legolas (ff) - 2
CHAPITRE 3 :
Ces deux derniers jours, Enetari n'avait pas chômé. Elle avait travaillé durement à l'auberge, s'assurant ainsi que son oncle ne serait pas déboussolé par son départ.
La semi-elfe rencontra toute sorte de créature, comme à son habitude. La Saule Verdoyant avait la réputation d'accueillir au même statut Elfes -hors elfes sylvestres qui n'était évidemment pas les bienvenus-, Hommes, Nains, Hobbits ou tout autre espèce.
Tous étaient des voyageurs accomplis, l'auberge se trouvant un peu au milieu de nulle part. Il fallait deux jours à cheval pour atteindre le premier village, et si certains s'en seraient sûrement plaints, Elros et sa nièce s'en satisfaisaient avec joie.
Enetari, accoudée au comptoir, observait, amusée, une bande de cinq nains se lancer un concours. Le gagnant était celui qui buvait le plus longtemps sans vomir ses trippes, et c'était la principale source de revenus du Saule Verdoyant -selon la jeune femme-.
La semi-elfe s'était longuement interrogée sur la présence de nains dans la demeure d'un elfe, avant d'apprendre que son oncle avait noué des liens d'amitié très forts avec eux en se battant à leurs côtés, refusant de les abandonner à leur funeste destin comme l'avait demandé son roi.
Elros se plaisait à raconter que Thror lui avait sauvé la vie lors d'une bataille, mais sa joie était toujours remplacée par une profonde tristesse quand il contait la mort de ce dernier. Afin de venger son ami mort en combattant, l'elfe aurait couvert son petit-fils, Thorïn Écu-de-Chêne, quand celui-ci tentait de terrasser Azog le Profanateur
-UNE TOURNÉE DE BIÈRE ! s'écria un nain, la tirant brutalement de ses pensées. Prévoyez-en huit ou neuf de plus, hoqueta-t-il en partant dans un fou rire.
Enetari esquissa un mince sourire, avant de remplir cinq chopes du liquide jaunâtre et de les apporter à la table.
Elle retourna derrière le comptoir, et prévoyant l'opiniâtreté des nains, commença à remplir d'autres chopes.
Puis soudain, venant la troubler en pleine besogne, une silhouette encapuchonnée s'installa sur un tabouret face au comptoir.
La jeune femme s'imobilisa un instant, guettant le danger.
-Une bière, s'il vous plait, dit poliment la personne.
Sans un mot, Enetari lui en tendit une déjà prête.
Elle avait appris à éviter de parler aux inconnus, spécialement ceux qui semblait être capable de tuer tout le monde dans cette pièce.
-Une soirée fructueuse ? observa l'homme en faisant allusion aux nains.
-En effet, répondit-elle sans aucune émotion transparaissant dans sa voix.
Cela la dérangeait de ne pas voir le visage de son interlocuteur. Mais elle ne fit aucune remarque, et se contenta de donner leurs boissons aux participants au concours d'alcool.
Mais alors qu'elle déambulait entre les tables rondes, un homme ivre mort lui aggripa la manche et lança d'une voix puissante :
-Eh mam'zelle ! C'est quand qu'tu passes dans not' lit ?
Des éclats de rire résonnèrent dans la pièce. Enetari se figea, une colère brûlante la saisissant. Elle se dégagea de l'emprise de l'homme et partit sans un mot.
Comme si rien ne s'était passé, elle continua de servir les clients. Malheureusement pour elle, quand elle repassa pour la troisième fois près de l'homme, celui-ci se redressa et lui attrapa la main.
-Oh ouais une elfe dans not' lit, z'imaginez ça ?
Il se rapprocha d'Enetari, un air malsain sur son visage. Hélas, il s'en était pris à la mauvaise personne. D'un bref mouvement, elle sortit un petit couteau de sa ceinture et en un geste rapide et précis, elle planta le poignard dans la table, embrochant le tissu de la manche de l'homme au passage.
Un silence se fit dans la salle, brisé par un nain qui vomissait.
L'homme se retrouvait coincé, le bras plaqué contre la table. La semi-elfe lui envoya un regard brûlant de rage, qui semblait faire fondre de honte même le plus fier des Hommes.
Quand elle se retourna, elle vit que la silhouette encapuchonnée l'observait. Que lui voulait-elle encore ?
