05:30:00
Les sourcils froncés et la mine sceptique, Jimin me regardait intensément depuis quelques minutes, le mouvement répétitif et robotisé de sa fourchette allant de son assiette à sa bouche. Mal à l'aise, je baissai les yeux sur mon plat et continuai de manger tranquillement. Minkyung, à mes côtés, naviguait tranquillement sur les réseaux sociaux, prenant son temps pour déjeuner. Je devais avoir une mine affreuse, mes yeux étaient secs, je sentais que je pouvais fondre en larmes à tout moment si je relâchais mes épaules.
— Au fait Jungkook, me sourit Minkyung en se tournant vers moi, tu as vu les messages sur le groupe hier soir ?
Je fronçai légèrement les sourcils en me demandant de quoi il parlait.
— Quels messages ?
— Concernant une petite soirée chez Jimin et Haneul pour ce weekend, on sera seulement nous quatre.
Etonné, j'allumai mon téléphone et vis en effet des notifications datant d'hier soir.
— Désolé, j'étais avec Taehyung.
— Ah oui ! C'est vrai que c'était vos un an, se rappela-t-il avec un agréable sourire.
Puis il ne posa pas plus de questions avant de repartir sur le sujet de cette petite soirée à quatre, que nous faisions de temps en temps. J'aimais énormément lorsque l'on se retrouvait tous ensemble hors cours, surtout avec Haneul que l'on ne voyait pas si souvent que ça.
— Du coup, est-ce que tu viens ?
Mon regard se leva à nouveau vers mon ami, me fixant avec des étoiles scintillantes dans les yeux quant à l'idée que nous allions passer une bonne soirée. Me retenant de ne pas exploser, je secouai la tête de droite à gauche en prenant une dernière bouchée de mon plat à moitié entamé.
— Désolé, je rentre à Busan ce week-end.
Son sourire disparut automatiquement et je détournai vite les yeux pour ne pas en voir davantage. J'allais craquer.
— Ca fait longtemps que tu n'es pas rentré, c'est vrai, fit Jimin en basculant en arrière sur sa chaise.
Il m'attribua un regard méfiant. Ce n'était pas habituel que je rentre aussi soudainement sans les avoir prévenu plus tôt, alors je savais d'avance qu'il avait facilement deviné que quelque chose n'allait pas. Mon cœur battant de stress dans ma poitrine, mes nerfs me démangeant à l'intérieur de ma peau, un mal de crâne faisant surface, je me sentais partir. En regard tour à tour Minkyung et Jimin, j'avais l'impression que c'était la dernière fois que nous étions réuni autour d'une table tous les trois. Je secouai ma tête de droite à gauche.
Je détestais ce genre de pressentiment, il fallait que je le chasse de ma tête avant qu'il ne bousille mes pensées plus ce qu'elles ne l'étaient déjà. Je n'arrivais plus à réfléchir, mon cerveau se vidait de tout, de tout ce qu'il s'était passé depuis la mort de Jihyung. Devant moi, Jimin me parlait, les yeux inquiets et se penchait au-dessus la table en faisant des gestes devant mes yeux. Mes paupières se fermèrent lentement avant de se rouvrir sur mes deux meilleurs amis, dont leurs mouvements semblaient être au ralenti, plus aucun son ne résonnait, tout était silencieux.
Puis les ténèbres accompagnèrent ce silence.
☯︎
Je ne sais plus comment est-ce que la lumière est revenue. J'étais allongé sur le sol, dans les bras de Jimin qui sourit lorsque mon regard rencontra le sien, et Minkyung apparut soudainement, la même expression au visage. Qu'est-ce qu'il venait de se passer ? Je n'entendais encore rien de ce qu'il se passait autour de moi, tous les sons étaient étouffés. Je voyais mes deux amis parler de quelque chose avant de me soulever, et que tout redevienne noir.
☯︎
— Jungkook... Fit la voix calme de Jimin.
Devant moi, un regard inquiet me fixait. Je me sentais léger, comme sur un nuage, la tête sur les cuisses d'un ange qui passait sa main dans mes cheveux pour me rassurer. Je ne savais pas si j'avais un corps, plus rien ne répondait à mon cerveau, comme si tous mes nerfs avaient été déconnectés. Peut-être que je rêvais, peut-être que la vision que j'avais de Jimin était factice, et pourtant, je savais que j'étais en train de me réveiller d'un long sommeil. Cette impression de confondre la réalité avec le rêve n'avait pas refait surface depuis mon hospitalisation il y a cinq ans, et la revivre me fit soudainement peur. Je n'arrivais pas à savoir où je me trouvais, ni ce qu'il y avait autour de moi, ni même si c'était réellement Jimin au-dessus de moi, qui me caressait les cheveux comme une mère protectrice.
Une voix au loin sembla m'appeler.
Soudain, une truffe froide se colla contre ma joue et ma tête se tourna immédiatement vers elle. Je me retrouvai face à face avec Orky, me regardant avec l'air adorable qui l'avait toujours suivi. Son pelage beige, ses grands yeux de bébé, la douceur de son poil qui me passa sous la main, le frottement de sa langue qui sécha mes larmes. Je ne pus m'empêcher de sourire et de m'assoir et prendre sa tête entre mes jambes pour le caresser comme il aimait. Je n'entendais pas mon rire, je ne voyais pas mes mains passer sur son dos mais ma mémoire semblait se rappeler de ce toucher particulier. A quelques endroits, le poil était plus rêche, peut-être parce qu'il s'était roulé dans quelque chose pendant une promenade.
