeter ? L'état de confusion dans lequel il était plongé n'aidait guère à faire le trie dans ses pensées, et les coups de fouet du vent semblaient avoir perdu de leur vigueur.

Mais, peut-être avait-il simplement été anesthésié par le froid depuis.

Brusquement, la culpabilité déferla en lui, tandis qu'il réalisait pleinement que Harry avait été victime de sa perte de contrôle imprévisible, de cette facette inconnue qu'il avait été incapable de réfréner. Il y avait une différence entre détester une personne et chercher à lui nuire, l'un n'entrainait certainement pas l'autre. La haine ne devait pas servir de prétexte à l'assouvissement immoral d'une pulsion dévastatrice, blesser quelqu'un volontairement était inexcusable, et invoquer un sentiment comme prétexte, c'était nier qu'on avait perdu le contrôle. La conscience d'un sentiment, c'était la conscience de soi. Hors, était-il juste de dire que dans un instant de frénésie aussi violent que celui qui avait contrôlé Baekhyun lors de son duel, il avait été parfaitement lucide ?

Baekhyun ressentait le besoin de retrouver le plus âgé, de s'assurer qu'il ne l'avait pas trop sévèrement amoché. Cependant, son désir n'était nullement induit par la crainte d'avoir déçu Harry, mais plus par celle de lui avoir ôté la vie et ainsi, d'être devenu un assassin.

Le Serpentard revint ainsi sur ses pas, ses pieds réalisant le chemin inverse, écrasant à nouveau l'herbe tandis que les murs de Poudlard prenaient de la hauteur au fur et à mesure qu'il s'en approchait.

Un pression dans son crâne lui arracha un grimace de douleur mais, indifférent à cet avertissement implicite, il continua sa progression en ignorant l'élancement qui lui comprimait la tête. C'était comme si des hurlements silencieux résonnaient au creux de sed oreilles, sourdes aux sons, mais guère indifférentes aux terribles vibrations.

Et, alors que la silhouette de Baekhyun disparaissait finalement dans les entrailles du château écossais, un premier flocon de neige s'échouait sur le sol.

Le mois de Novembre, porté par le vent, venait de déployer son manteau immaculé qui ne tarderait pas à recouvrir Poudlard dans son intégralité.

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Lorsque Baekhyun se retrouva face aux portes de l'infirmerie, il fut envahi par un sentiment d'appréhension qui le cloua sur place.

Anxieux, il attrapa sa lèvre inférieure entre ses dents, mordillant la chaire rosée et lisse, déversant ses doutes à travers cette habitude instinctive dans l'espoir que cela suffise à lui insuffler un peu plus de courage. Néanmoins, il eut beau maltraiter encore et encore son croissant de chair dorénavant rouge passion, cela ne lui permit pas de troquer ses écailles de serpent froussard, pour la crinière d'un lion brave.

Un soupir lui échappa, tandis qu'il réalisait que ce n'était pas demain qu'il serait capable de rugir férocement, ce qui n'était pas plus mal finalement. Ses orbes hésitants se posèrent sur la porte en bois, la fixant intensément, comme s'il espérait y déceler un message, une indication sur la bonne conduite à suivre. Sa culpabilité l'avait poussé à se rendre à l'infirmerie pour présenter ses excuses, tel le jeune homme poli et civilisé qu'il était. Seulement, depuis qu'il affrontait directement la pièce dans laquelle la victime de sa perte de contrôle reposait, il sentait sa détermination flancher, se contrefichant bien franchement de l'éthique et de ce que le pardon représentait. S'il avait écouté son instinct, il aurait pris ses jambes à son cou, quitte à éprouver des regrets durant un mois, si tel était le châtiment pour son comportement inconvenable.

Cependant, son esprit, lui, avait bien conscience que présenter ses excuses représentait une étape impérative à l'acceptation de son erreur. Peut-être Baekhyun ne le réalisait-il pas vraiment, mais il avait besoin que Harry le rassure en lui disant que ce n'était pas bien grave, qu'il n'était pas un monstre cruel s'amusant à torturer ses adversaires pour le plaisir.

Mais, alors que Baekhyun, décidé, avançait sa main vers la poignet pour pénétrer dans l'infirmerie, celle-ci s'abaissa avant qu'il ne puisse la saisir. Doucement, la porte imposante s'ouvrit, dévoilant derrière elle l'illustre figure du directeur Dumbledore.

