Elizabeth était une jeune fille obéissante, intelligente et écoutant toujours les paroles, comme tout bon croyant, du prêcheur de l'église environnante. Son père et sa mère pouvaient être fiers d'elle. Ayant été forcés il y a quelques années comme d'autres de quitter les terres d'Angleterre afin de venir s'installer sur celles d'Amérique, le père d'Elizabeth réussit à travailler en tant que charpentier dans un village fraichement construit, tandis que sa mère restait comme toute femme qui se le devait au foyer, rangeant et s'occupant de l'éducation de ses enfants.

Un matin de 1675, Elizabeth partit remplir un seau d'eau à la rivière la plus proche. Sa longue jupe nouée au niveau de sa taille, elle se démenait avec les flots pour ne pas tomber. Soudain, elle aperçue dépassant du rocher en face des mèches de cheveux blonds. Curieuse, elle se rapprocha pour découvrir Jeremy, le fils d'un des agriculteurs voisins. Celui-ci se promenait comme à son habitude près du bois, lorsqu'il vit Elizabeth, l'eau jusqu'à la moitié des jambes. Subjugué par sa beauté, il s'était caché derrière ce rocher afin de mieux pouvoir l'observer.

La jeune fille rougit. Il n'était pas à son habitude de susciter ce genre d'appréciation, elle qui était si réservée, polie et sage. Mais une chaleur se fit sentir dans son ventre, envahissant tout son corps. Il faut dire qu'avec cet acte, Jeremy l'avait rendue toute décontenancée. Voyant d'ailleurs la peau de celle-ci pâlir, le jeune homme s'excusa, avant de tourner vivement les talons d'une manière embarrassé. Rentrée dans son chez soi, avec sa belle petite famille, Elizabeth restait pourtant absente durant tout le repas. Son esprit allait toujours à Jeremy, l'ayant observé depuis le rocher tant il la trouvait jolie. Cela la fit à nouveau sourire.

Les jours derniers, la mère d'Elizabeth commença à s'inquiéter pour la santé de sa fille. En effet, Madame Walker trouvait son enfant bien trop distraite, s'endormant parfois même à la messe toujours avec ce sourire abruti peint sur son minois. Alors, cette mère dévouée se rendit chez le médecin du village, craignant un mal inconnu. Le docteur écouta patiemment sa peine, puis annonça d'une voix amusée.

« Très chère, il s'agit-là d'amour dont vous me parlez.

-D'amour ?! »

Madame Walker fut choquée, une main posée sur son cœur. Pourquoi diable Elizabeth serait amoureuse ? l'amour était péché, monsieur le Révérant le disait bien. L'amour conduit aux pires travers des hommes, l'amour est démon de nos consciences. Ce soir-là, Madame Walker en parla à son mari ; tous deux étaient bien d'accord. Cette diablerie ci n'avait pas sa place. Entre temps, tous deux ignoraient que leur chère petite et obéissante Elizabeth avait délaisser la corvée de linge pour se rapprocher de Jeremy, à leur plus grand dam.

Le lendemain, un terrible évènement secoua le village. L'on avait recensé des choses étranges, catégorisés comme maléfiques, et tous soupçonnaient une sorcière d'être dans les environs. Les villageois ainsi que Monsieur le Révérant se mirent donc à enquêter dessus. Les parents d'Elizabeth commencèrent à leur tour à participer activement aux recherches, tandis que la jeune fille continuait ses batifolages en secret. Bientôt, les divers crimes et l'aridité des terres devinrent si présentes et insoutenables, qu'il fallut trouver un coupable sur le champ. Monsieur et Madame Walker pensèrent alors à leur fille. Il était sûr qu'il s'agissait de cette fiancée du diable, car elle avait osé aimer, le plus risqué des pêchés, mais également le plus dangereux. Et un matin gris, la pauvre Elizabeth fut pendue sans autre forme de procès.

L'on peut constater, la seule véritable erreur de la jeune enfant fut de délaisser l'ignorance et la bêtise de son prochain.