𝐟𝐨𝐮𝐫
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Dans les couloirs vides, Inheung et Jiae marchaient côte à côte sans rien dire, n'ouvrant pas la bouche une seule fois. Le jeune homme se demandait bien comment un professeur avait pu demander à une jeune femme comme Jiae de porter une vingtaine de manuels comme ça, sans se soucier du poids de ceux-ci. La jeune femme à ses côtés se sentait quand à elle légèrement gênée du silence entre eux.
Elle se demandait si elle devait parler, discuter avec lui de choses et d'autres, mais elle savait qu'elle ne pouvait pas. Jiae se sentait trop gênée pour cela, cependant, la présence d'Inheung ne la faisait pas suffoquer comme celle des autres, elle était certes impressionnante, mais elle ne lui donnait pas envie de fuir. Surtout que personne ne les verrait ensemble à cette heure-ci.
Jiae se demanda d'ailleurs pourquoi le garçon était encore présent au lycée après les cours.
- Tu vas étudier à la bibliothèque ?
Sortant de son mutisme, il avait tourné son regard noir vers elle alors qu'elle levait désormais ses iris vers les siennes. Jiae fut un instant happée par la noirceur de celles-ci ; elle ne se rappelait pas en avoir vu d'aussi noires de sa vie entière. C'était comme si ces pupilles renfermaient la nuit en elle et ne brillaient que lorsqu'il souriait, comme si son sourire apportait les étoiles dans ses pupilles sombres.
Doucement, Jiae avala sa salive, ses joues rouges l'embarrassant.
- Oui.
Il avait remarqué qu'elle portait encore son sac, il en avait déduit que le professeur avait dû alors lui confier ces manuels parce qu'elle se rendait à la bibliothèque.
Il hocha la tête, attendant qu'elle ouvre la porte devant lui et qu'il y entre avant qu'elle ne le suive. Tout deux se dirigèrent vers la vieille femme qui gardait ce trésor de livres, comme un dragon gardait des tonnes d'ors. C'était d'ailleurs ce qui lui avait valu son surnom de dragon.
Lorsque le capitaine de basket posa les lourds bouquins sur son comptoir, la vieille femme releva ses yeux à travers ses lunettes en demi lune posées sur le bout de son nez ridé. Elle haussa les sourcils devant les deux jeunes gens devant elle. C'était un spectacle bien inhabituel pour elle que de voir Jiae accompagnée, de surcroît par Jung Inheung, lui qui n'avait mît les pieds ici qu'une seule fois et pour accrochée des photos compromettantes de Bangchan, un autre élève et le capitaine de l'équipe de foot, son rival en soit.
Le dragon souffla par le nez, amusée par les rougeurs de la jeune femme qui serrait la lanière de son sac entre ses fins doigts tandis qu'Inheung gardait ses mains dans ses poches, ses yeux parcourant la bibliothèque d'un air désintéressé.
- C'est rare de vous voir ici monsieur Jung, Jiae a dû vous traîner derrière elle pour que vous veniez ici.
Sa remarque moqueuse eut le don d'attirer le regard du jeune homme pendant que Jiae se dandinait sur ses pieds.
Madame Min se trompait, elle ne lui avait rien demandé. Peut-être s'était il senti obligé de l'aider lorsqu'elle avait faillit tomber, mais au fond ça lui avait fait plaisir. Elle se sentait idiote de penser ça.
- Hm, non elle ne m'a pas traîné. Je suis venu parce que je voulais l'aider.
- Bien je vois. Merci d'avoir rendu vos manuels, Jiae, sourit le dragon avec lassitude.
La jeune élève s'inclina respectueusement alors que Madame Min s'était déjà tourné vers une salle que seule elle et les professeurs pouvaient visiter. Inheung, lui, gonfla ses joues en roulant ses yeux au ciel. Il ne l'avait jamais aimé, ce dragon de malheur.
- Bon, tu vas étudier non ? Je vais rester avec toi le temps que Jinyoung ait fini avec son club, lui annonça la voix grave d'Inheung.
Tout d'abord, elle voulu refuser et lui dire que ce n'était pas la peine, mais il avait l'air décidé et puis, un peu de compagnie ne lui ferait pas de mal.
Alors, toujours sans échanger une seule parole, ils s'installèrent à une petite table ronde et Jiae sortit ses affaires et son manuel de littérature. C'était certainement sa matière préférée et ça lui faisait toujours plaisir d'étudier.
