𝟑. 𝐃𝐨𝐮𝐭𝐞𝐬, 𝐂𝐨𝐦𝐩𝐭𝐢𝐧𝐞 𝐞𝐭 𝐙𝐞́𝐫𝐨 𝐚𝐛𝐬𝐨𝐥𝐮.
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Les frères Jeon avaient toujours été très fusionnels. C'était clair comme de l'eau de roche, flagrant comme un bouton en plein milieu du front. Ils étaient aux antipodes, aussi bien sur le plan caractériel que sur le plan physique. Mais comme le dit si bien cette expression : les contraires font pairs.
Lors de son arrivée dans sa famille d'accueil, Tae avait eu le cerveau criblé d'appréhensions de toutes sortes. La peur que ses nouveaux parents se comportent exactement comme ses vrais géniteurs, que celui qu'il devrait considérer comme son frère ne le rejette comme la peste ou lui fasse subir moult bavures. Il en avait assez bavé avec ces barbares qu'il avait dû nommer respectivement « Maman » et « Papa » et avait espéré que cette fois-ci la chance serait de son côté de toute sa misérable existence. Ses doutes s'étaient envolés pour de bon une fois le pied posé chez eux, dans leur grand foyer encerclé de verdure à perte de vue. Les remarques acerbes avaient été remplacées par de doux compliments, les pluies de gifles s'étaient transformées en cascade de câlins et de baisers. Le blondinet ne s'était plus larmoyé. De la honte de la famille, il était devenu le cadeau tombé du ciel que les Jeon avaient prié jour et nuit depuis bien longtemps.
Sa pureté, sa vulnérabilité, sa manière d'être, le « lui » dans son entièreté ne furent jamais perçus comme une gêne ou comme un défaut qu'il fallait absolument gommer. C'était peut-être ça que Jungkook adorait tant chez le blondinet à l'épiderme crépusculaire.
En grandissant ensemble, son aîné avait développé un côté surprotecteur vis-à-vis de lui. Du point de vue du cadet, c'était tout bonnement adorable. Le plus grand avait trop peur qu'il lui arrive malheur en cours ou lors de ses sorties avec ses amis. En parlant d'amis, Tae avait dû parfois le canaliser car il s'était montré trop méfiant et avait perçu le mal là où il n'y en avait pas de trace visible, des scénarios invraisemblables se fomentant dans son esprit et qui avaient aboutis de temps à autre à des accrochages inutiles qui auraient pu être évités. Taehyung, lui, lisait en Jungkook comme dans un livre ouvert. En un échange de regard, il pouvait sentir quand celui-ci n'était pas au meilleur de sa forme, quand la contrariété l'envahissait. L'ébène ne montrait jamais ses faiblesses à qui que ce soit, excepté devant son blond préféré. Quand l'un n'allait pas très bien, l'autre l'invitait le soir à sombrer au pays des rêves en sa compagnie. Ce drôle de rituel de préadolescence, dont eux seuls détenaient le secret, les avait finalement suivis jusqu'à l'âge adulte.
Au départ, c'était innocent. Il s'agissait d'une façon pour eux de se consoler mutuellement, le seul moyen de les soulager de leurs maux et de confesser leurs tracas sans retenue et donc, de se rapprocher davantage. Jusqu'à ce qu'un beau matin, la matriarche en voulant les réveiller ne soit témoin d'une image qu'elle aurait préféré ne jamais voir de sa vie et rayer de sa mémoire.
Son fils avait surplombé Tae de toute sa hauteur et quelques centimètres à peine avaient éloigné leurs paires de lippes respectives. Tous deux avaient eu l'air de se dévorer et de se déshabiller du regard, à deux doigts de la transgression, de passer à un acte sacrilège. L'un avait seize ans, l'autre vingt et ce premier « imprévu » n'était que l'annonce d'une succession de futures catastrophes qui compliquerait le lien qui les unissait.
