ℂ𝕙𝕒𝕡𝕚𝕥𝕣𝕖 10 𝑇𝑎𝑒ℎ𝑦𝑢𝑛𝑔
Mon esprit bouillonnait de colère et d'impatience, mêlant des sentiments sombres et envahissants. L'image de Jeon Jungkook me revenait sans cesse en tête. Mon plan ? Le plonger dans un véritable cauchemar, jusqu'à ce qu'il supplie de se soustraire à ces cours de soutien insupportables. Chaque minute passée en sa présence était une torture, mais je savais que je ne pouvais pas me libérer de cette situation si je voulais éviter la colère redoutable de ma mère. Alors, je m'étais résolu à faire de sa vie un enfer, à épuiser son moral et sa patience.
Aujourd'hui, dans les couloirs de l'établissement, mon humeur était exécrable, vannant d'une tristesse froide et teintée d'animosité. Dans ma tête, des mots acerbes tourbillonnaient tandis que je repoussais d'un geste méprisant cet idiot qui avait osé me fixer de trop près. La confrontation avait rapidement dégénéré, et je m'étais retrouvé avec une heure de retenue en guise de punition. Génial.
"Qui a eu l'idée stupide d'organiser un cours de sport un après-midi de ce maudit mardi ?" pensais-je, un soupçon d'irritation pulsant à chaque syllabe. Ce lycée n'était qu'un repaire d'insignifiance, et pour une raison que je ne comprenais toujours pas, j'y étais coincé.
Maintenant, enfermé dans cette salle punitive, je fulminais. J'aurais dû être libre, à l'extérieur, à profiter de l'air frais. Mais non, je subissais une heure interminable à contempler les murs. Mon téléphone vibra soudain, et je vis apparaître le nom du garagiste sur l'écran. C'était lui qui m'annonçait que je pouvais enfin venir récupérer ma précieuse Jeep.
Le monde entier me poussait à bout. Après une heure à tourner en rond dans cette salle, je sortis enfin aux alentours de dix-huit heures, une bouffée de soulagement se répandant en moi quand je vis Minho m'attendre à l'extérieur, avec sa voiture garée.
" Sérieusement, je n'arrive toujours pas à croire que tu sois croyant et que tu ailles à l'église, alors que tu te comportes comme un abruti." Il grimaça, lançant cette phrase alors que nous grimpions dans sa Renault Clio.
"Être croyant et fréquenter l'église ne signifie pas être coincé du cul," grognai-je, la frustration montant en moi. Je commençais à en avoir marre de ce genre de commentaires.
Minho haussa les épaules, amusé. "Dis-moi, est-ce que tu as aussi une bible ?"
Je soupirai, sachant que depuis qu'il avait découvert que je mettait les pieds à l'église de temps en temps, il ne manquait jamais une occasion pour me bombarder de questions qui me semblaient ridicules.
"J'en ai une sur mon téléphone portable," répondis-je en descendant du véhicule, m'étant déjà engagé vers le garage pour récupérer ma Jeep.
En approchant de la porte du garage, je sentis une légère anticipation. Ma Jeep, c'était une pièce de mon identité, quelque chose qui me représentait vraiment. Je voyais déjà son apparence brillante, prête à me donner cette sensation de liberté dont j'avais tant de besoin.
Alors que j'entrais, un sourire se dessina sur mon visage, chassant temporairement l'orage de mes pensées. Je pourrais maintenant quitter cette journée infernale derrière moi. Je voulais m'éloigner de ce lycée et de tous ses soucis, et même si Jungkook continuait à me frustrer, je savais qu'il me fallait plus que tout ça. Je voulais que cette journée me rappelle qu'il y avait des choses encore plus importantes que les querelles et les cours de soutien.
"Tu n'oublieras pas les cours de soutien, n'est-ce pas ?" lança Minho avec un sourire malicieux en voyant mon enthousiasme pour ma voiture.
Je me retournai, un brin sarcastique dans la voix. "Évidemment. Tu me prends pour qui ? Ce n'est pas moi qui vais fuir, mais Jungkook."
Une fois à bord de ma voiture, je décidai de regagner ma maison alors que Minho se dirigeait vers la sienne.
Mes sœurs n'étaient pas présentes à la maison. Elles passaient une semaine sur deux chez leur père, et lorsque c'était le cas, notre nourrice, madame Min, pouvait rentrer chez elle plus tôt car elle s'occupait également de So-mi. Cela signifiait que la maison était étrangement calme aujourd'hui. Je savais que ma mère devait se trouver dans son bureau, probablement plongée dans le travail. Pour ma part, je n'avais même pas pris la peine de changer mon uniforme scolaire après une journée déjà chargée. Je me dirigeai donc vers la cuisine, un ventre grognant à cause de la faim.
