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Mission de Sauvetage 8/9

Un cri strident sortit d'entre les lèvres de Sielle lorsque le corps de son frère s'écroula au sol. Des larmes percèrent ses défenses, tandis que sa poigne frémissait autour de son Magnergie. Sielle voulait tirer, mettre à terre celle qui avait osé occire Lascan. Pourtant, elle n'y arriva pas. Ses tremblements prirent de l'ampleur, embrassant la totalité de son corps lorsque Milléïs et Draval, hypnotisés par la dépouille de leur camarade, la retinrent d'avancer.

Comment Laliza avait-elle pu faire une telle chose ?

Même s'ils n'avaient jamais été en bons termes avec lui, le sacrifice de Lascan les touchait profondément. Il était le premier mort qu'ils voyaient de leurs propres yeux ; c'était traumatisant et effrayant, comme un sentiment d'impuissance et de chagrin. Il ne méritait pas ça. Personne ne le méritait, pas même Laliza ou ces Contestataires qui assistaient à la scène, un air satisfait au visage. Maintenue par Milléïs, l'héritière hurla :

— Non ! Pourquoi ?

— Un coup dans la poitrine, ça résout beaucoup de problèmes. Je lui avais pourtant bien dit de mettre un gilet. Vous, en revanche, ce sera dans la tête... Pour être sûre.

Laliza fit une enjambée dans leur direction, son arme fumante à la main. Sielle se pressa contre l'épaule d'une Milléïs dont les yeux brillaient de haine, alors que Draval se dressa devant elles, prêt à tirer ou à être le suivant sur la liste noire de Laliza.

Or, lorsque celle-ci marcha à côté du corps de Lascan, un mouvement frénétique l'agrippa aux chevilles et la fit goûter aux lattes poussiéreuses. Au fond du couloir, Gédéus eut un soubresaut et partit se cacher derrière Barthélise et Jobal. Dans sa chute, Laliza échappa son Magnergie qui glissa jusqu'aux pieds de Milléïs. Draval écarquilla de grands yeux surpris et Sielle, elle, remonta des paupières humides lorsqu'une masse inattendue se releva.

Avec un sourire égaré dans ses pleurs, elle cria avec joie :

— Lascan !

En effet, Lascan était vivant et en pleine santé. Seule une grimace déformait ses traits de granite, due à la douleur du coup qui s'était heurté contre sa cage thoracique. Cela lui faisait l'effet d'un boulet de canon brûlant encastré dans les os. Avec un rictus de consolation, Lascan souleva son haut d'uniforme et montra son abdomen. Il portait un gilet de protection estampillé d'un impact de balle.

Sielle réalisa alors que les conseils lui avaient fait un électrochoc. Sa raison avait pris le contrôle sur son orgueil familial et elle ne pouvait qu'être fière de lui. S'ils n'étaient pas cerclés par la situation, elle lui aurait sauté au cou. Son index virulent pointé vers lui, Milléïs l'engueula sans scrupule.

— Je n'y crois pas, Lockspear ! C'était quoi cette mascarade ? Tu nous as fait peur !

— La mort, c'est pour les pauvres. Mais ne perdons pas de temps en palabres, ramasse son Magnergie, Gazergray ! lui somma-t-il, parfaitement remis.

Quelque peu furieuse de cette feinte et de son ton éternellement autoritaire, Milléïs l'écouta tout de même et prit possession de l'arme de Laliza. Elle en venait presque a regretter son retour à la vie...

La traîtresse, fâchée de s'être fait bernée, pivota comme une panthère sur Lascan. Elle lui fit un croche-patte et il tomba sur le dos. Elle le plaqua immédiatement au sol et le chevaucha, ses cheveux défaits et aussi fous qu'elle virevoltant avec hargne. D'un geste désespéré, Laliza le cogna brutalement à la joue, puis une seconde fois. L'adolescent fortuné tentait de la faire basculer, sans succès. Elle avait la force d'un homme.