Taehyung déglutit avec difficulté en se rappelant de cette bourde monumentale et terriblement obscène, honteux. Quarante-huit heures s'étaient écoulées depuis que le numéro de Kook était revenu le turlupiner jusqu'à le pousser à la limite de la crise d'angoisse, voire de l'évanouissement. Ce selfie pris à son insu avait ravivé de vieux souvenirs qu'il préférait sceller dans un tiroir et en jeter la clé. La relation qu'avaient entretenue les deux garçons avait toujours été ambiguë, pleine d'imprécisions et pour le romancier, l'envoi de ce cliché n'était pas anodin. Il n'empêche que cela avait réussi à le baigner dans une psychose mordante. Depuis, il vérifiait que toutes ses portes et fenêtres étaient bien fermées lorsqu'il quittait la maison ou alors s'apprêtait à aller se coucher. Il allait même jusqu'à faire le tour du logement pendant plusieurs minutes pour s'assurer s'il n'y avait un dangereux malade qui le stalkait en douce, caché dans la pénombre derrière un arbre.
Intimement, bien que toutes ces circonstances le surmenassent, il croyait peu à peu naïvement que son frère était de retour. La limite entre la fiction et la réalité s'amincissait, ces deux-là devenant presque indissociables. Comme la plupart des écrits qu'il avait façonné de sa propre imagination.
Lors de son réveil, dès l'aube, il avait scruté de manière intempestive son téléphone désormais fissuré. Une fois, deux fois, trois fois... Ce n'était jamais suffisant pour calmer son stress grandissant. Deux jours s'étaient enchaînés et il attendait avec impatience, la boule au ventre, un putain de message qui se faisait désirer. Là, assis à sa place fétiche dans ce même bar où il avait pris l'habitude de se rendre avec Jungkook et leur ami commun Namjoon - et dont il adorait la décoration avant-gardiste - il examinait d'un air suspicieux chaque personne qui entrait dans son champ de vision, en se questionnant si parmi l'un des clients se cachait l'auteur des messages...
Ou si son frère n'était pas là, dans le même périmètre que lui, en train de l'observer dans l'ombre en silence au cœur de ce capharnaüm fringant.
Il était totalement désemparé, coincé dans un entre-deux. Sur son épaule droite, reposait cette désireuse envie de revoir son cher frère. Puis sur sa jumelle, l'espérance que tout ceci ne soit qu'une vile mascarade.
Toujours rien... À quoi est-ce que tu joues, Jungkook ?
Dans quel genre de jeux malsains est-ce que tu m'entraînes, encore ?
Cette histoire mettait à rude épreuve sa sainteté d'esprit et la liste d'interrogations, déjà très longue, ne fit que s'allonger une fois de plus.
— Taehyung !
La voix de son vis-à-vis le sortit de ses songes et lentement, il détourna son regard pour donner toute son attention à son ami.
— Hmm ? fit-il.
— T'as l'air complètement à côté de la plaque, t'es sûr que ça va ?
— Ouais ça va, Nam'. Ce n'est rien de grave, ne t'inquiète-
— Arrête un peu ton char. T'as des crevasses profondes comme le grand Canyon sous les yeux, tu touches à peine à ton verre et tu ne parles presque pas. Tu mens comme tu respires.
Tae se mordilla la lèvre inférieure, tout en se tortillant contre le dossier de son siège en bois et ne sachant quoi répondre à son ami âgé de deux ans son aîné. Namjoon le suspectait depuis quelques jours de ne pas aller bien et le blond le contredisait à chaque fois pour tenter de dissiper son inquiétude. Néanmoins, il se doutait très bien que celui-ci était loin d'être con. Namjoon repérait tout. Absolument tout. Rien ne lui échappait et ça, c'était un détail qui le faisait sacrément chier.
— C'est en rapport avec ton frère, hein ?
