𝐗𝐈𝐈𝐈 ─ 𝕠𝕟 𝕚𝕣𝕒 𝕖𝕟𝕤𝕖𝕞𝕓𝕝𝕖 𝕛𝕦𝕤𝕢𝕦'𝕒𝕦 𝕔𝕚𝕖𝕝
•✒ 𝙲𝚛𝚘𝚒𝚛𝚎 𝚎𝚗 𝚜𝚎𝚜 𝚛𝚎̂𝚟𝚎𝚜 𝚖𝚎̂𝚖𝚎 𝚊𝚙𝚛𝚎̀𝚜 𝚕𝚊 𝚖𝚘𝚛𝚝 𝚎𝚜𝚝 𝚕𝚊 𝚙𝚕𝚞𝚜 𝚏𝚘𝚛𝚝𝚎 𝚍𝚎𝚜 𝚖𝚘𝚝𝚒𝚟𝚊𝚝𝚒𝚘𝚗𝚜.
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𝙎𝙖𝙞𝙝𝙖𝙧𝙖 𝙈𝙞𝙣𝙖𝙢𝙤𝙩𝙤
𝟏𝟖 𝐅𝐄́𝐕𝐑𝐈𝐄𝐑 𝟐𝟎𝟎𝟏 – 𝟎𝟐 : 𝟎𝟎
Saihara ne savait pas combien de temps s'était écoulé depuis qu'il faisait les cent pas, perdu. Il était littéralement épuisé à force d'avancer, mais se devait de continuer. Contrairement à ce que Jhin aurait pu penser, l'adolescent n'ignorait rien de la situation ; au contraire. Quelque chose au fond de lui avait titillé son instabilité, le forçant à s'échapper de la bâtisse abandonnée pour chercher plus d'indices aux alentours de cette dernière. S'enfuir de cette étrange forêt était sa priorité afin de pouvoir prévenir les autorités les plus proches. Pourtant, les feuillages ne semblaient pas enclins à le laisser partir. Le blanc provoqué par le brouillard autour de lui était si profond qu'il ne pouvait pas voir à plus de quelques mètres, et le jeune homme avait dû, un nombre incalculable de fois, revenir en arrière et prendre des détours inattendus.
Un frisson le parcourut alors qu'il s'appuyait contre un arbre, crevé par la course. L'écorce était sèche sous ses mains fiévreuses. Il épongea la sueur de son front d'un mouvement las, à l'aide de la manche de sa chemise, puis contempla les lieux avec un certain désarroi. En soupirant, il finit par perdre espoir de s'échapper et jeta un œil tout autour de lui, quelque peu pris par le désir d'apercevoir un chemin saugrenu se dessiner devant l'arbre qui lui faisait face. Cependant, il n'y avait qu'une épaisse couche de crachin. Dommage. Pris d'une soudaine envie de faire marche arrière, accablé par des pensées négatives, la peau attaquée par les perles d'eau qui tombaient depuis des lustres, Saihara hurla. Son cœur lui répétait de retourner là-bas à toutes jambes et son esprit ne faisait qu'énumérer les raisons qui pouvaient le pousser à le faire. Saihara voulait aider Eijiro et Jhin, mais en était-il seulement capable ? En repensant à la réaction des deux garçons, un sentiment insolite lui perça l'âme. D'ordinaire, le brun aurait été le plus courageux, le battant à qui personne n'aurait osé se confronter par peur de souffrir ou de subir le pire des supplices.
Il ne savait pas ce qui l'avait poussé à les abandonner. Et c'est pour cela qu'il se devait d'y retourner. Maintenant.
Soudain, alors que ses pieds firent un pas vers l'arrière, une présence l'assaillit dans son entièreté, maîtrisant son affectivité. Tout ce qu'il aperçut en se retournant fut une personne qu'il connaissait bien, très bien : Sayuri, sa camarade de classe et meilleure amie. Comme si elle était en transe, ses iris enflammés étaient fixés vers l'herbe fanée. Du coin de l'œil, Saihara la vit baisser les épaules, comme affligée par une impulsion répugnante. L'hémoglobine sirupeuse qui s'échappait du renfoncement de ses yeux était semblable à celle qui recouvrait ses mains dans leur totalité. Au départ, Saihara eut peur de comprendre que quelque chose d'horrible avait eu lieu. Puis, quand l'un de ses doigts étriqués désigna le vide qui se trouvait à sa droite, il ne put réprimer la trépidation de sa chair, craignant de déraper. Nauséeux, il fit de son mieux pour oublier ce qu'il venait de voir en détournant brusquement la tête. C'était horrible. Une biche se trouvait là, dépecée, et le spectacle lui fit mal au cœur, bien que toutes les heures passées à assister à ce genre de choses lui donnaient une certaine immunité. Il avait déjà fait cela des centaines de fois, voire pire, quand il partait à la chasse avec son frère.