Puis, d'un coup, sa tête se tourna en arrière, intéressé, comme s'il avait été appelé par quelqu'un, et après un dernier regard, parti en courant vers deux ombres au loin ; une petite, et une grande. Plus je le regardais s'éloigner, rejoindre celles-ci, plus les larmes coulaient sur mes joues, plus mon cœur se déchirait. Pourquoi était-ce les meilleurs qui partaient en premier ? Pourquoi fallait-il que la vie soit faite ainsi, aussi infernale, à nous retirer les personnes à qui on tenait le plus ? Je ne pouvais pas comprendre, je ne voulais pas comprendre.
Orky n'était plus là, tout comme les deux ombres au loin, il n'y avait plus que Minkyung, accroupit devant moi, ses yeux levés vers moi, emplis d'angoisse. J'étais assis sur un canapé du hall de l'école, l'esprit perdu, les paupières se mettant à papillonner d'elles-mêmes comme pour chasser le rêve de la réalité.
— Jungkook... Fit doucement mon ami. Ca va... ?
Lentement, mon regard se baissa sur lui d'une lenteur impériale.
— Qu'est-ce qu'il y a... ? Murmurai-je, à bout de force.
Minkyung se leva et vint s'assoir à ma droite, toujours inquiet.
— Tu t'es évanoui à la cafétéria, est-ce que ça va mieux ? Comment tu te sens ?
J'amenai une main à ma nuque pour me la masser en soupirant.
— Je ne sais pas...
— Tu nous as fait sacrément flippé, fit la voix de Jimin à ma gauche.
Surpris de sa présence que je n'avais absolument pas sentie, je sursautai légèrement en le regardant. Son visage était assez crispé et il tenait dans sa main son téléphone, ouvert sur le contacte téléphonique de Taehyung. Un frisson d'effroi me parcourut l'échine.
— Tu l'as prévenu ? M'écriai-je à moitié, la voix cassée.
Choqué du fait que j'ai élevé la voix, il fronça les sourcils en éteignant son téléphone.
— J'allais le faire parce que tu devenais fou, pourquoi ? L'infirmerie est fermée...
Je devenais fou ? Un mauvais rire sortit de ma gorge à ses paroles.
— Tu... Hésita Minjyung à cause de mon comportement. Tu nous as vraiment fait peur Jungkook... On venait à peine de t'allonger ici que tu t'es assis et tu as commencé à caresser un animal invisible...
En silence, je le fixais quelques secondes avant que je ne me perde dans le vide. Okry était pari rejoindre Papa et Jihyung après être venu me dire au revoir. Ou alors avais-je rêvé, est-ce que Jimin avait raison, et je devenais complètement fou ? Je ne savais pas quoi penser, tout se mélangeait dans ma tête et il m'était impossible de réfléchir correctement et trouver une excuse rationnelle à mes actions. Mais fallait-il vraiment une excuse pour prononcer le fait que tout venait de basculer ? Il ne fallait jamais sous-estimer la petite goutte qui faisait déborder le vase, et je venais de me rendre compte que j'incitais mon esprit à aller mieux. Je refoulais mon mal être depuis ma rencontre avec Taehyung, je me forçais à aller bien pour ne pas l'inquiéter, mais à partir de ce matin, tout venait de se briser.
Sa présence à mes côtés m'aidait, c'était une certitude, mais peut-être pas autant qu'il ne le fallait ni comme j'en avais besoin. L'affaire de Mina et la pression de Namjoon sur mon dos bloquait cette guérison, car je m'affaissais au fur et à mesure de mes pas en avant vers un gouffre sans fond. Il fallait que je me débarrasse de cette caméra, il fallait à tout prix que je sois certain de la sincérité de Namjoon quant à sa promesse de me laisser en paix s'il la récupère. Il fallait que je sois sûr que Taehyung, Yumin, Seokjin, Yoongi, Minkyung, Jimin, Haneul et ma mère soient en sécurité.
— Jungkook... Qu'est-ce que tu racontes ?
☯︎
Seize heures dix.
Je soupirai longuement en passant le portail de l'école, seul. Mes deux meilleurs amis n'étant plus dans la même classe que moi, nos emplois du temps n'étaient logiquement plus pareils et il n'était pas rare qu'il nous soit obligé de nous dire au revoir vers midi. Ils avaient insisté pour que je rentre chez moi après que j'ai repris mes esprits, mais j'avais réussi à les convaincre par je ne savais quel moyen que j'allais mieux, alors que c'était tout l'inverse. Mon dernier cours avait été une vraie tuerie, il m'avait été impossible de me concentrer lorsque je devais me forcer à garder la tête sur les deux épaules. Plus d'une fois j'avais manqué de m'évanouir à nouveau, et plus l'heure fatidique arrivait, plus mon cœur aplatissait tous les sons autour de moi pour bien me rappeler que j'allais bientôt rencontrer celui qui avait fait de ma vie un véritable calvaire. Je m'en voulais d'être faible. Je n'arrivais pas à me faire faire changer d'avis quant à cette rencontre.
