🆇︎🅸︎.𝑙'𝑒𝑠𝑝𝑟𝑖𝑡 𝑣𝑎𝑔𝑎𝑏𝑜𝑛𝑑
La première semaine de cours particuliers à domicile est désormais derrière moi. J'ai eu en tout trois professeurs, chacun d'eux cherchant à évaluer mes compétences. Je me cache derrière la porte du séjour, le cœur battant, écoutant les voix de mes parents et des enseignants dans le séjour. Je ne sais pas précisément ce qu'ils se disent, mais l'angoisse me ronge, et je ne peux m'empêcher de tendre mieux l’oreille.
« Taehyung est très distrait pendant les cours, » dit la première voix, que je reconnais comme celle de mon professeur de maths. « Au début, il suit attentivement, mais ensuite, il s'égare. Par moments, j'ai l'impression que son esprit voyage ailleurs. »
Je me crispe à ces mots. C’est vrai, j'ai du mal à me concentrer. Le feuillage des arbres mordant le soleil, les oiseaux chantant à l’extérieur, tout me distrait. C'est comme si mon esprit était une mer agitée, incapable de rester en place.
« Il comprend les bases des mathématiques, mais dès que l’on s’attaque à des notions plus avancées, il perd le fil, » ajoute le professeur de mathématiques, empreint d’un ton neutre mais légèrement préoccupé.
Le professeur suivant, une femme cette fois-ci, à la voix douce, intervient pour tempérer l'information. « En revanche, je dois dire qu'il excelle en lecture. Il semble aimer lire énormément. En orthographe et en grammaire, il est très avancé. »
À cette remarque, une petite lueur d’orgueil s’allume en moi. C’est vrai que Jack avait une obsession pour l’orthographe, la grammaire et la conjugaison. Chaque règle qu'il avait édictée résonnait dans ma tête comme des mantras. J'avais passé tant de temps à perfectionner cela car ça faisait partie des règles de la cave, m’accrochant à l'ordre qu'il imposait dans le désordre de ma vie.
« Peut-être devrions-nous orienter son parcours scolaire vers une filière littéraire plutôt que scientifique, » conclut un autre professeur, sa voix plus apaisée, mais qui résonne en moi comme un ultimatum.
L'idée d’aller à l'école ne m’enchante guère. Cela fait huit ans que je n’y ai pas mis les pieds. La dernière fois, je n'étais qu'un enfant, insouciant. Je soupire, conscient que je ne suis qu'une ombre parmi les masses. Mon cœur se serre à l’idée de me plonger à nouveau dans une institution où tout semble flou. Je vais me retrouver entouré d’inconnus, de visages que je ne connais pas. Que va-t-il se passer là-bas ? Cela me terrifie.
Les murmures des adultes continuent à flotter dans la pièce, mais je ne veux plus les écouter. Je me lève lentement, comme si chaque geste demandait un effort surhumain. Je me dirige vers ma chambre, refermant la porte derrière moi avec un léger bruit sourd. Tout est en ordre, bien rangé. Cette manie est l’un des derniers vestiges de la cave, celle qui me donne une illusion de contrôle. Mais à l'intérieur, je me sens brisé, fragmenté.
Je soupire, mes pensées s'embrouillant. La vie semble s'être figée dans le temps, mes émotions tournoyent dans un flou d’incertitude. Pourquoi tout me semble-t-il si vide ? Quelque chose s’ancre en moi, un abîme, une mélancolie qui ne me quitte jamais. Une incapacité à ressentir autre chose que le poids de l’angoisse m’abandonne.
Je pense au garçon de l'étang. L'image de son regard triste et mélancolique me hante. Est-il là aujourd'hui ? Je n'y suis pas allé depuis notre dernière rencontre. Mes mains tremblent légèrement à cette pensée, comme si le besoin de cette connexion était plus fort que moi. Je sais que j'ai besoin de quelque chose pour apaiser cette douleur sourde qui m'habite.
Sans réfléchir davantage, je saisis mon exemplaire du Petit Prince, l'odeur familière de ses pages me réconfortant un instant. Je regarde l'heure : 15h. Je dois commencer à me dépêcher.
Je rabats ma capuche sur mes cheveux, enfilant mes sandales avec une rapidité presque frénétique, et je quitte la maison, laissant derrière moi les voix anxieuses de mes parents. À chaque pas, je sens la nécessité de m'éloigner, de fuir cette pression pesante. Je commence à courir, mes pieds effleurant le sol, mon livre serré dans mes bras comme un talisman.
