Chapitre 16 : Silence hémorragique
𝒫𝑜𝒾𝓃𝓉 𝒹𝑒 𝓋𝓊𝑒 𝒹𝑒 ℒ𝒾𝓋𝒶𝒾̈
"Longeant ses boutiques, habitée par l'ombre de tout part, côte à côte, je m'éprends à me perdre au fond de lui. Observant les courbes de ses traits. Gracieuses comme sa façon d'exister. Je pourrais encore sentir la chaleur de ses bras autour de moi, ce feu contre mon corps, si froid.
—
Tu sais que je te regarde. Je le ressens. T'aime ça, la façon que j'ai de te voir comme un art vivant. C'est pourtant ce que tu es, bien qu'il y est quelques défauts sur la toile. La peur, antithèse de la paix. Ronger par l'incertitude de demain. Voulant vivre dans la sûreté du passé. J'étais naïf de penser qu'il ne passait que quelques gouttes d'eau dans ta vie. Alors que c'était surement l'orage qui passait au dessus de ta tête. Et je te demande pardon pour ça.
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-Dis-moi, je commence, comment tu m'as retrouvé ? Je n'ai pas le souvenir de t'avoir donné mon adresse ( manquerait plus qu'il soit devin).
-C'est Bast qui m'a conduit jusqu'à toi, me livre Eren, passant ses pupilles sur les miennes.
-Bast ? Je répète, essayant en vain de fouiller au fond de ma mémoire s'il m'en avait déjà parlé.
-Tss...sérieusement tu verrais ta tête quand tu réfléchis, se met à rire légèrement le brun. Une pépite !
-Hé, tu pourrais pas plutôt m'éclairer au lieu de te moquer de moi ? (Elle avait quoi ma tronche sérieusement ?)
-Bien sûr que je peux. Hum...Peut-être que si je te dis "Bastet", ça te semble plus familier ?
-Un peu...mais c'est pas pour autant que je vois exactement qui sais.
-Fille de Rê, elle est la déesse égyptienne de la maternité, du foyer et de la chaleur du soleil, dans les grandes lignes. Tu l'as peut-être déjà vu quelque part. Elle est représentée comme une hybride, femme à tête de chat ou en chat directement.
-Je vois mieux. Enfin je crois. Pourquoi l'avoir appelé Bast ? C'est un surnom que tu lui donnes ou une autre façon de l'appeler ?
-Oh non, pas du tout, rétorque la demie-divinité. En fait, les premiers égyptologues avaient fait une erreur de traduction lors de la découverte du hiéroglyphe représentant son prénom. Cette erreur a perduré dans le temps jusqu'à aujourd'hui et peu de personne ont osé la rectifier pour rétablir la vérité. C'est plus simple aux yeux de certains d'enseigner le mensonge apparemment. Bast à longtemps été en colère à ce sujet. À tel point que si j'avais le malheur de la charrier sur ça qu'elle m'aurait dévorer tout entier si elle ne contrôlait pas sa fureur.
-Vraiment charmant...
-Cette tête brûlée s'est maintenant assagie à ce sujet. Mais elle reste un antagoniste dans l'âme malgré tout.
-Comment ça ?
-Sous son aspect doux et bienveillant que j'apprécie beaucoup chez elle, se terre un caractère tout aussi explosif. Qui osera la courroucer verra le regret et la peur l'habiter.
-Si elle est la fille de Rê, je remarque, elle est donc un lien de parenté avec Sekhmet n'est-ce pas ?
-Hum...d'une certaine façon, mais ça reste au fond un peu plus complexe.
-Je t'écoute.
-Bast et Sekhmet n'étaient au début qu'une seule et même divinité. Avec des appellations différentes en fonction de ce qu'elle représentait. Le félin aussi doux que féroce."Bast" d'ordinaire et "Sekhmet" lorsqu'elle était en colère. Par la suite ces deux "personnalités"si je puis dire, ont finis par devenir des êtres à part entière. Mais malgré ça, on continue parfois de les identifier l'une à l'autre. Un peu comme des jumelles siamoises que l'on aurait finit par séparer de mon point de vue. Et si tu veux encore compliquer la compréhension de cette histoire, Sekhmet et Bast auraient été deux aspects d'Hator — parèdre et épouse de l'un de mes frères. Qui aurait été la forme originelle des "jumelles" comme je les appelle parfois ; avant de se décliner.
-C'est facile de s'y perdre là-dedans, je remarque, mais j'ai à peu près tout compris. Du moins l'essentiel.
-Tant mieux, en ce qui me concerne, j'ai encore parfois un peu de mal à y voir totalement clair.