Soudain, un coup de feu paralysa la totalité des corps et fit frémir les enfants, encore cachés derrière la porte du cagibi. Laliza se cambra et exulta un cri lorsque du sang gicla de son épaule. La Défenseure s'écrasa d'elle-même sur le flanc, libérant Lascan de son emprise, ses doigts serrés sur son point touché. Un plomb s'était coincé dans ses tendons. Lorsque l'héritier redressa le haut de son corps, il ne vit qu'un seul canon en fumée.

Celui de Draval.

Il avait osé tirer ? Même Milléïs était abasourdie par l'acte de son froussard de meilleur ami. Draval avait fait abstraction de l'environnement et de ses peurs enfantines, seule la mission obstruait sa rétine. Ses bras fermement tendus étaient inébranlables, pas la moindre trace d'oscillation. Laliza émit un rugissement étouffé entre ses dents, se traînant comme une bête blessée sur le parquet de l'hôtellerie.

— Vous croyez que... cette blessure va m'arrêter ? leur siffla-t-elle, pleine de rancœur.

— Celle-ci non... Mais celle-là oui.

Le doigt de Draval pressa la détente et la balle fut crachée droit dans la cuisse de Laliza. Elle partagea sa souffrance dans un rideau rougeoyant qui tapissa le corridor et éclaboussa les bottes de Lascan. Dans la foulée, Milléïs arriva derrière son binôme et s'élança vers Laliza. Un genou à terre, le poing tendu, l'adolescente la foudroya du regard et lui murmura :

— Ça, c'est pour votre partenaire...

Avec une force qu'elle ne se connaissait pas, Milléïs écrasa ses phalanges contre la mâchoire de l'ancienne ingénieure en chef, l'assomant sur le coup. Elle secoua sa main endolorie sous les yeux d'un Draval admiratif de ce geste fougueux. Emportant finalement les filles avec lui, le fils du forgeron dépassa le corps inerte de leur supérieure, puis rejoignit Lascan avec qui il échangea un regard éloquent.

Le pouilleux lui avait sauvé la vie ? C'était inadmissible pour son estime ; totalement impensable. Pourtant, il ne pouvait le nier ou le démentir. Sans Draval, il serait peut-être encore entre les mains de Laliza. Cette pensée lui soulevait le cœur.

Sans un mot, ni un remerciement, Lascan se plaça à leurs côtés, son Magnergie en avant, désormais face aux trois Contestataires.

Le quatuor de choc, tous alignés, les braqua sans pitié.

— Par les pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous annonçons que vous êtes en état d'arrestation ! récita Milléïs, ses deux calibres entre les doigts et un sourire malicieux à ses joues.

Dans un ricanement sinistre, Jobal baissa la tête, attirant ainsi l'attention toute particulière de Barthélise qui ignorait comment se sortir de cette épineuse position.

— Vous êtes forts, c'est bien... Mais est-ce suffisant pour m'arrêter ?

Quelques secondes s'égrenèrent suite à ses mots. Milléïs eut juste le temps de remarquer une lueur qui clignotait dans le dos de Jobal, qu'une explosion secoua la bâtisse toute entière. Un tourbillon de lumière macabre recracha les briques et les morceaux de fondation à contresens. Les enfants hurlèrent, Barthélise se coucha au sol, imitant Gédéus qui beuglait de terreur.

Des roches se detachèrent des vieux murs et l'une d'elles tomba sur Dennis, tandis que l'escalier s'effondrait. Des Contestataires venus en renforts furent broyés en dessous.

Les quatre Défenseurs reculèrent, soufflés par l'onde de choc et les flammes. Un immense trou s'était creusé dans la cloison, donnant sur le vide étourdissant de l'extérieur.

Dehors, les sbires de Jobal s'activèrent, entièrement remis de leur soûlerie. La déflagration avait formé une gerbe de feu qui léchait le ciel de nuit, dépassant la canopée, comme mue par sa propre volonté. De leur position, les troupes d'assaut en furent tout aussi étonnées. Très vite, l'un des Défenseurs en attente tenta de contacter Laliza pour s'enquérir de leur état. Or, le grésillement ne trouva de fin. C'était inquiétant en vue de la situation. Devaient-ils continuer de camper ou foncer tête baissée ?