L'air frais m’accueille, mais il ne parvient pas à chasser l’obscurité qui s’est logée dans mon cœur. Je cours, mais chaque mouvement semble un peu vide, presque automatique. Où couré-je, au juste ? Pourquoi ai-je l'impression de fuir ma propre vie ? Les rues s’enchaînent, les maisons défilent, et ma tête tourne dans un tourbillon.
En arrivant enfin au parc, je frémis à l'idée de retrouver l'étang. Mon cœur bat la chamade, mais alors que je me dirige vers le banc, je ne vois personne. Mon regard se perd à la surface du miroir d'eau. C'est calme ici, mais aussi étrangement angoissant. J’avais espéré trouver réconfort dans ce lieu, mais je reste face à mon reflet, et c’est loin d’être apaisant.
Je m'assois sur l'herbe, ouvrant le livre sous la lumière douce du soleil. J'essaie de plonger dans l'histoire, de me laisser emporter par les mots, mais ce monde, bien que fascinant, ne parvient pas à combler le vide qui me ronge. Les pages semblent s'étirer sans fin, les phrases se répètent sous mes yeux, mais je ne peux pas les assimiler.
L'incertitude grandit en moi comme une ombre. Pourquoi cette incapacité à goûter à la vie ? Pourquoi chaque effort semble-t-il futile ? Je ne sais pas où chercher, ni comment trouver la lumière au milieu de cette grisaille.
Une pensée me traverse, comme un souffle : suis-je destiné à vivre dans ce vide ? Je ferme les yeux, tentant de repousser la réalité, mais les pensées continuent à me hanter. Des souvenirs, des peurs, des doutes, tout cela empile un poids lourd sur mes épaules.
Mon esprit sombre doucement, comme si chaque goutte d'espoir s’évaporait un peu plus. Je me sens piégé, perdu dans un labyrinthe dont je ne peux pas trouver la sortie. Mes rêves, autrefois si vivants, se sont mués en brumes. Je languis d'un sens, d'une raison de lutter. Qui suis-je à présent ?
Je rouvre les yeux, le livre toujours sur mes genoux. L'absence du garçon me touche plus que je ne l'aurais imaginé. Peut-être que cet endroit était censé être un refuge, mais aujourd'hui, il est tout aussi accablant. Je soupire longuement, le soleil commençant à décliner, projetant des ombres déformées autour de moi. Mon cœur se serre. La vie avance, mais moi, je reste là, immobile, incapable de bouger au rythme du monde qui continue de tourner.
L’heure avance lentement, et je suis toujours assis sur l'herbe, mes pensées dérivant comme des feuilles emportées par une brise discrète. L’étang scintille à la lumière dorée du soleil, reflet de mes propres hésitations. C'est à ce moment-là qu'une silhouette attire mon attention.
Il arrive enfin, un violon à la main. Mon cœur fait un bond dans ma poitrine. C'est lui, le garçon que j'avais croisé la dernière fois, celui qui me captivait sans que je le veuille. Il semble ne pas remarquer ma présence et se dirige directement vers le banc près de l'étang, son visage tourné vers le sol. Je me sens à la fois curieux et nerveux, hésitant à me lever, à aller vers lui comme un enfant trop timide.
Il commence à jeter des morceaux de pain dans l’eau, et mes yeux ne quittent pas ses gestes. Je peux voir comment ses doigts effleurent le violon, une délicatesse infinie. Des éclats de lumière dansent sur ses cheveux noirs, et je réalise, soudain, à quel point j'ai oublié l'apparence des enfants de mon âge. Je suis comme un étranger dans le monde qui m'entoure, et lui, il me rappelle ce que c’est d'être jeune.
Il semble pensif, presque mélancolique, et je me demande quelles pensées traversent son esprit. Peut-être se souvient-il aussi de ses propres luttes, de ses propres combats. Chaque mouvement, chaque geste dit quelque chose de lui, et je suis hypnotisé. Les morceaux de pain tombent un à un, et je me demande s'il espère vraiment que les poissons viendront ou si cela est juste une distraction pour lui.
Je prends le temps de noter chaque détail de sa présence, de sa timidité manifeste, de cette passion silencieuse qui émane de lui. Cela doit faire des années que je suis enfermé, et je n'ai jamais eu la chance de découvrir une telle fascination. C'est étrange, ce sentiment que je ressens envers lui. Une envie de parler, de rire et d'échanger des mots, mais à la place, je reste figé comme un spectateur muet, enfermé dans mes propres pensées.