Je préparai rapidement un sandwich, les gestes devenant presque automatiques. Le pain se plia sous mes doigts alors que je le garnissais de quelques tranches de jambon et de fromage. Une fois satisfait de ma création, je fouillai le réfrigérateur à la recherche d'un coca. La canette froide me fit plaisir, et je la pris avec moi avant de gravir les escaliers.
Dans ma chambre, un petit bruit me tira de mes pensées. Miaou, mon chat, était venu frotter son museau contre mon pied, cherchant probablement de l'attention. Je déposai ma nourriture sur ma table de bureau et le pris dans mes bras pour lui donner ses fameuses "papouilles". Il ronronna un instant avant de se détacher de mes bras, s'éloignant sans même prendre la peine de me regarder.
Quel égoïste, celui-là.
Je souris en le regardant partir. Miaou, avec sa personnalité si indépendante, ne manquait jamais de me surprendre malgré tous ses caprices. J'aimais cependant sa façon d'être. Je m'installai à mon bureau, prêt à passer le reste de la soirée à dessiner.
Avec précaution, j'ouvris mon carnet noir et blanc, feuilletant ses pages déjà remplies de croquis, de paysages et de portraits. Mes pensées dérivèrent vers le jour où j'avais découvert ma passion pour le dessin. C'était il y a des années, lors d'une exposition d'art à l'école. La beauté des œuvres exposées m'avait complètement captivé. J'avais alors décidé de me plonger dans cet univers: depuis ce jour-là, le dessin était devenu mon refuge.
Alors que je commençai à crayonner sur une page vierge, je réalisai à quel point le silence régnant dans la maison me permettait de réfléchir. Les murs, souvent témoins de disputes et de rires, semblaient aujourd'hui apaiser mon esprit. À travers les lignes de mon crayon, j'exprimais ces émotions que je cachais au fond de moi, donnant vie à une partie de moi-même que peu de gens connaissaient. Les ombres et les contrastes se dessinaient, créant un univers que je pouvais maîtriser. Les couleurs, superflues, n'avaient pas leur place ici. Le noir et blanc, c'était mon style, mon monde.
Les minutes s'écoulèrent, et je me laissai emporter par mon art. Chaque coup de crayon était précis, presque comme une cadence familière. Je passai d'un dessin à l'autre, explorant différents sujets, cherchais des perspectives nouvelles et des compositions intrigantes. C'était ma manière de fuir la monotonie du quotidien, d'échapper à la pression des cours et aux attentes familiales. Dans ce petit espace de papier, je me sentais enfin libre.
La lueur du jour qui filtrait à travers les rideaux commença à s'estomper, et je réalisai alors que j'avais perdu la notion du temps. Un rapide coup d'œil à ma montre me fit comprendre à quel point une heure s'était déjà écoulée.
Je fermai mon carnet avec précaution, prenant soin de ne pas l'endommager avant de le ranger soigneusement dans mon tiroir. Je me levai de ma chaise, étirant mes bras et mes jambes, ressentant la fatigue s'installer dans mon corps, mais aussi une sensation d'apaisement profond.
Je m'approchai de ma fenêtre, admirant le spectacle nocturne qui enveloppait doucement la ville. Les lumières scintillaient dans les rues, créant un tableau magnifique qu'aucun artiste ne pourrait forcément capturer. Tout semblait en harmonie, baigné dans une douce lumière, et pour moi, ce moment d'introspection vivait un tableau en noir et blanc, parfait et silencieux.
C'était l'une des principales épreuves de ma vie, un fardeau que je n'avais jamais souhaité porter. Mon achromatopsie, cette condition rare, me condamnait à vivre dans un monde de nuances ternes, dénué de couleurs, comme si chaque journée était projetée à travers un filtre gris. Je ne savais pas ce que c'étaient les couleurs ; je n'avais jamais eu la chance de les voir. Pour moi, le rouge était un concept abstrait, le bleu une notion lointaine. Tout ce que je pouvais contempler, c'était un dégradé de noir, blanc et quelques nuances de gris.
Les journées ensoleillées étaient particulièrement éprouvantes. La clarté du jour me faisait mal aux yeux. Les lumières vives altéraient ma vision, créant une douleur insupportable derrière mes paupières. Pour atténuer cet inconfort, je portais souvent des lunettes de soleil, même dans des circonstances où d'autres auraient ri de mon besoin d'une telle protection. Les gens n'en savaient rien alors ils pensaient que mes lunettes de soleil c'était pour me donner un genre. Mais c'était ma réalité, et seule ma mère et quelques amis proches savaient à quel point c'était un défi quotidien. Mes demi-sœurs, elles, en ignoraient tout. J'avais parfois la sensation qu'elles pensaient que mes difficultés étaient d'une simplicité déconcertante. Ari avait bien remarqué que j'avais des problèmes avec les couleurs, mais derrière son regard amusé se cachait l'idée que j'étais juste un peu... stupide, ou peut-être simplement daltonien à mes heures. Peu importait, en vérité. Les nuances de ma condition étaient bien plus graves qu'elle ne pouvait l'imaginer.
