En vérité, ma question était idiote: j'avais un moyen tout trouvé de me rendre à Pré-au-lard.

C'était donc pour cela que je me retrouvais à sillonner le ciel illuminé par les étoiles sous ma forme d'Animagus.

Super.

Plus tu grandis, très chère, plus tu as tendance à te retrouver dans des situations... improbables.

J'amorcai ma descente vers le caractéristique village, sans prêter plus attention que ça à cette petite pique.

- Bon... lancai-je pour moi même après ma détransformation.

Il faisait froid, pour une fin de mois de septembre.

À partir de maintenant, le tout devenait plus compliqué. Il fallait absolument que j'entre dans le château sans me faire remarquer. Autant annoncer la couleur immédiatement, c'était mission impossible.

Sauf depuis un seul endroit, accessible depuis Pré-au-lard: la cabane hurlante.

J'étais manifestement repartie pour un tour.

. . .

- Accueillant et chaleureux, par ici.

Cet endroit me fichait froid dans le dos, mais je n'avais pas vraiment le temps d'écrire un article pour un futur guide touristique, je voulais seulement arriver près du saule cogneur. Le vieux plancher d'ébène craquait sous mes pas, et j'avais la claire impression d'être oppressée par l'atmosphère sombre qui régnait ici.

- Bouge toi, ma vieille, bouge toi...

Je passai dans le petit tunnel qui menait sous le saule cogneur et que j'avais découvert avec James en début de troisième année. J'immobilisai l'arbre grâce à un Stupéfix qui atteignit droit sa cible, à savoir la petite racine dont Pettigrow se servait, à son époque, pour les besoins des Maraudeurs.

En soi, il ne me restait plus qu'à éviter les préfets et les professeurs lors de leurs rondes, et le tour était joué.

Sans me faire remarquer, je m'engageai dans le Grand Hall, et me dirigeai vers le premier couloir qui me vint à l'esprit. Il fallait à tout prix que je reste en mouvement, ou bien j'allais finir par me faire prendre.

Là où ils ont laissé leur histoire racontée.

Je retournais le problème dans ma tête, encore et encore, mais je ne parvenais pas à savoir de quoi il était question.

Ce fut à ce moment là que j'entendis deux voix, dans un couloir voisin, qui se rapprochaient de plus en plus.

- On se sépare ici et on se voit demain en Potions. Bonne nuit, Zabini.

Je me cachai derrière une statue, bloquant ma respiration, cherchant à ne pas me faire remarquer. Le garçon passa devant moi sans me voir, mais j'avais besoin de lui. J'attrapai son poignet le plus vite possible et l'attirai contre moi, plaquant ma main contre sa bouche.

- Tu cries, je te tue. Contente de te revoir, Potter.

. . .

- Rogue ?

Il avait l'air mi-choqué, mi-en colère, ce qui était compréhensible. En récupérant Albus, j'aurais sûrement la même tête. Enfin, si je le retrouvais un jour.

- J'ai cru que t'étais morte, lança t-il en me regardant droit dans les yeux, un pli soucieux formé sur son visage par ses sourcils froncés.

Sans que je m'y attende vraiment, il me prit dans ses bras, comme il l'avait fait ce jour là à l'infirmerie.

- Je suis... hum... fit t-il en se raclant la gorge et en passant la main dans ses cheveux. Content de te revoir.

Avant que nous ne puissions faire quoi que ce soit contre, une gêne s'installa entre nous, que je choisis d'interrompre par une simple question.

- Je cherche un objet en particulier. J'en ai besoin pour... pour quelque chose dont je ne peux pas te parler. Une carte, je pense. Quelque chose du genre, du moins.

Il avait l'air abasourdi, alors je passai ma main devant son visage pour qu'il m'offre au moins une petite réaction, infime soit-elle.

- Je suis toute une série d'énigmes, qui devraient me conduire à quelque chose d'important. Et la phrase qui est censée m'indiquer où la carte est cachée, c'est "là où ils ont laissé leur histoire racontée". De manière plus générale, le texte parle des quatre fondateurs de Poudlard.

Il m'observa quelques secondes, d'un air indéchiffrable, puis me donna la réponse d'une voix calme et claire.

- L'Histoire de Poudlard, non ? Ça me semblerait logique, vu que leurs agissements sont racontés dans ce bouquin.

D'accord, ça se tenait. Maintenant, il fallait que je trouve un exemplaire dans lequel l'Albus du futur avait pu cacher quelque chose.

- Tu as la carte avec toi ? demandai-je dans l'espoir d'obtenir une réponse positive.

Il hocha la tête vivement, et je lui attrapai le bras en moins de temps qu'il fallait pour dire "Quiddich".

- OK. Il faut qu'on aille à la bibliothèque.

Je pris sa main dans la mienne et sans plus de discussion, nous nous engageâmes dans le couloir sinueux qui menait à l'endroit qui m'intéressait.

. . .

- Tu sais, tu fais ce que tu veux, hein. Mais je veux savoir ce que tu cherches. C'est dangereux ? chuchota t-il, une lueur étrange allumée dans le regard.

En soi, "dangereux" n'était pas le premier mot à me venir à l'esprit. Pour le moment, j'avais juste évité les gens qu'il ne fallait pas que je croise. C'était tout.

- Je... Ces énigmes me permettront de le ramener, répondis-je en appuyant particulièrement sur le "le".

Son geste se suspendit totalement, et il resta planté là, au milieu de ce couloir.

- Tu cherches Albus ?

Il semblait perdu.

- Oui, je cherche Albus. Et si je ne trouve pas cette fichue carte, je ne risque pas de le retrouver.

Il reprit, sa colère masquée par un calme apparent qui ne me trompait pas. Je connaissais ce genre de mimiques chez James Potter: le calme avant la tempête à l'état pur.

- Tu vas aller t'infiltrer dans l'antre de Bellatrix. Tu vas sûrement mourir comme Albus doit l'être à l'heure qu'il est, et ce depuis un bon moment. Elle va te torturer.

Il m'attrapa le poignet tellement fort que j'étais sûre d'en garder une marque durant plusieurs jours.

- Elle ne me fera rien. Elle n'osera pas me toucher, James. Il y a des choses que tu ignores et qu'il faut absolument que je t'explique un jour. Disons que... quelqu'un lui a interdit de me toucher.

Il fronça les sourcils puis ouvrit encore une fois la bouche.

- Qui te dit que ces énigmes ne sont pas un piège pour que tu te jettes droit dans la gueule du loup ? Et puis qui a interdit à Bellatrix de te toucher ? Si je ne m'abuse, ton père n'a pas eu de contacts avec elle depuis un bon moment ! À moins que je me trompe et qu'il soit finalement un véritable mangemort ! Qui sait, peut être que tu en es une aussi ?

Son visage était déformé par la colère et chaque des inflexions de sa voix étaient renforcées par sa rage.

- Ma mère est une mangemort, lâchai-je sans réfléchir. Tout ce dont j'ai besoin, c'est de cette carte et de reprendre mon voyage. Si tu ne veux plus avoir rien à faire avec moi, laisse-moi ici, mais ne préviens personne de ma venue.

Un silence envahit l'espace entre nos deux corps, et je finis par reprendre la parole.

- Si je ramène Albus, suis-je toujours une mangemort ?

Il secoua la tête dans un signe négatif.

- Très bien. Dans ce cas, James, je te dis à bientôt.

Je l'observai une dernière fois et disparut à l'angle du couloir en direction de la bibliothèque, ravalant mon envie de pleurer. Pourtant, quelques secondes après, j'entendis un murmure dans l'obscurité.

Deux mots.

- Bonne chance.