Les minutes passent, je ne sais pas combien de temps s’est écoulé. Les oiseaux de l’étang s’approchent des miettes que le garçon jette. Ce spectacle simple et pur me touche d'une manière inexplicable. J’aimerais lui dire quelque chose, mais les mots restent coincés dans ma gorge. Quelle serait la première phrase ? Que pourrais-je bien dire à un garçon que je connais si peu ?
La magie de cet instant est telle que je ne veux pas qu'elle prenne fin. Je me demande s'il perçoit ma présence derrière le banc, ou s'il est complètement perdu dans son propre monde à lui. Peut-être que je ne devrais pas le déranger, après tout. Si je m'approche, si je dis quelque chose, je risque de briser le charme de ce moment.
Alors que l'horloge du parc affiche 17h, je le vois enfin se lever. Mon cœur se serre à cette idée. Je ne veux pas qu'il parte, mais je ne sais pas comment l'arrêter. Une partie de moi se débat avec cette envie de l'accoster, mais chaque pulsion est combattue par ma peur du rejet. Il s'éloigne lentement, les morceaux de pain laissés derrière lui, et quelque chose en moi s'effondre.
Mes pensées s'éparpillent alors qu'il disparaît dans le chemin, chaque pas résonnant comme un dernier adieu. Je me lève, mon propre départ pesant sur ma poitrine. Je fais demi-tour, mes pieds traînant sur le sol, l’euphorie de la rencontre se transformant en une mélancolie sourde.
Lorsque je rentre chez moi, l'atmosphère est tendue. Dès que j'ouvre la porte, l’air lourd semble m’étouffer. Mes parents se trouvent dans le salon, leurs visages marqués par l'inquiétude.
« Taehyung ! Où étais-tu ? » s’inquiète ma mère, une note d’affolement dans sa voix.
Je ne réponds pas, me contentant de baisser les yeux. Je sens déjà la critique qui se pointe à l’horizon.
« Fais-nous savoir où tu es. On a été inquiet ! » s'exclame SeokJin, le ton ferme.
Saejin est là aussi, mais elle reste silencieuse, absorbée par son dessin animé. Elle n’a même pas remarqué mon retour, son petit monde étant suffisamment coloré pour ne pas se soucier de moi. Cela me serre encore plus le cœur. Tout semble si décalé, comme si une distance se creusait entre nous.
« Désolé, » dis-je finalement, les mots à peine audibles. Cela semble si dérisoire face à leur inquiétude. Je ne suis qu’un enfant perdu dans un brouillard d'impressions et d’émotions, incapable de m'expliquer.
Je tourne les talons, me dirigeant vers ma chambre. Je sens leurs regards peser sur moi, leurs attentes écrasantes, comme si j'étais devenu l'écho de ce qu'ils espéraient. Une partie de moi désire crier, de sortir tout ce qui se cache en moi, mais je garde le silence.
Je ferme la porte de ma chambre derrière moi, me retrouvant dans mon sanctuaire climatisé. Chaque élément semble familier, mais je ne trouve aucun réconfort. Mes pensées se bousculent, des souvenirs s'entrelacent, et l'image du garçon près de l'étang, l'air pensif, reste imprégnée dans mon esprit.
Avec un soupir, je m'assois sur mon lit, le Petit Prince reposant à mes côtés. Mais je ne peux pas lire. Je suis incapable de me plonger dans cette histoire qui m’avait autrefois tant fasciné. À la place, mon esprit tourne encore autour de l'étrangeté de ce garçon qui semble apporter une lueur d'espoir, d'humanité, dans cet océan de solitude.
Que s'est-il passé dans ma vie pour que je me sente si déconnecté, si invisiblement piégé ? Je me sens sombrer lentement, écrasé sous le poids du vide et du désespoir. C'est une lutte constante qui ne se résout jamais, une mélancolie qui ne s'éteint jamais pleinement.
Alors que je m’allonge sur le lit, l’esprit vagabond, je ferme les yeux, espérant simplement que demain sera un jour meilleur. Mais alors que je m'enfonce dans ce noir inconnu, je crains que chaque jour ne soit qu'un reflet du précédent, un passage sans fin dans ces couloirs sombres de solitude.
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Voilà j'espère que l'histoire vous plaît si vous êtes arrivé jusqu'ici ✨ ❤️
N'hésitez pas à partager l'histoire avec d'autres, commenter ou encore liker, ca me ferait plaisir et m'encouragerait beaucoup merci ❤️
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