Son intonation devint bien plus calme. Namjoon s'était adouci en voyant la moue que tirait son cadet. Délicatement, il alla entourer sa main autour du mince poignet de Tae, son geste se voulant réconfortant. Ce dernier se laissa faire, étant habitué aux marques d'affection de son ami, son autre main libre touillant le contenu de son verre à l'aide de sa paille.
— Écoute... Kook me manque énormément aussi. Il y a des jours où j'aimerais comme toi qu'il soit de nouveau parmi nous, à siroter sa bière aux fruits rouges et à nous raconter des blagues vaseuses, mais... C'est impossible, malheureusement. On le sait très bien tous les deux. Il faut que tu acceptes la vérité, mon grand.
Et si je te disais qu'il n'est peut-être pas si mort que ça, en fin de compte ?
Tae se retint de lui relater les derniers événements. Namjoon s'était toujours montré compréhensif et compatissant envers lui, peu importe ses choix entrepris et ses opinions. Mais dans un contexte aussi particulier que celui-ci, il était convaincu que son ami ne le suivrait pas dans son raisonnement tout comme ses parents adoptifs. Il lui dirait que les fantômes n'existent pas, qu'il n'est pas dans un film d'épouvante à faible budget et qu'il devrait franchement rattraper ses heures de sommeil manquées. Il ne pouvait confier cela à personne, sans passer pour un fou.
— Ne te blâme pas pour ce qu'il lui est arrivé. Ce n'est de la faute à aucun d'entre vous, ça arrive de se disputer violemment et de dire des choses qui dépassent notre pensée. Et je suis sûr que de là où il se trouve, Jungkook ne t'en veut pas... Il en est incapable même, il tenait bien trop à toi pour agir de la sorte. Tu étais sa priorité, l'être le plus précieux à ses yeux. Je crois même qu'il t'aimait encore plus qu'il n'adorait vos parents.
Une sensation inconnue couvrit le blond.
« Je t'ai vu hier te prélasser au bar où nous avions pour habitude d'aller rien que tous les deux, en compagnie de Namjoon... J'étais si peiné... »
Une pression inhabituelle lui compressa le cœur, cœur qui se mit à battre à un tempo lent, extrêmement lent, comme si d'ici peu il rendrait son dernier souffle. Il ne se sentait plus aussi à l'aise en présence de son copain. L'impression d'être compressé au dedans de son être, que l'oxygène oscillant dans le café s'alourdissait et l'étranglait langoureusement lui refourgua cette lubie urgente de partir d'ici. Tout lui paraissait hostile, d'un coup.
« Tellement peiné... »
Ce malaise l'invita alors à se défaire de la prise de son interlocuteur d'un geste plus brutal qu'il ne l'avait voulu et à se rhabiller de sa veste rapidement.
C'était trop pour lui. Il ne pouvait pas rester une minute de plus dans ce bar.
— Taetae... implora celui-ci, inquiet.
— Pardonne-moi Joonie, mais je dois retourner chez moi.
En trombe, l'artiste délaissa son ami seul à l'intérieur de l'Iron Moon et se retrouva à l'extérieur, respirant à pleins poumons comme s'il avait été en apnée durant les quelques secondes qui venaient de s'écouler. Qu'est-ce qu'il venait de se passer ? Pourquoi se sentait-il aussi coupable subitement ? C'était bizarre. Beaucoup trop bizarre pour comprendre.
C'est dans cet état d'esprit singulier qu'il quitta les lieux, des questionnements qui n'en finissaient plus lui labourant le crâne durant le trajet du retour. Le ciel commençait à devenir nuageux et c'est pour cette raison qu'il se dépêcha avant que la drache ne vienne le tremper jusqu'aux os. La météo s'était faite plutôt capricieuse en ce début août et cela ne présageait rien de bon, ou du moins un potentiel gros orage qui secourait une partie de la région nordique. Une fois rentré dans sa demeure luxuriante et débarrassé de son chandail, l'accalmie de celle-ci l'accueillit à bras ouverts. Entre-temps, cette impression de culpabilité s'était estompée. Pour le moment, en tout cas.
