Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

28:00:00


Le « happy end » final est de rigueur et célèbre le consensus sur le statu quo social et politique. La conjoncture n'est donc pas ici un moteur ou un acteur de l'action, elle reste un décor figé, les moteurs restant archaïques et traditionnels. Ces films ont la « couleur » de l'actualité, femmes modernes qui exercent une profession « d'homme », liberté de la presse, bien-être matériel des jeunes couples, mais ne traitent pas de l'actualité comme quelque chose sur laquelle les spectateurs-citoyens peuvent agir. Le nécessaire aller-retour permanent entre le contexte et les actes des personnages, que l'on trouve chez Park Kwangsu par exemple, et qui atteste d'une véritable mise en situation d'une problématique contemporaine, est absent.

Je raturai frénétiquement mon paragraphe en soufflant d'agacement. Les happy ends, quel beau mensonge. Une histoire se finissant sur ce happy end n'était jamais réellement terminée, ou alors elle cachait une part de vérité. Je comprenais pourquoi Jimin avait voulu faire ce dossier avec moi, il était long et commençait à me prendre la tête dès le matin.

Le ronronnement du rasoir électrique, qui me martyrisait les oreilles depuis plus de vingt minutes, s'arrêta à mon plus grand soulagement.

— Lève la tête pour voir, fit ma mère en passant devant moi.

Je redressai le visage de mon paquet de feuilles à mes genoux et la regardai observer mes cheveux. Les siens étaient attachés en une queue de cheval basse, et ses yeux jonglaient un peu partout, sa main arrangeant quelques mèches sur mon front. J'avais l'impression de ne plus avoir un poil sur le caillou maintenant. Un sourire étira ses fines lèvres et elle alla chercher un petit miroir dans la cuisine qu'elle présenta devant moi.

Ma mère était définitivement multitâche, c'était comme si un véritable coiffeur venait de m'arranger la tête.

J'avais à présent retrouvé ma coupe favorite, celle qui m'allait le mieux selon ma mère. L'arrière du crâne était assez court, remontant en un léger dégradé où mes mèches tombaient jusqu'au début de mes oreilles. Celles sur mon front étaient divisées en deux parties, donnant forme à un V à l'envers.

— Merci Maman, la remerciai-je en un grand sourire.

Elle embrassa mon front et retira la serviette qui couvrait mes épaules pour secouer tous les cheveux coupés aux sols. De ma chaise, que je venais d'avancer vers la table à manger où était disposé le reste du dossier sur lequel je travaillais depuis mon réveil, j'alignai le miroir et le rasoir électrique dans un coin pour aider un peu ma mère. Qui d'ailleurs me disputa gentiment, car elle préférait que je travaille sur mes devoirs plutôt que de l'aider à ranger deux trois babioles.

Bref, au boulot.

Onze heures trente-huit.

Je lâchai mon stylo en soupirant de frustration. Je n'arrivais pas voir le bout de ce foutu dossier de vingt pages.

— Qu'est-ce qu'on mange ce midi ? Demandai-je en me levant de ma chaise.

De mon pied nu, je tapotai le sol carrelé afin de vérifier s'il était toujours humide ou pas. Ma mère avait profité de mes cheveux coupés pour faire le ménage dans la salle, et je ne voulais pas gâcher son travail.

Voyant que tout était sec, je la rejoignis sur le canapé où elle était enveloppée dans un plaid devant sa série préférée. Son regard chocolat se posa sur moi, et elle me fit un léger sourire en m'invitant à s'installer à ses côtés. Chose que je fis sans attendre en déposant ma tête sur ses cuisses recouvertes de sa couverture, et m'allongeai de tout mon long. Mes paupières se fermèrent instantanément lorsque sa main se perdit dans mes cheveux.

— Je ne sais pas, finit-elle par répondre. On est que tous les deux ce midi, donc c'est comme tu veux.

Je fronçai les sourcils.

— Pourquoi on est que tous les deux ?

— Jihyuk et ses amis sont en ville pour la journée, c'est l'anniversaire de l'un d'entre eux à ce que j'ai compris.

Je les avais bien vu partir, mais je ne savais pas que c'était jusqu'à ce soir. D'ailleurs, je me demandais à qui était-ce l'anniversaire, Yoongi ?, Seokjin ?, Taehyung ?. Mon cœur s'emballa aux souvenirs de cette nuit qui revenaient à l'évocation de son prénom.