Ils étaient sur des charbons ardents devant cette situation critique. Ils décidèrent donc de transgresser les ordres et d'attaquer en les prenant par surprise. Dans un cri de guerre, les commandos dévalèrent les pentes boisées, armes à la main, tout droit sur les sous-fifres à peine réveillés.

Dans l'hôtellerie, sous des airs apocalyptiques, les corps émergeaient difficilement de l'explosion, asphyxiés par l'insoutenable odeur de soufre et les particules de cendres. Les garçons, assourdis par le sifflement à leurs oreilles dû à la détonation, aidèrent les filles à se remettre debout, puis ensemble, ils évaluèrent les dégâts. Derrière l'écran de fumée, la silhouette nébuleuse de Jobal se tenait droite. Les flammèches et les braises volatiles ressemblaient à des démons tournant frénétiquement autour de leur maître. Ils s'attardèrent sur ce spectacle aussi envoûtant que fatal.

Le front lacéré, Barthélise exhala une quinte de toux, puis se releva, veillant à ce que Gédéus n'ait rien. Elle n'avait pas remarqué que durant l'affrontement des Défenseurs, Jobal avait discrètement posé une bombe à crochets pour leur ouvrir le chemin vers la liberté. C'était ingénieux, mais très dangereux. Son amant n'avait aucune limite.

Alors que les adolescents se remettaient du remue-méninge, Barthélise en profita pour rejoindre Jobal.

— C'est le moment, nous devons fuir !

— Je le sais. Mais... Malheureusement, ce plongeoir est bien trop haut pour toi et Gédéus. Vous n'aurez nul moyen de fuir par ici.

— Quoi ?

— Je suis désolé, Barthélise. Ne m'en veux pas...

Sans prévenir, Jobal repoussa la jeune femme d'un violent coup de paume et sprinta tout droit vers le trou béant. Sous les yeux fanés de tristesse de Barthélise, Jobal bondit dans le vide avant de s'élever vers la cime des arbres, des étincelles furieuses à ses semelles ; ses bottes à réactions.

En se ruant vers le rebord vertigineux, Barthélise hurla et pleura à la lune devant l'abandon lâche de l'homme qu'elle aimait. Elle appelait son prénom, mais ses cris déchirants se perdaient dans le vent, n'atteignant même pas celui qui fuyait sans se retourner. S'enticher de lui avait été son erreur fatale. Nulle trahison ne pourrait être plus brutale et douloureuse que celle-ci.

En voyant le spectacle qui se jouait devant eux, Milléïs fit remarquer à sa troupe que Jobal s'échappait. Avec Draval, elle accourut pour l'arrêter, mais Gédéus leur barra la route. Un ignoble filet de bave glissait de ses babines écartées, alors qu'il exposait ses dents entartrées qui les menaçaient et leur conseillaient de ne pas s'approcher davantage. Barthélise en profita pour chercher son armement égaré durant l'explosion. Elle le retrouva assez vite dans l'une des chambres dont la porte était ouverte.

Or, dans la poche de Milléïs, Spoon était bien décidé à en découdre, lui aussi.

Il se laissa tomber à ses pieds et avança sous le nez de Gédéus. Sa simple présence fit grelotter le décérébré qui exhala un effroyable hurlement de peur. Il s'effondra sur les fesses et rampa avec frénésie, tentant de s'éloigner le plus possible de cette souris mécanique. Le chemin enfin libre, Milléïs remercia Spoon et emporta Draval avec elle vers la sortie. Ils délogèrent leurs Dodécaèdres de concert et les lancèrent, dépliant les magnifiques et scintillants Méca-Condors qu'ils contenaient.

Milléïs sauta alors sur le dos d'Arktis, en dehors de l'abbaye, et Draval, sur Écho. À tire d'ailes, le binôme talonna Jobal à travers les cieux.