─ Je veux que tu sentes, que tu voies et que tu comprennes. La vérité devra éclater en même temps que cet univers. S'il te plaît, regarde et ne détourne pas les yeux une seule fois. Il n'y en a pas qu'un seul. Sauve-les. Sauve-les, je t'en supplie.
Au bruit que produisit Saihara en se retournant, les bestioles accrochées à la dépouille s'envolèrent. Le plateau venteux criait à l'aide, tandis que les fleurs pliaient l'échine face au fantôme qui leur faisait face. Ce n'était plus Sayuri qui se tenait devant lui. En réalité, ça n'avait jamais été elle. Les cheveux dorés de son amie avaient cédé la place à de longues mèches blanchâtres, recouvertes de suie et emmêlées entre elles. Le chagrin avait dévoré les doux traits abscons de son visage et la plainte mortelle qu'elle poussa fit vibrer son entendement. Lorsque ses mains délavées attinrent les siennes, son organisme, dépassé par le réchauffement soudain, se plia comme une grossière feuille de papier.
A ce moment-là, des cris s'élevèrent de la forêt, emportant sur leur passage quelque illusion saugrenue. Des bruits de pas s'approchèrent de lui et en un instant, tout disparût. Le vide, assemblage de faisceaux transparents et incolores, l'entoura durant de longues secondes avant qu'il ne se recroqueville sur lui-même, pétrifié par l'obsession d'être coincé ici à jamais. Quand l'image changea, chatoyant tel un envoyé de Dieu, son corps se redressa sous les instructions de son cerveau. Un garçon de son âge pas plus épais que lui se tordait comme un minable sur un tatami. Le mouvement que Saihara esquissa pour l'aider à se relever passa à travers sa personne, et il observa avec stupeur le fait qu'aucun des individus présents dans la pièce ne semblait avoir remarqué sa présence. C'était comme s'il n'existait pas, comme s'il n'était qu'un être transcendant toute logique.
─ Laisse-le, Enji, il souffre ! C'est notre enfant, Enji, notre bébé ! Comment tu peux le traiter ainsi ?
Saihara reconnut la femme aux longs cheveux blancs. Elle était effrayée et se tenait fermement collée à ce garçon, tandis que sa vie semblait en dépendre. Ses yeux bruns étaient injectés d'une étrange substance bleuâtre, alors que son fils, plié de douleur sur le sol, ne faisait que vomir du sang sans interruption.
─ Tu ne comprends pas, Rei, souffla l'homme juste devant eux de sa voix grave. Cet enfant, ce n'est pas le nôtre. C'est celui d'un démon ! Il va tous nous détruire, Rei, il l'a déjà fait une fois et il recommencera, c'est sûr ! Lâche-le, je vais m'occuper de lui.
Le grand type aux cheveux rouges rejeta violemment sa femme contre le mur sous les yeux écarquillés de Saihara, qui ne pouvait rien faire pour intervenir. Elle ressemblait à une marionnette démantibulée par rapport à son mari, et quand elle tenta de prendre appui sur la commode à côté d'elle pour ramper jusqu'à son enfant, l'imposante main de l'ignoble homme heurta sa mâchoire. Saihara avait de la peine, mais ne pouvait absolument rien faire pour les aider. Même bouger le petit doigt était impossible. Le brun ne comprenait pas et avait envie d'agir, de pouvoir secourir cette pauvre famille. En quoi ce garçon était dangereux ? Qu'avait-il de si spécial ?
Soudain, un petit aux cheveux bicolores fit irruption dans la pièce et se précipita vers le corps replié de sa mère. Saihara se perdit durant de longues secondes dans ses pupilles hétérochromes et l'inquiétude pure le fit frissonner. Il n'allait pas lui faire subir la même chose, quand même ? Le père se retourna, comme dérangé par l'apparition soudaine de son rejeton et annonça d'une voix ferme :
─ Toi aussi... Toi aussi, tu finiras par recommencer. Tu es un monstre, comme ton frère, vous portez une malédiction !