Finalement j'avais bien fait de trop manger hier soir.

Ou même, j'avais bien fait de gribouiller son discours.

Un sourire étendit légèrement mes lèvres pendant que mes yeux restaient clos sous les caresses de ma mère. Mina me fixait comme habituellement de ses yeux rouges sang, mais je les ignorais, la tête dans les souvenirs de cette nuit. Ce foutu démon était revenu dès que Taehyung et moi s'étions levés.

À mon réveil, j'avais la tête posée sur son bras, allongé sur le dos et mes mains de part et d'autres autour de mon corps. Et dès que mes yeux s'étaient ouverts, grâce à la légère lumière qui traversait mes volets, j'avais eu une vue directe sur mon patron. Lui, était déjà réveillé, et il fixait le plafond d'un regard vide. Je l'avais observé longuement réfléchir à je ne savais quoi, j'avais observé ses lèvres, son nez, son œil, l'autre étant caché. Je l'avais trouvé réellement beau.

Puis son visage s'était tourné lentement vers le mien, et nous nous étions regardé un temps que je ne pouvais mesurer. Aucun de nous deux n'avaient prononcé un quelconque mot jusqu'à son départ avec mon frère. J'avais eu envie de me rendormir tellement j'étais bien installé, sauf que la voix de Jihyuk gueulant dans l'escalier nous avait fait levé en panique. J'avais même failli trébucher de mon lit et Taehyung était retourné dans la chambre de Jihyung pour se changer. Personne n'avait rien vu.

Enfin bref, mon grand-frère de malheur avait encore tout gâché.

Ça allait faire bientôt deux heures que mon patron était parti avec ses amis d'enfances, et je ressentais comme un vide à l'intérieur.

Je soupirai, perdant mon sourire.

— Jungkook, murmura ma mère en me sortant de mes pensées.

— Mh ?...

— Est-ce que tu pourras aller promener les whippets cet après-midi s'il te plaît ?

— Oui j'irai...

— Merci mon chéri.

Je ne répondis rien en me contentant de me concentrer sur ses caresses répétitives dans mes cheveux tout frais coupés.

Un bâillement violent me prit d'assaut et ma mâchoire craqua soudainement, me faisant geindre et grogner ma mère. Elle détestait lorsque je faisais craquer mes doigts, mes poignets ou même ma nuque. Elle disait sans arrêt que plus tard, quand je serai vieux, mes mains se seront plus que du chamalow à cause de ces craquements. Du coup, je faisais exprès de le faire lorsqu'elle était dans les parages pour l'embêter. Bon, je me faisais gronder après mais ça m'avait toujours fait rire, ses expressions étaient fantastiques.

— Oh le con ! S'écria ma mère en me faisant sursauter alors que je commençais à m'endormir.

— Quoi ?... Gémis-je en refermant les yeux.

— Dongho a trahi Jinwoo ! 

Je ronchonnai. Ne jamais la déranger lorsqu'elle regardait son drama préféré car elle le vivait entièrement. Quand j'habitais encore avec elle, je pouvais l'entendre râler depuis ma chambre, c'était dire.

— Jungkook je te préviens, tempêta-t-elle sur un ton qui me fit doucement rire, si un jour tes histoires sont réalisées en films ou en séries, je ne veux pas de coup de pute !

Je me relevai soudainement et la regardai avec de grands yeux.

— Maman ! Depuis quand tu parles comme ça ? Elle croisa les bras sous sa petite poitrine.

— Depuis toujours, seulement tu n'étais pas là. Ton boudin de père réagissait exactement comme toi, rit-elle a gorge déployée. Bref chut, je regarde.

Je secouai légèrement la tête, un sourire aux lèvres et m'assis correctement dans le fond du canapé. Des fois, elle m'épuisait mais je ne pouvais pas m'empêcher d'être fière d'elle. Car même après l'accident tragique dans notre famille, elle n'avait pas perdu son sens de l'amusement contrairement à moi. Certes il n'y avait plus mon père pour délirer avec elle – je les avais plusieurs fois vu rire à en pleurer sans qu'on ne sache pourquoi, mais elle parlait toujours de lui comme s'il était encore en vie. Tel que boudin de père qu'elle venait de dire, ce bourricot, ou encore ce nul. J'idolâtrais ma mère pour sa force.