L'obscurité régnait entre ces quatre murs. L'environnement n'était plus du tout le même et l'extérieur contribuait à leur donner une allure sinistre et lugubre, de quoi refiler pour la on-ne-sait combientième fois des frissons au maître du lieu. Tae alla de ce pas dans sa chambre, après avoir passé au peigne fin chaque porte et fenêtre, pour une question de sécurité. Il était censé l'être en temps normal, sauf qu'il ne l'était plus désormais. Il ne l'était plus depuis cette affreuse nuit passée deux jours auparavant et cela n'était pas prêt de changer de sitôt.
Il se déplaça vers l'immense armoire et l'ouvrit. Ses mains prirent le premier pyjama sur la pile puis il s'arrêta dans son geste, hésitant. Les affaires de Kook se trouvaient encore là, juste à côté des siennes, rangées impeccablement et triées en fonction des couleurs des vêtements.
Taehyung n'y avait pas touché depuis le décès présumé de celui-ci. Pourtant, l'envie de les manier sous la pulpe de ses doigts, de humer son odeur pour se rappeler de la ribambelle de souvenirs qu'ils avaient créés ensemble le piquait à vif, chaque fois qu'il se retrouvait devant ses habits. Pendant ces instants, il se retenait sans trop en connaître la raison. Enfin, il avait une hypothèse, mais il espérait qu'elle soit fausse : agir ainsi, ce serait admettre que son frère était définitivement parti. Il éprouva un douloureux pincement au centre de sa cage thoracique, une sensation similaire qui l'avait submergé à l'Iron Moon en présence de Namjoon, un peu plus tôt.
Une minute passa. Puis deux, puis trois avant que le blond craque et agrippe l'un des t-shirts noirs ayant anciennement appartenu à l'ébène. Soit l'une des couleurs qui embellissait le plus Jungkook. Il déposa alors son propre haut à son emplacement initial et partit en direction de la salle de bain. Après une douche rafraîchissante et s'être séché le corps, il s'empara de ledit t-shirt puis le tritura, sentit chaque fibre le constituant. Il se cramponna à ce bout de tissu comme si à tout moment il deviendrait poussières... Puis il lâcha prise. La tentation était bien trop forte, ces derniers temps. Taehyung respira son odeur, le visage plongé dans le vêtement. Il absorba son effluve, baigna dans une douce béatitude à cette senteur qui lui manquait un peu plus chaque jour. De la bergamote mêlée à de la mandarine avec une touche boisée. Une odeur qui possédait du caractère et qui en imposait. Du Jungkook tout craché.
Alors qu'il aspirait goulûment cet arôme, une kyrielle de souvenirs défilèrent dans son esprit que Taehyung ne refréna pas. Leurs voix qui hurlaient, gagnaient en volume au point de réveiller les morts, dans leur cuisine quelques minutes avant que Jungkook ne disparaisse pour de bon. Ces moments doux passés sur le canapé devant un bon film retransmis sur leur écran de télé, ou sur le perron à chasser les constellations sous la voûte estivale. Leur premier dérapage dans la demeure familiale, puis ceux qui ont succédé dont seule la forêt était spectatrice. Ces instants de déraison complet où leurs gémissements fusionnaient au même titre que leur corps et ce désir qui montait, montait encore, toujours un peu plus et-
Taehyung revint subitement à lui, loin de cette transe étrange dans laquelle que ses réminiscences l'avaient immergé. Hébété par son agissement, il tenta de retrouver contenance et passa outre la sensation de chaleur logeant son ventre. Il se contenta alors de se vêtir de ce haut noir en coton puis revint dans la chambre, ses cheveux encore légèrement mouillés et s'assit en tailleur au milieu de son lit. Les draps flattaient son derme à ce doux contact. Ses doigts longilignes triturèrent le bas de son haut tandis qu'il arborait une mine contrariée.