Alertée par les cris des enfants derrière elle, Sielle découvrit que le petit Dennis avait les deux jambes bloquées sous un éboulement. Ses larmes montèrent jusqu'à elle et, dans une pulsion de secours, la Défenseure courut vers lui pour le libérer. Avec rapidité et précaution, elle retira les briques cassées sous les complaintes de Dennis.

— J'ai mal ! S'il vous plaît, aidez-moi !

— Ça va aller, j'y suis presque ! Tiens bon, mon grand, le rassura Sielle, sans s'arrêter.

Enfin, ses jambes apparurent sous les débris. Les pierres avaient déchiré sa peau sanguinolente. Le résultat n'était pas beau à voir. Ayant de fines connaissances en médecine naturelle grâce, notamment, à l'encyclopédie de Manfred DeGrance, elle sut immédiatement que l'os était brisé et qu'il risquait l'infection. Elle devait agir dans l'immédiat ! La jeune fille s'activa donc à lui faire un garot avec l'écharpe d'un des enfants qui la secondait, en pleurs.

Lascan, lui, rencontra Barthélise qui le visa de son revolver. Il l'imita et cette fois, il était prêt à faire feu. Sous les braillements ininterrompus de Gédéus, il lui ordonna :

— Lâchez votre arme !

— Quitte à mourir... Autant me défendre jusqu'à la fin. Je n'ai plus rien à perdre, de toute façon ! pleura la femme, sa vision brouillée par le sel.

— Sielle, contacte les troupes extérieures, explique-leur la situation. Moi, je m'occupe d'eux...

Alors qu'elle s'occupait de Dennis, la noble essaya de protester, sans succès.

— Fais ce que je te dis ! Il faut les mettre au courant avant que Milléïs et Draval ne reviennent.

Docilement, Sielle abdiqua au bon vouloir de son frère et décrocha sa radio. Elle n'était pas encore prête à lui manifester son improbation. Elle le pensait mort seulement quelques instants auparavant. Soudain, attirant l'œil en alerte de l'héritier, Gédéus sortit en trombe d'une des chambres dans laquelle il s'était caché de Spoon. Lorsque le rongeur l'avait retrouvé, il s'était avivé comme un geyser fissurant la croûte terrestre. Ses élans de voix happèrent l'attention de Lascan qui, dans un sursaut, changea de point de mire.

Dans son affolement, Gédéus ne fit pas attention au bord pernicieux. Barthélise chercha à le rattraper, en vain.

— Gédéus ! Non !

Mais il était trop tard.

Les planches brûlées se dérobèrent sous les sandales de joncs du défiguré, l'emportant dans une chute qui lui fut fatale. Ses cris et ses lamentations bestiales furent l'ultime souffle de sa vie. Lorsque Barthélise regarda en bas, de nouvelles larmes moribondes s'évadèrent. Le corps de Gédéus avait heurté le mur protecteur de plein fouet et s'était cassé la nuque. Une trace pourpre témoignait encore de son contact mortel avec la pierre.

En une soirée, elle venait de tout perdre. Absolument tout. Les deux êtres auxquels elle tenait le plus au monde lui avaient été arrachés de manière très brutales. Éclat après éclat, elle se brisa, se morcela et laissa ses genoux embrasser le sol dans un dernier effort. Elle n'avait plus la force de se battre, ni même de lutter. Elle brandissait vers les cieux ses foudres meurtries. Ses sanglots s'intensifièrent comme ses prières, conjurant le dieu lunaire d'accueillir Gédéus comme il se devait.

Elle ignora Lascan qui avançait dans son dos pour lui passer les menottes. Elle ne fit aucune objection à ce geste. Lorsque le cliquètement du métal retentit, Spoon vint innocemment rejoindre Lascan, le fixant de ses prunelles artificielles plus brillantes que des lampes. Cette souris ridicule aura fait du grabuge, ce soir, pensa-t-il, en glissant une main dans ses cheveux. Quelques feuilles de cendre tombèrent sur ses cils.

