𝟷𝟶 ¦ 𝙴́𝙱𝚁𝙰𝙽𝙻𝙴𝙼𝙴𝙽𝚃 𝙳𝙴𝚂 𝚂𝙴𝙽𝚂²
𝙲𝙷𝙰𝙿𝙸𝚃𝚁𝙴 𝟷𝟶
ᴘᴀʀᴛɪᴇ ⒉
Les jours qui suivirent furent quelque peu étranges aux yeux de Marco qui n'était nullement habitué à voir son paternel déambuler dans sa propre maison. Pourtant, il s'accommodait plutôt bien de cette présence qui, certes étonnante, ne se révélait pas désagréable du tout. Il y avait quelque chose de rassurant dans la simple pensée de se dire qu'il n'était plus constamment seul chez lui, que quelqu'un se trouvait là en cas de besoin. Puisqu'il ne savait guère combien de temps cette atypique situation allait durer, il tâchait de profiter un peu de ce sentiment de sécurité et de stabilité.
Un après-midi, alors que Jean et Marco rentraient du lycée, le brun eut la bonne surprise de trouver un petit paquet posé sur la table basse du salon. Un sourire illumina son visage lorsqu'il lut l'étiquette. Se saisissant du colis, il fit signe à Jean de le suivre dans les escaliers. Curieux, celui-ci se laissa entraîner jusqu'à la chambre de son ami. Seulement, sitôt la porte refermée, Marco ne semblait plus si sûr de lui et montra même des signes de nervosité.
— J'ai enfin reçu ton cadeau de Noël. Mais finalement, je me dis que ce n'était peut-être pas une bonne idée, grimaça-t-il.
Quelques jours avant la date fatidique, le garçon n'avait toujours pas trouvé de cadeau approprié pour son meilleur ami. En fin de compte, son choix s'était fait par hasard, après avoir découvert le site d'une petite créatrice de bijoux indépendante. Celle-ci se trouvant naturellement débordée par les commandes de fin d'année, son précieux colis avait pris plusieurs semaines avant d'arriver. Cependant, maintenant qu'il le tenait dans ses mains, il se demandait si ce présent qu'il avait choisi sur un coup de tête n'était pas juste complètement idiot.
— Tu n'as que des bonnes idées, le rassura Jean. Rappelles-toi que ma mère sautait de joie lorsque tu lui a offerts ce service à thé en forme d'éléphants ! Il n'y avait que toi pour lui dégotter un truc pareil.
Marco souri en se remémorant la réaction de Marie qui s'était effectivement montrée particulièrement ravie. Après quelques secondes d'hésitation, il se décida enfin à tendre le petit paquet à un Jean très curieux et très impatient. S'asseyant à ces côtés sur le bord du lit, il le regarda déchirer le carton avec une certaine appréhension. Lorsque son ami découvrit enfin la petite boîte qui se trouvait à l'intérieur, son ami retient sa respiration. Jean laissa encore passer quelques secondes avant de soulever le couvercle avec une extrême attention. Quand ses yeux aperçurent le bijou doré qui reposait à l'intérieur, il suspendit son geste, le visage figé dans une expression que Marco ne parvint pas à déchiffrer. Celui-ci ouvrit la bouche, prêt à bredouiller qu'il pouvait probablement encore se faire rembourser, mais Jean ne lui en laissa pas l'opportunité.
— Je l'adore, souffla-t-il.
— C'est vrai ?
— Bien sûr !
Marco se détendit aussitôt, soulagé de constater qu'il semblait sincèrement l'apprécier. Le châtain n'était certes pas du genre à refuser un cadeau, mais sa réaction muette traduisait un réel émerveillement qui ravissait son ami. Au fond de l'écrin, un collier d'or reposait sur un petit coussin embourré. Du bout des doigts, Jean effleura timidement le pendentif dont la forme rectangulaire ne lui était pas si étrangère. Sur cette carte de tarot, un grand soleil affublé d'un visage occupait tout l'espace supérieur. Ses rayons chaleureux formaient un cercle voluptueux autour de lui tandis qu'il laissait échapper des gouttes d'eau autour de deux enfants. Leur frêle silhouette se tenait côte à côte, l'un ayant posé sa man sur l'épaule de l'autre qui touchait son torse. En bas du pendentif, un nom était en relief : Lᴇ Sᴏʟᴇɪʟ. Jean contempla en silence le bijou brillant, ne sachant guère que dire.
— Pourquoi ? fit-il enfin. Je veux dire, pourquoi celle-là en particulier ?
— J'ai pensé qu'elle t'irait bien.
Marco se saisit avec délicatesse de l'écrin pour en sortir le collier dont il actionna minutieusement le fermoir. S'approchant de Jean, il passa la fine chaînette d'or à son cou avant de refermer le mécanisme sur sa nuque. Il s'éloigna légèrement pour admirer le résultat.
