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- Phœbé, s'il te plaît, arrête de faire la tête, l'encourage doucement April.
- Je ne fais pas la tête, c'est mon expression naturelle, marmonne la concernée.
- Avoir les sourcils froncés, les yeux plissés, le nez retroussé et la bouche pincée est une expression naturelle ? poursuit sa mère, sceptique. Moi, j'appelle cette tête, une tête soucieuse. C'est ton chéri qui te tracasse ? s'enquit-elle avec un air rempli de sous-entendus.
- D'un : je ne suis pas songeuse, je réfléchis, de deux : Chad n'est pas mon chéri et de trois : cet idiot est le cadet de mes soucis, peste l'étudiante.
En tout cas, la version actuelle de cet idiot est le cadet de ses soucis, car celle du passé, quant à elle, accapare toutes ses pensées au point de lui en donner d'horribles migraines.
- C'est également parce que ce n'est pas ton chéri que tes appels deviennent aussi espacés ? Mademoiselle je ne suis pas songeuse, je réfléchis, quémande la rousse, sournoisement.
- Depuis quand dire Mademoiselle plus un extrait de phrase est une mode ? soupire Phœbé.
- Depuis que mon Bébé raconte n'importe quoi, déclare April tout sourire. Tu es bien mignonne lorsque tu boudes néanmoins, je veux que tu affiches un joli sourire en rentrant dans cette maison, la prévient cette dernière avec une légèreté presque effrayante.
- Comme ça, c'est bon ? s'assure l'ancienne étudiante en lui adressant un grand sourire forcé.
Sa mère adoptive rit et lui donne une faible tape sur l'épaule. Phœbé l'imite et passe son bras sur la nuque de la rousse tandis que celle-ci faufile son bras dans son dos tandis que Jay passe devant afin de toquer à la porte de la demeure de ses parents. Une immense demeure qui se trouve à deux heures de route de chez eux et tout ça pour un stupide anniversaire de mariage dont elle ne comprend pas le principe.
À quoi cela sert-il de fêter cet événement ? À les féliciter de ne pas avoir encore divorcé après X années ? De se supporter encore malgré l'insupportable caractère de Madame Brown ? Ou alors de montrer une image faussée d'eux ? Car il faut l'avouer, les parents de Jay sont les plus hypocrites jamais vus sur Terre. Et pour ajouter au charme de ce couple aux innombrables qualités, ce sont des homophobes endurcis alors qu'une de leur propre fille est homosexuelle et des racistes invétérés que ce soit envers les espèces surnaturelles ou alors envers les personnes « de couleurs » comme ils aiment si bien le dire.
On pourrait se demander ce qu'une Afro-Américaine, qui plus est adoptée et liée à un loup, fait ici et la réponse est qu'honnêtement, elle n'en a aucune idée. Ah non, elle retire, elle en a une parfaite idée, c'est grâces à ses adorables parents qui l'ont traîné de force dans ces lieux à la décoration surfaite. Pour le coup, elle les remercie du fond du cœur, surtout, que pour ce couple xénophobe, la jeune femme a dû revêtir sa magnifique combinaison noire en dentelle qu'elle aurait tout autant préféré mettre à leur enterrement.
La porte d'entrée s'écarte et Phœbé retient de justesse un soupir d'agacement en découvrant le benjamin de la famille alias le pervers. Ce crétin âgé de presque une trentaine d'années s'amuse à lui faire des avances dès qu'il en a l'occasion, du fait que contrairement à ses parents, il adore les femmes de teintes plus foncées que la sienne.
Ce sale type lui embrasse langoureusement la joue de ses lèvres froides quand vient son tour des salutations et lui dit de façon très explicite à quel point il est ravi de la revoir tout en la déshabillant du regard. Qu'est-ce qu'il empêche de frapper ce porc ?
Le contournant largement, la jeune femme attend April qui passe sans aucune embûche avant de rejoindre Jay un peu plus loin. Il est en train de discuter avec ses sœurs jumelles de deux ans ses cadettes, qui n'ont que quelques traits en commun : leurs longs cheveux aux reflets blonds, leurs yeux émeraude qui n'ont rien à voir avec le reste de la famille, leur fin nez, leur sourire immaculé et leur taille identique.
Pour ce qui est de l'apparence physique en général, c'est un total opposé. Améthyste, la plus grande d'une minute, est douée d'un corps athlétique et de traits très prononcés par la finesse de son visage alors que la benjamine, Émeraude, est plus ronde et dotée de traits plus doux. Les deux sont de très belles femmes, cependant, cette dernière paraît posséder quelque chose en plus qui la rend plus attrayante que son aînée. Leur prénom à la syntaxe et à la prononciation exclusivement française rend parfaitement justice à ce duo si particulier.
- Mais c'est ma nièce préférée, sourit Émeraude en ouvrant ses bras à la vue de Phœbé.
Celle-ci sourit et se glisse volontiers entre ses bras.
- C'est la mienne aussi, je te signale, peste sa jumelle.
- Première arrivée, première servie, rétorque-t-elle. Et puis, priorité à la marraine, ajoute-t-elle gaiement en embrassant la joue de l'Afro-Américaine. Je commençais à m'inquiéter à ne plus te voir aux repas de famille.
En continuant de bavarder et entourée des deux femmes, Phœbé est entraînée dans l'énorme salle de séjour où se trouvent les stars du jour, tout un tas d'invités et une montagne de cadeaux. Tant de choses pour un couple si près de la mort. April et Jay prennent leur direction et ces deux hypocrites sourient de ravissement jusqu'à ce qu'il la voie elle, le vilain petit canard et que leur sourire ne devient qu'une ligne droite.
Sûrement, doivent-ils se demander ce qu'elle fiche ici ? Et l'intéressée se le demande également. Malgré sa parfaite connaissance de leur point de vue concernant sa personne, l'Afro-Américaine se rapproche d'eux, parée d'un énorme sourire, et leur tend sa joue. Ils n'oseront jamais la repousser devant tous ces invités de diverses origines qui font partie de leur petit cercle si restreint et si faux, sans lequel tout s'effondre.
Vive l'hypocrisie. Vive le racisme. Vive l'homophobie. Vive la société moderne. Qu'ils aillent tous pourrir en paix et heureux en Enfer. Car sa mère lui a toujours appris à ne pas souhaiter le malheur aux autres et de toujours voir le côté positif des choses. Ou du moins, de rendre positives des situations qui n'ont absolument rien de bon en elles, même pas de zéro virgule un pour cent. Félicitations à ces mères qui tentent tant bien que mal d'éloigner leurs enfants de toute cette haine jusqu'à se faire passer pour des êtres naïfs.
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