Je savais qu'intérieurement elle souffrait de son absence et de celle de son fils, car après tout, ce genre de douleur était incurable. Une mère ne pouvait pas se remettre complètement du décès soudain de son mari tant aimé et de son enfant tant chéri.

Mais elle continuait à monter vers la paix, alors que moi, j'en dégringolais depuis plus de dix ans.

À côté d'elle, de cette femme si forte, je ne pouvais cesser de me sentir honteux d'être son fils. D'être un fils si abominable.

J'en soupirai.

— Qu'est-ce qu'on mange alors ! S'écria cette dernière encore une fois lorsque le générique de son épisode commença.

— Des nouilles ou des pâtes, au choix.

Ses yeux légèrement ridés pivotèrent vers moi, et elle les plissa de malice. Son accoutrement m'amusait, elle ressemblait à un maki avec son plaid noir autour de son corps fin, jouant l'algue, et ses cheveux blanchissant, toujours attachés en une petite queue de cheval basse, qui jouaient le riz. Sa peau blanche participait au rôle du riz, aussi.

— On commande pizza alors, sourit-elle de ses dents de lapin.

Elle m'épuisait. Malgré ça, je ne pus m'empêcher de pouffer en la voyant se pencher vers la table basse pour attraper son téléphone.

— Je croyais que tu étais au régime, Maman... Elle pianota sur son écran avant de l'amener à son oreille.

— Il attendra ma mort, ses yeux amusés me fixèrent, il est aussi infidèle que Modération.

Décidément, elle était vraiment de bonne humeur aujourd'hui.

Et ce fut comme ça que quinze minutes après, j'étais en route pour aller récupérer notre commande sur Busan. Les livraisons ne se faisaient pas en dehors de la ville en elle-même, ce qui était bien dommage car cela nous éviterait de toujours faire l'aller-retour en voiture. Quoique, j'aurais pris des kilos en trop depuis longtemps si ça avait été le cas.

Arrivé dans la rue marchande où nous prenions toujours nos pizzas, je me garai rapidement à une place qui n'attendait que ma petite KIA, puis continuai à pied en direction de notre pizzeria habituelle. Les fêtes de fin d'années étant demain soir, les rues grouillaient de monde achetant des cadeaux ou de quoi faire un bon repas pour le soir.

Le ciel était gris, surplombé par une immense couche de nuage lisse qui ne laissait aucune chaleur entrer. Comme à l'accoutumée, je faisais attention à ne pas rentrer en contact avec les personnes jusqu'à ce que j'arrive à me faufiler sans dégât à ma destination. L'odeur de la mal bouffe me monta directement au nez et mon ventre grogna d'attente.

Bon Dieu cela faisait tellement longtemps que je ne m'étais pas enfilé ce genre de repas.

Fort heureusement, il n'y avait pas trop de monde et les commandes passaient vites.

— Oh Jungkook ! S'écria une voix grinçante derrière moi.

Je me retournai en un sursaut et tombai nez à nez avec un couple d'adultes accompagné d'une jeune femme. Wouah, c'était qui elle ? Elle était carrément magnifique. Un corps fin et parfaitement taillé enveloppé dans un manteau beige, grande, de longs cheveux noirs tombant sur sa poitrine et son visage légèrement maquillé créaient une harmonie incroyable. Elle ressemblait à une idole, à une femme célèbre pour son physique qui en attirait plus d'un.

Un sentiment étrange me passa dans le cœur.

Elle ressemblait à quelqu'un.

— Qu'est-ce que tu fais là, mon garçon ? Me demanda l'homme.

Je me courbai légèrement face à eux, un peu en retard en répondant à sa question, un petit sourire aux lèvres. Ce couple, aux allures parfaites et sans égales, était les parents de Mina. Je ne les avais vu que quelque fois, même si grâce à ma relation avec leur fille étant enfant les avait fait rapprocher de ma mère. Ils me disaient toujours bonjour lorsqu'ils me croisaient, mais je me sentais constamment mal en leur présence.

S'ils savaient ce que j'avais fait à leur pauvre fille.

— Comment va ta mère ? Questionna à son tour la mère avec un large sourire.

E-Elle va bien, répondis-je, gêné, nous avons des invités en ce moment alors elle est remplie de joie.

— Des invités ? C'est si peu commun chez les Jeon d'avoir des invités.