— Le Soleil représente une vision enthousiaste et positive de la vie, expliqua le brun. C'est l'astre de la joie et de la réussite. Il rayonne sur le monde.
Pensif, Jean touchait le pendentif dont il voulait graver les reliefs dans sa mémoire. Marco le regardait avec un sourire qu'il s'efforçait de réprimer un tant soit peu.
— Comme toi, laissa-t-il échapper.
Le châtain releva les yeux vers lui, les sourcils relevés en un air étonné.
— Je suis un Soleil ?
— Tu es mon Soleil, admit Marco en rougissant doucement.
Jean resta un instant interdit devant l'honnêteté de ces mots, puis il rosit à son tour. Troublé, mais béat comme un bienheureux, il approcha sa tête de la sienne.
— Merci, chuchota-t-il à son oreille.
Marco tressailli légèrement, mais il fut bien plus sensible au contact du baiser furtif que Jean lui déposa sur la joue. Leur visage tout entier rougit de plus belle sous la surprise et sous la témérité du geste qui ne s'était pas révélé désagréable. Heureusement, le châtain posa rapidement sa tête sur l'épaule de son vis-à-vis, les empêchant mutuellement de constater cette gêne soudaine. Un sourire niais toujours accroché à ses lèvres, Marco fit remonter sa main le long de son dos pour chatouiller sa nuque de ses doigts tandis que Jean glissait les siens dans son col pour y dénicher son Étoile. Savoir qu'ils portaient à leur cou un bijou similaire le contentait plus qu'il n'oserait l'avouer.
Les deux garçons étaient encore perdus dans cet univers qui leur appartenait quand un cliquetis vint briser le silence. Marco réalisa soudainement ce que ce bruit pouvait signifier et prit ensuite conscience que son père se trouvait justement au rez-de-chaussée et qu'il pouvait à tout moment se lever du canapé pour aller récupérer le courrier. Bafouillant quelques excuses profondément incompréhensibles à Jean, il se leva brusquement et descendit les marches à la volée. Sa prudence excessive se trouva justifiée lorsqu'il repéra une feuille de papier pliée en quatre au milieu du paillasson. Il s'en saisit rapidement pour la fourrer dans la poche arrière de son pantalon, sans même prendre la peine de la lire. Il remonta les escaliers d'un pas lourd en se demandant comment il allait bien faire pour se sortir d'une telle situation. En le voyant revenir, Jean se releva, l'air soucieux.
— Il y a un problème ?
— Non, affirma Marco, ce n'est rien.
Seulement, ses yeux fuyaient les siens, ce que le châtain remarqua aussitôt. Son ami était incapable de mentir effrontément à qui que ce soit, ce qui le poussait à détourner le regard chaque fois qu'il s'y voyait contraint. Pressentant que quelque chose se tramait, Jean fronça les sourcils. Il voulu insister, mais Marco lui répéta en souriant faussement que tout allait très bien et se détourna pour aller trifouiller dans son bureau, espérant trouver de quoi distraire son ami. Ce dernier remarqua alors qu'un coin de papier dépassait de sa poche arrière et s'en saisi aussitôt.
— Qu'est-ce que c'est ?
Marco fit immédiatement volte-face, son visage palissant à la vue du mot. Comprenant qu'il venait de mettre le doigt sur un point sensible, Jean attendit des précisions qui tardèrent à venir. Son ami dégluti difficilement, incapable de soutenir l'intensité du regard qu'il sentait posé sur sa personne.
— D'accord, balbutia-t-il. Je vais tout t'expliquer. Juste... Ne t'énerve pas, s'il-te-plait.
Jean secoua la tête, les lèvres pincées.
— Je ne peux pas te le promettre, lâcha-t-il en toute honnêteté.
La boule de peur et de rage qu'il sentait naître dans sa poitrine le dissuada de prononcer des promesses qu'il ne saurait guère tenir. Il fit tourner le papier dans ses doigts quelques instants avant de le déplier avec soin, redoutant déjà ce qu'il allait découvrir. Marco ferma les yeux, ne désirant pas voir son visage qu'il pouvait imaginer se décomposer au fil de sa lecture. Il continua de rester immobile, patientant avec calme pendant des secondes qui lui semblèrent interminables. Face à lui, Jean prenait difficilement l'entière mesure de la situation et se mit à tourner en rond. Plusieurs fois, il ouvrit la bouche pour parler, sans pour autant savoir par où commencer.
— Combien ?