Baekhyun retint sa respiration lorsque son regard étonné rencontra les billes fatiguées du sorcier. Il eut l'impression, en étudiant un instant ses yeux, que l'éclat particulier qu'ils avaient toujours reflété s'était envolé, emportant le caractère pétillant de ses orbes auparavant pénétrants, qui semblaient dorénavant dépourvus de vie. Il fut stupéfait lorsque sa vision s'élargie pour dévoiler Dumbledore dans son intégralité.

Le mage blanc n'avait jamais paru plus vieux qu'à ce moment précis. Pourtant, Baekhyun n'était pas sans ignorer son âge avancé, mais l'homme avait toujours été paré de cette atmosphère intemporelle jusqu'à aujourd'hui, cette impression qu'il était éternel. Cependant, la barbe autrefois blanche et parfaitement peignée du directeur était désormais cendreuse et emmêlée, au même titre que ses cheveux hirsutes et ternes. Les robes colorées dont il raffolait tant avaient été remplacées par un ensemble gris et tristement ordinaire, bien loin de l'excentricité de Dumbledore. Les verres de ses lunettes en forme de demi-lune était sales, comme s'il ne trouvait plus la force de les nettoyer, encore et encore.

Cette vision lui fit un drôle d'effet. Si jusqu'à présent, Baekhyun n'avait jamais pensé terminer sa scolarité sous la direction d'un autre homme, il ressentait dorénavant le sentiment pesant que Dumbledore pourrait s'éteindre à tout moment.

C'était imaginable et pourtant, tout criait au trépas prochain.

-Oh, monsieur Byun, s'étonna le vieil homme, comment allez-vous mon garçon ?

La porte s'était refermée dans son dos, alors qu'il gratifiait le dénommé d'un sourire bienveillant.

Baekhyun dut prendre sur lui pour ne pas baisser la tête. Être ainsi confronté au regard de son directeur était assez perturbant, surtout lorsqu'on venait d'envoyer le précieux Survivant à l'infirmerie, lieu d'où sortait d'ailleurs le sorcier.

-Je, commença-t-il, avant de se reprendre, comment va Harry ?

Esquiver la question, et poser une interrogation au sujet de l'héritier Potter lui donnerait l'image d'un jeune homme faisant passer le bien de son camarade avant sa propre personne. Il se doutait que Dumbledore s'était rendu dans la pièce où s'affairait madame Pomfresh pour s'enquérir de l'état d'Harry, le mage blanc ne s'aventurait pas souvent hors de son bureau. La situation devait être assez grave pour qu'il fasse le déplacement, ce qui n'était pas bon signe. Il avait donc tout intérêt à laisser entrevoir sa culpabilité, s'il ne voulait pas se faire expulser de Poudlard pour déchainement de violence envers un élève.

-Monsieur Potter a connu des jours meilleurs, mais il est sur la voie de la guérison. Madame Pomfresh espère le voir remis sur pied d'ici deux jours.

Baekhyun pris soin de laisser entrevoir son soulagement, un long soupir passant la barrière de ses lèves tandis que ses épaules s'affaissaient. En temps normal, il ne se serait jamais montré aussi transparent, mais faire preuve de remords était primordial pour susciter l'indulgence de son directeur.

-Je suis rassuré, souffla-t-il d'une petite voix.

-Voyons mon garçon, le rassura gentiment Dumbledore, si la vie de monsieur Potter avait été réellement en danger, le professeur Rogue serait intervenu immédiatement.

Le petit brun, suspicieux, sut qu'il valait mieux ne pas aller dans le sens du plus âgé au risque qu'il comprenne la supercherie. Se défaire aussi rapidement de la culpabilité attesterait d'un sentiment feint car, il fallait le préciser, une personne en proie aux tourments avait tendance à se rabaisser continuellement et à refuser d'entendre les paroles rassurantes de son entourage. À ses yeux, rien ne pourrait excuser son comportement, ni amoindrir sa gravité. Ainsi, se jeter directement sur l'opportunité gentiment offerte par Dumbledore signerait la fin de sa comédie.

-Il n'empêche qu'à cause de moi il est cloué au lit, insista Baekhyun d'une voix tremblante, mon sortilège a été assez violent pour lui faire perdre conscience. Je suis fautif monsieur le directeur.