Du coin de l'oeil, elle aperçut son oncle entrer dans la pièce. C'était la fin de son service. Elle posa avec soulagement le tablier sur le comptoir, salua son oncle et partit se coucher.
Demain sera une grande journée.
~○~
Enetari avait peu dormi. Les événements de la veille et sa colère bouillonnante ne lui avaient pas permis de trouver le calme nécessaire au sommeil. Le soleil n'allait se lever que dans deux heures tout au moins quand la semi-elfe commença à s'habiller.
Elle enfila un pantalon moulant confortable qui la laissait libre de ses mouvements, et un chemisier à la fois léger et la protégeant des caprices du temps. Elle cacha dans ses sous-vêtements une des plus petites dagues en sa possession. Bien évidemment, c'était juste au-cas-où, car elle se voyait mal farfouiller son soutient-gorge en plein combat.
Avec cela, elle serra à sa taille une ceinture regorgeant d'armes, pour la plupart des poignards. Elle prit également une épée, qu'elle rangea dans son fourreau. Elle enfila une tunique de cuir, moins solide qu'une armure mais qui pourrait tout de même la protéger. Enetari chaussa ses bottes où se trouvait en chacune d'elles un poignard au niveau du mollet. Pour couronner le tout, elle se vêtit de sa cape, lui allant jusqu'aux chevilles, et rabbatit sa grande capuche sur sa tête. Tout dans sa tenue était noir, avec parfois quelques touches de vert. L'idéal pour se fondre dans la forêt.
Durant son insomnie, Enetari s'était joliment coiffée : cinq petites tresses de part et d'autre de son crâne débutaient sur ses tempes et se rejoignaient à l'arrière de sa tête. Le reste de sa chevelure était restée lache. Cela lui permettait de ne pas avoir constamment des cheveux devant le visage, mais aussi de ne pas les attacher entièrement.
Elle observa une derrière fois son reflet dans une bassine d'eau près de son lit, avant d'enrouler tout son visage -mis à part des yeux- d'un foulard noir.
Ainsi, personne ne connaitra jamais son identité.
La semi-elfe descendit silencieusement les marches, avant de se retrouver au bar. Elle étouffa un petit rire en voyant que l'homme qu'elle avait cloué à sa table y était encore. Il ronflait bruyamment, et semblait plongé dans un profond sommeil.
Enetari se faufila hors de l'auberge, et marcha tranquillement vers les écuries. Elle s'arrêta un instant, observant les étoiles. Voilà bien la seule chose qu'elle ne perdrait jamais. Son admiration pour ces lumières à jamais étincelantes dépassait celle de bien des êtres. Cette fascination a quelque chose de génétique, car il en était ainsi pour tous les membres de la famille BrillanteÉtoile. Elros lui-même passait de longues soirées à contempler le ciel sombre de la nuit.
-Si douce est la lumière
Des infaillibles étoiles
Éclairant le chemin invisible
Qu'est notre lointain futur
J'avance la vue éteinte
Mon âme appartient aux astres
Étoiles dont les mains
Détiennent mon destin, psamoldia doucement Enetari.
Ses yeux s'étaient inconsciemment fermés, et la fraîcheur de la nuit l'enveloppait d'une étreinte rassurante quand une voix vint la tirer de son calme :
-C'est très beau, résonna une voix masculine. C'est de vous ?
La semi-elfe ne laissa rien paraître de sa surprise, et se retourna pour faire face à l'homme encapuchonné qu'elle avait vu hier.
-Merci, mon Seigneur. Il me semble que ceci est de ma composition, mais j'aurais très bien pu entendre ces paroles de mon oncle qui ne tarrit pas d'éloges sur les mystères de la voute étoilée, répondit-elle en s'inclinant légèrement.
Les deux restèrent un moment silencieux, avant de prendre le chemin des écuries.
-Vous partez, fit remarquer l'inconnu. Ne vous plaisez-vous pas ici ?
Enetari s'interrogea un moment sur la curiosité de l'homme. Pourquoi s'intéressait-il autant à elle ? Cela ne la mettait pas mal à l'aise, non, l'inconnu avec une présence apaisante. C'est ce pourquoi elle répondit.
-Comprenez, mon Seigneur, qu'en cinq-cinquante années d'existence, je n'ai quitté que trois fois les terres de mon oncle, expliqua-t-elle. Toujours accompagnée de celui-ci.