— C'est la première fois qu'elle accepte, mon grand-frère a amené ses amis d'enfances pour fêter le jour de l'an et comme j'ai quitté la maison, elle a pensé que ça pouvait être sympa.

— Oh ce bon vieux Jihyuk ! Ria l'homme. Ça fait tellement longtemps qu'on ne l'a pas vu !

Bon, ils faisaient quoi avec ma commande là ?

Je me mis à rire nerveusement avec le père de Mina alors que mon regard se reporta de nouveau sur la jeune femme les accompagnants. Ses sourcils s'étaient froncés lorsque j'avais évoqué mon frère et sa bottine tapotait à répétition le sol. Elle semblait totalement fermée à la conversation en vue de ses bras croisés à la poitrine et son visage tourné vers les bornes de commande. Finalement, elle ne paraissait pas très patiente ni très sympathique.

— Commande de Jeon Hyerin ! Tonna un serveur depuis la borne de retrait.

Dieu soit loué.

Je me courbai une nouvelle fois pour les saluer et allai chercher mes deux pizzas, réglai vite fait et partis avec un dernier sourire crispé dans la direction du couple. La jeune femme sembla se détendre lorsque j'eus franchi la porte d'entrée, et recommença à parler avec ceux qu'elle accompagnait. Ma présence l'avait gênée ? Je ne la connaissais pas pourtant. Son visage me rappelait juste vaguement quelqu'un mais je ne savais pas qui.

Je soupirai en regagnant ma voiture. Si je pouvais voyager dans mon subconscient je l'aurais fait volontiers pour trouver des réponses à mes questions.

Bref, à table !

— Ouuh ! Fit ma mère en me prenant les pizzas des mains alors que je venais à peine de rentrer. Elles sont encore chaudes en plus !

Je retirai mes chaussures et mon manteau en regardant la femme de ma vie se diriger par de petits pas rapide vers la cuisine. Je comprenais pourquoi mon père était tombé sous son charme, si j'avais rencontré une femme comme elle, je crois que je n'aurais pas résisté.

— Qu'est-ce que tu fais Jungkook ? Demanda cette dernière vers le plan de travail. Tu vas manger debout ?

☯︎

Seize heures huit.

Je passai le dernier lasso autour du cou de Néo et mis ma main à la poignée de la porte d'entrée.

— J'y vais ! Prévins-je en haussant la voix. Je suis au lac.

— D'accord, à tout à l'heure ! Fit ma mère depuis la lingerie.

Dehors, le ciel s'était légèrement éclairci par rapport à ce midi. Quelques tâches bleues apparaissaient de part et d'autres, le vent du Nord s'était levé pour venir caresser les arbres nus, et les sapins. Je m'étais simplement habillé d'une grosse doudoune, et dès que je fus à l'extérieur, je regrettai amèrement de ne pas avoir pris de bonnet.

Et devoir prendre un bonnet s'avérait être le parcours du combattant; retirer ses chaussures, monter à l'étage, entrer dans mon dressing, chercher frénétiquement dans mes affaires pendant que mes chiens me suivraient partout, beaucoup trop impatients d'aller en balade, puis faire tout le chemin inverse...

Allons-y sans bonnet.

Je descendis les quelques marches et traversai le petit sentier jusqu'au portail que j'ouvris grâce à la télécommande de mes clés. Puis, avec trois chiens me tirant comme une charrette, j'allai tranquillement en direction du lac. Celui à une centaine de mètres où Jihyung et moi passions des après-midi entier à jouer à nos jeux inventés, ou lorsque nous rentions de l'école.

Il fallait passer par un petit bois pour l'atteindre, et à peine eus-je quitté la route pour y entrer que je demandai à mes chiens de s'arrêter. Les lassos retirés, ils se mirent à trottiner plus en avant et reniflèrent la nature. Cette nature si calme qu'elle semblait morte, alors qu'elle n'était qu'endormie en un long repos. Je soupirai, fatigué.

Arrivé au lac, un gros rocher près de la rive accueillit mon fessier et je m'y perchai comme chaque fois que je venais ici. C'était un peu mon siège, et de là, j'avais une vision assez globale sur une partie de l'étendue d'eau, ce qui me permettait de surveiller les whippets. De l'autre côté, au pied d'une pente où se dressait le début de la forêt, il y avait l'ancienne gare. Plus aucun train n'empruntait sa seule et unique voix maintenant. Ce pauvre bâtiment commençait à tomber en lambeaux au fil des années.