L'homme se frotta pensivement la barbe, ses yeux refusant de se détacher de la silhouette de son étudiant.

-Eh bien...Vous n'y êtes en effet pas allé de main morte, mais au final, monsieur Potter se porte bien et sa vie n'est pas menacée.

La main de Dumbledore se posa sur l'épaule du Serpentard avec bienveillance, arrachant un sursaut au concerné.

-Le principe d'un duel est de mettre son adversaire hors d'état de nuire, reprit-il, les élèves sont libres d'user de tous les moyens pour se faire, tant qu'ils n'emploient aucun sortilèges impardonnables et qu'ils ne tentent pas de tuer leurs camarades. Vous vous êtes arrêté de vous-même, de ce fait, personne ne peut vous reprocher d'avoir mis toutes les chances de votre côté pour gagner le combat.

Il lui adressa un sourire complice, sa voix prenant un ton paternel :

-Et, de toute façon monsieur Byun, les élèves qui s'inscrivent au club de Duel s'engagent et acceptent l'idée qu'il puisse être blessés lors des combats. Ces cours ne sont pas là pour s'amuser, mais pour vous préparer au monde des adultes. C'est une bonne chose que de se mettre dans des conditions de combat réelles, vous ne devriez pas vous en vouloir.

-Tout de même, soupira Baekhyun, il va rudement m'en vouloir.

En raison de son regard cloué au sol, il n'aperçut pas le sourire malicieux de son directeur.

-Oh je doute fort que monsieur Potter puisse vous en vouloir, lui répondit-il sur un ton empreint de mystères, pas si mystérieux que ça.

Baekhyun fit directement le rapprochement avec le fait que le Gryffondor nourrisse des sentiments amoureux à son égard. Cependant, cela n'expliquait pas comment Dumbledore avait été mis dans la confidence.

-Figurez-vous que je comptais vous convoquer dans mon bureau aujourd'hui. C'est une bonne chose que nous nous croisions, lui confia Dumbledore.

-Vraiment ? S'étonna Baekhyun. C'est au sujet d'Harry ?

Il se fit la réflexion, presque immédiatement après cette supposition, que si cela avait été le cas, Dumbledore n'aurait pas attendu qu'ils décortiquent le sujet pour lui dire qu'il avait prévu de le convoquer. Autrement, il aurait fait les choses dans l'ordre, tel le sorcier méticuleux qu'il était.

-Non. En réalité, je voulais te parler du professeur Halcyone.

La révélation eut l'effet d'un coup de tonnerre. Paralysé, Baekhyun ouvrit la bouche pour tenter de trouver une excuse, un moyen détourné pour éviter le sujet, mais absolument rien ne lui vint à l'esprit. Les yeux écarquillés, il observait le visage du vieil homme comme s'il venait de lui pousser une nouvelle tête ce qui, en un sens, n'était pas totalement faux puisque le directeur avait abandonné son air de papy gâteau pour revêtir une expression plus grave.

-Pourquoi vouloir parler du professeur Halcyone avec moi ?

Baekhyun était horrifié, et c'était terriblement difficile de dissimuler ce sentiment. Il aurait voulu partir en courant pour échapper au regard déstabilisant de Dumbledore, mais la fuite ne ferait que renforcer les probables soupçons du mage.

Qu'avait-il découvert ? Etait-il au courant de la relation interdite qu'il menait avec Chanyeol ? Avait-il surpris, par un moyen inconnu, leurs gestes intimes l'un envers l'autre, leurs échanges privés, leurs regards langoureux, leurs pensées déplacées ?

Baekhyun en fut mortifié, rien qu'à l'idée. Si par malheur le directeur avait été mis au courant, lui comme Chanyeol pouvaient dire adieu à Poudlard, et à leur relation. Si quelqu'un venait à savoir que l'adulte lui avait fait des avances loin d'être innocentes alors qu'il était encore mineur, il était certain que le fautif serait convoqué face au Magenmagot pour répondre de ses actes, risquant jusqu'à dix ans de prison à Azkaban.

-Monsieur Byun, fit Dumbledore, ses yeux le fixant au dessus de ses lunettes en forme de demi-lune, si le professeur Halcyone a abusé de son autorité sur vous d'une quelconque manière, vous devez impérativement m'en parler.