Tout à coup, Lascan perçut comme une lueur dans l'armure de l'Animaltronique. Il plissa les yeux pour aiguiser sa vision, alors que Sielle venait d'arriver vers lui, les enfants sur les talons, pour lui dire que les équipes extérieures avaient été prévenues. L'insolence naturelle de Lascan fit soudainement place à un sentiment terrible d'être pris au piège.

Rapidement, il réalisa que ces reflets provenaient du dehors ; plus particulièrement d'un Mini-Missile qui arrivait tout droit sur eux.


Derrière Jobal, Milléïs et Draval survolaient la forêt. Le vent les fouettait, leur scindant le souffle par sa froideur. Dans l'obscurité de la nuit, seules les flammes à l'arrière des pieds du fugitif demeuraient leur lanterne. Milléïs sentait son pouls battre contre ses tempes par l'adrénaline, créant une mélodie dissonante et pleine de véhémence dans sa tête. De sa main droite, elle lui tira une balle solaire sans lâcher la manette d'Arktis, de la gauche. Draval la seconda et leurs assauts finirent par avoir l'un des réacteurs de Jobal. Dans un mouvement aléatoire, il vacilla et chuta dans les bois.

L'odieux pyromane dégringola dans les branches, se griffa les bras et le crâne pour finalement tomber sur le tapis sylvain. Le duo piqua alors sur lui et descendit à sa rencontre. En rappelant leurs oiseaux sous forme de Dodécaèdres, Milléïs et Draval pointèrent l'atterré qui s'apprêtait à se lever, une grimace ensanglantée greffé à sa face.

— C'est fini, Jobal, abandonne !

Une munition s'enfonça subitement dans un arbre, éraflant la peau de la jeune fille qui vociféra son mal. Deux sbires, ayant fui l'assaut plus loin, jaillirent des feuillages. L'un possédait un pistolet et l'autre, une dague aiguisée.

— Tuez-moi ces Défenseurs ! commanda Jobal, sans ménagement.

L'homme au poignard les attaqua de front et tenta de taillader Draval à la gorge. Le garçon l'esquiva habilement trois fois de suite et le frappa au niveau de l'estomac, le faisant couiner comme un jouet. L'adolescent se prépara à l'assaut du Contestataire qui revint très vite à la charge. Il déjoua à nouveau la valse du couteau, mais un défaut dans sa garde permit à l'ennemi d'attraper Draval fermement par le col. L'homme lui administra un coup de crâne qui le déconcentra et le déphasa. Une goutte de sang glissa de la narine du châtain.

L'agresseur voulut lui enfoncer sa lame au creux du ventre, mais même sonné, Draval l'avait vu venir. Sa douleur n'était plus qu'un lointain souvenir. Il arrêta son attaque en bloquant l'arrivée du poignet à l'aide de ses deux paumes. Il le repoussa en lui rendant son action de tête au centuple, puis lui fit lâcher son couteau d'un coude bien placé dans l'intérieur du bras.

Milléïs affleura sur le côté et le balaya de la jambe, soulevant quelques feuilles mortes sous sa masse affalée dans une série de plaintes. Les picotements de sa blessure au bras grandissaient comme une déchirure. Elle appuya furtivement sa paume dessus afin d'attenuer la torture. Le second individu, de moitié camouflé par les buissons, leur tira dessus. Le binôme caracola immédiatement derrière un grand arbre pour se protéger des balles.

— Tiens, prends ça !

Milléïs passa le Magnergie de Laliza à Draval.

— Qu'est-ce que tu veux que j'en fasse ? J'en ai déjà un.

— Je le sais. Mais dis-toi que c'est comme les pains au sucre ; un, c'est bien, deux, c'est mieux !

Il arqua un sourcil, presque amusé par cette répartie. Elle savait qu'il était imbattable dans cette discipline et elle ne se gêna pas de le lui dire. Ignorant la noirceur ambiante et les voix terrifiantes qui résonnaient au loin, Draval s'arma de bravoure et des deux calibres, puis se jeta à nouveau sur le champ, requinqué. Il mitrailla l'homme en face de lui sans faiblir. Il le toucha à la main, provoquant ses clameurs endiablées.

— Draval, roulette sur le dos !

Semblant comprendre le langage absurde de sa partenaire, il se courba en avant, laissant Milléïs prendre appui sur la surface aplatie de son dos dans une pirouette contrôlée et experte. Elle asséna un coup de talon au visage de l'individu à terre qui s'apprêtait à se relever. Son corps frêle se contorsionna dans une forme de ressort, puis tel un nœud, elle serra son poing et lui abattit magistralement sur le dessus du crâne. Le tout, sous les yeux révulsés de Jobal.

Désormais dos à dos, le binôme immobilisa les deux Contestataires en leur tirant une balle dans la rotule.

Entre temps, gémissant quant à la douleur aiguë de sa jambe, Jobal s'était remis sur pieds. Sa haine envers ces deux enfants avait atteint le point de non-retour. S'il ne pouvait les tuer, alors il les écorcherait jusqu'au plus profond de leur être, jusqu'aux confins de leur moindre fibre charnelle. Il les détruirait sans même les toucher.

Il avait la solution.

— Jobal, ça ne sert à rien de courir. Vous êtes fait ! lui cracha Draval, en enchaînant un pas vers lui.

— Personne n'a jamais réussi à m'arrêter. Même dans la pire des situations, je sais garder la tête froide et réfléchir à une échappatoire possible et exécutable. Seule la mort pourra définitivement me stopper dans ma quête de justice, rentrez-vous bien ça dans le crâne ! Les crimes, quels qu'ils soient, ne sont jamais effacés sans avoir payé les tords des âmes volées. Mais les plus grands restent sourds, insensibles. Ils ne respirent pas le même air que nous. Ce pourquoi, je vengerai ceux qui ont péri et sauvegarderai notre honneur.

— Non, mais vous vous entendez ? Ouvrez les yeux, Jobal ! Votre soi-disant honneur n'est rien de plus qu'une armure. Vous pensez qu'elle peut justifier vos actes et vous protéger, mais elle ne fait que vous alourdir et vous enfoncer davantage. Vous parlez de crimes, hein ? Vous en commettez tout autant ! feûla Milléïs.

— Sornettes ! Nul ne sert de parler avec l'adversaire. Vous commencez sérieusement à m'ennuyer, tous les deux. Je gardais cette chose en cas d'extrême urgence, mais... Je crois que son heure d'utilisation va être avortée.

Jobal enfila sa main à l'intérieur de sa veste et en sortit une sorte de bâton métallique pourvu d'une goupille. Sous le nez du binôme, il hissa la chose au-dessus de sa tête et agrippa le petit bout de fer. Lorsqu'il le retira, un rai de flammes sortit de son postérieur, comme un feu d'artifice pétillant. Ils réalisèrent trop tard qu'il s'agissait d'un Mini-Missile, une bombe prohibée car hautement dangereuse et sensible.

Dégoupillée, le moindre contact pouvait la faire éclater, même celui d'un simple grêlon. Milléïs essaya de le raisonner.

— Ne faites pas ça ! Pensez aux enfants et à vos camarades !

— Mes camarades ? Ils ne sont rien de plus que des pions pour moi, je n'ai pas de honte à avouer que seule ma vie m'importe... J'en réunirais d'autres plus performants, plus fanatiques. Sur ce, dites bonne nuit, les petits...

Jobal lâcha alors le Mini-Missile qui partit au quart de tour, tout droit vers l'abbaye. Milléïs et Draval le suivirent du regard, glacés par la peur. Les enfants, Sielle, Lascan, Laliza... Ils étaient tous là-bas. Si la bombe les touchait, ils seraient déchiquetés dans l'explosion. Sans plus de préambule, le duo abandonna Jobal et emboîta le pas du Mini-Missile en ratissant toutes les possibilités exploitables pour le faire cesser sans blesser quiconque. Leur cœur battait à l'unisson, essoufflé et éperdu.

