« — Papa, quand est-ce qu'Henri arrive ? »

Il y a des jours comme celui-ci, où j'aimerais pouvoir mettre le monde sur pause. Je suis même persuadé que si un génie apparaissait, ce serait la première chose que je demanderais.

« — Je ne sais pas mon cœur, il est chez son père ce weekend alors il a plus de route à faire pour venir jusqu'ici, lui dis-je en caressant sa tête.

— Papa ! Enlève ta main de mes cheveux, tu vas abîmer ma coiffure, ronchonne la blondinette en s'écartant. »

Ouais, mettre la vie sur pause serait le top du top.

Dixie me tourne le dos et retourne s'amuser avec ses amies dans le jardin. Elle fait sa petite loi depuis ce matin et pour cause : elle fête aujourd'hui ses neuf ans.

Je lui ai préparé une fête exceptionnelle. J'ai invité tous ses amis, engagé un traiteur, fais installer un château gonflable et mis un stand de barbe à papa à disposition... Et par-dessus tout, j'ai demandé aux gars de l'équipe de faire une apparition surprise à la petite fête.

Dixie adore mon équipe, elle les trouve tous plus cools que moi. Elle n'a pas cessé de me répéter comme ça serait super de les avoir à son anniversaire, comme ça elle pourrait crâner devant les autres. Et comme je ne peux rien lui refuser, j'ai demandé aux gars de venir. Ça n'a pas été compliqué, ils ont tous très vite acceptés. À l'exception de Dixon, évidemment.

Tout ça pour dire, que j'ai fait tout mon possible pour offrir à ma fille le meilleur anniversaire qui soit et cette petite ingrate me remercie en m'ordonnant de ne pas toucher ses cheveux. On est loin de la petite fille qui réclamait des câlins à tout va.

Cette petite Dixie me manque déjà.

« — Papa, ça sonne, va ouvrir !, hurle la star du jour.

— J'y vais chérie, j'y vais !

— J'espère que c'est Henri, parce que sinon je vais finir par m'énerver. »

Dépassé par les événements, j'accours vers la porte d'entrée et l'ouvre en priant de tomber sur le visage d'Henri. Mais malheureusement pour moi, ce n'est pas lui. Il s'agit uniquement de mes misérables amis.

« — Salut ! On arrive pas trop tard j'espère ?, demande Tess.

— Pile à l'heure, dis-je avec désespoir. »

Je laisse le quatuor rentrer et retourne m'occuper des dernières petites choses avant l'arrivée de tout le monde.

J'espère que l'arrivée de mes amis fera oublier à Dixie l'absence d'Henri. Au moins durant quelques minutes.

Henri est le meilleur ami de Dixie, ils se connaissent depuis leur plus jeune âge. Ils sont inséparables depuis toujours. Ils vont dans la même école, ont les mêmes amis et partage tout. Vraiment tout. J'ai souvent retrouvé Henri avec les vêtements de Dixie et inversement. À tel point que ça ne m'étonne même plus aujourd'hui. Ils sont vraiment très proches et ça me rassure beaucoup de savoir que ma fille n'est jamais seule.

Enfin, n'était jamais seule.

En plus d'être le meilleur ami de Dixie, Henri est également le cadet de Tyler, le meilleur ami d'Alec. Autant être sincère, toute cette histoire autour d'Alec et Mme Sanders a causé pas mal de tourments dans la vie des petits.

Après avoir découvert que sa femme le trompait avec un mineur, Mr Sanders a décidé de la quitter et de déménager à l'autre bout de la ville. Et comme il ne faisait plus confiance à sa femme pour assurer la protection de ses enfants, il a décidé de prendre Henri avec lui, laissant ainsi Tyler et sa mère seuls. Ça a créé pas mal de nouveaux problèmes de Henri en à payé les pots cassés. Il se retrouve maintenant dans une nouvelle école, loin de ses amis parce que sa mère a abusé d'un mineur.

C'est affligeant.

Cette situation a beaucoup peiné Dixie, ne plus pouvoir partager ses journées avec son ami est très compliqué pour elle. Alors c'est pour ça qu'elle est impatiente de le voir. J'espère que Mr Sanders ne tardera plus trop.