C'était le même sentiment lors de mon voyage à Tokyo, quelques minutes avant le décès de Mina. Cette impression de n'être qu'un pantin, que tout n'était que fictif et que je ne pouvais qu'être spectateur de mes faits et gestes dirigés par Namjoon. Tout comme cette nuit là, j'étais contrôlé par une force invisible qui me forçait à faire quelque chose dont je n'avais pas envie. C'était avec cet effroi que je me rendais à notre lieu de rendez-vous, un café non loin de l'école, avec cette impression d'être manipulé, le dos courbé par le lourd poids de mes décisions.
Seize heures dix-neuf.
Installé à une table du café, je tenais contre ma poitrine mon sac à dos qui contenait le carton. J'étais épuisé. Le thé que j'avais pris en attendant sa venue m'endormait plus qu'il ne me réveillait. Mon cœur ne cessait de battre et de sursauter au moindre bruit de clochette qui résonnait à la venue d'un nouveau client. Ce café était réputé pour ses bonnes gaufres, mais mon appétit était coupé et il m'était impossible de saliver en sentant l'odeur qui flottait dans tout le café. Quelques étudiants de l'école passait leur temps libre ici au lieu d'aller à la bibliothèque, d'autres avaient des uniformes et riaient par petits groupes d'amis.
Quelques adultes étaient aussi en pause, un homme d'affaire, deux femmes, trois autres hommes à la même table, tous avaient l'air de passer un bon moment. J'avais dis à Taehyung que je restais un peu étudier à l'école avant de rentrer, sauf que je ne supportais pas lui mentir de la sorte en sachant qui j'allais voir. Je savais qu'il n'aimait pas Namjoon et se méfiait de lui, la raison m'était d'ailleurs inconnue, mais il ne valait mieux pas que je lui dise avec qui j'avais rendez-vous, et surtout, pourquoi.
Je soupirai, puant le stress à plein nez. Ma jambe tressautait en dessous de la table de fatigue ou de peur, mon regard appuyait chaque personne qui entrait dans le café, essayant de reconnaître l'ombre de Namjoon. J'avais même fait une recherche sur Google pour me souvenir exactement à quoi il ressemblait, et un mauvais frisson m'avait parcouru le dos à ce moment-là. Depuis, je ne faisais plus que de devenir de plus en plus anxieux au fur et à mesure des secondes qui passaient.
Puis, à seize heures trente, l'heure du rendez-vous, la clochette du café tinta.
Quelques personnes étaient parties depuis, d'autres étaient arrivées, mais lorsque nos regards se sont croisés, j'eus l'impression de devenir tout petit. Une longue veste rouge, un costard noir, les cheveux blonds coiffés d'une manière délicate, je dus avaler ma salive en me rendant compte de l'allure charismatique qu'il avait. D'un côté, cela le rendait très attractif envers les inconnus qui tournaient la tête à chaque pas qu'il faisait en ma direction. La voix m'avait quitté. La force, la pensée, tout. Tout avait disparu au moment même où nos yeux étaient entrés en contact. Je ne savais pas comment interpréter le léger sourire qu'il avait aux lèvres en s'asseyant à ma table d'une délicatesse qui ne collait absolument pas à sa personnalité.
— Bonjour Jungkook.
Légèrement, je fronçai les sourcils. C'était étrange. Avais-je bien le Kim Namjoon, coupable le plus rechercher de Corée Du Sud et du Japon ? Je n'arrivais pas à croire qu'il puisse sourire et faire comme si de rien n'était. Un serveur vint immédiatement vers nous pour prendre sa commande, qui ne fut qu'un café moulu. Son choix m'étonna beaucoup, pourquoi prendre un café aussi peu cher alors qu'il aurait pu en prendre un bien mieux ?
— Bonjour... Murmurai-je, aplati par sa présence.
Si ma rencontre avec Taehyung m'avait fait sentir petit à cause de son charisme et sa froideur passée, Namjoon l'était cent fois plus. Je n'arrivais même plus à trouver la force de parler ou de faire le moindre mouvement, mais je ne savais pas si ce phénomène était dû à son naturel ou si c'était lié à notre passé. J'inspirai longuement, ne savant pas vraiment où regarder.
— Ne sois pas si stressé s'il te plait, demanda-t-il en me souriant sincèrement.
Je ne comprenais pas. Quelque chose dans son regard ne me rappelait absolument pas le Namjoon que j'avais connu il y a cinq ans ; noir, absent de gentillesse, perçant, sanglant, c'était tout le contraire maintenant. Jovial, doux, rieur, mais aussi mélancolique. Si au début mon corps était empli de frissons, plus les minutes passaient, plus ils disparaissaient et je commençais à apprécier sa compagnie. Nos sujets de conversations, toujours engagés par lui, étaient intéressants et ne portaient en aucun cas sur le sujet qui nous avait rejoins ici. Le carton était toujours dans mon sac à mes pieds, et au bout d'une dizaine de minutes, j'en oubliais presque sa présence.