Marco se tordit nerveusement les doigts, les yeux fixés sur le parquet qui n'avait jamais été aussi hypnotisant. Comprenant qu'il était trop tard pour démentir quoi que ce soit plus longtemps, il s'accroupit au bord du lit pour tirer la boîte à chaussures qui se cachait en-dessous. Il la posa lentement sur le matelas, puis tapota de ses doigts le couvercle. D'une main tremblante, il le souleva légèrement afin de dévoiler les mots qui s'y étaient entassés au fil des semaines. Après un dernier soupir, il sortit de sa poche son téléphone portable qu'il lâcha au milieu des feuillets en un geste symbolique. Du coin de l'œil, Jean constata l'ampleur des dégâts. Son visage se tordit en une expression horrifiée tandis qu'il se passait les mains dans les cheveux, en proie à un profond dilemme. Lorsqu'enfin, il craqua et se tourna vers lui, Marco eut envie de pleurer.
— Pourquoi tu ne m'as rien dit ?
— Ce n'est pas grand chose... tenta d'arguer le brun.
À ces mots lancés avec une désinvolture qui n'était guère de circonstance, Jean sentit son sang ne faire qu'un tour. Malgré lui, il haussa franchement le ton dans l'espoir de provoquer une prise de conscience quelconque chez son ami.
— Si ce n'était pas grand chose, tu ne me l'aurais pas caché !
Le brun se tassa sur lui-même au son de l'exclamation et aussitôt, Jean regretta son geste. Réalisant qu'il n'aiderait personne de cette manière, il s'efforça de rester calme en prenant de grandes inspirations. Une fois son angoisse un peu apaisé en apparence, il s'assit sur le lit en invitant Marco à en faire de même.
— Tu n'y crois pas toi-même. Qui cherches-tu à convaincre ?
— Je pensais qu'ils finiraient par disparaître si je n'y prêtais pas attention, avoua le brun dans un murmure. C'est bête, je sais.
Jean secoua la tête en signe de désapprobation. Encadrant doucement de ses mains le visage de Marco, il l'obligea à lui faire face et déposa son front contre le sien.
— Je comprend. Vraiment. Mais tout ça, fit-il en désignant le contenu déplaisant de la boîte, ce n'est pas rien. C'est même très grave, Marco, et il va falloir faire quelque chose.
Au fur et à mesure que le brun reconnaissait difficilement cette vérité, son corps se mit à trembler. Jean avait entièrement raison : il ne pouvait échapper à cette perspective, même si elle l'avait toujours terrifié. En se bornant à ignorer le retour de cet harcèlement qu'il peinait à qualifier comme tel, Marco ne faisait que retarder l'inévitable. Sa gorge se serrait à l'idée de ce qui pouvait l'attendre, mais il refusait de tomber une fois de plus dans l'horreur de son enfance. Après tout, à l'inverse du passé, l'avenir n'était pas figé dans le marbre. Si Jean acceptait encore de marcher à ses côtés, l'inconnu lui ferait un peu moins peur.
— D'accord, lâcha-t-il enfin.
Jean sentit la caresse d'une larme sur sa joue et son cœur se serra. De ses pouces, il essuya délicatement les sillons salés avant de faire glisser une main derrière la nuque de Marco pour l'attirer contre lui. Le garçon chercha à retenir ses sanglots, mais il abandonna bien vite, laissant son corps être parcouru de soubresauts irréguliers qui déchirèrent son ami. Jean aurait donné n'importe quoi pour avoir la possibilité de lui affirmer que tout irait mieux très bientôt, qu'il se chargerait lui-même de ce problème et qu'il n'aurait plus à s'inquiéter de rien. Seulement, le châtain ne disposait pas d'un tel pouvoir et devinait que la situation dépassait ses pauvres capacités. C'était une aide extérieure, compétente et qualifiée qu'ils devaient vraiment dénicher. Mais pour l'heure, Jean et ses bras réconfortants étaient l'unique chose dont Marco avait besoin.
𝟸𝟶𝟷𝟸 ᴍᴏᴛs
ᴀ̀ sᴜɪᴠʀᴇ...
𝘺𝘰𝘶'𝘳𝘦 𝘯𝘰𝘵 𝘢𝘭𝘰𝘯𝘦 𝘪𝘯 𝘢𝘭𝘭 𝘵𝘩𝘪𝘴
𝘺𝘰𝘶'𝘳𝘦 𝘯𝘰𝘵 𝘢𝘭𝘰𝘯𝘦, 𝘪 𝘱𝘳𝘰𝘮𝘪𝘴𝘦
𝘴𝘵𝘢𝘯𝘥𝘪𝘯𝘨 𝘵𝘰𝘨𝘦𝘵𝘩𝘦𝘳 𝘸𝘦 𝘤𝘢𝘯 𝘥𝘰 𝘢𝘯𝘺𝘵𝘩𝘪𝘯𝘨
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