À part les trois grelots qui résonnaient dans le silence, il n'y avait aucun bruit. Pas d'oiseaux à cause de l'hiver, pas de moteurs, rien. Un silence de mort.

Mes yeux se fermèrent d'eux-mêmes en appréciant le calme de la campagne. Mais mon cœur était en manque, en manque de Taehyung et de sa chaleur si particulière. Même s'il était parti ce matin vers neuf heures, j'avais l'impression de ne pas l'avoir vu pendant plus d'un mois, sauf que je ne voulais pas me l'avouer.

Je n'avais même pas fait attention si cette nuit, juste avant sa douche, il sentait l'alcool.

Tout ce que je savais; c'était que je voulais le revoir.

Je secouai la tête violemment en soupirant de frustration. Cet homme me faisait tourner en bourrique. Et ne pas parler de ce qu'il se passait depuis deux jours entre nous me pesait sur les épaules.

Je sursautai du haut de mon rocher lorsque l'aboiement de ma chienne retentit. Je me tournai rapidement vers elle jusqu'à ce que mon cœur ne s'arrête complètement dans sa cage thoracique, face à qui elle se dirigeait rapidement.

Deux larges mains attrapèrent sa fine tête pendant que son museau se planta entre ses jambes pour quémander des caresses, la queue remuante à vive allure. Et cette chanceuse reçu un bisou sur le crâne avant qu'elle ne reparte jouer avec ses frères, toute contente.

Le nouvel arrivant se redressa sur son mètre quatre-vingt, et nos regards se rencontrèrent enfin depuis ce matin. Je ne pus retenir un sourire.

Mon patron se tenait à l'entrée du sentier rejoignant le lac à la route, un large manteau chaud sur les épaules et par de légers pas, il se mit à franchir la trentaine de mètre qui nous séparait.

Qu'est-ce qu'il faisait là d'ailleurs ? Il n'était pas censé être avec mon frère ?

Si j'avais su qu'il allait venir pendant que je pensais à lui, j'aurais dû le faire plus tôt.

Je l'observais marcher vers moi, le nez légèrement rougit à cause du froid et son air si mystérieux le suivant partout. Il se fondait complètement avec la nature autour de nous, qui commençait à s'assombrir progressivement. Ses mèches ébènes retombant devant ses yeux sombres n'arrangeait pas cette impression de mystère, de supériorité et de pouvoir. Cette aura à laquelle malgré moi, me faisait devenir complètement fou. Comme si tous mes repères se perdaient en sa présence.

— Naya doit bien vous aimer, lui fis-je remarquer lorsqu'il fut proche.

Il haussa les épaules sans répondre.

Le vent était doux désormais, tranquille, et le silence de la mort était devenu plus vivant.

Je rompis nos échanges en me rapportant sur le lac, puis sur ma montre qui indiquait dix-sept heures trente.

Quoi ? J'étais resté si longtemps ?

J'avais l'impression d'être arrivé depuis dix minutes alors que cela faisait bientôt une heure et demi que j'étais perché sur mon rocher. Rocher qui me surélevait légèrement par rapport à mon patron, qui lui aussi s'était mis à observer la nature, les mains dans les poches de son manteau. Il n'était qu'à un mètre de moi, et je sentais déjà sa chaleur m'envahir qui me faisait sourire contre mon gré.

— Comment vous avez su que j'étais là ? Lui demandai-je, venant de me faire la réflexion.

— Ta mère me l'a dit.

Sa voix roque et fatiguée me fit frissonner comme habituellement, bien qu'il ne m'avait accordé aucun regard. Je ne cherchai même pas à savoir pourquoi ma mère lui avait dit où j'étais, elle agissait vraiment étrangement envers lui. Le mettre dans la chambre de Jihyung, maintenant ça... Je soufflai discrètement en sautant de mon rocher. La nuit tombait, je commençais à avoir vraiment froid et les chiens n'allaient pas tarder d'avoir faim. Je devais sûrement ne pas avoir senti la fraîcheur de l'hiver à cause de mes réflexions incessantes.

Je perdais de plus en plus la notion du temps ces derniers jours, et la boule d'angoisse qui grossissait depuis deux mois à l'intérieur de mon cœur s'avérait devenir complètement inarrangeable. Elle me faisait peur.