Son changement de personnalité me laissait dans une incompréhension sans limite. Même si une personne jouait un autre rôle pour cacher son identité, il y avait forcément un moment où à un autre, à un pique dans une phrase ou un mouvement, leur vraie personnalité ressortait, ne serait-ce qu'une seule seconde. Et, grâce à mes histoires, j'avais beaucoup appris sur le comportement humain et sa méthode de fonctionnement afin de créer mes personnages le plus humainement possible. J'en avais donc conclu que Namjoon, jeune homme ayant mon âge, déjà vice-président d'une multinationale, ne jouait pas un rôle. Ses manières, sa façon de parler, tout était naturel, comme s'il avait toujours été comme cela. Connaissant sa facette cachée, je ne pouvais pas m'empêcher de me demander quel était le vrai Namjoon qui se tenait devant moi.
Est-ce que cette personne était réellement aussi douce qu'un agneau ou alors, était-il aussi démoniaque que tout l'enfer réuni ?
— Je suis content de te parler Jungkook.
Intrigué, je levai les yeux de mon thé vers lui.
— Mina avait raison à ton propos, elle disait que ta compagnie était très agréable et qu'elle aurait aimé nager à nouveau à tes côtés.
Soudain, un rire retentit de derrière moi et j'eus un léger sursaut en me retournant. C'était une lycéenne.
— J'aurais aimé aussi, fis-je d'un sourire légèrement forcé.
— Au fait, reprit-il d'une gentillesse absolue.
Un frisson me parcourut subitement la colonne vertébrale.
— Je suis désolé de t'imposer ça, mais est-ce que tu as ce qu'il-, il se mordit les lèvres avant de se rattraper, ce que je t'ai demandé ?
J'eus un hoquet qui le surprit. Un sourire se força à apparaitre à son visage, il ne paraissait plus aussi serein que quelques secondes auparavant. J'avais déjà vu ce comportement dans les séries, les films et même dans les romans, c'était celui d'une personne menacée de mort si elle ne faisait pas ce qu'on lui demandait. Ses jambes tressautaient en dessous de la table et je crus apercevoir une goutte de sueur perlée sur son front avant qu'il ne boive le reste de son café froid. D'un œil curieux, je regardai discrètement derrière lui mais ne vis personne qui pouvait être susceptible de le menacer d'une quelconque manière. Il n'y avait rien à part la vie d'un café normal avec son personnel et ses clients.
— S'il te plait Jungkook, insista-t-il en reposant sa tasse. J'ai... une réunion importante bientôt.
— Ah, oui pardon.
En vitesse, je pris mon sac à mes pieds et l'ouvris pour en sortir le carton. En le touchant, des fourmis me grignotèrent les doigts, et même après l'avoir posé sur la table, je dus me frotter les mains contre mon pantalon pour espérer les faire partir. Chose qui n'eut pas lieu. Mon regard passant de la boîte abîmée à celui de Namjoon, je remarquai quelque chose d'effrayant. Ses yeux étaient emplis de peur et d'effroi tandis que ses lèvres s'étiraient en un sourire extrêmement sadique. Un affreux frisson me parcourut une énième fois l'échine et l'atmosphère était devenue extrêmement pesante. C'était comme si son esprit n'avaient pas les mêmes intentions qui apparaissaient sur deux parties de son visage.
Seize heures cinquante.
La clochette du café tinta et je soupirai profondément. Namjoon venait de partir, le carton sous le bras. J'étais toujours assis à notre table, le regard complètement vide, l'esprit ailleurs. Je n'arrivais pas à donner un sens rationnel à ce qu'il venait de se passer ces vingt dernières minutes. Est-ce que j'avais fait le bon choix de lui donner la caméra ? Comment cela pouvait être possible pouvait être aussi douce qu'un agneau alors qu'elle avait commis des atrocités sous mon nez ?
Au bout d'un moment de réflexion, je venais à me demander si c'était bien la même personne qui s'était pointée devant moi que celle d'il y a cinq ans. Pourtant, je me souvenais parfaitement de l'expression que Namjoon avait eu cette nuit-là, et le voyant devant moi, à boire un café qu'il pourrait définir comme pauvre, je dus me convaincre que quelque chose clochait. A moins qu'il ait un oscar d'acteur et que tout avait été prévu et jouer pour ne pas attirer le regard curieux du publique ?
Je passai une main à mon front avant de me frotter le visage, tiré par la fatigue. Tout le stress accumulé par cette rencontre se relâchait petit à petit et faisait peser mes épaules. Je n'en pouvais plus. J'étais fatigué à un point où je dus prendre mon temps pour me lever de ma chaise si je voulais ne pas m'écraser au sol comme ce midi. Est-ce que c'était réellement terminé ? Est-ce que Namjoon allait me laisser en paix maintenant qu'il avait obtenu ce qu'il voulait ?