La colère de l'homme explosa tandis que Saihara le dévisageait. Le petit garçon posa une main sur la fragile femme et ses larmoiements redoublèrent d'intensité. Toute la pièce se mit à tourner autour du brun lorsque ce dernier, scandalisé, serra les poings avec toute la force qu'il possédait. Ses jambes ne manquèrent pas de vaciller quand la scène superficielle changea de nouveau, provoquant en lui d'atroces migraines.
𝙸𝚗𝚞𝚝𝚒𝚕𝚎. 𝙸𝚗𝚞𝚝𝚒𝚕𝚎. 𝙸𝚗𝚞𝚝𝚒𝚕𝚎. 𝚃𝚞 𝚎𝚜 𝚒𝚗𝚞𝚝𝚒𝚕𝚎. 𝚃𝚞 𝚍𝚘𝚒𝚜 𝚍𝚒𝚜𝚙𝚊𝚛𝚊𝚒̂𝚝𝚛𝚎. 𝙼𝚊𝚖𝚊𝚗, 𝚊𝚛𝚛𝚎̂𝚝𝚎 𝚌̧𝚊, 𝚜'𝚒𝚕 𝚝𝚎 𝚙𝚕𝚊𝚒̂𝚝.
A présent, la douleur qui lui vrillait les tempes était encore plus présente. Encore une fois, Saihara reconnut le garçon qui se tordait de douleur sur le sol dans sa vision précédente. Cette fois-ci, il semblait tout aussi triste et se tenait aux côtés du cadavre d'un garçon aux cheveux blonds. Curieusement, une fine fumée se dégageait de ses yeux tandis qu'il criait. Ses gémissements ressemblaient à des sanglots étouffés, et la scène aurait pu être tirée d'un film si le brun n'avait pas reconnu l'école dans laquelle il se trouvait il y a peu. Visiblement, tout était lié.
─ Keigo, réveille-toi. Ne meurs pas, s'il te plaît. Ne me laisse pas tout seul !
Saihara s'apprêtait à avancer quand un long sifflement l'interrompit. Le garçon jeta un regard tout autour de lui tandis que l'autre adolescent plaçait sa main sur le corps encore chaud du défunt. A peine éclairé, le corps était positionné d'une étrange façon, les jambes tordues jusqu'au torse. Quelqu'un lui avait tranché la carotide, quelqu'un lui avait enlevé sa liberté. La longue plaie qui lui barrait le cou allait de la droite jusqu'à la gauche, et sa précision était plutôt étonnante. La victime avait dû agoniser pendant longtemps avant que son ami ne le trouve. Malgré le fait qu'il soit perturbé, l'étudiant de Shokudo arriva à garder la tête haute.
Il se devait de comprendre ce qui était en train de se passer. Ce fantôme voulait sûrement lui faire passer un message important.
─ Keigo, non, non, hurla une nouvelle fois l'adolescent aux cheveux blancs, désespéré, je suis tellement désolé ! Si j'avais su, je ne lui aurais jamais fait confiance, Keigo, merde ! Ne me laisse pas... Ne me laisse pas ! Tu es mon seul ami... Qu'est-ce que ta petite soeur va faire sans toi ?
Et enfin, Saihara eut l'impression d'étouffer et sentit ses poumons se comprimer à l'intérieur de sa poitrine. La chaleur ambiante devint écrasante, force de la nature insoupçonnable qui ne fit que grandir, prenant de l'ampleur à chaque cri, alors que l'adolescent tombait. Il retint difficilement ses larmes quand la peine le rongea tout entier. Il en avait marre de rêver et souhaitait se réveiller.
Saihara cligna des yeux. Le père du martyr apparut une nouvelle fois devant lui, posé sur le sol. L'homme, haut comme presque deux mètres, portait un costume noir décoré de multiples breloques anciennes. Ses cheveux pourpres étaient coiffés d'un petit chapeau de la même couleur que ses vêtements, et les reflets du soleil illuminaient les bords argentés de ce dernier. Il observait avec attention les façades décorées de fleur, tandis que ses mains liées trituraient une pièce de monnaie rouillée. Lorsqu'il dirigea son regard devant lui, Saihara comprit qu'il était en train de prier. Hanté par un désir soudain de se déchaîner, l'homme serra les poings, l'air rageur, et hurla. Pourquoi réagissait-il constamment de façon disproportionnée ? Qui était cet homme ? Soudain, ravagé par une sensibilité extrême, il attrapa le cadre en cuivre posé sur la commode face à lui, et le jeta brusquement sur le sol. Le bruit retentissant provoqua un fracas terrible, alors que des oiseaux se mirent à gazouiller, bienheureux d'être éloignés de la scène. En s'approchant, Saihara put remarquer la photo qui se trouvait sous les multiples verres brisés. La tache noire qui trônait à la place du visage de l'un des membres de la famille lui vrilla les entrailles et il gémit de frustration. Quelle était cette sensation ?
─ Qui es-tu, bordel ? rugit l'homme près de lui en claquant son poing contre le mur. Et surtout, pourquoi je ne me souviens pas de toi ?
Une dernière fois, tout changea. Saihara se retrouva au milieu d'un champ de fleurs de toutes les couleurs. La petite silhouette de Sayuri enfant, reconnaissable parmi des milliers, s'esquissa devant ses yeux. À côté d'elle, le brun fut surpris de découvrir, bien vivant, l'ami de l'adolescent des précédentes visions. Ses cheveux blonds étaient en bataille, plaqués vers l'arrière de sa tête, et de petits bijoux noirs perçaient ses deux oreilles.
─ Eh, grand frère ? J'ai quelque chose à te dire, murmura la petite Sayuri en s'allongeant près de lui sur l'herbe.
Grand frère ? Sayuri n'avait qu'un seul frère, Yami. Alors pourquoi ? Les épais sourcils marron de Saihara se froncèrent encore plus quand elle se colla à lui en ricanant à plusieurs de ses blagues. Il ne comprenait rien. La petite main de Sayuri découvrit le visage du garçon, qui lui sourit tendrement. Deux moineaux passèrent à travers les nuages au-dessus d'eux, et la scène devint étonnamment douce.
─ Qu'est-ce qu'il y a, petit chat ? murmura-t-il en câlinant sa tête.
Les oiseaux gazouillèrent. Saihara avait l'impression d'assister à quelque chose d'irréel. Sa tête tournait, alors que son souffle était retenu par l'angoisse, et une violente fournaise lui vrillait l'estomac. Les émotions qu'il éprouvait allaient finir par toutes le tuer, si le temps s'éternisait.
─ Plus tard, j'aimerais être un oiseau, finit-elle par déclarer en regardant fixement le ciel de ses grands yeux rubis. Je veux être libre, m'envoler par-dessus les nuages et observer les étoiles de plus près. Tu verras, Keigo, on ira ensemble jusqu'au ciel, et je te le promets.
Son frère la regarda pendant quelques secondes avant de se jeter sur elle pour la serrer dans ses bras. Les longs cheveux ambrés de Sayuri lui collaient au visage, mais il n'avait pas l'air de s'en soucier. L'émerveillement qui se lut sur la tête de Saihara lorsqu'il la vit sourire fut agréable. Même si tout cela n'était qu'une illusion, il était ravi de l'avoir vue heureuse.
─ Tu es vraiment la plus mignonne, Sayuri !
─ Non, tu es plus mignon que moi, Keigo. Maman me dit toujours que je suis moche.
Soudain, quand tout s'arrêta, Saihara comprit : ses visions n'étaient pas des illusions ; elles étaient véritables, réelles et tentaient de lui imposer une vérité cachée de tous. Sayuri avait un autre frère, bon sang. Yami n'était pas le seul trou du cul restant à faire partie de sa famille. Tout ce qu'il avait vu s'était déjà déroulé, malgré le fait qu'il n'y ait aucune logique entre les différents morceaux de mémoire.
Qui était cet adolescent maudit et comment connaissait-il le présumé frère de Sayuri ?
Lorsque Saihara, intrigué, ouvrit enfin les yeux en croyant apercevoir une autre bribe de souvenirs, tout ce qu'il put voir en baissant la tête fut le corps sanglant et immobile d'Eijiro. La paire de ciseaux qui était profondément incrustée dans son échine se trouvait dans un état horrible, alors que Jhin se tenait recroquevillé dans un coin de la pièce et ne semblait pas l'avoir remarqué.
─ Putain, mais qu'est-ce qu'il s'est passé ?
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»TAKAHIRO OBATA - 𝐼𝑠𝑎𝑏𝑒𝑙𝑙𝑎'𝑠 𝐿𝑢𝑙𝑙𝑎𝑏𝑦«
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