Pendant qu'elle s'affairait à lire les premières lignes de sa consigne, Inheung avait posé ses bras sur la table, en profitant pour y poser son menton. Désormais, Inheung pouvait allègrement observer le doux visage de Jiae ; ses cheveux bruns clairs coiffés en son éternelle queue de cheval haute, des sourcils légèrement froncés alors qu'elle lisait et ses lèvres entrouvertes, comme pour laisser entre les mots qu'elle lisait dans sa bouche et mieux les assimilé. Il l'observa plusieurs minutes ; il l'a voyait sans son air constamment gêné et ses joues rouges, il voulait absolument la revoir ainsi.
Il voulait revoir ce visage concentré pendant qu'elle lisait et, il se dit que s'il fallait qu'il affronte chaque jour le dragon pour cela, il le ferait sans hésiter une seule seconde. Un sourire amusé flotta sur ses lèvres lorsqu'elle posa sa joue dans la paume de sa main et joua un instant avec son stylo bleu pastel.
C'est à ce moment précis qu'il se rappela du stylo lapin qu'elle avait fait tomber lors de leur rencontre et il se maudit de l'avoir laissé dans sa trousse qui était restée dans la salle de classe. Il souffla par le nez, se traitant d'idiot tandis que ses paupières commençaient à devenir lourdes.
Cette nuit encore, il n'avait pas pu trouver le sommeil. C'était comme ça depuis... depuis... depuis la mort de Seunghyun. C'était comme s'il le tourmentait parce qu'Inheung n'avait pas su prendre soin de Noeul et, alors, la nuit, il n'arrivait pas à fermer les yeux sans que sa promesse avec sa meilleure amie d'enfance ne lui revienne en mémoire. Il était fatigué par cela, fatigué de sentir son cœur se morceler à chaque fois qu'il la croisait dans les couloirs ; mais il souriait et faisait le guignol comme pour lui dire que ça allait, il allait bien lui aussi.
Mais il savait qu'ils n'allaient pas bien. Ni lui qui l'avait abandonné ni elle qui continuait sa route seule.
Et puis, doucement, au rythme des pages que Jiae tournait, Inheung s'endormit d'un sommeil de plomb comme il n'en avait pas eu depuis trop longtemps.
𝐩𝐢𝐧𝐤 𝐜𝐨𝐧𝐯𝐞𝐫𝐬𝐞𝐬
- Alors ? Tu t'es toujours pas confessé à Shihiro ?
Ses yeux rieurs, son sourire moqueur et son visage éclatant se tournèrent vers sa meilleure amie, Kim Noeul, qui lui lança un regard noir, agacée par ses moqueries depuis qu'elle lui avait avoué avoir un faible pour le japonais.
Son petit poing fermé atterrit sur l'épaule du garçon alors que ses joues devenaient légèrement rouges, Inheung rigolant devant ses airs de petites filles.
- Laisses moi tranquille ! Tu comprends pas ce que c'est !
- Bien sur que non je ne comprends pas, y'a que les nanas pour tomber amoureuses en un clin d'œil, rigola avec sarcasme le garçon.
D'une œillade courroucée, elle lui dit comprendre de se taire, mais il avait l'habitude de ses regards noirs et de son sale caractère, après tout, ils se connaissaient depuis qu'ils étaient enfants, étaient en seconde dans le même lycée, dans la même classe.
Ils passaient leurs temps ensemble, et comme tout les vendredis, Inheung et Noeul se dirigeaient vers les quais près du port, ignorant le frère aîné de la jeune femme qui les engueulait de ne pas rentrer assez tôt selon lui.
Et, pourtant, plus le temps filait, plus Inheung se rendait compte d'à quel point noeul devenait une femme. Elle avait des prétendants, comme lui avait des prétendantes, mais Noeul était populaire. Elle était gentille, jolie et souriante. Les garçons s'intéressaient à elle et, il savait qu'elle avait fini par craquer pour Yohkomura Shihiro, d'un an leur aîné.
Il n'avait rien contre Shihiro, il trouvait ce garçon amusant et plutôt gentil, c'était plutôt-
- Jiho m'a encore demandé de sortir avec lui.
La voix de Noeul avait coupé court au silence tandis que les deux jeunes s'asseyaient au bord du quai, les semelles des converses noires d'Inheung touchant presque la surface de l'eau tant le jeune homme était grand. En comparaison, les sandales claires de Noeul arrivait à peine aux mollets de son meilleur ami et cette remarque la fit grogner.
Inheung, lui, regarda un instant les traits tirés de son amie. Sous la lumière orangée du coucher de soleil qu'ils venaient voir ici chaque vendredis soirs depuis leurs dix ans, elle semblait radieuse, comblée, heureuse, bien loin des pleurs que Woo Jiho inculquait à toutes ses anciennes conquêtes.