Sortant du café, je pris une grande inspiration d'air frais et partis dans le sens opposé à chez moi. Je ne savais pas où je voulais aller, mais je marchais entre dans les rues sans but réel, sans chercher par où me diriger, sans regarder autour de moi. Tout me paraissait flotter, étoiles mystérieuses mortes dont la lumière nous parvenait encore, comme si j'étais en plein rêve et que je n'allais pas tarder de me réveiller. Les personnes marchant à contre-sens ou me doublant rentraient chez eux, allaient faire quelques courses, chercher leurs enfants, ou même, partaient pour leur travail nocturne. Je marchais.
La légère brise froide me caressait le visage, me chuchotait à l'oreille qu'il fallait rentrer à la maison, que quelqu'un m'attendait, à peut-être s'inquiéter de mon absence. Quelle heure était-il ?
☯︎
— Il arrive.
Vingt-quatre appels manqués, douze messages non lus, c'est ce qu'affichait mon écran de téléphone, tenu entre mes doigts dénués de force. Sur le palier de l'appartement de Taehyung, je fermai les yeux avant de les rouvrir d'une lenteur impériale, encore anesthésié par l'incompréhension. Mes gestes étaient aussi lents et lourds qu'une porte de prison, mon esprit plongé dans un long sommeil, incapable de se rendre compte des faits qui se présentaient devant moi.
Subitement, une flopée d'air me frappa de plein fouet lorsque la porte devant moi s'ouvrit d'un coup, laissant apparaître Taehyung. Je n'eus le temps d'analyser l'expression de son visage qu'il me prit directement dans ses bras, me serrant contre lui de toutes ses forces. Naturellement, le noir m'enveloppa en même temps qu'une douce chaleur, parfumée, agréable pour l'esprit. Il parla à quelqu'un, je ne savais qui, je ne pouvais pas comprendre ce qu'ils disaient, et d'un côté, je préférais accepter cette étreinte et le silence plutôt que d'écouter deux personnes discuter.
L'instant suivant, je me retrouvais assis sur une surface douce et moelleuse, et un soupir fatigué sortit d'entre mes lèvres. Difficilement, j'entrouvris les yeux et vis Taehyung devant moi, les bras croisés à la poitrine et le regard sombre, fixé sur moi. Installé sur la table basse pour me faire face, il paraissait très énervé et fermé à la conversation. Je déglutis en maintenant ma respiration. Mes yeux circulèrent dans toute la pièce pour tenter de trouver une horloge qui pourrait m'indiquer l'heure.
— Il est minuit, m'informa Taehyung d'une voix lourde.
Je déglutis une nouvelle fois et il m'était impossible de relâcher mes poumons. Son ton me fit frissonner désagréablement et je n'osai le remercier à la vue de son taux d'énervement. Comment cela pouvait-il se faire qu'il était minuit ? Je n'avais plus aucun souvenir à partir du moment où j'avais quitté le café, par quel moyen avais-je atterri ici ?
— Où étais-tu ?
Je baissai la tête, les yeux piquants. Mes lèvres tremblaient, je sentais que je n'allais pas tenir mes larmes longtemps, et le voir dans une aussi grande colère me détruisait. Le problème était que je ne pouvais pas répondre à sa question, car je n'avais absolument aucun souvenir de ce que j'avais fais. Je n'avais pas l'air d'être blessé quelque part, mais ma tête était entièrement vide. Et ce vide me terrorisait.
— J'avais besoin de prendre l'air...
Il soupira, ne décroisant aucunement ses bras, n'ayant aucune intention de s'ouvrir à la discussion.
— Je veux bien le comprendre.
D'un côté, c'était vrai. Au départ, c'était pour penser à autre chose que je n'étais pas rentré tout de suite. Mais pour lui, j'avais voulu m'aérer la tête à cause de la mort de mon chien, sauf que quelque chose s'était ajouté en plus. Il ne savait pas pour ma rencontre avec Namjoon, il ne fallait pas qu'il sache. Je voulais le protéger, lui et ma mère, et ce, même si je devais donner ma peau.
— Désolé...
Aucune réponse.
Je sentis mes excuses être rejetées, mon cœur se briser, mes larmes couler sur mes joues, pour venir s'étaler sur mon pull. Ce silence voulait tout dire, c'était un bruit infernale qui me pulvérisait le cerveau, qui me détruisait l'esprit et débutait une guerre à l'intérieur de moi-même. Taehyung n'était plus de mon côté.
— Jungkook, dis-moi la vérité.
Taehyung n'était plus de mon côté.
Il ne l'était plus à partir du moment où son téléphone s'est tendu sous mon nez, et que mon regard s'est posé sur son écran qui affichait une vidéo. Une vidéo que je reconnaissais. Une vidéo où j'apparaissais, un couteau dans les mains, à côté d'un lit où était allongée une jeune femme ensanglantée. Un frisson d'effroi me parcourut la colonne vertébrale et je retins une remontée répugnante. C'était elle. C'était la vidéo d'il y a cinq ans, celle que j'avais tourné, manipulé comme un pantin, celle qui m'avait hanté à ne plus pouvoir en vivre.
Je venais de perdre ce qui me maintenait en vie, sans possibilité de retour en arrière.
— Je...
Plus rien ne sortait d'entre mes lèvres. Pourquoi avais-je cru Namjoon, lorsqu'il disait que c'était simplement pour lui ? J'avais été complètement débile et inconscient de le croire. Même si je savais que regarder l'expression que devais tirer Taehyung à cet instant-là, j'eus l'audace de lever les yeux vers lui. Seulement, ce ne fut pas lui que je vis, mais la personne derrière lui.