Ils étaient leur dernier espoir.

— Draval, on doit l'arrêter en plein vol. On ne peut pas le laisser toucher l'abbaye, sinon tout le monde va y passer, dit Milléïs, entre deux respirations saccadées.

— Comment tu comptes t'y prendre ?

— On va devoir compter sur toi !

Le garçon manqua de s'étrangler dans sa course ; et ce n'était pas le moucheron qu'il venait d'avaler par mégarde.

— Sur moi ? cria-t-il presque, après avoir retrouvé un fil d'air.

— Oui, tu étais le meilleur aux cours de tir de Monsieur Norixius ! Avec une balle bien placée, on pourrait le faire exploser avant qu'il n'atteigne l'abbaye.

— Ce n'est pas la même chose, Milléïs ! C'est une bombe ambulante, tu te rends compte ? Je vais me planter, je n'ai pas le niveau pour...

Agacée par ces dires, la jeune blonde le cogna à l'épaule sans s'arrêter de courir.

— Ça suffit ! Arrête un peu de gémir sur ton sort ! La vie de tous est entre nos mains ! Prends ton Magnergie et tire !

La paire s'arrêta finalement dans un creux naturel où la terre était fraîchement retournée, visiblement par des animaux. Draval se saisit d'un de ses Magnergies ; aucune erreur n'était envisageable, aucun faux pas, il n'avait qu'une chance. Un seul essai.

Un genou sur la terre, Draval se répéta les sages paroles de son professeur de tir : « une cible mouvante possède toujours un point faible, un axe parfait exploitable à une certaine vitesse. Il faut viser cet axe et se verrouiller dessus, jusqu'à l'arrivée de la cible. Suffisamment concentré, il est impossible de la louper. ».

Draval fit alors le vide dans sa tête, fixant un amas invisible au-dessus des arbres, tout près de l'édifice religieux. Rien ne devait faire obstacle à sa concentration.

— Tu peux le faire, Draval... Ne crois pas en toi. Crois en moi qui crois en toi.

La voix de Milléïs se répercuta entre ses parois cérébrales et lui insuffla la rage de vaincre. Ses tremblements de nervosité prirent fin. Ses muscles se bandèrent et, lorsque la fusée passa sur la cible que son imagination avait érigée, Draval bloqua sa respiration et tira.

Le projectile trancha l'air dans un chuintement.

À l'instant où l'impact allait s'établir, Draval se déposséda de son attirail et emprisonna le visage de Milléïs contre son torse pour la protéger. La balle entra en contact avec la bombe qui déflagra à quelques mètres de l'abbaye, sous les yeux horrifiés de Lascan et Sielle. L'explosion fut bien plus violente que la première. La vague brûlante fit danser les végétaux, calcina les feuilles et repoussa les jumeaux qui durent se préserver l'un contre l'autre, au fond du couloir éboulé, auprès des enfants. Le bruit était assourdissant, fracassant, et provoqua les hurlements de stupeur des corps présents autour du bâtiment.

Milléïs et Draval restèrent enlacés durant quelques minutes, échevelés, haletants et contusionnés par les débris. La demoiselle finit par se séparer doucement de lui, peinant à s'extirper de sa confusion et de son émoi. Lorsqu'elle vit à travers les buissons dévorés par les retombées de braises, l'abbaye encore debout, un sourire naquit sur son minois taché de suie. Elle souffla alors à son meilleur ami, avec douceur :

— Tu as réussi, Draval...

— Non... On a réussi.

Tous deux échangèrent un regard, puis un rire complice, assis à même le parterre boueux. Ils avaient réussi, avec difficulté, mais aussi avec courage et une bonne dose d'adresse. Ils n'étaient pas prêts d'oublier cette première mission dans la légendaire Forêt de Liesel.

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