-Hator est la déesse des festivité et de l'amour n'est-ce pas ? Je demande de façon rhétorique. Représentée sous la forme d'une vache ou d'une une femme arborant le disque solaire entre ses cornes ? C'est la seule que je connaissais, ma mère me parlais souvent d'elle quand j'étais petit. Avec du recul, je me demande si elle représentait quelque chose pour elle...
-Là, je ne peux pas t'apporter de réponse, tu devrais le lui demander.
-Je sais mais...j'ai quelque réserve à ce sujet.
-Je peux te demander pourquoi ?
-Ce qui concerne de près ou de loin mon enfance était un sujet assez délicat à l'époque. Tu as peut-être remarqué que je ne parle jamais de mon père. Si tu te demandes pourquoi c'est juste parce qu'il n'y a rien à dire. Il a quitté ma mère quand il a appris sa grossesse. Elle ne pouvait pas avorter, c'était trop tard. Je me suis toujours demandé ce qu'elle aurait fait si elle avait eu cette opportunité. J'ai jamais osé le lui demander par peur de la réponse.
-Qu'est-ce qui t'effraie dans ce qu'elle pourrait te répondre Livaï ?
-Savoir que j'ai été un frein à sa vie, un fardeau qu'elle à malgré tout garder à ses côtés.
-Je ne peux pas répondre à sa place, déclare-t-il doucement, mais tu ne peux pas t'en vouloir d'exister. Et ce, peut importe la vérité qu'elle te dévoilera.
-Je sais, mais ce n'est pas toujours facile, j'avoue — contrit.
-Je m'en doute, mais ton bonheur ne doit pas reposer sur la perception que quelqu'un a de ton existence.
-Comment tu fais pour que tes mots résonnent autant dans mon esprit ?
-Parce qu'ils ont peut-être un sens pour toi ?
—
-Tu te souviens de la fois où on a été retrouver Sekhmet dans le désert ? Je lui demande.
-Oh oui, comment oublier cette tempête de sable et cette mission que l'Ennéade t'avait confié ?
-Parfois, je repense à elle, elle m'a plus marqué que ce que je pensais...
-Sekhmet ou la mission ?
-Sekhmet...J'avais ignoré ça sur le coup mais... avant qu'on ne s'en aille — j'ai eu l'impression de voir une sorte... de douleur dans son regard. Comme si elle en voulait au monde, attristée d'être enfermée dans sa propre haine.
-Je vois ce que tu veux dire, acquiesce Eren, j'ai déjà essayé de lui en parler à l'époque où on était assez proche elle et moi. Elle l'a mal prit et m'a tourné le dos depuis, j'étais surpris de constater qu'elle n'avait plus l'air de vraiment m'en vouloir la dernière fois qu'on l'a vu.
—
-Je peux te poser une question par rapport à ton père ou tu ne souhaites pas en parler ? Demande le brun, soucieux sur le sujet.
-Je n'ai pas de problème avec ça, alors vas-y.
-Tu as déjà cherché à savoir qui il est ?
-Non, ça ne m'intéresse pas de connaître une personne qui n'a pas voulu faire partie de ma vie. Honnêtement, j'étais surtout triste pour ma mère, ça me faisais mal de savoir qu'on l'avait abandonné comme ça. Qui plus est dans une période pas toujours facile. Je me souviens que parfois elle pleurait pendant qu'on jouait ensemble. Et qu'elle me répondait quand je la questionnais qu'elle était triste parce que quelqu'un lui avait fait mal au cœur. Je ne sais pas s'il a eu peur ou s'il avait d'autres raisons de partir comme ça. Mais si il le voulait vraiment, il aurait pu le faire bien, sans détruire un cœur derrière lui. Sans agir comme si ma mère n'était rien et que moi, j'allais pas être une vie à part entière dont elle allait devoir s'occuper. Heureusement que ma famille était là pour elle. Hé...fait pas cette tête Eren.
-Comment s'appelle ta mère ? Demande-t-il.
-Kuchel.
Mon interlocuteur hoche la tête, et sans que je ne m'y attende enlace ses doigts avec les miens. Au travers de cette pluie qui trépasse contre ce sol pas si propre. Et de cet air que j'aspire de nouveau, neuf, avant que nos regards ne cessent d'accoster l'autre.
—
Assis sous cet arrêt de bus, tard dans la nuit. Enveloppé par la fraîcheur qu'apporte l'obscurité, chacun regarde droit devant lui, le regard peut-être posé dans le vide face à cette morne vue. Face à un silence pensif, agréable pour je, suppose nous deux (du moins ça l'est pour moi en cette nuit riche en émotion). Jusqu'à ce qu'Eren ne semble "se réveiller" et se tourne vers moi.
- Dis-moi Livaï...
-Oui ?
-Tu n'as rien remarqué d'étrange dans ton quotidien ces derniers temps ?
-Pas que je me souvienne...Pourquoi tu me demandes ça ? Je questionne, confus.
-Bast veillait sur toi après ton départ. tu l'as d'ailleurs vu un soir.
-De quoi tu me-
("Et c'est avec émoi que mon regard croise celui d'un chat, assis sur le balcon d'en face".)
-Oh...je me souviens oui. Ce chat était loin d'être commun...sur le coup je ne m'étais pas dit que c'était étrange. Pourquoi tu me parles de ça ? Et...pourquoi est-ce qu'elle veillait sur moi ?
-Ça, je ne sais pas. Livaï, es-tu sûr que tu n'as rien remarqué d'étrange ? Une sensation ou autre ? Bast avait senti de mauvaises vibrations autour de toi.
-Je...
("Une ombre dévora promptement mon champ de vision, dehors, derrière la vitre".)
("Un mauvais sentiment s'empare de mon être, comme si on voulait me pousser et voir l'enveloppe de mon âme s'écraser contre le bitume".)
-Eren, je commence — inquiet, qu'est-ce qu'il se passe ?
-Justement, j'en sais rien. Mais je t'en reparlerai quand j'en saurai un peu plus.
—
-Livaï ! Sort de tes pensées. Tu rêvasseras chez toi, ici c'est pas l'endroit pour, me reprend le gérant en passant devant moi.
-Oui, excusez-moi, je réponds aussitôt — gêné de m'être fait prendre à faire autre chose que mon travail.
Merde, ce n'est pas le moment de penser à cette soirée sur mon lieu de travail. Déjà qu'on m'a sûrement embaucher parce que j'étais le seul choix disponible...Je travaille actuellement dans une salle de sport à l'autre bout de chez moi entant qu'agent polyvalent depuis deux semaines maintenant. Je voulais absolument me trouver un emploi en attendant que je sache dans quoi j'aimerais me lancer. Je ne pensais pas que ça serai si compliqué de trouver sa voie. Et au lieu d'y songer, je préfère penser à Eren. À la dernière fois qu'on s'est vu. J'ai l'impression que c'était hier...Il était venu juste pour me voir, et est repartis après ça. Me disant qu'il me laisserait du temps pour décider ce que je souhaite pour nous deux. Que de son coté, il aimerait que l'on devienne un couple par la suite, si je nous permets de nous laisser une chance de nous connaître d'avantage. Et qui si je souhaitais lui parler, je pouvais l'appeler ou lui envoyer un message. Discuter de tout et de rien. Je me souviens qu'avant qu'on ne se quitte, il m'avait embrassé sur le front. Ce simple geste m'avait retourné cette soirée-là. Pour l'instant, je ne sais pas encore ce que je veux. J'ai toujours détesté être indécis.
Une cliente entre aussitôt dans le bâtiment au moment où je me fais cette réflexion. Me posant quelques questions avant de finalement prendre un abonnement pour une année. J'espère vous revoir madame. Depuis ces quelques jours ici, j'en vois des gens s'enthousiasmer à l'idée de s'engager à faire du sport. Mais je n'ai vu revenir presque aucun d'eux. À croire que leur motivation n'est qu'illusoire...
(Vrr...vrr)
Mon portable se met à soudainement sonner dans ma poche, m'étonnant quelque peu, car l'on m'appelle assez rarement. Et c'est en regardant discrètement l'écran que je remarque que l'appelant n'est pas inscrit dans mon répertoire. Une pub ? Non...pourquoi me contacterait-on depuis le...le Pérou ? C'est presque l'heure de ma pause, circonspect je décroche tout en sortant dehors et ce n'est que le silence qui me répond.
-Allô ?
Toujours rien. Jusqu'à ce qu'un léger crépitement se fasse entendre en fond. Étant suivis d'une eau que l'on renverse, d'un son de refroidissement — d'un hurlement strident. Effroyable. Me faisant lâcher le téléphone à terre. Sentant une vive algie m'assaillir le crâne. Le visage douloureux. Apercevant à travers mon reflet dans la porte vitrée, plein de stupeur, un liquide rougeâtre sortir de mes oreilles.
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Lexique :
Hathor* : Déesse d'origine céleste. Epouse d'Horus et mère de Ihi et Haromtous (Horus le jeune). Elle est considérée comme l'œil de Rê et la nourrice des pharaons. Vénérée à Dendérah (Younet an arabe, située près de la rive ouest du Nile. À 65 km au nord de Louxor), Imaou et également en dehors de l'Egypte ( Nubie, Syrie, Israël, Palestine...) Sa première apparition remonte à la IVe dynastie.
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