Maculée de sang, plusieurs trous dans le corps, un sourire effrayant, un visage méconnaissable, les cheveux emmêlés et le rouge étant le nouveau blanc, elle se tenait là, à peine un mètre de distance nous séparait. Elle me fixait de ses yeux imbibés de sang, sans aucun état d'âme, ni une seule pensée. Son seul but était de me faire rappeler ce que j'avais fait, que je ne l'oublie pas. Je ne voulais pas, je ne voulais pas qu'elle revienne, je ne voulais même plus voir le jour. Tout s'effondrait. Mon travail de toute une année se réduisait en poussière au fur et à mesure que les secondes défilaient dans le vide, sans que je ne me daigne à faire changer les choses. L'espoir était parti.
— Jungkook.
Subitement, je regardai Taehyung, dont le visage était toujours aussi fermé. Il attendait une réaction de ma part, mais en temps normal, j'aurais vu une lueur d'espoir s'enflammé à travers ses prunelles, voulant que tout ceci ne soit qu'une erreur. Seulement à présent, il n'y avait rien, seulement une profonde haine suite à une trahison. J'avais les deux pieds collés à mes fautes passées. Puis, d'un coup, alors que je tentais de discerner une once d'amour dans son regard, sa tête partit en arrière et un petit rond rouge apparut entre ses deux yeux.
Les pupilles révulsées, le téléphone tombant de ses mains, un ruisseau d'hémoglobine roulant sur son visage, mon petit-ami tomba en silence sur la table basse.
Mina me fixait, semblait jouir de mes expressions horrifiées, avant de disparaître dans un grand fou rire qui me donna un mal de crâne affreux. Je ne pensais plus. Le corps inerte de Taehyung était devant moi, encore en vie à peine quelques secondes auparavant, et je n'eus pas la force de hurler. Je ne l'eue même pas lorsque je vis Namjoon apparaitre sur le côté de mon champ de vision, un révolver pointé sur moi. Un immense sourire se dessinait sur ses lèvres, laissant apparaitre sa dentition blanche. Puis, il eut un bruit sourd accompagné d'un noir plus sombre que celui de la mort.
— Jungkook !
Brutalement, une douleur m'électrisa le corps et Taehyung apparut au-dessus de moi, me fixant d'une inquiétude impériale. Sans même m'en rendre compte, je manquais d'air et il dût me frapper la poitrine en panique pour que je me daigne à respirer. Prisonnier de cette souffrance qui me rongeait chaque partie de mon âme, j'avais l'impression que tout autour de moi se passait au ralenti. Je n'entendais pas ce que me disait mon petit-ami, je le voyais inquiet, tenter de me faire reprendre raison, sauf que je commençais à me sentir bien dans cette souffrance. C'était ce que je méritais, c'était mon châtiment. Mes nerfs tiraient, me secouaient, me faisaient vivre une souffrance physique et psychologique comme je n'avais plus eu depuis une bonne année. Tout s'effondrait.
Le visage de Taehyung toujours au-dessus du mien, illuminé par une ambiance chaude, je me mis à analyser les détails de se peau, son grain, sa douceur, ses quelques grains de beauté qui participaient à son charme, ses longs cils, ses iris noirs aussi profonds que les abîmes, ses lèvres qui se mouvaient lentement, comme s'il me disait quelque chose que je n'entendais pas.
Brutalement, je stoppai tout regard lorsque l'on me tapota les joues.
— Jungkook, Jungkook, tu m'entends ?
Je papillonnai des yeux en prenant une grosse bouffée d'air qui me fit subitement tousser avec violence. Instinctivement, je m'assis en tenant ma gorge, Taehyung me tapotant le dos avec douceur. J'avais l'impression que deux mains me serraient le cou et le relâchaient sans cesse, et ce, pendant des minutes que je trouvais insupportablement longues. Un mal de tête était apparu, ma gorge irritée à force de tousser, et j'eus mal aux poumons lorsque je tentai de respirer normalement. J'étais fatigué.
— Ca va... ?
Je me frottai les yeux doucement et remarquai que mon corps était trempé avant d'être pris de frissons d'un coup. Pour répondre à Taehyung, je ne fis qu'un haussement de la tête pas spécialement convainquant. Puis je regardai où je me trouvais, soit dans sa chambre, comme à notre habitude lorsque je venais ici, au beau milieu de la nuit. Quelle heure était-il ?
— Minuit.
D'un léger sursaut, je me retournai vers mon petit-ami qui me fixait, toujours assez inquiet.
— Tu as fait un cauchemar ?
Je haussai la tête lentement en la rebaissant. J'avais froid.
— Tae... Fis-je d'une petite voix.
— Mh ?
Je n'arrivais pas à savoir à quel moment mon cauchemar avait débuté, tout m'avait paru si réel que j'étais en train de me demander si ce n'était pas ce présent-là dont je rêvais. Je n'avais plus aucun souvenir à partir du moment où j'avais quitté le café après mon rendez-vous avec Namjoon. Qu'est-ce qui était réel ? Qu'est-ce qui ne l'était pas ? Fatigué, j'étais tellement fatigué. Sans continué ma phrase, je me tournai à nouveau vers Taehyung, et amenai ma main à son front pour y déposer mon indexe à l'endroit précis où il s'était pris une balle. Pourquoi n'y avait-il pas de trou ? Il me fixa d'un air toujours aussi inquiet et ma main tomba lourdement sur le drap. Quand allions-nous nous coucher ?
— A quelle heure... repris-je, à moitié essoufflé, je suis rentré ?
Il eut une mine dubitative et ses sourcils se froncèrent légèrement.
— Aux environs de dix-huit heures, murmura-t-il en posant une main inquiète sur ma hanche. Tu n'as pas voulu me parler et tu es directement allé dormir...
— Je...
Pourquoi je ne me souvenais de rien ? Pourquoi la dernière chose que je voyais, était le visage troublant de Namjoon, effrayé et excité ? J'avais passé une heure je ne savais où, à errer en ville avant de revenir ici par je ne savais quel moyen. Ce simple fait m'effraya et je regardai bien tout autour de moi sans aucune raison. Alors que je commençais à vraiment devenir fou de ce qu'il se passait, deux bras s'enroulèrent autour de mon torse et tout se calma soudainement. Sa chaleur remplaça le froid qui me rongeait le corps, et je lâchai un grand soupir. C'était réel.
— P-Pardon...
☯︎
Quinze heures dix-sept.
— Du coup Jungkook tu rentres ce week-end ? Me demanda Jimin en buvant son café.
Installés à la cafétéria, je touillai mon thé en haussant la tête.
— Oui, je pars demain soir.
Ces simples mots n'étaient pas loin d'être les seuls que j'avais sortis aujourd'hui. Ma langue et mon esprit s'étaient perdu je ne savais où, peut-être hier soir pendant l'heure dont je ne me souvenais pas, ou peut-être cette nuit en assistant à la mort de Taehyung. A moins que ce ne soit la mort de mon chien qui venait de faire déborder le vase à ne plus pouvoir l'arrêter. Oui, ça devait être ça.
Du coin de l'œil, je vis Minkyung et Jimin se regarder d'un air inquiet. Je soupirai. Je ne voulais pas qu'ils s'inquiètent pour moi, je ne voulais plus les embarquer dans mes histoires au risque qu'ils deviennent une nouvelle fois des victimes. Tout ce qui m'importait, c'était qu'ils vivent posément, sans avoir à se préoccuper de mes soucis qui pourraient leur coûter cher. Cela avait déjà été le cas avec Jimin il y a bientôt un an, et j'avais toujours du mal à le digérer encore aujourd'hui. Je savais que lui n'y pensais plus, que sa cicatrice était désormais recouverte d'un magnifique tatouage, mais ce n'était pas mon cas. Même envers Minkyung, bien que cela avait été qu'un simple message, il avait failli brisé notre amitié. Et s'il n'avait pas été patient, compréhensif, et ouvert d'esprit, je ne savais pas où est-ce que nous en saurions aujourd'hui. Mes épaules étaient lourdes, tout le poids de mes actes m'écrasait de plus en plus.
Je ne pouvais plus dire « ca va » lorsque l'on me demandait comment j'allais, parce que ça n'allait plus. Plus du tout. Je me mentais déjà à moi-même en essayant de me convaincre que tout allait passer dans peu de temps, ce qui était totalement faux. Je voulais pleurer, hurler à m'en déchirer les cordes vocales, peu m'importait si la mort m'attendait au bout du tunnel, car tout ce que je voulais, c'était vivre ma vie tranquillement auprès de mes amis, ma mère et de mon petit-ami. Alors pourquoi fallait-il qu'on mette des bâtons dans les roues de mon bonheur ?
Je voulais hurler à Jimin et Minkyung le mal être qui me rongeait, leur avouer que le décès de mon chien venait de tout foutre en l'air mon travail, que mon cœur était brisé suite à cette nouvelle disparition dans ma famille, que j'avais peur de rentrer chez moi et de ne pas le voir arriver me dire bonjour. Oui, j'avais tellement peur, j'étais effrayé de la réalité. Je voulais m'endormir et rêver de ceux qui me manquaient pour l'éternité.
Maman, je n'en peux plus.
Dix-sept heures quarante-cinq.
— C'est quand déjà la projection ? Demanda Minkyung à Jimin en sortant du bâtiment principal de l'école.
Le ciel était gris, quelques tâches foncées commençaient à tomber là et là. Les cieux aussi étaient tristes et fatigués.
— Fin semaine prochaine je crois.
Le visage en l'air et les yeux rivés sur les nuages noirs, je lâchai un énième soupir depuis le début de la journée. Des gouttes vinrent s'éclater contre ma peau et glisser le long de mes joues, comme si elles prenaient le rôle des larmes que je retenais. Sortis de l'enceinte de l'établissement, je voyais les personnes autour de moi ouvrir leur parapluie pour se protéger de la tristesse du ciel. Mes amis n'en firent pas parti, beaucoup trop occupés à continuer leur conversation pour remarquer qu'il commençait à pleuvoir. Dans ma poche de manteau, je sentis mon téléphone vibrer, me faisant sortir de ma transe.
