La pluie s'est abattue sur Séoul depuis quelques jours et YoonGi a le coeur lourd. Tout va très bien avec son ami pourtant il a senti quelque chose de différent. Il y a un problème, c'est certain. Parfois Nam Joon lui dit que stopper les concours maintenant serait une bonne idée. Il ne voudrait pas que le pianiste souffre d'une défaite totale perdant la demi-finale et perde toute confiance en lui mais il ne se rend pas compte qu'en réalité, il vexe le petit qui veut continuer et s'affirmer par le biais de ces épreuves. Il n'a pas conscience de l'importance que tout cela à prise pour lui. Il soupire longuement puis se prépare un chocolat chaud. Ses mains vont bien mieux et il peut à nouveau jouer librement sans avoir mal. Il fait plus attention et prend tout à deux mains pour ne pas se blesser. Lentement, il verse le lait chaud dans sa tasse puis sort une petite brioche. Le pianiste s'installe dans le canapé puis mange silencieusement regardant parfois sa peluche favorite toujours à ses côtés. Il ne sait pas comment clairement dire à Nam Joon de lui faire confiance et d'arrêter d'avoir peur pour lui. Il veut grandir mais il ne pourra pas si on l'enferme constamment. Maintenant YoonGi veut essayer de sortir seul, de marcher plus vite et de courir. Lui qui en rêve depuis si longtemps. Mais il sait également que la réalité l'enchaîne. Son corps ne peut pas aller au-delà de ses capacités pourtant il continue d'y croire. Un jour il espère pouvoir réussir à être comme les autres. Ses yeux se ferment progressivement. Un jour il prendra son envol comme un oisillon quittant le nid pour devenir un oiseau.

Dans son nouveau rêve, YoonGi est à une grande réception. Il n'apprécie pas spécialement ce genre d'endroit étant désagréable avec la plupart des invités mais cette fois c'est en son honneur pour avoir gagné un prestigieux prix. Lui ne voit qu'une seule chose. Il a perdu Nam Joon. Impossible de reprendre contact avec lui depuis son rire et ses paroles blessantes. Il était triste de savoir que lui ne partageait pas ses sentiments et que depuis le début il s'était inventé toute une romance idiote. Dans un long soupir, il pose sa coupe et se dirige vers un endroit plus tranquille pour être un peu seul avec lui-même. Il ne fait que penser à Nam. Constamment, il ne peut pas l'oublier. Il aimerait au moins l'apercevoir dans toute cette foule mais il ne se fait pas vraiment d'illusions. Ce n'est qu'une pensée futile. Le pianiste reste assit fixant un point jusqu'à distinguer au milieu du monde celui qu'il attendait tant. Le jeune homme se tient droit avec un léger sourire sur son visage. Ses cheveux blancs sont parfaitement bien coiffés et laqués et son costume noir le met en valeur contrairement à YoonGi qui flotte un peu dans le sien. Rapidement, le petit se lève et s'approche de lui. Il aimerait au moins entendre sa voix.

Enfin, sa main se pose sur son épaule. Nam Joon se retourne lentement et découvre le visage triste de pianiste. Il sourit un peu plus et le félicite pour avoir réussi à gagner un tel concours. Il ajoute que sa composition ainsi que son interprétation étaient incroyables. Ils ne s'échangent aucun mot concernant leur entre-vue sous les cerisiers. Le petit le remercie poliment puis décide de sortir prendre l'air pour verser quelques larmes, ému de ses paroles mais aussi de ce manque cruel de tendresse envers sa personne. Il aimerait obtenir tellement plus du jeune homme que des simples regards sympathiques. Silencieusement, adossé contre un mur en observant les étoiles, il pleure. Il ne sait plus vraiment quand il a commencé à aimer ce type. Peut-être après l'avoir croisé dans les couloirs de leur établissement. Son charme et sa prestance l'avaient attiré sans doute. Depuis ce temps il n'arrivait pas à se défaire de lui et ne pouvait pas se résoudre à l'ignorer. Il le voyait partout. Au fond de la salle dans ses représentations, dans les coulisses, dans les cérémonies. Le pianiste l'aimait et voulait lui dire avec assurance. Voilà où il en est maintenant. Il entend des bruits de pas et se retourne timidement avant de découvrir Nam Joon. L'émotion monte un peu plus quand il entend son nom s'échapper de ses lèvres. YoonGi.

Quelqu'un le secoue doucement pour le réveiller. L'étudiant est inquiet. En arrivant dans le salon il a trouvé son ami endormi mais le visage couvert de larmes. Soudain, le petit ouvre les yeux et repousse le jeune homme en lâchant un cri de tristesse. Nam se rattrape maladroitement manquant de tomber, surpris.

« YoonGi doucement, c'est moi Nam Joon !

C'est de ta faute si je suis malheureux ! Je pleure constamment, tu crois que gagner me rend heureux ? Absolument pas ! Il n'y a que toi qui le peux mais tu m'ignores !»

Nam ne bouge plus, la bouche légèrement entre ouverte. Son ami délire surement à cause d'un cauchemar mais qui le rend si malheureux ? Quelqu'un dont il serait amoureux, surement. Mais la même question revient. Qui ? Essayant de mettre ça de côté, il s'approche et passe ses bras autour du petit pour le calmer. Sa grande main caresse ses cheveux tandis que l'autre continue de se débattre et de crier, les larmes dévalant ses joues.

« Allons, tu as fais un cauchemar. C'est tout. YoonGi, s'il te plaît.. C'est moi, Nam Joon.»

Finalement YoonGi retrouve progressivement son calme et reprend sa respiration. Ses spasmes se stoppent enfin et il reste dans les bras de son ami pendant un moment, ses mains serrant sa chemise. L'étudiant le soulève avec délicatesse et le porte jusqu'à sa chambre où il l'installe sur son lit lui tendant sa bouteille d'eau. Il sait que ça lui fait toujours du bien de boire un peu. Sa main caresse son dos et il attend ne posant aucune question. Il ne veut pas encore l'embêter avec tout ça même si cela le trouble. Finalement il se risque à prendre la parole en voyant que le petit ne décrochera pas un mot.

« Si les concours te stressent trop, abandonne. Ne te rends pas malade avec ça.»

Lentement le pianiste tourne la tête. Abandonner ? Il espère que le délégué se moque de lui parce que c'est impensable de tout arrêter maintenant. Il réussit enfin à s'affirmer grâce à la musique et combat ses peurs malgré les difficultés et Nam Joon lui conseille de tout lâcher à présent. Il en est hors de question, pas après tous les efforts fait pour y parvenir. Il refuse de faire demi-tour et de fuir.

« C'est toi qui m'inscris, qui m'entraîne et maintenant à un mois du prochain concours tu me dis de tout abandonner ?!»

L'étudiant mordille sa lèvre. Non il ne voulait pas dire ça. Il pensait que YoonGi était trop stressé à cause de la compétition et qu'il devait se préserver, ne pas s'exposer au danger pour ne pas être blessé. Pas encore. Il veut éviter que le pianiste ne souffre trop comme à l'époque. Tout ce qu'il veut c'est son bonheur et il pensait que les concours lui donnaient plus de mauvaises choses que de bonnes. Il secoue la tête pour contester mais son ami se lève soudainement, énervé.

« Réponds !»

Il est incapable de dire quelque chose perdant ses mots face à lui. De toute façon qu'il dise quelque chose ou pas, ça ne changera rien. Il se doute que l'autre n'écoute plus rien, bien trop en colère à présent. Le petit le fusille du regard et continue de crier.

« Tu m'as dit que tu croyais en moi !

Mais je crois en toi.»

YoonGi tourne en rond comme un lion en cage passant ses mains dans ses cheveux. Il cherche ses mots pour construire une phrase malgré la tristesse qu'il éprouve. Nam Joon n'a donc pas compris à quel point il avait besoin de grandir et que le seul moyen pour lui d'y arriver était la musique ? Il lui adresse un nouveau regard et reprend froidement. Il est comme son frère. Il l'enferme et ne voit pas les conséquences. Il l'empêche de s'affirmer et de prendre son envol lui aussi. L'étudiant était prêt à le soutenir jusqu'à une certaine limite, effectivement, jusqu'à le garder dans une cage d'or.

« Laisse-moi. Si toi tu veux abandonner, tu n'as qu'à partir. Moi je vais continuer et te prouver que je peux gagner même sans ton aide.»

Nam Joon entre ouvre la bouche sans comprendre pourquoi il réagit d'une manière si forte. Il voulait juste se montrer attentionné avec lui. Il finit par secouer lentement la tête pour lui dire non mais le petit s'approche de lui pour le pousser en dehors de sa chambre et ne plus le voir. Le délégué lui demande plusieurs fois de l'écouter mais rien. Il aimerait pourtant se défendre et lui expliquer clairement ses intentions mais son ami ne veut plus lui laisser l'occasion. Pourtant il est tellement attaché à ce petit être et veut continuer d'être proche de lui pour le soutenir et le voir s'épanouir. Il finit par réussir à lui saisir l'avant-bras et plonger son regard dans le sien.

« YoonGi ! S'il te plaît, écoute-moi !»

Le petit refuse à nouveau et commence à se débattre en criant. En voyant son état Nam ne préfère pas continuer pensant que le combat est perdu pour le moment. Il baisse la tête et se recule lentement laissant sa main glisser dans celle de son ami. Il aimerait lui déclarer ses sentiments mais ce n'est pas le bon moment. Il est beaucoup trop en colère pour écouter et répondre à de telles avances. L'étudiant décide donc de partir en sachant parfaitement que discuter ne sera pas utile avec lui.

Ce soir, Nam Joon va se retrouver sous la pluie en larmes adossé contre un mur. Ses grandes mains vont essuyer plusieurs fois ses larmes qui ne le quitteront pas pendant plusieurs heures. Il comprendra qu'avec quelques paroles il a quasiment perdu YoonGi qui en plus à surement quelqu'un d'autre dans son coeur. Après tout, le pianiste est très secret et ne lui parle jamais de ce sujet alors il a pu tomber amoureux lors d'un concours en rencontrant un autre participant. Ce sera difficile pour lui de se dire que son ami n'éprouve pas les mêmes sentiments envers lui. Il va continuer à pleurer comme YoonGi qui lui sera dans son lit, serrant sa peluche. Déçu que l'étudiant n'est pas réussi à le comprendre et qu'il veut également le surprotéger au point de lui interdire d'affronter des épreuves alors que lui veut enfin grandir. Il veut devenir plus mature et réussir à trouver sa place dans ce monde. Il voudrait aussi avoir Nam Joon à ses côtés pour toujours mais d'un autre côté il ne veut plus le voir pour le moment, trop triste de penser que l'étudiant ne croit pas en sa force de se battre. Si vraiment le pianiste était fragile ses pieds auraient déjà quitté le sol pour laisser son corps s'envoler loin dans les nuages et disparaître.