À chaque fois que je croisais le regard de Lindsay, j'étais frappé par la clarté de ses yeux. J'aurais voulu connaître la couleur qui les caractérisait, tant de gens disaient qu'ils étaient bleus. Mais cette nuance m'échappait. C'était comme essayer de saisir de l'eau avec des mains ouvertes, incapable de comprendre ce qu'elle pouvait symboliser. Quand je regardais les autres, je voyais leurs visages illuminés par une palette de couleurs vibrantes, des teintes que je ne pourrais jamais apprécier. Je pouvais m'imaginer regardant un coucher de soleil, mais tant de personnes me disaient que chaque couleur avait sa propre signification, sa propre essence, et il me manquait tout cela.
Mon cœur se serrait à cette pensée. Je m'interrogeais souvent sur ce que c'était que d'admirer un arc-en-ciel après une pluie, d'observer les subtilités d'une fleur au printemps, ou encore de savourer le rouge vif d'une fraise, son goût sucré promettant des plaisirs estivaux. Je rêvais de ces choses, les couleurs restant des figments de mon imagination, de douces promesses inaccessibles.
Être achromatopsique n'était nullement un don à envier. C'était un regard qui transcende le noir et le blanc, un regard qui ne pourrait jamais savourer la beauté d'un monde coloré. J'étais sensible à la tristesse qui émanait de ce manque, soutenant le poids d'un isolement invisible. Comme si chaque sourire que je voyais autour de moi était teinté d'une teinte que je ne pourrais jamais exercer. Ma cécité de couleurs était une prison, et pourtant, j'étais en quête de lumière à l'intérieur de moi, me promettant qu'un jour, je découvrirais l'éclat éclatant de ce que c'étaient réellement les couleurs.
Mon monde était monochrome, un tableau vierge où tout restait figé. Mais au fond, j'espérais ardemment que ma vision changerait, que la vie un jour me dévoilerait tout un arc-en-ciel de sensations. Que je pourrais enfin dire, avec émerveillement dans la voix, à quel point la lumière était belle dans chaque couleur.
°
Lorsque j'émergai de mon sommeil ce matin-là, une légère grimace me tirailla les lèvres. Une fois de plus, j'avais omis de prendre le temps de manger la veille au soir. Malgré le sandwich que je m'étais préparé, je l'avais abandonné sur mon bureau sans y toucher. Oublier de manger était devenu une habitude pour moi.
Après ma douche, je descendis paisiblement jusqu'à la cuisine, où madame Min m'attendait invariablement dès sept heures du matin. Elle était fidèle au poste, cette brave âme.
"Bonjour Taehyung", me salua-t-elle en disposant devant moi un jus d'orange fraîchement pressé ainsi qu'un délicieux morceau de tarte fait maison.
Bien qu'elle ne connaisse de moi que mon insolence proverbiale, je l'appréciais secrètement. Elle était notre femme de ménage, cela était indéniable, mais je la considérais d'une façon bien différente.
"C'est délicieux, Yoonji", soufflai-je avec un sourire sincère.
Son étonnement se peignit sur son visage, car d'ordinaire, je restais silencieux en sa présence, impassible. À cet instant, elle m'offrit à son tour un sourire bienveillant avant de poursuivre ses tâches domestiques.
Je posai ma voiture sur le parking, m'éloignant vers l'entrée, mes lunettes de soleil éternelles joliment posées sur le nez. La lumière éclatante du soleil était bien trop intense pour mon regard aujourd'hui. Conduire devenait un défi ardu lorsqu'on est atteint d'achromatopsie, comme c'était mon cas. Les feux de signalisation, par exemple, se transformaient en véritable cauchemar, mais j'avais appris à distinguer quand ils passaient au rouge, en m'attardant sur chaque teinte éclatante qu'offraient les couleurs les plus vives.
Tous pensaient que je portais ces lunettes de soleil en permanence par pur snobisme, et tant mieux. Une fois dans les couloirs, je les retirai doucement, me dirigeant vers Minho et Lindsay, qui discutaient près des casiers. Lorsque j'atteignis leur proximité, Lindsay m'accueillit avec un baiser sur les lèvres et se blottit contre moi. Je saluai également Minho, et nous passâmes quelques minutes à échanger avant de nous rendre chacun dans notre salle de classe respective.
Ce soir, j'avais cours de soutien avec Jungkook et j'avais envie de me pendre.
Quelqu'un aurait une corde ?
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Qu'avez-vous pensé de ce chapitre qui révèle un peu plus sur Taehyung ?
Voilà comment le niveau de daltonisme de Taehyung lui fait voir le monde c'est rare d'en arriver là mais c'est bien réel.
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