TAEHYUNG :
On commande ce soir ?
J'eus un sourire en lisant son message et répondis positivement. Cela faisait un moment que l'on n'avait pas fait cela et maintenant qu'il m'avait donné envie d'un bon repas gras, je me léchais presque les babines. En rangeant mon portable, je relevai la tête vers mes deux amis, qui se dirigeaient vers leur arrêt de bus. A cause de nos emplois du temps, c'était la dernière fois que je les voyais jusqu'à la semaine prochaine, car je n'avais que cours demain matin, tandis que Minkyung avait cours l'après-midi et Jimin était déjà en week-end. Je décidai alors de ne pas rentrer tout de suite et de rester un peu avec eux jusqu'à ce que leur bus arrive.
— Putain Minkyung t'aurais pas pu te retenir d'aller aux chiottes ? Râla Jimin en regardant les horaires de bus.
Ne comprenant pas où il voulait en venir, l'accusé se pencha à son tour sur le panneau électrique et se mit à rire de plein cœur. Leur bus venait de passer à deux minutes d'intervalles de notre arrivée, et ils devaient attendre une dizaine de minutes avant le prochain. L'un était frustré de ne pas pouvoir rentrer plus tôt, tandis que l'autre riait de sa bêtise. Les voir se chamailler comme cela me fit sourire.
— Ah mais il pleut ? Remarqua Minkyung en levant le visage au ciel avant de se cacher en vitesse sous l'abri bus.
Jimin le rejoint immédiatement tandis que je pris plus mon temps, me foutant complètement d'être trempé. Tout ce qui m'importait pour le moment, c'était de passer encore quelques instants avec eux pour les regarder s'embêter avant de rentrer. Je ne savais pas pourquoi j'avais ce désir, et ce n'était pas pour me déplaire. Pour rien au monde je ne voulais les perdre.
— Jungkook, fis le même que plus tôt, tu ne vas pas à Coquelicot ce soir ?
— Je suis en arrêt.
Son visage prit une mine étonnée et Jimin fronça légèrement les sourcils. Ils savaient très bien que ça n'allait pas depuis hier, mais j'étais mitigé entre le fait de leur avouer la vérité et mentir. Je n'aimais pas mentir, et pourtant, je le faisais de plus en plus.
— Pourquoi ?
— Ca... J'hésitai quelques instants avant de tapoter ma tempe du doigt, ça ne va plus très bien là-haut.
— C'est pour ça que tu rentres ce week-end ? Demanda directement Jimin en passant une main dans ses cheveux d'ange.
Mal à l'aise, je haussai la tête en me mordant les lèvres. Je ne me sentais pas encore prêt de leur annoncer que je venais de perdre un nouveau membre de ma famille, le choc était encore trop présent.
Dix-sept heures cinquante.
Les gouttes étaient devenues des cordes, la route devenait un gigantesque miroir où se reflétaient les voitures et les lumières de la ville. La nuit commençait à tomber de plus en plus rapidement et l'arrêt de bus était rempli d'inconnus et d'étudiants de mon école. L'odeur de la pluie mélangée à la poussière était une chose que j'adorais. Cela me faisait remonter des souvenirs avec Jihyung lorsqu'il pleuvait à sauts à Busan, et que nous nous installions sur la bordure d'une fenêtre à discuter de tout et rien en appréciant la mélodie de la nature. Peut-être qu'en rentrant, je pourrais demander à Taehyung s'il voulait bien faire la même chose en mangeant.
— C'est bon t'as fini ?! Râla Minkyung en pleine partie avec Jimin sur leur téléphone.
— Bam, j'ai encore gagné, fit celui-ci avec fierté.
— Façon il est nul ce jeu.
Je pouffai d'amusement en voyant la tête de mauvais perdant qu'il tirait. Quelques personnes tournèrent un regard curieux sur eux avant de continuer à naviguer sur leur téléphone, seul objet qui attirait leur attention durant l'attente du bus. Personnellement, je m'occupais plus à les regarder ou à observer la pluie tomber sur le sol comme j'aimais le faire. Je n'avais ni de capuche, ni de parapluie, mais je n'en avais que faire. Si je pleurais, cela ne se verrait pas.
Dix-sept heures cinquante-deux.
Subitement, une voiture noire aux vitres teintées s'arrêta d'un coup de frein brutal sur la bande d'arrêt des bus, juste devant l'arrêt. Toutes les personnes présentent furent intriguée par celle-ci qui venait de sortir de nulle part, tandis que j'eus un horrible pressentiment lorsque mon cœur se mit à battre plus rapidement. Puis tout alla à une vitesse hallucinante ; deux hommes masqués de noir descendirent, et en une fraction de seconde, j'eus une horrible douleur au nez. Tout devint alors flou autour de moi, je vis Minkyung se prendre un coup de genou dans les côtes, mon corps se relâcha et je crus entendre des cris d'effroi rebondirent sur les parois de mon crâne.
Et parmi ces cris, mon prénom fut hurlé avant que tout ne devienne sombre et calme.
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