« — Mais vous êtes pas Henri, entends-je à mes côtés. »

Carter et Tess se mettent à froncer les sourcils en entendant Dixie, tandis que Matt et Estelle ricanent. On voit de suite qui sont les bons vivants et les emmerdeurs de service.

« — Non, on est pas Henri, mais au moins on a un cadeau !, annonce Tess en secouant le paquet.

— Juste un ? Je pensais que vous en ramèneriez plus, dit la petite en nous tournant le dos.

— Eh, reviens par là petite ingrate ! »

La métisse attrape Dixie et la soulève dans les airs, causant à celle-ci un éclat de rire intense.

« — Y en a peut-être qu'un, mais au moins j'ai choisi quelque chose qui va te plaire. Tu crois vraiment que tata va t'acheter un truc de merde ?

— Eh, le langage, la reprends-je.

— Pardon, elle m'envoie un baiser volant, tu crois vraiment que je vais t'acheter un truc... comment on dit un truc de merde, mais en langage soutenu ? »

Alors que tout le monde s'active pour donner une réponse à Tess, j'entends la sonnette de la maison retentir à nouveau. Sans alerter personne — et encore moins Dixie — je m'éclipse et vais ouvrir en espérant toujours tomber sur Henri.

Mais une fois de plus, ce n'est pas lui.

Sauf que cette fois, je suis encore plus heureux que si ça l'avait été.

« — Salut, désolée pour le retard, me lance cette voix que j'aime tant.

— Non, t'en fais pas, entre !, je me dévale pour la laisser passer, Je suis heureux de te voir, même si tu n'es pas Henri. »

La jolie rousse hausse un sourcil avant de me demander d'une voix amusée :

« — Qui est Henri ?

— Le meilleur ami de Dixie, il aurait déjà dû être là depuis une heure, mais toujours aucune trace de sa présence.

— Il ne devrait plus tarder.

— J'espère, parce qu'on a une Dixie pas contente là-bas, annoncé-je en pointant la petite du doigt. »

Elle est toujours en train de voler dans les bras de Tess, qui malgré ce qu'elle montre, commence à fatiguer. Cette vision m'arrache un sourire et j'en profite pour discuter avec Olivia un peu plus longtemps.

Depuis que nous avons couché ensemble la semaine dernière, nous n'avons pas eu le temps d'en discuter. L'univers fait qu'à chacun de nos écarts, nous avons des emplois du temps très chargés qui nous empêchent de communiquer. En temps normal ça m'aurait sûrement agacé, sauf qu'aujourd'hui, je suis angoissé. Je n'ai pas l'habitude de coucher avec des femmes, surtout pas des femmes qui me plaisent vraiment. Et lorsque je le fais, je préfère faire les choses bien.

Et je ne l'ai vraiment pas fait avec Olivia.

Habituellement, j'aurais d'abord emmené Olivia en rendez-vous. Plusieurs fois. Je n'aurais pas fait ça comme un empressé et je n'aurais surtout pas couché avec elle dans une chambre d'hôtel. Ce n'est vraiment pas mon genre de faire les choses de manières si disgracieuses. Alors j'aimerais réparer mes erreurs et recommencer du début.

Même si je ne veux en aucun cas oublier cette nuit de bonheur.

« — Hm, Olivia ? »

La rouquine qui regardait jusqu'à présent les filles, tourne sa tête vers moi et me sourit grandement.

Bordel, je meurs pour ce sourire.

« — Je voudrais m'excuser.

— T'excuser ?, demande-t-elle en fronçant les sourcils.

— Ouais, pour avoir couché avec toi de manière si précipitée, c'est pas mon genre. »

Un voile de déception traverse furtivement les yeux d'Olivia.

J'admets que ma manière d'annoncer les choses n'a rien de rassurante. Elle doit sûrement croire que je m'apprête à lui dire que je regrette ou quelque chose dans le genre.

Alors que bordel, c'est tout le contraire.

Si je le pouvais, je le referais tout de suite. Je la plaquerai contre cette porte d'entrée et plongerai sur ses lèvres qui n'attendent que moi. Mais je ne veux pas refaire les mêmes bêtises.

« — Et avant que tu ne t'imagines des choses, je ne regrette absolument pas d'avoir couché avec toi. C'était l'expérience la plus merveilleuse que j'ai vécu depuis très longtemps, avoué-je avec maladresse.