C'était aussi ma relation avec mon patron qui, au fond, me faisait peur, même s'il guérissait tout lorsque nos deux corps entraient en contact.

Comme si nous n'avions aucun droit de faire ce que nous faisions.

Je ne comprenais plus rien à ce qu'il se passait à l'intérieur de mon crâne, tout s'opposait, se battait, c'était une véritable guerre.

Ma semelle tapa dans un caillou qui disparut dans l'eau, à quelque mètre de nous. Okry, le plus jeune de mes chiens, avait levé les oreilles dans la direction du lac à cause du bruit. Cela me fit sourire.

— C'est ici que tu venais avec ton frère ?

Je me tournai vers mon supérieur, un peu plus en arrière.

— Oui, répondis-je en fronçant légèrement les sourcils, comm-

— Arrête de toujours demander comment je sais les choses, me coupa-t-il avec agacement. J'observe, c'est tout.

Mes lèvres se mordirent entres elles, et baissai légèrement la tête tel un pauvre chiot en me remettant dos à lui.

Son ton avait été tellement froid, tellement distant. Comme s'il n'acceptait pas que j'ai pu voir ses faiblesses cette nuit, qu'il en avait honte et que son masque était de nouveau encré sur son visage, sur son âme. Je soupirai intérieurement. Comment pouvait-il être le même homme qui m'avait demandé de rester auprès de lui, qui m'avait enlacé jusqu'à embrasser mon cou ?

Tout était si différent la nuit.

Les paroles de Seokjin d'un mois plus tôt me revirent soudainement à l'esprit : il a toujours été très intelligent avec une capacité d'observation et de mémorisation incroyable.

Je voyais maintenant la bête.

Pff. Je n'allais même pas lui demander comment il savait que je venais ici avec Jihyung. J'allais lui demander s'il avait trouvé facilement le chemin pour venir ici.

... Comment il le savait ?

— J'ai vu les photos de vous deux avec ce lac dans ta chambre ce matin, avoua-t-il plus calmement.

Je n'osai me retourner et me contentai d'acquiescer sans un mot. Même si sa voix avait baissé d'un ton, et était redevenue plus ou moins posée, je n'avais pas envie de rencontrer une nouvelle fois son regard noir à mon égard.

— Vous vous ressembliez beaucoup, reprit-il.

J'haussai la tête une nouvelle fois alors que je le sentais se rapprocher de moi, de franchir les deux, trois mètres qui nous séparaient. Les branches mélangées aux feuilles et aux cailloux craquaient sous ses chaussures, et son aura m'enveloppa complètement lorsqu'il ne fut qu'à quelques centimètres. Son souffle semblait s'échouer dans mon col à moitié découvert et son odeur alcoolisée faisait de nouveau son apparition.

Tous mes sens semblèrent se mettre en alerte et mon cœur s'affola.

— Jungkook.

Un frisson me parcourut l'échine, et non sans appréhension, je rencontrai son regard par dessus mon épaule. Cet homme allait causer ma mort à force de jouer avec mon cœur, je ne voyais pas d'autre façon de mourir.

Voyant qu'il voulait me montrer quelque chose, je me retournai complètement face à lui et mon regard longea son manteau. Ses deux poings fermés étaient tendus devant moi, me faisant lever un sourcil d'incompréhension.

Sainte Mère de Dieu, j'avais chaud maintenant.

Même si nous n'étions pas collés l'un à l'autre comme cette nuit, je me sentais hors de moi à cause de ces trente centimètres qui nous séparaient.

Je lui jetai un œil et vis qu'il me fixait d'un air légèrement amusé.

Je me reportai sur ses poings où quelques veines sortaient, créant de petites bosses sur lesquelles j'aimerais bien sauter. Mon esprit m'arracha cette pensée médiocre. Je devais devenir fou.

— Je dois choisir ? Lui demandai-je en observant tour à tour ses mains.

— Mh.

On va prendre ça pour un oui.

Comme je ne savais pas si j'avais le droit d'entrer en contact avec lui, je pointais simplement mon doigt sur son poing gauche.

Mes joues se gonflèrent lorsqu'il l'ouvrit en direction du ciel. Il n'y avait rien. Seulement une main fine, grande, et séduisante.

Il la referma, me frustrant.