-Je ne comprends pas, balbutia le jeune homme, déboussolé.

Il était complètement terrorisés à l'idée que Chanyeol lui soit arraché. Comment diable le directeur en était-il arrivé à cette conclusion ? Ils avaient pourtant été prudents, Chanyeol avait pris soin de ne laisser aucun indice, et leur comportement en dehors du bureau de celui-ci frôlait l'irréprochable...

Subitement, ses yeux s'accrochèrent à la porte de l'infirmerie, lui rappelant l'identité de la personne à qui il était venu rendre visite.

Ce fut à cet instant précis qu'il comprit.

-Baekhyun, insista Dumbledore en osant pour la première fois abandonner son ton formel, si cet homme a abusé de toi sexuellement, s'il t'a menacé, je dois le savoir.

Comme ramené à la réalité par l'intervention de son directeur, le dénommé s'empressa de répondre, le coeur au bord des lèvres :

-Non ! S'exclama-t-il, outré. Il ne m'a fait aucun mal, jamais il ne m'a forcé à faire quoi que ce soit !

Inconscient que ses paroles pouvaient porter à confusion, que le sous-entendu à peine dissimulé de sa totale coopération semblait indiquer que lui et son professeur de Défense contre les forces du Mal avaient outrepassé les limites, il continua à défendre celui-ci, furieux.

-Je ne sais pas qui a été vous raconter un pareille bêtise mais c'est faux, totalement faux.

-Calmez-vous mon garçon, je vous crois, le rassura Dumbledore.

Son regard revêtit alors une lueur attristée, bien qu'il sembla libéré de l'inquiétude qui l'avait jusqu'alors terni.

Le discours qu'il lui servi par la suite le surpris au plus haut point.

-Pardonnez la paranoïa d'un vieil homme, j'aurais dû prendre en compte le fait que vous ayez tendance à être plus proche de vos professeurs que de vos camarades, Severus en est un bon exemple. Simplement, je ne pouvais pas affirmer connaitre le professeur Halcyone aussi bien que lui, d'où mon inquiétude de toute évidence infondée.

Baekhyun se contenta d'acquiescer silencieusement, encore chamboulé par la discussion qu'il venait d'entretenir avec l'homme.

Bien que Dumbledore lui affirme le contraire, il avait la dérangeante impression que sa relation avec Chanyeol n'était plus, désormais, une exclusivité dont ils gardaient précieusement la clé.

Néanmoins, il n'eut pas le loisir d'y songer un instant de plus, puisque Dumbledore, le contournant, lui adressa ces dernières paroles avant de s'enfoncer de le couloir :

-N'oubliez jamais que vous êtes doté d'une rare intelligence, utilisez-là avant de prendre une importante décision.

Puis, il se volatilisa, laissant flotter une fragrance étrange, mélange de citron et de chaire nécrosée, derrière son passage.

°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

Baekhyun s'avança d'une démarche colérique jusqu'au lit où Harry reposait silencieusement, croisant ainsi le regard étonné du Survivant qui eut la peine le temps d'ouvrir la bouche, qu'il se faisait déjà agresser par la voix venimeuse du plus jeune :

-Enfoiré ! Qu'est ce que tu es allé raconter à Dumbledore ?!

Harry, le front entouré par un bandage légèrement imbibé de sang, écarquilla les yeux, son visage se figeant en une expression stupéfaite qui ne fit qu'attiser la fureur du Serpentard.

-Fais pas l'étonné, tu sais très bien de quoi je parle !

Baekhyun éprouvait la furieuse envie de saisir entre ses mains la gorge du garçon-qui-a-survécu pour l'obliger à répondre. Il avait l'impression qu'une force inconnue avait à nouveau pris le contrôle de son être, lui insufflant des idées malsaines, horriblement cruelles, dont la finalité était la même : la mort tragique de ce foutu Survivant. S'il avait écouté la voix qui lui soufflait de prendre une nouvelle fois son pied en ruant de coups le plus âgé, l'avenir d'Harry aurait revêtu une teinte on ne peut plus incertaine. Et, malgré cette envie terrible qui le rongeait, ce désir d'arracher la peau de son vis-à-vis à main nue, de lui planter sa baguette droit dans le coeur, il n'en fit rien. Il se contenta de serrer les poings, son regard azur disparaissant progressivement pour laisser place aux abysses ténébreuses d'une colère refoulée.

Harry eut l'impression d'avoir effectué un plongeon forcé dans ces orbes, lorsqu'il fut traversé par un froid tranchant.

-Baek je, tenta-t-il, avant de se faire à nouveau couper.

-Ferme-là ! Quand je pense que j'étais venu te présenter mes excuses, t'es vraiment un connard Potter ! Ruiner ma vie est devenu ton nouveau loisir ? Ça t'a pas suffi de me tuer de l'intérieur en m'abandonnant ?!

Harry fut brisé par le regard douloureux que lui envoya Baekhyun en évoquant ce passage de sa vie. La gorge serrée, il fut incapable de répliquer, partagé entre la joie d'apprendre que le plus petit s'en était voulu de l'avoir mis dans cet état, l'incompréhension face à ses accusations, et le dégoût envers sa propre personne.

Il osa à peine jeter une œillade en direction de Baekhyun, et son bref élan de courage lui arracha un hoquet d'étonnement.

Les joues rouges de petit brun étaient recouvertes d'une substance transparente, un liquide salé qu'il n'aurait jamais pensé possible d'apercevoir à nouveau sur son faciès de marbre. Anéanti, il assista, impuissant, à l'écoulement de ces larmes traitresses, brouillant le regard de l'être qu'il aimait plus que tout, écorchant son coeur à chaque fois qu'un sanglot s'aventurait hors de sa bouche pincée. Les épaules tressautantes de Baekhyun ne paraissaient pas vouloir se stabiliser, et celui-ci continuait à l'insulte copieusement, évacuant pour la première fois la haine qu'il s'était efforcé de réfréner.

-T'as laissé passer ta chance depuis trop longtemps, imbécile ! Si tu n'avais pas tout gâché, j'aurais certainement accepté tes sentiments, l'accusa-t-il, mais c'est trop tard désormais, j'ai tourné la page, avec lui. Et toi, toi au lieu d'essayer de te rattraper tu t'enfonces en allant rapporter ma relation à Dumbledore ! Où s'arrête donc ton égoïsme, Harry Potter ?!

Honteux, Baekhyun plaqua ses mains devant son visage, se fustigeant d'être incapable de réfréner ses pleurs. Il s'était promis de ne plus jamais laisser transparaître son mal intérieur face à des personnes comme Harry, et le voilà désormais, couinant comme un animal en manque d'attention, face à la dernière personne devant qui il fallait se laisser aller.

Il était incapable de décrire ce qu'il voulait, actuellement. Blesser Harry, s'enterrer dans un endroit où personne ne pourrait plus jamais le retrouver, qu'on le prenne dans une étreinte réconfortante, qu'on lui témoigne un peu d'amour, peut-être ? Il était perdu, incapable de décrire ce dont il avait besoin. Il aurait pensé que déverser sa frustration sur Harry lui aurait permis de se débarrasser du poids qui n'avait fait que s'alourdir depuis ce matin, mais le fait était qu'il se sentait désormais encore plus mal.

Il était embarrassé de dévoiler sa faiblesse face à l'héritier Potter, lui qui était venu pour lui passer le savon du siècle, il se retrouvait à gémir pitoyablement sa douleur devant les orbes déboussolés d'un homme qui n'avait fait que lui infliger du tord.

Il aurait aimé que Chanyeol soit à ses côtés et l'enferme entre ses bras pour le couper du monde extérieur. Son coeur n'en pouvait plus de battre dans le silence pensant qu'avait laissé le plus grand en s'absentant, cette solitude qui le tourmentait et qui lui donnait l'impression que le monde avait arrêté de tourner. Baekhyun se savait dépendant, mais pas au point que les secondes deviennent des lacérations invisibles, les minutes des coups de couteau, les heures un doloris poussé au maximum de son intensité.

Alors, se dit-il, c'était ça ? Son comportement totalement irréfléchi, cette humeur changeante, ce trou béant dans sa poitrine, ce n'était que le caprice d'un chaton exigeant les caresses habituelles de son maître ?

Un rire amère s'échappa de sa gorge. Il se trouvait tristement pathétique, surtout que Harry n'avait eu de cesse de le fixer avec inquiétude, observant ses traits se tordre pour refléter des sentiments contradictoires, parfois poignants, ou bien effrayants.