— Dans ce cas, qu'est-ce que tu voulais dire exactement ?

— Que je ne suis pas le genre de gars à coucher avec une femme sans que nous ayons eu des rendez-vous et surtout dans une chambre d'hôtel.

— Evan, ça m'allait totalement. Tu...

— Olivia, accorde-moi un rendez-vous. Je pourrais t'emmener dîner ou nous pourrions aller prendre un verre. Je ferais ce qu'il te semble le mieux, mais permets-moi de me rattraper. »

Un rire angélique s'échappe des lèvres de ma déesse. Elle jette un coup d'œil à mes amis qui nous tournent toujours le dos et après être sûr que personne ne nous regarde, elle claque un chaste baiser sur mes lèvres.

« — Je suis partante pour ce rendez-vous, mais il se fera chez moi. Je préfère la simplicité, souffle-t-elle contre mes lèvres. »

J'ai vraiment gagné le Saint Graal avec cette femme.

✺✺✺

« — Henri, Dixie, Lana, arrêtez de courir autour de la piscine !, crié-je pour la troisième fois. »

Installés autour du salon de jardin, nous discutons entre adultes. Matt nous explique ce qu'il a ressenti en entendant le cœur du bébé battre pour la première fois. Et aussi beau soit l'instant, je n'arrive pas à lâcher Olivia des yeux.

Elle est si belle dans cette combinaison verte. Le satin épouse les formes d'Olivia avec une finesse exceptionnelle. C'est envoûtant. Je pourrais la contempler durant des heures sans aucun souci. Il n'y a rien qui pourrait me détourner d'elle.

« — Tiens, Alec ! Ça fait longtemps mon pote !, lance soudainement Carter. »

Ou presque rien.

Je lâche Olivia des yeux et regarde en direction de la baie vitrée pour voir Alec. Il a troqué son survêtement pour une tenue plus présentable et a coiffé sa tignasse désordonnée.

Je suis heureux de le voir ici, aujourd'hui. Depuis le scandale, Alec reste cloîtré dans sa chambre. Il ne descend même pas pour manger, ni même pour aller au lycée, et ce, malgré toutes mes tentatives pour l'obliger à sortir. Il ne m'adresse pas non plus la parole. Et même si je peux comprendre sa colère, je ne suis pas le responsable de toute cette situation. Il ne devrait pas me le faire payer et encore moins à sa pauvre sœur qui n'a rien demandé.

En souhaitant m'éviter, il l'évite elle aussi. Cela fait beaucoup de peine à Dixie qui me demande chaque jour quand est-ce que son frère sera de nouveau heureux. J'espère que ce jour arrivera vite, car je n'ai plus envie de voir cette mine renfermée sur son visage.

« — Alec, je suis content que tu sois descendu, m'empressé-je de dire. »

Celui qui évitait mon regard jusqu'à maintenant daigne enfin me regarder et je ne suis pas vraiment ravi de ce que je lis dans ses yeux.

Il me regarde avec mépris.

Encore et toujours ce putain de mépris.

« — J'suis pas descendu pour toi. J'suis là pour ma petite sœur. »

Sans rien dire de plus, il nous passe devant et rejoint les petits qui sont à présent dans le château gonflable. Je soupire désespérément et passe une main dans mes cheveux.

Je n'ai même pas le temps de rebondir sur ce qu'il vient de se passer que je sens mon téléphone vibrer dans ma poche. Je le sors avec lassitude et remarque que tous les autres sortent les leurs en même temps.

D'un œil extérieur, on pourrait croire que nous sommes dans une série dramatique et qu'un dingue nous harcèle de menace par message. Et sincèrement j'aurais préféré, car en lisant l'article qui vient de tomber, je regrette presque de m'être épris de ma belle Olivia.

« people.com :

D'après des sources fiables, le célèbre hockeyeur Evan Nash et Olivia Ellis, la nouvelle coach de l'équipe, n'entretiendraient pas qu'une simple relation professionnelle. Plusieurs photographies les montrant dans des situations délicates ont été prises durant ces dernières semaines. Se pourrait-il que les deux Bruins aient laissé leur amour passé avant leur carrière ? »