— Bah l'autre alors, ronchonnai-je à moi-même en désignant son second poing.

Alors que je m'étais préparé à voir quelque chose à l'intérieur de sa paume, il se passa la même chose. Il n'y avait rien du tout. Pas même une feuille, un bout de bois, ou même un grain de riz.

Je relevai le visage à sa hauteur et fus surpris de voir un petit sourire à son coin de lèvres. J'apercevais même une canine, ce qui eut le don de me chambouler le bas ventre.

J'arrivai à lui froncer les sourcils en croisant les bras à mon torse.

— Vous me prenez pour une chèvre ?

Son torse fut secoué et un doux son sortir d'entre sa gorge. J'entrouvris la bouche de stupeur, il venait de rire une seconde fois. Bien qu'il fût étouffé, il avait été tellement beau à entendre, comme si de petites cloches sonnaient l'ouverture d'une porte.

Mon visage se détendit pour apprécier cette vison si rare, jusqu'à ce que son regard toujours aussi amusé se reporte sur moi.

— Tu es sûr de tout avoir ouvert ?

Son poing droit était resté déplié alors qu'il avait directement refermé le gauche.

Je lui jetai un nouvel œil furtif. S'il me prenait une seconde fois pour une chèvre, je n'allais pas me gêner pour lui refaire le visage.

— Mais...

Sans même avoir eu besoin de désigner son poing, il l'avait rouvert. Et cette fois-ci, il y avait quelque chose.

Ce quelque chose que je pris très doucement entre mes doigts, les larmes commençant à me gêner la vue.

C'était mon porte-bonheur.

Celui que j'avais perdu environ un mois auparavant, celui que Jihyung m'avait offert lorsque j'avais huit ans, et lui neuf.

C'était une petite chouette en verre, d'où pendaient cinq petits piments rouges. Il venait d'Italie. Mon frère nous en avait tous acheté un lorsqu'il avait été dans ce pays avec l'école. Nous avions toujours été dans la même classe, mais elle était séparée en deux groupes différents, les CE1 et les CE2. Nous avions droit à un voyage scolaire tous les deux ans, organisés par l'école. Malheureusement, j'étais tombé gravement malade la semaine du départ, alors je n'y étais pas allé.

— Vous... Balbutiai-je en admirant le bijou sous tous ses angles. Où l'avez-vous trouvé ?

— Tu te rappelles du jour où on s'est rentré dedans ? Demanda-t-il en remettant ses mains dans ses poches. Lorsque je t'ai donné des congés.

Comment ne pas s'en rappeler ? J'avais été tellement mal ce jour là, tellement fatigué et vexé du message d'Hoseok.

Puis voir mon patron aussi exténué que moi, voir des larmes rouler sur sa peau nacrée, m'avait complètement retourné.

Je baissai la tête, mes doigts se tripotant entre eux.

— Oui, je m'en souviens...

— Tu cherchais ton paquet de cigarettes dans tes poches, expliqua-t-il tout bas, et ton hibou a dû se glisser entre ta main et ton paquet. Il est tombé lorsqu'on s'est rentré dedans.

C'était donc ça qu'il fixait au sol, avant de me regarder ?

Un large sourire qui ne lui parut pas inaperçu, étira mes lèvres pendant que je remontai le visage vers lui.

— Merci beaucoup.

— Je n'ai pas pensé à te le rendre plus tôt.

— Ce n'est pas grave, lui assurai-je en rangeant le souvenir dans ma poche de blouson.

Quelque chose fit alors tilt dans mon crâne, et j'écarquillai d'un coup les yeux en le regardant.

— Vous avez fait de la magie ! M'écriai-je. Il y était pas avant, et après il y a été alors que vous n'avez même pas bouger les mains !

J'eus de nouveau droit à un petit rire qui me fit tourner en bourrique une énième fois. Mais il ne me répondît pas et se contenta de jouer avec ses sourcils pour m'embêter. D'accord, mon patron savait faire des tours de magie.

Puis pendant que j'allais récupérer mes chiens en leur passant leur lasso respectif autour du cou, ma mère m'avait appelé pour me demander quand est-ce que je comptais revenir pour préparer le dîner.

En train, je suis en train.

Mon patron prit Naya, moi les deux autres autres, et nous rentrâmes sans un mot de plus, un silence doux et reposant nous suivant tout deux, sous le début de la nuit.

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro