
𝕮𝖍𝖆𝖕𝖎𝖙𝖗𝖊 𝕳𝖚𝖎𝖙
saison trois
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MATRICIDE
母殺し
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— « Ne m'oblige pas à y retourner.»
Les ténèbres.
Les paupières ouvertes sur un ciel dégagé de nuages, la légère brise caressait sa nuque en quête de l'éveiller, le froid arrivait toujours à la ramener les pieds sur Terre.
Les oiseaux libérateurs tâchaient sa vision, éclairée par un soleil à son apogée, elle désirait tendre sa main vers ce symbole de sérénité où les problèmes se réglaient d'un battement d'ailes.
Une surface dure contre ses omoplates, inconfortable, froide, cette dernière se redressait. Son dos, à ce simple geste, se brisait par l'effort, impossible de faire le moindre mouvement supplémentaire. Des vertiges s'amusaient à tournoyer son esprit en bourrique, avant de remarquer, par un coup d'œil, que ce n'était guère qu'une simple impression.
Assise sur le sol d'un des trois grands murs primaires, sa main s'élevait à sa poitrine, se déposant sur son cœur battant pour s'assurer qu'elle respirait encore la vie de son être.
Au loin, une étendue d'herbe s'étendait à perte de vue, lui laissant soupçonner qu'elle ne se trouvait pas sur les remparts d'un district, mais sur la continuité d'une des façades qui protégeaient la cité de la venue des titans.
Néanmoins, sa pensée principale était destinée à la raison de sa présence ici. Certaine de se trouver avec le Caporal Chef, en plein interrogatoire dépourvu de violence, du moins vers la fin, larmoyante de ne pas pouvoir répondre à ses questions concernant sa génitrice.
Le corps endolori, Nelly n'arrivait pas à tenir sur ses deux jambes, son échine refusait de se plier aux ordres de son cerveau. Ses genoux flageolants, elle tenait à peine sur ces derniers reposant sur la pierre. Les yeux fermaient, elle se souvenait de ce type, de la première division, l'ayant confondu avec sa propre mère, il avouait être l'auteur de ce meurtre.
Son cœur se compressait dans sa poitrine, le souffle court, la femme se demandait si Livaï ne l'avait pas assommé un peu trop fort, ne contrôlant plus sa brutalité, et l'avait donc tué sur le coup.
Et si la mort ressemblait à ça, la bourge préférait vivre dans le monde d'en bas à enchaîner les mauvaises passes de la vie.
Une grande aspiration, elle laissait sa bouche, ouverte, surprise par la présence d'une autre personne plus loin de sa position.
Une femme, installée au bord de la muraille, les jambes dans le vide, contemplait le paysage que lui conférait cette hauteur singulière, malgré qu'elle chuterait si elle venait à éternuer un peu trop fort.
Ne pouvant toujours se mouvoir, Nelly réussit au moins à articuler une phrase.
— « Vous devriez vous reculer du bord.»
Si cette situation ne s'avérait pas être une cause d'une mort précoce, alors, le danger régnait pour cette civile.
Où était la garnison ?
Le soleil au sommet, signe qu'il devait être aux alentours de midi, signifiait que les membres de la Rose n'étaient, peut-être pas, encore ivres.
Et depuis l'infiltration de quelques titans dans le deuxième rempart, un assaut rondement mené par un titan nommé le poilu, des soldats continuaient sans cesse de surveiller les alentours par équipes.
Néanmoins, un séisme prolifère de son dos à sa nuque, une chose cloche dans toute cette situation, sans compter le fait que cette inconnue n'avait pas daigné la regarder ou même lui répondre.
Ne l'entendait-elle pas ?
Nelly ressentait l'horrible impression de ne pas exister, de ne pas être à sa place.
Un nouveau bruit attirait son attention, ainsi que celle de la femme au bord du mur, lui tournant le dos pour se relever.
Elle arrivait à bouger au contraire de Zackley, prisonnière de bras invisibles qui la retenaient contre le sol. Sa robe azur cachait son corps, jusqu'à ses chevilles, et quelques broderies d'un bleu nuit formaient des motifs fleuris sur sa toge.
La seule mobilité, son visage, se tournait vers la source de ses pas.
La gorge privait de liquide étanche depuis la vision de cet homme dans la carrière, torturé par les deux Caporaux, se transformait en une aigreur jamais connue.
Les cheveux de flammes de sa sœur aînée, Vidia, s'envolaient avec les bourrasques de vents tempétueux, fouettant parfois son visage de quelques mèches rebelles sorties de sa tresse.
Une coiffure qu'elle réalisait souvent petite sur Nelly, les tresses étaient plus pratiques, pas de cheveux dans les yeux, pas besoin de les coiffer tous les jours à cause des nœuds si on dormait avec.
Un détail venait titiller son étonnement, l'œil rouge de Vidia brûlait d'une intensité étrange, peu commune pour elle.
Et surtout, elle n'avait pas son cache-œil suite à cet incident, où, par une crise de sommeil, sa sœur aînée s'était privée de sa singularité en barrant cette malédiction habilement d'un coup de couteau.
Aucune cicatrice, comme ci cela ne s'était pas produit, pas encore.
Vidia Zackley possédait un œil sombre aux couleurs de l'automne, comme son père, la rendant plus humaine en dépit de cette distinction qui laissait des frissons dans ceux qui croisaient son iris.
Chaque enfant Zackley détenait une couleur différente.
Reid aspirait l'océan dans ses deux orbes azur, semblable à l'œil gauche de leur mère, Nelly inspirait l'espoir de sa prunelle émeraude, selon Nomie, tenant d'un miracle d'une descendance lointaine.
Les yeux jade, chez eux, se qualifiaient en première position sur la liste de la rareté.
Finalement, les trois enfants illustraient chacun un symbole propre à eux.
Vidia représentait la sagesse, la réflexion, la dureté de ce monde dont le poids pesait sur ses épaules, n'ayant besoin d'aide pour le tenir à bout de bras.
La rouquine avait un certain sang-froid face aux situations qui demandaient une décision où revenir en arrière était inconcevable.
Reid personnifiait la force intérieure et physique, vif d'esprit et rayonnant, son honnêteté tapait durement sur le système qui essayait de le dompter.
Le châtain était un homme créatif, perdu dans ses rêves, ses yeux séduisaient beaucoup de femmes et son esprit avait su charmer celle qu'il désirait.
Nelly incarnait l'imprévisibilité de la famille, son visage pouvait être tiré par la sérénité avant de subitement changer pour un autre sentiment, impossible de discipliner ses émotions.
L'espoir, le fantasme de bien des hommes, la jeune femme n'était pas qu'une simple midinette.
Les deux derniers ressemblaient à Nomie Zackley, bien plus que la première à Daris, indomptables, indisciplinés et inflexibles, on les considérait souvent comme des jumeaux.
Le corps de Nelly irradiait par la présence d'un homme à sa gauche.
C'était lui, enfermé et subissant les sévices de l'imagination d'Hansi.
À cette vision, la brune désirait lui crier de déguerpir, se trouvant à côté d'un meurtrier, aucun son n'arrivait à sortir de ses lèvres pulpeuses.
— « Alors, tu m'as vendu à la première division ?»
Cette voix, douce et pourtant si autoritaire, appartenait à sa mère.
Spectatrice de cette scène impossible, Nomie était morte il y a quatorze ans, elle ne pouvait se trouver ici, de chair et d'os.
— « Vous avez vu, réplique Vidia en se tournant vers Djer Sanes, elle sait qui vous êtes.»
Cette équipe, en dehors des ficelles du Général des trois corps de l'armée principale, restait secrète.
Les Zackley, à l'époque, ignoraient leurs existences, leur travail pour le gouvernement en toute clandestinité de dompter les âmes en déroute de leurs mensonges.
Comme le père d'Erwin Smith.
Seule Vidia connaissait les magouilles de ces types, elle fréquentait un homme des licornes, proche de la couronne où la confiance régnait en maître dans les deux parties.
Après tout, ils partageaient un enfant, une petite fille de quelques mois portant le nom d'Ondine.
— « Depuis quelques semaines, continue sa sœur, elle essaye de fouiller dans les archives de vos rapports, elle a même trouvé des choses compromettantes qui pourraient bien vous offrir un allé simple à la potence si les citoyens étaient mis au courant.»
La tête secouait avec frénésie, Nelly réfutait l'idée de croire en cette étrange vision, Vidia ne vendrait pas sa mère aux autorités, elle faisait partie de sa famille.
— « Voyez-vous Sanes, elle a même voulu éclater la vérité, la vérité que vous préservez au péril de vos vies, des sacrifices qu'il a fallu pour instaurer une certaine autorité chez les esprits les plus curieux.»
La rouquine sortit un carnet de cuir, fermé d'une simple ficelle, le jetant au pied de sa mère avec désinvolture. À ce moment, Nelly apprécierait d'avoir la capacité, juste, de se remuer pour acquérir ce registre.
Seulement, la paralysie rongeait ses moindres mouvements, la jeune femme venait de se rendre compte d'une seconde chose, ils ne semblaient pas la voir.
— « Et les autres ? Sont-ils au courant ?»
Les yeux froids de Vidia tremblaient par la crainte face à cette question de la part du seul homme présent parmi le duo féminin et cet astre invisible observateur.
— « Mon père n'est au courant de rien, je vous l'ai dit, ça fait quelques semaines et je suis la seule à avoir remarqué son changement de comportement, je ne viendrais pas vous mentir.»
L'aînée des trois enfants Zackley ne pouvait se permettre d'ouvrir une porte de danger aux autres par rapport à sa mère, elle les avait appelé car les choix proposés étaient tous uniques.
Elle aurait tout perdu.
— « Je dois admettre que je te sous-estimais Vidia.»
La cadette refermait sa bouche à la prise de parole de sa mère.
Depuis sa mort, la brune ne savait pas comment gérer tout ce qui se passait dans sa tête. Après son décès, Vidia lui avait tourné le dos, elles ne s'adressent la parole que pour s'insulter, comme-ci la plus grande portait des regrets dans ces poches.
La relation entre Vidia et Nelly, autrefois, se trouvait gorgée de bienveillance à l'égard de chacune, Vidia était un modèle pour la cadette, une deuxième figure maternelle.
Courageuse, audacieuse, son aînée ne se laissait pas marcher dessus, aucun des enfants de Daris ne s'écrasait à la soumission.
Et lorsque Nomie rejoignit le ciel, la rouquine changea brusquement de comportement. Plus dure, la sévérité incombait ses paroles vis-à-vis de Nelly et Reid, délaissant ce rôle de deuxième mère aimante vacante pour s'accaparer celui de sœur aigrie aux commandes de la famille quand leur père s'absentait.
Néanmoins, la rébellion et l'insolence étaient également des traits de caractère des Zackley.
Nel n'appréciait pas son comportement à vouloir diriger sa vie, ses conduites, comme-ci Vidia essayait de la protéger de quelque chose, l'enfermer dans un cocon afin de ne pas sortir au-devant du danger.
Alors, depuis, les deux sœurs se vouaient une haine incommensurable, Vidia essayait toujours d'interférer dans sa vie, et Nelly prenait un malin plaisir à lui montrer son plus beau majeur.
À ce tragique accident, les deux femmes se sont entendues lors d'une soirée, une seule et unique soirée où elles avaient retrouvé ce lien entre elles avant qu'il ne soit brisé de nouveau par la plus grande. À la plus grande désolation de Nelly qui avait laissé sa rage exploser, creusant un fossé profond entre elles qui ne pourra jamais être comblé.
Son œil rouge, si semblable à celui de ses filles qu'on ne pourrait pas prétendre qu'elles ne sont pas de la même famille, ne démordait aucune peur, elle ne craignait pas la mort.
L'extinction écrite dans chaque destin des vies humaines, pourquoi craindre la faucheuse inévitable ?
— « Pourquoi n'avoues-tu pas vu que tu sais des choses ? Que tu sais parfaitement que c'est...
— Nous le savons.»
Le torturé, dans sa réalité, coupait sa prochaine victime sans aucune once de pitié, il tranchait sa phrase sans l'opportunité qu'elle ne finisse.
Nel se retenait férocement de ne pas le tuer, brandir son poing et lui écraser sur le visage assez de fois pour que ce dernier soit totalement enfoncé dans le sol de pierre.
— « Vidia nous a livré toutes les informations qu'elle sait sur vous, ce que vous comptiez faire, et ce qu'elle a vu.»
Croisant les bras sur son chemisier jade, la rouquine ne lâchait pas du regard ce qui lui servait de mère, un modèle pour elle autrefois, un déchet pour elle aujourd'hui.
Sa mère essayait de l'embarquer avec elle dans un destin tragique, et, contre toute attente, Vidia avait révélé toute son histoire à la première division qui avait jugé bon de ne pas la tuer.
Certes, la jeune femme omettait de dire ses capacités étranges, pour éviter à sa famille de payer ses erreurs.
Ce don familial devait être enterré à jamais.
— « Et je suis de leur côté, maman.»
Son dernier mot sonnait faux, dédaigneux à son encontre, l'aînée ne la voyait plus comme une mère depuis son essai à l'assassinat.
— « Je tiens à préserver ce mensonge collectif pour le bien de tous, pour le bien de ma famille.»
Les autres, elle s'en fichait royalement. De toute manière, les moutons suivaient la majorité de peur que la minorité ne finisse dans la gueule du grand méchant loup.
Vidia ne se privait pas de cracher sur eux, comme eux lui crachent dessus.
Deuil pour deuil, sang pour sang et âme pour âme.
— « Alors que toi, tu préfères croire en tes suppositions, prête à sacrifier le sang de ton sang pour un peut-être.»
Le poing serré, Nelly n'avait jamais vu sa sœur aussi énervée, elle incarnait pourtant la douceur, opposée à elle et son insolence légendaire.
Aliénée par la rage, Vidia s'approchait de sa mère pour lui assigner une gifle magistrale dont la résonance sifflait dans les oreilles de sa sœur cadette, invisible à ses yeux.
Un geste d'une grande violence pour la femme aux cheveux flamboyants, au contraire de Nelly qui n'hésitait pas à exploser, elle résistait aux envies de ses impulsions primaires.
Désormais proche de sa mère, elle chuchotait afin que Djer Sanes n'entende pas la suite de ses accusations.
— « Tu étais prête à la tuer pour que ça n'arrive pas. Mais on ne change pas le destin en sacrifiant des vies. Car si c'est le cas, je préfère mourir, tous ensemble, bouffé par des titans que les observer se tuer, tous, un à un, en quête d'un monde idéal qui ne leur sera jamais délivré.»
La tête de Nelly implosait d'informations, n'arrivant pas à se détourner du trio, elle sentit les pulsions de son sang contre ses tempes qui n'arrangeaient pas sa géhenne infernale.
— « Et pourtant Reid souhaite intégrer le bataillon. Il sera contre toi.
— Il voulait être un ingénieur de la Garnison. Et par ta faute, il reconsidère l'idée d'intégrer ces fous au péril de sa vie.»
Vidia se retenait de ne pas lui huer sa faute en élevant la voix, une veine sur son front, tremblante par la tempérance, le choix de son frère, l'enfant du milieu, avait basculé suite au décès de sa petite amie, futur fiancé, n'ayant plus rien à perdre.
Reid, parmi les trois descendants de Daris, se trouvait pourvu de plus d'égoïsme que les deux autres filles. Il n'en avait rien à faire de crever la bouche ouverte dans celle d'un titan, alors qu'elles, elles essayaient constamment de protéger ce noyau familial.
Nelly se jetterait pour éviter à son frère la fossoyeuse, ainsi que Vidia. Elles prenaient garde à leur vie, ayant connaissance des conséquences que cela pourrait engendrer dans la famille.
— « Je ne te laisserais pas tous les tuer juste pour aider ce qui va advenir en priant que ça se passe bien, cette fois.
— Le grand terrassement.»
Trois mots, et le vent se dissipait aussitôt, effrayé par la tournure de cette discussion. La brune ne savait pas de quoi les deux femmes parlaient, tout comme le soldat de la première division, derrière elles à quelques mètres.
Le regard vitreux de Vidia démontrait une horreur inimaginable à cette pensée, réfutant l'idée même d'assister à ce genre de choses dans le futur.
— « C'est le cycle de la vie, c'est ça que tu vas me dire ? Tu veux tenter cette idée alors que je t'ai prévenu, et tu espères qu'ils arriveront, eux, à y survivre. Mais si nous laissons le destin inchangé, ils viendront comme tu me l'as dit, et nous n'aurions pas à nous soucier de ça.»
Nomie regrettait désormais ses confidences à sa propre fille sur l'avenir.
— « Parce que vous allez tous mourir, mais il y a une chose que tu oublies.»
La femme de Daris Zackley posait ses yeux sur Djer qui semblait pris de vertige à ce simple contact.
Un iris rouge, l'œil de la mort, l'œil qui annonce la faucheuse, l'œil pour deuil.
— « L'originel va être volé.»
Son sang ne fit qu'un tour, avançant d'un pas, l'adulte lui tenait fermement le bras, brûlant à ce simple contact avec le veston de sa fille.
— « Et vous ne pourrez pas intervenir pour espérer que la suite de l'histoire ne soit chamboulée.
— Tu sais qui va le voler n'est-ce pas ?»
Vidia s'approchait de sa mère, se faisant face l'une à l'autre, jamais elle n'avait osé la confronter de si près, repoussant sa poigne qui gardait une distance correcte il y a encore quelques secondes.
— « Oui. Et elle le sait aussi.»
Vidia semblait paralysée sur place, elle n'avait pas besoin de rajouter cette dernière à la fin de sa phrase, l'aînée ne voulait guère que le soldat sache cela, car les premières divisions tueraient tous ceux qui sont un danger pour eux et le gouvernement actuel.
Malgré qu'elles chuchotaient, il allait s'interroger rapidement sur ses messes basses entre elles.
— « Elle se rapprochera de lui inconsciemment pour le protéger Vidia, et tu ne pourras rien faire.
— Alors pourquoi tu as essayé de la tuer si elle est censée le protéger ?
— Parce que quelqu'un de plus important ira se sacrifier pour elle, et sans cette personne, il n'y aura aucun moyen d'arrêter tout cela. Elle doit mourir Vidia, l'histoire n'est pas censée lui accorder un rôle important.
— Qui te dit une seule seconde que ce n'est pas elle qui va se sacrifier pour ce héros dont tu parles ?»
Pourquoi les visions ne semblaient être fournies qu'avec une seule version ?
— «La vie n'aurait plus de sens pour lui sans sa présence. Il aura trop perdu pour assister à une énième perte. Car, ce jour-là, si elle doit mourir, un autre mourra avec elle.
— Il se suicidera ?
— Pas avant de l'avoir vengé. Pas avant de les avoir tous vengé.»
Et c'est ce qui importait, il restera assez longtemps en vie pour permettre la réalisation de sa vengeance et être un des acteurs principal à ces chaînes brisées.
— « Si elle meurt maintenant, il ne la connaîtra jamais.»
Vidia détournait son regard sur sa cadette, elle ne pouvait pas la voir, mais Nelly remarquait son regard larmoyant, la culpabilité rongeait ses traits, et ses muscles étaient tendus prêts à se déchirer.
— « Peux-tu me dire son nom ? Je pourrais empêcher qu'elle ne le rencontre.
— Tu sais bien que seule la mort peut changer le destin, ça ne sert à rien d'essayer de jouer à la poupée Vidia, au final tu échoueras.
— Et tu sais que j'ai vu la guerre, autrefois, et que je ne veux pas revivre ça dans notre réalité.
— Tu préfères attendre qu'ils arrivent et qu'ils nous tuent tous en envoyant leurs titans affamés ?
— Oui, et, murmurait-elle encore plus bas, si je trouve une alternative à ses deux finalités qui nous mènent à la mort, je promets de faire en sorte qu'elle se réalise.
— C'est pour ça que tu dois me laisser la tuer Vidia, c'est la seule solution.
— Une vie ne se marchande pas maman, cette solution doit être sans aucun sacrifice, sans aucune tâche de sang versé de notre famille.»
Et ce n'était pas négociable pour elle.
— « Avant de mourir, dis-moi le nom de celui qui va voler l'originel, s'il te plaît. Pourquoi je n'ai pas le droit de voir le futur, comme toi ? Pourquoi c'est à moi de voir les horreurs commises par le passé de notre propre peuple ?
— Ce qui ne doit pas être évoqué, doit être enterré.»
À cette phrase, les tendons de l'intruse se raidissaient, incapable de respirer, elle se sentait au bord du vide.
— « Le passé est passé Vidia, il faut que tu le laisses derrière toi.»
La rouquine devait se forcer à avancer sans se préoccuper des actes commis jadis, elle devait ensevelir toutes ses souffrances pour permettre à un futur différent de celui qu'elle a vu dans ces anciennes vies.
— « J'en rêve chaque nuit, je hurle toutes les nuits qu'on me libère de toutes ces visions, je ressens tout ce qu'ils ressentent, la mort, la torture, l'abandon, le chagrin, la colère, comment peux-tu me demander de les ignorer ?»
Une larme coulait le long de l'œil rubis, similaire à celui de sa mère et de sa sœur, s'échouant sur la pierre, imbibant cette tristesse à jamais scellée.
— « Pourquoi moi ?
— Parce que tu es ma fille, et cette malédiction nous tourmente, passé ou avenir, depuis des siècles la famille des Hellsehen est pourvue d'un don unique, ce n'est pas parce que nous sommes des Zackley que notre sang a changé.»
Malheureusement.
— « Chaque ancienne famille a des particularités, et toi, tu essayes de la rejeter, ton œil te permet de voir au-delà des barrières de l'esprit, du temps.»
Les doigts de Vidia se glissaient, instinctivement sur cette distinction, depuis toujours, elle rêvait de l'arracher, préférant être aveugle que voir tous ceux-ci.
— « J'ai toujours voulu m'en débarrasser.
— Alors crève-toi le.»
Vidia serrait le poing, avant qu'un rire ne sorte des lèvres maquillées, d'un rouge aussi sanglant que son iris, de la plus vieille.
— « Si tu crois qu'il est l'unique cause de tes cauchemars, débarrasses-toi en Vidia. Cela prouve que tu n'es pas à la hauteur de ce cadeau. Nelly dépassera toutes mes espérances.»
En entendant son nom, la concernée semblait arrêter de respirer.
Nelly ne présentait aucun signe de crises pour le moment, pourtant âgée, cette dernière devait commencer à développer des chimères, à ses yeux irréalistes et pourtant véridiques.
— « Elle verra ce que tu m'as fait.
— Elle verra ce que tu lui as fait.»
Les deux n'allaient clairement pas céder.
— « Elle me pardonnera, continue Vidia vétuste d'un maigre rictus, j'ignore ce que tu vois dans l'avenir, et j'ignore ce qu'elle va voir, mais tu ne vois pas ce que je vois du passé, tu n'as pas vécu ce qu'elle a subi.»
Vidia semblait traumatisée de se remémorer ses souvenirs. L'odeur âcre du cadavre sur cette table ne la quittait jamais, un effluve lui rappelant la puanteur des actes commis.
— « Le futur ne peut pas être pire que le passé.»
Les gens changent, comprennent des erreurs.
— « S'il te plaît, dis-moi ce que tu sais.»
La détresse de la jeune femme déployait sa sincérité, depuis le début, elle laissait ses émotions enfermée, sa raison prenant l'ascendance, et à cette supplication, la porte s'ouvrait à son cœur éploré.
— « Le futur peut encore changer Vidia.»
Elle ne dit rien de plus. Les négociations concluaient par cette affirmation.
Les larmes de sa fille aînée coulaient le long de sa mâchoire, attristée de devoir en venir à des extrêmes aussi sordides avec sa propre mère.
— « Et je te le répète, je ne te laisserais pas détruire ma famille pour des changements qui n'interfèrent peut-être pas avec la destinée. Je regrette, mais je ne peux pas te laisser les massacrer pour une simple vision.
— Vous avez fini ?»
Djer commençait à s'impatienter alors que la rouquine se mit de dos, tournant ce dernier à sa mère, elle s'éloignait, loin d'elle.
— « J'espère, dit cette dernière, que tu seras fière de moi là-haut.»
Vidia allait réussir, elle en était certaine. Elle sauverait tous ses gens, sa famille, et empêcherait le grand terrassement de s'abattre de nouveau sur eux. Peu importe si elle y laissait la vie si Reid et Nelly prospéraient dans un monde aux nouveaux horizons florissants.
— « Toi et moi savons que je n'irais pas en haut. Nous sommes les démons insulaires.»
À cette dernière phrase, le membre de la première division poussa la femme de Daris dans le vide, laissant la brune hurler, le bras tendu en quête de lui porter secours.
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Les yeux de Nelly s'ouvrirent brusquement, réveillée par cette brûlure naissante dans sa poitrine, mais également par ce contact qui réchauffait son corps meurtri d'une chaleur enivrante, les cris balayés à droite, et les tourments jetés à gauche.
Cette impression de tomber dans le vide cessait dans l'immédiat, sur la terre ferme, elle s'accrochait à lui, ses mains dans sa chevelure ébène, Nelly ne voulait pas s'effondrer avec la sensation de ne plus jamais pouvoir revenir ici.
La douceur de ses lèvres, pressées contre les siennes, la noyait dans une valse endiablée dont le Caporal n'arrivait à se défaire également.
La lune, aux aspects étrangement rougeoyants, contemplait les deux amants s'assembler, les étoiles continuent de colporter des rumeurs sur cette relation mystérieuse, s'adressant à l'astre de la nuit, témoin de la naissance de ce fil fragile.
Le cœur déchiré, Livaï désirait la soulager de ce fardeau abattu sur elle sur ses propres épaules. Il espérait être pourvu de la même capacité, à chaque embrassade, de soigner ses plaies, consoler sa désolation, et combler ce vide.
En voyant Nelly au bord de la mort dans ses bras à l'instant même, étranglé par la panique, le noiraud n'imaginait pas une autre solution pour la réveiller de cette transe étrange. Dans un état second, il pensait réellement que la fille Zackley allait mourir, aujourd'hui.
Face aux yeux fermés du noiraud, la châtain refermait ses paupières, laissant quelques larmes mouillées ses joues, ainsi que celle de Livaï qui, à cette sensation, brisait ce baiser dont la douceur était rare lorsqu'ils venaient à se lier.
Pour lui, l'embrasser le libérait de tous ces cauchemars, submergé dans l'ivresse d'un moment occulte, le Caporal prenait plaisir à ressentir la sensation d'être vulnérable, avec elle, inapte de retrouver sa sobriété.
Pourvue d'une délicatesse peu commune aux yeux de tous, son front se posait sur celui de la jeune femme, incapable de se défaire de ce lien.
Ces lèvres avaient le don de le faire fondre de plaisir, le brun avait toujours voulu être différent des autres hommes qui agissaient sûrement comme des obsédés avec elle, et pourtant, son instinct primaire n'arrivait à se retenir lorsqu'il l'embrassait habituellement.
Et en sentant sa tristesse, il avait eu envie de lui faire oublier tout cela entre les draps, soulagé de sentir sa langue effleurer la sienne lors de cette échange, se cachant de ce monde. Et pourtant, il pressentait que, cette fois, ça ne suffirait pas.
Une main sur sa cuisse blessée, lui relevant légèrement, il s'en voulait. Il s'en voulait de l'avoir laissé ce blessé pour lui, à cause de son inadvertance, cette balle aurait pu être mortelle, cette petite babiole aurait pu lui enlever l'une des rares personnes dont il chérissait l'existence depuis sa rencontre.
Son odeur de lavande, ses yeux, sa voix, il ne souhaitait jamais perdre cela. Elle était à lui, et même si c'était la fin du monde, la seule femme restante, il était trop égoïste pour la partager avec un autre.
La reproduction irait se faire foutre.
— «Livaï, arrivait-elle à articuler entre deux souffles alors que son regard sémillant éclora de nouveau, reluisant par une chose qu'il ignorait encore.»
Ce dernier relevait les yeux vers sa voix, douce, et pourtant si tranchante à l'oreille des autres idiots qui osaient la provoquer.
Les larmes sur ses joues continuaient de couler sur sa peau de porcelaine, l'astre lunaire mettant en évidence cette tristesse, telles des diamants qui scintillent.
Le Caporal ne l'avait jamais trouvé aussi belle qu'à cet instant, aussi belle que brisée.
— « Est-ce que je peux te faire confiance ?»
Face à sa question, l'homme se carapate de son air méfiant, Nelly ne lui avait jamais posé la question.
Depuis qu'ils se connaissaient, pour lui en tout cas, c'était une évidence.
Il lui accordait sa confiance.
Malgré cet épisode dans les bas-fonds, alliée avec Erwin, dans le fond, Livaï ne lui en voulait pas. Elle ne le connaissait pas, et pourtant, elle avait essayé de le prévenir.
Nelly avait toujours essayé de le prévenir, même lors de la 57ème expédition extra-muros, avec Eren, il se souviendrait toujours de son visage sérieux quand elle lui avait annoncé de faire confiance à ce gamin. Et s'il l'avait écouté, il n'aurait peut-être pas perdu toute son escouade.
Auruo, Gunther, Erd, et Petra ne méritaient aucunement de mourir de cette façon.
Plus d'une fois Nelly alertait ses sens de ses paroles pourvues de préventions, et lui n'avait jamais pris la peine de boire ses mots, préférant écouter les directives d'Erwin.
Alors, est-ce qu'elle pouvait vraiment lui faire confiance ?
Même lui se le demandait.
Un frisson, la main de son amante trouvait refuge sur sa joue, brûlant d'envie de lui raconter absolument tout sans omettre de détails. La respiration, de la châtain, caressait son visage, ne pouvant s'éloigner de cette aura chaleureuse.
Si elle s'éteignait, un jour, il ne le supporterait pas. Sa vie avait trouvé un sens avec sa présence, et sans elle, perdue, il ne pourrait pas vivre avec cette énième perte qui tourmenterait son esprit.
Si elle doit connaître le châtiment de la mort pendant les nombreuses batailles qui les attendaient, Livaï se jurait de la venger.
— « Oh mon dieu !»
Les deux têtes se tournaient rapidement vers la porte, plaquée contre le mur, la bouche d'Hansi formait un "o" face à leurs positions plus qu'explicite sur la réelle relation qu'ils entretenaient.
Livaï avait tout de même appelé sa camarade, pris par l'affolement de la situation qui lui échappait.
Jamais, ô grand jamais, le duo ne s'était fait surprendre depuis ces nombreuses années à flirter ensemble de manière subtile, en se lançant des répliques visées l'un et l'autre, se cherchant parfois, et même durant les nuits où le Caporal ne se privait pas de l'admirer crier son nom face à la pleine satisfaction qu'il lui apportait.
Les deux amants ne connaissaient pas le silence pendant ces moments qu'ils pourraient ne plus avoir le lendemain.
L'ébène se relevait, au grand étonnement de la bourge qui penserait qu'il serait contrarié, au contraire, il n'en tenait pas rigueur.
Autrefois, ils avaient discuté de leur relation et s'ils devaient, oui ou non, ne plus se préoccuper des autres et être libre d'être démonstratif au-devant du public.
Livaï ne voyait pas d'inconvénient, lui, en dépit de Nelly qui craignait qu'on ne vienne la titiller elle pour atteindre l'homme le plus fort de l'humanité, elle décida donc de garder ça pour eux, dans une sphère purement privée.
Hansi n'avait pas le temps de poser une quelconque question qu'elle se faisait dépasser par un homme qui sentit l'air lui revenir en voyant la jeune Zackley.
Les autres lui avaient confirmé la présence de sa sœur, blessée à Trost, mais il n'en croyait pas ses yeux. Nelly ne participait pas aux missions suicides du bataillon, elle endossait le rôle de petite fouine dans les quartiers les plus hauts placés, pour eux justement.
Sauf cette fois avec Reiner et Berthold, n'ayant d'autres choix que d'être enrôlée.
— « Mais qu'est-ce que tu fiches avec le Bataillon ?»
Reid s'avançait vers sa sœur avant de venir l'enlacer, sous le choc, cette dernière ne bougeait pas, il est vrai qu'en voyant Hansi en bas, elle aurait dû se douter que son frère était dans les parages, membre de son escouade depuis son entrée chez ceux qu'on surnomme les cinglés.
Nelly le serrait dans ses bras encore tremblants, inspirant son odeur réconfortante, son frère sentait toujours le pin, en dépit du manque d'hygiène contraignant lors des missions comme celle-ci, Reid gardait cet effluve de nature très distinctif par rapport à la puanteur des autres.
Tout comme Livaï, le soldat prenait soin de sa propreté corporelle, malgré son manque d'organisation par contre dans les dortoirs où il réside.
Le cœur battant, son esprit répétait ces dialogues entendues entre Nomie et Vidia, et Reid pouvait-elle lui faire confiance face à la vision de sa propre sœur trahissant sa mère ?
Le Caporal jetait un regard vers ces retrouvailles familiales, ne laissant rien transparaître malgré un lourd regard vers Hansi pour lui faire comprendre de se taire.
Ce n'était pas le sujet, ni la priorité pour le moment d'étaler sa vie privée. Cette folle furieuse essayait de ne pas sourire jusqu'aux oreilles, il le voyait bien.
— « Vous avez fini ?»
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