-Je vais te laisser, souffla Baekhyun, je crois que je me suis assez ridiculisé.

Mais alors qu'il s'éloignait du lit du Survivant, sa main fut brusquement agrippée par ce dernier, tandis qu'il se redressait dans son lit.

-Il est hors de question que je te laisse repartir dans cet état, affirma Harry d'une voix sévère.

Baekhyun jeta un regard étrange à leurs mains liées, comme s'il était incapable de mettre un mot sur ce que cette vision lui inspirait.

-Je n'ai plus envie de discu-

-J'ai rien dit à Dumbledore en ce qui concerne ta relation avec le professeur de Défense contre les forces du Mal, l'interrompit Harry.

Baekhyun se figea à l'entente de cette déclaration. Si bien, qu'il ne réagit pas lorsque le plus âgé le tira jusqu'à son lit où il le força à s'assoir.

-Et tu sais pourquoi ?

Le plus petit ne répondit pas, son regard inexpressif se contentant de fixer Harry, dans l'attente d'une réponse qu'il pourrait par la suite juger.

-Même si le fait de savoir que ce type a le droit de poser ses sales mains sur toi me répugne, grimaça le Gryffondor, le dénoncer reviendrait également à te dénoncer. Et si lui faire du tord ne me gêne absolument pas, en ce qui te concerne, c'est une autre histoire.

-Tu crois que je vais te croire ?

Baekhyun avait posé cette question en haussant un sourcil sceptique, sa main toujours emprisonnée dans celle du Survivant.

-Réfléchis Baek, insista Harry, si j'avais réellement voulu mettre un terme à votre relation, tu crois vraiment que j'aurais attendu un instant de plus pour vous dénoncer ?

Baekhyun acquiesça silencieusement, lui accordant un point pour cet argument.

-Je crois que t'as pas saisi quelque chose : je suis fou amoureux de toi. Ce qui signifie que suis incapable de vouloir ta souffrance.

-Excuse-moi, mais tu ne semblais pas t'en soucier lorsque tu as décidé de m'abandonner, contra Baekhyun.

Harry baissa la tête, sa main renforçant inconsciemment sa prise sur celle de Baekhyun.

-Je sais. Et il n'y a pas un jour qui passe sans que je le regrette amèrement.

Baekhyun le regarda simplement, sa bouche close instaurant sciemment un blanc sur lequel il avait le contrôle, Harry semblant incapable de rajouter un mot.

Ses billes semblables à des lagons se posèrent alors sur leurs mains entrelacées, un mince sourire se formant sur son faciès à la vue de ses doigts fins enfermés dans la paume immense du joueur de Quidditch, des souvenirs lui explosant au visage.

-Je suis désolé, chuchota-t-il.

Harry releva vivement la tête, s'étonnant de découvrir un sourire chagriné sur les lèvres de son petit protégé.

-De quoi es-tu désolé ?

Les doigts de Baekhyun remuèrent dans leur cage de chair, faisant frissonner le rouge et or.

-De t'avoir accusé à tord.

Le pouce minuscule fut le premier à se libérer.

-De t'avoir blessé également.

Finalement, la main du petit brun se détacha de celle du plus âgé, laissant à ce dernier une étrange sensation de vide.

-Et d'être incapable de te rendre tes sentiments, conclut-il d'une voix plus douce.

Soudainement, un courant d'air fit s'envoler les rideaux immaculés de l'infirmerie, le long tissu se déployant devant le visage d'Harry qui, gêné, fut arraché un instant à la contemplation des traits réguliers du plus jeune.

Mais, lorsque la brise fraiche s'évapora, et que les rideaux reprirent leur place initiale, la seule chose qu'il fut capable de distinguer fut les lieux désespérément vides.

°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

Un chapitre bien plus calme, faisant le point sur les sentiments de Baekhyun et sa frayeur face à la personne qu'il est en train devenir. Sans oublier Dumbledore qui semble dire une chose très étrange à Baekhyun, avez-vous compris le sens de son discours ? Et puis Harry, qui finalement n'est pas si méchant que ça. Qu'en avez-vous pensé ?

Chanyeol ne vous manque pas trop ? Car apparement pour Baekhyun, c'est une véritable torture !

J'espère que vous êtes satisfaits de ce chapitre, un des plus longs d'ailleurs avec 5000 mots !

On se retrouve bientôt ~