Bien qu'elle s'en plaignait en ce moment, ces escapades ont toujours fait partie de ses meilleurs souvenirs et elle ne les regrettait pour rien au monde.
-Vous restez extrêmement jeune pour une elfe, constata son interlocuteur.
-Le temps qui s'écoule est une idée très complexe, mon Seigneur, contra-t-elle. Une heure passée avec l'amour de votre vie peut vous sembler n'être d'une poignée de minutes. Au contraire, une heure passée à être torturé par votre ennemi peut vous sembler être d'interminables semaines.
L'inconnu méditait ses paroles. Elles étaient sages et pleines de bon sens, remplies d'une logique que peu d'êtres avaient assimilé. Il devina que la semi-elfe était bien plus mature que son âge pouvait le laisser croire.
-Vous êtes dans le second cas, dit-il finalement.
Enetari lacha un petit rire.
-Absolument pas, sourit-elle. J'ai passé de merveilleuses années ici, et je fus très heureuse. Seulement, une insatiable envie de découvrir le monde m'a toujours tiraillé le coeur. Et je ne puis attendre plus longtemps.
Les deux arrivèrent aux écuries. Le hasard fit que le cheval de l'homme logeait dans le box le plus proche de celui de Vaillant, si bien qu'ils continuèrent leur discussion.
-Ne craignez-vous donc pas d'être tuée ? demanda l'homme.
-Tout Homme, Elfe ou Nain a cette peur, et je ne déroge pas à la règle, répondit-elle en caressant son étalon. Seulement, si je dois laisser ma vie pour protéger ceux que mon coeur chérit, alors je le ferai.
-Vous êtes sage, ma Dame, malgré votre jeune âge, affirma-t-il. Je vous souhaite le meilleur pour votre proche voyage.
La semi-elfe sourit, fière d'être qualifiée de "sage".
-Et vous, mon Seigneur, où vous dirigez-vous ? interrogea-t-elle en sellant Vaillant.
-Je m'en vais vers le Sud, répondit-il, énigmatique.
Enetari n'insista pas, elle savait qu'il n'ajouterait rien.
-Pardonnez mon indiscrétion, mais pourquoi masquer votre visage ? demanda-t-elle finalement.
-Pour la même raison que vous, ma dame. Je ne souhaite pas que l'on me reconnaisse.
L'homme avait déjà fini de préparer sa monture. Il passa avec elle près du boxe de la jeune femme, et il s'arrêta un instant pour s'incliner.
-Ce fût un plaisir de converser avec vous. Une étoile brillait sur l'heure de notre rencontre, salua-t-il avec une pointe d'humour dans la voix.
-Puisse la clarté des étoiles guider votre chemin, répondit poliment la semi-elfe.
Puis l'inconnu sortit de l'écurie. Quelques secondes plus tard, Enetari entendit les sabots du cheval fouler le sol à un rythme rapide.
-Eh bien Vaillant, il n'y a plus que toi et moi, murmura-t-elle en caressant son chanfrein.
-Tu oublies ton oncle, jeune fille, lança une voix puissante derrière elle.
Elle se retourna, et vit Elros qui se dirigeait vers elle. La semi-elfe découvrit son visage en laissant son capuchon sombre reposer sur ses épaules et fit quelques pas avant d'enlacer son oncle.
Ils restèrent silencieux, jusqu'à ce qu'ils ne se séparent.
-Enetari... murmura l'elfe avec tendresse. Les Valar seuls savent combien tu vas me manquer.
-Il en est de même pour moi, sourit-elle.
Elros contemplait sa nièce, soucieux. Elle était magnifique, un mélange parfait entre la douce beauté de sa mère et la brutale prestance de son père. Si il avait toujours refusé d'exposer Enetari à des quelconques prétendants, c'est parce qu'il savait qu'ils seraient bien trop nombreux. Malheur à celui qui osait la courtiser : après une courte entrevue avec Elros, on ne le revoyait pas de sitôt.
Loin de s'en offusquer, la semi-elfe bénissait la méfiance de son oncle. Elle se trouvait bien trop jeune pour se marier, et détestait cette idée. Elle tenait à sa liberté comme à sa vie.
-Elros, tu m'as l'air inquiet, observa cette dernière.
-J'en ai toutes les raisons, répliqua-t-il. J'ai bien peur que ta soif de justice ne cause ta perte.
-Tu m'as toujours entraînée pour affronter les dangers du monde, mon oncle. Mais je ne puis les affronter si je ne sors de ces terres.
-Tu chasses le mal de ma forêt, rétorqua-t-il, déclenchant le rire de sa nièce.
-Cela n'a rien à voir, sourit-elle. Je souhaite protéger ceux qui ne peuvent pas se protéger eux-même.
-Tu ne tenais pas ce discours hier, railla l'elfe. J'ai l'impression que tu ne sais pas ce que tu veux faire.
-Je veux quitter mon berceau, mon oncle, contra Enetari. Bien qu'il y ait une part de vérité dans tes paroles.
Un duel de regard suivit ces mots. Les yeux sévères d'Elros affrontaient ceux déterminés de sa nièce. Finalement, l'elfe se déroba, laissant la jeune femme gagner.
-Je souhaite découvrir un monde dont on ne m'a que trop parlé, lança-t-elle.
En effet, elle écoutait souvent les histoires que contaient parfois les voyageurs dormant à l'auberge. Elle avait notamment été subjuguée par le récit d'un soldat de la Lothorien contant ses innombrables batailles.
Vaillant hennit derrière elle, lui faisant parvenir son impatience. Elle saisit entre ses doigts la crinière noire du cheval, et se hissa d'un mouvement gracieux et fluide sur le dos de l'étalon. Elros les observa, soucieux.
-Et je sais que je ne pourrais te faire changer d'avis, concéda-t-il. Mais je te prie d'écouter mes dernières recommandations.
Enetari inclina la tête, signe qu'elle était toute ouïe.
-Méfie-toi des Hommes, certains sont cupides et arrogants, commença-t-il. Ils peuvent être de solides alliés comme de puissant ennemis.
La semi-elfe nota cette information dans un coin de sa mémoire tout en se disant que les Hommes ne paraissaient pas bien menaçants.
-Les Nains apprécient peu les Elfes, et si tu venais à en rencontrer, montre-leur ceci, en gage de ton honnêteté et de ta bonne foi.
Elros sortit de sa poche une hache de petite taille où quelques joyaux étaient incrustés dans le manche.
-Ceci est un cadeau du Roi Thraïn, qui me fut offert en remerciement pour avoir protéger son fils et aider son peuple, précisa-t-il. Puisse cette arme te protéger du courroux des Nains.
Enetari prit l'arme, touchée, et la rangea dans une poche intérieure de sa cape.
-Les Elfes sont des êtres bons et hospitaliers, ils constitueront un refuge de choix pour toi. J'ai rencontré les fils du Seigneur Elrond, ce sont des elfes sages et généreux, tout comme leur père, confia-t-il.
Puis immédiatement, sa mine s'assombrit, et la semi-elfe devina quel serait le sujet de son prochain conseil.
-Je t'en conjure Enetari, ne t'approche pas de la Forêt Noire. Les elfes sylvestre sont mauvais, guidés par l'orgueil. Leur roi, Thranduil, est une des plus infâmes personnes qui m'ait été donné de rencontrer, vociféra Elros. Je ne regrette pas qu'il m'ait banni, je n'aurais pas pu supporter plus longtemps le joug de cet être glacial et opportuniste.
Sa nièce sentit une vague de colère la submerger. Ce Thranduil avait blessé son oncle, elle le savait.
-Cet elfe est ignoble, affirma-t-elle. Même si tu n'en parles pas mon oncle, je sais que tu souffres de la séparation avec ta femme, ma tante.
Les traits de l'elfe s'emplirent d'une profonde tristesse, très vite remplacés par un masque d'impassibilité.
-Je ne pourrais le nier, acquiesça-t-il. Mais ce n'est pas le pire. Rappelle-toi ce qu'il a fait à ta mère, tonna-t-il, rappelle-toi sa trahison envers un de ses sujets ! Rappelle-toi qu'il est la cause de sa disparition, rappelle-toi que c'est par sa faute qu'une enfant est devenue orpheline, dit-il, sa voix se brisant légèrement. Rappelle-toi que cet elfe a trahi tes parents.
Enetari fut ébranlée par la douleur transparant dans sa voix. Une fureur monstrueuse saisit son coeur, et coula dans ses veines.
-Rappelle-toi, n'oublie jamais, murmura-t-il. Tu ne peux avoir confiance en ce peuple.
-Jamais, jamais n'oublierai, promit-elle, le poing serré contre son coeur. Au nom d'Elendë, ma mère. Au nom de Duinhir, mon père. Et en ton nom, mon oncle ; je me battrai contre les injustices de ce monde, et vengerai ceux qui méritent d'être vengés.
La fierté brilla dans le regard d'Elros, qui admirait la détermination de la semi-elfe. Celle-ci détacha un broche de sa cape, et la tendit respectueusement vers son oncle.
-Prends ceci, en mémoire de moi.
La broche représentait une branche de gui symbolisant la paix qu'Enetari cherchait tant.
L'elfe l'attacha solennellement à son habit, au niveau du coeur.
-Prends soin de toi, Enetari BrillanteÉtoile, et que la clarté des étoiles guide ton chemin, clama-t-il.
-Veille sur toi également, mon oncle. Tu vas me manquer, le salua-t-elle.
En lançant un dernier regard à son berceau, elle caressa l'encolure de Vaillant.
-Va mon beau, galope plus vite que le vent !
Répondant aux ordres de son amie, le cheval partit comme une flèche, malgré le poids des bagages d'Enetari, laissant Elros fier et digne, mais cruellement seul.
CHAPITRE 4 :
Voilà bien deux mois qu'Enetari vaquait dans la Terre du Milieu. Sa bourse de pièce d'or n'avais pas changé le moins du monde. Elle subvenait elle-même à ses besoins, et effectuaient souvent quelques petites quêtes qui lui permettaient d'amasser une poignée de pièce. Le plus souvent, elle avait pour mission de capturer des hors-la-loi, même si on lui avait demandé plusieurs fois de pister des orques et les tuer.
La semi-elfe était actuellement attablée dans un bar miteux, observant sa chope de bière sans en boire. Elle avait l'impression de passer à côté de quelque chose, quelque chose d'important. Plongée dans ses pensées, elle ne remarqua pas la femme qui était entrée en catastrophe dans le bar.
-Des orques ! hurla-t-elle. Ils l'ont prit ! Ils ont prit mon bébé, mon enfant, sanglota-t-elle. Ils l'ont tué !
Enetari but d'une traite sa bière, et en une seconde elle était déjà auprès de la femme.
Celle-ci avait les cheveux en pagaille et des vêtements sales et déchirés. Son visage était ravagé par les larmes, mais relativement jeune.
Elle pointa du doigt la porte, et la semi-elfe sortit brusquement dehors. La partie est de la ville était en feu. Elle s'y rua, et ce qu'elle vit l'horrifia.
Des cadavres éparpillés au sol, des gens qui pleuraient, des bébés qui criaient. Une petite fille vint la voir, sanglotant.
-Mon seigneur, papa... Papa est mort, annonça-t-elle secouée par ses sanglots.
Enetari ne la reprit pas, mais s'agenouilla. Elle décida de baisser le foulard qui lui couvrait la tête.
-Sois-forte, ma petite, souffla-t-elle tandis que l'enfant ouvrait des yeux étonnés. Comment tu t'appelles ?
-Lida, dit-elle en retenant ses pleurs.
-Lida, je sais que c'est dur. C'est très triste, et très injuste. Mais ton père aurait voulu que tu sois forte, et que tu aides les gens qui ne sont pas aussi forts que toi, déclara la semi-elfe.
La petite buvait ses paroles, les yeux grands ouverts.
-Où est ta mère ?
-Là-bas, chuchota-t-elle en désignant une femme agenouillée près d'un corps, le regard vide.
-Très bien. Tu vas aider ta mère, et aussi tes voisins, d'accord ? Va prévenir les habitants de l'ouest, et ramène le plus de nourriture que tu peux, ordonna-t-elle.
-D'accord, acquiesça l'enfant.
La peur se lisait dans ses yeux, mais aussi la détermination. Enetari sourit, et se releva.
-Ma Dame, vous êtes une elfe ? demanda-t-elle soudain.
-Oui. Mais c'est notre petit secret, n'est-ce pas ? confia-t-elle tandis que la petite hochait vigoureusement la tête.
-Vous allez tuer les démons ?
La brune fut surprise par l'appellation des orques. Mais finalement, cela leur allait bien.
-Oui.
-Je veux venir avec vous !
Elle rit, attendrie. Elle se baissa de nouveau, et sortit une petite dague de sa botte droite.
-Quel âge as-tu Lida ?
-Sept ans, s'exclama-t-elle fièrement. Et demie.
-Ce n'est pas un âge pour se battre, fit remarquer Enetari. Mais voilà un présent pour toi, pour te défendre.
La petite semblait émerveillée par l'arme. Elle la prit, et la fit tourner habilement entre ses mains.
-Oh merci milles fois ma dame, remercia-t-elle.
-Ce n'est rien. Puisse la clarté des étoiles guider ton chemin, Petite Guerrière.
L'enfant fronça les sourcils, étonnée par cette formule de politesse.
-Euh... vous aussi, dit-elle avec hésitation.
La semi-elfe sourit une dernière fois avant de remettre son foulard noir. Elle se leva, et regarda vers le nord. Les orques s'étaient enfuis vers là-bas.
Elle siffla bruyamment.
-Vaillant ! lança-t-elle d'une voix puissante.
Quelques secondes plus tard, les claquements des sabots contre les pavés se faisaient entendre et l'étalon noir galopait dans les rues. Il se stoppa à côté d'Enetari, et s'ébroua.
-N'oublie pas ta mission, Lida enfant des Hommes, lança-t-elle avant de se hisser sur son cheval.
La petite, émerveillée, n'avait pas détaché son regard de la rôdeuse et de sa monture. Quand elle fut rappelée à l'ordre, elle s'inclina et fonça vers la partie ouest de la ville.
-Allez Vaillant, il est temps de se battre, murmura-t-elle.
Mais avant de poursuivre les orques, la semi-elfe s'arrêta près de la mère de Lida, toujours assise aux côtés du cadavres de son mari.
-Ma dame, soyez courageuse. Votre fille a besoin de vous, affirma-t-elle.
La femme leva ses yeux éteints vers Enetari, qui sentit son coeur se serrer.
Un faible sourire vint étirer ses lèvres gercées, et elle s'inclina devant la cavalière.
-Vengez-le, souffla-t-elle simplement.
Elle hocha la tête, avant de caresser l'encolure de son cheval.
-Va, mon beau, lança la semi-elfe.
Vaillant sortit au trot de la ville, avant de galoper avec puissance.
~○~
Les orques étaient trop nombreux pour un cavalier seul, si bien qu'Enetari se contentait de les traquer. Elle avait été surprise par le fait que les démons n'attaquent que la moitié de la ville.
Mais elle avait cru comprendre qu'ils étaient pressés, au vu de la vitesse à laquelle ils avançaient. Les ouargs ne prenaient que très peu de repos, contrairement à Vaillant qui pourtant n'était pas un cheval feignant.
Lors d'une de leur pause, Enetari réfléchissait. Il ne servait à rien d'affronter ces orques, ça n'aurait aucun impact à part celui de la tuer elle et son cheval. D'autres rôdeurs semblaient avoir suivi le même raisonnement, puisqu'elle se retrouvait seule à la suite des ennemis.
Les traquer pouvait aussi s'avérer inutile, mais la rôdeuse souhaitait savoir d'où venait tous ces essaims de démons.
Alors qu'elle examinait les chevilles de l'étalon noir, Enetari, grâce à sa fine ouïe, entendit les orques s'arrêter.
Elle se leva doucement, et posa une main sur le flanc du cheval.
-Reste là, Vaillant. Je vais juste faire du repérage.
Elle noua son foulard noir autour de son visage, et masqua sa tête par son capuchon noir.
Elle avançait silencieusement dans la nuit noire, sous l'oeil attentif de sa monture.
Enfin, les démons pâles étaient en vue. La semi-elfe percevait quelques mots, mais ne les comprenant pas, elle décida de s'approcher encore.
Tapie derrière un imposant rocher, elle observait l'orque semblant être le chef. Elle remarqua alors que, contrairement à ce qu'elle pensait, ils ne se dirigeaient vers leur repère, mais épiaient quelqu'un.
Enetari traquaient des orques qui traquaient des Hommes.
Malheureusement pour elle, les démons parlaient en langue du Mordor, et elle ne comprenait pas la discussion. Elle avait appris quelques mots du langage noir, à la demande de son oncle qui souhaitait qu'elle connaisse son ennemi. Elle comprit les mots : attaquer, tuer, et ramener, et cela lui suffit bien.
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