Parce que Inheung le connaissait, ce garçon. Ils faisaient partis de la même équipe de basket du lycée Han dont Inheung était le capitaine. Il l'entendait se vanter de ses conquêtes et de celles qui revenaient pleurer parce qu'elles l'aimaient toujours, elles.
Parce que Woo Jiho, lui, n'en aimait aucune.
- Tu devrais continuer de refuser et arrêter de lui parler.
Il avait les sourcils froncés et Noeul se sentit attendri par son regard noir sévère. Quand ils étaient plus petits, les yeux noirs d'Inheung faisaient fuir la plupart de leurs petits camarades ; ils disaient qu'Inheung avait des yeux de démons.
Mais Noeul savait mieux que quiconque que ces yeux noirs renfermaient plus de douceur et de chaleur que n'importe quoi d'autres.
- T'inquiète pas.
- Bien sur que si je m'inquiète, tête de mule !
- Yah !
- Quoi ? Quoi ?
Il lui donna un coup de coude qui la fit éclater de rire pendant qu'il l'observait. Inheung savait qu'il aurait beau dire ce qu'on voulait, Noeul n'en faisait jamais qu'à sa tête. Elle était comme ça et même si elle choisirait la pire option, elle s'en fichait éperduement.
Pourtant, ils savaient tout deux qu'Inheung avait raison.
- Tu sais, peu importe si tu finis avec Shihiro ou Jiho, je serais toujours là pour toi.
Noeul releva ses yeux qui brillaient face aux rayons du soleil orange qui se reflétaient à la surface de l'eau. Elle observa le profil droit de son meilleur ami, son air serein alors qu'il observait le soleil descendre vers les eaux et son teint mate, et elle sourit doucement.
Il n'avait pas l'habitude de lui dire ce genre de choses parce que cela tombait sous le sens pour lui. Et ses mots gonflèrent le cœur de Noeul de joie alors qu'elle balançait ses pieds au dessus de l'eau d'un air enfantin.
- Faisons une promesse, Inheung-ah.
Le basketteur se tourna vers elle avec des sourcils froncés, attendant qu'elle continue pendant qu'elle se tournait aussi pour le regarder, lui tendant son petit doigts.
- Peu importe où nous sommes, nos métiers, notre âge ou nos vies amoureuses, on restera toujours ensemble et on se séparera jamais.
Sa voix douce avait prononcé ces mots d'une manière légère alors qu'ils étaient fait d'un poids lourds qu'aucun des deux ne comprenaient encore bien.
Inheung la regarda avec son sourire bien heureux, ses cheveux détachés encadrant son visage d'enfant alors qu'elle était entrain de devenir peu à peu une adulte, et, il entrelaça leurs doigts, la faisant doucement sourire. Leurs pouces se touchèrent alors, scellant leurs promesses et, le sourire moqueur, Inheung ne put s'empêcher d'ajouter ;
- Maintenant je suis obligé de te supporter toute ma vie, géniales tes idées.
- Tu veux que je te tue ?!
Ce sont sous ses rires qu'elle le frappa derrière le crâne, le faisant encore plus rire tandis qu'elle grommelait contre cet idiot qui l'avait toujours accompagné dans chaque moment de sa vie.
𝐩𝐢𝐧𝐤 𝐜𝐨𝐧𝐯𝐞𝐫𝐬𝐞𝐬
Il sentait une main dans ses cheveux, ses mèches contre des doigts fins et chauds alors que ses paupières s'ouvraient peu à peu, la lumière forte des lampadaires du stade de foot lui agressant les yeux alors qu'il releva doucement son visage, tombant avec étonnement sur le regard concerné de Jiae.
Elle semblait inquiète, penchée vers lui, ses sourcils froncés en une expression qu'il ne lui connaissait pas encore mais qu'il grava dans son esprit. Encore mal réveillé, il passa une main dans ses cheveux noirs et haussa un sourcil lorsqu'elle s'éloignait légèrement.
- Pourquoi tu pleures ?
Sa question le fit écarquiller ses fins yeux en amande tandis qu'il remarquait sa vision flouttait par ses larmes qui coulaient silencieusement, sans qu'il ne s'en rende compte, les souvenirs de son rêve ravivant la tristesse qu'il tendait si bien de cacher depuis qu'il avait rompu sa promesse.
Sa promesse avec Noeul.
Ses yeux larmoyants se dardèrent dans ceux de Jiae qui leva la main, comme pour atteindre ses larmes et les effacer, mais avant qu'elle ne puisse le toucher, il avait déjà fait volte face et était parti en courant, s'enfuyant à nouveau de quelque chose dont il ne se sentait pas capable.
Et, dans sa course, il se traita d'idiot.
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