— Jungkook... commença-t-il, avec incertitude. Si tu es là...
Puis il se mit à pester avant de rire nerveusement.
— Bon sang, qu'est-ce que je suis en train de faire... ?
Tae stoppa le martyre du bout de tissu et releva la tête, regardant avec attention chaque élément se trouvant face à lui. La pièce était faiblement éclairée par la grande porte-fenêtre. Les arbres absorbaient le moindre rayon de lumière qui tentait de les pourfendre. Cependant, les ombres de chaque meuble étaient projetées sur le sol. Elles avaient l'air vivantes et si l'on s'attardait un peu plus dessus, on aurait pu croire qu'elles dansaient de façon macabre.
— Tu te souviens de la comptine que tu me chantais quand on était gosses ? T'adorais me faire flipper avec cette histoire parce que tu savais à quel point je peux me comporter comme un trouillard. T'étais un vrai sadique, quand j'y pense... Mais j'aimais tes taquineries.
Le jeune coréen inspira un grand coup comme pour se donner du courage dans ce qu'il s'apprêtait à faire puis à voix basse, il entama un chant mélodieux qui fit vibrer ses cordes vocales.
« C'est une sombre forêt verte,
Où la lumière du soleil ne pénètre pas.
Je suis couché dans la cabane obscure,
La poussière tourbillonne autour de mon visage. »
Il garda un rythme soutenu tout en se berçant avec légèreté, tel un pendule de droite à gauche. Son pouce se mit à jouer avec son anneau passé au doigt de la même main.
« Un cerf flotte au-dessus de moi,
Ses yeux sont si noirs et plein de fureur.
Le voilà qu'il tombe violemment,
Il s'apprête à écraser mes os puis à m'asphyxier. »
Sa voix tremblota. Ses prunelles dérivaient sur chaque détail qui constituait le mobilier avec une certaine angoisse y lanternant. Comme si d'une seconde à l'autre sa lampe de chevet se mettrait soudainement à léviter ou qu'une ombre menaçante surgirait de façon improbable pour le violenter, le posséder ou commettre tout un tas d'autres actions qu'il n'osait visualiser.
« Dans la maisonnette, je suis allongé seul,
Mais j'entends une toux derrière la porte fermée de la chambre lugubre,
À l'intérieur gît un homme mort. »
Cette comptine sépulcrale, Jungkook la lui avait fredonnée de sa voix grave assez de fois au bord du lit pour qu'il en retienne les paroles par cœur. Il l'adorait tout autant qu'il la détestait, d'autant plus que son origine restait un mystère. Une chansonnette transmise de génération en génération, d'après l'ébène. Kook riait à chaque fois quand il sous-entendait au blond que le même sort que subissait le personnage de la comptine lui serait réservé et que celui-ci se mettait aussitôt à chouiner, un torrent de larmes dévalant ses joues joliment rebondies. Une certaine chaleur l'envahit alors de nouveau, ce qui le détendit un peu et le fit relâcher la pression monstre et invisible exercée sur ses épaules.
« Il se précipite soudain sur moi,
Je tombe à ses pieds.
Et sur le sol abîmé et froid,
Je m'abandonne à toi. »
Un craquement. Droit devant lui.
Juste aux pieds de son lit.
Tae hoqueta, le souffle court, ses mirettes braquées vers l'endroit exact d'où provenait le bruit alors qu'il venait de mettre un point final à la berceuse horrifique. Pétrifié, il resta immobile, le palpitant cognant fort dans sa poitrine. C'était à peine s'il respirait, tant il était terrorisé. S'il bougeait d'un millimètre, cela casserait l'harmonie du lieu. Pire encore, peut-être que quelque chose de grave lui arriverait. Est-ce qu'une créature immonde se cachait sous lui ?
— Tais-toi, Taehyung. Pour l'amour du ciel, ferme-là !
Comment garder un esprit lucide et une réflexion cartésienne à une heure aussi tardive quand on est doté d'une imagination sans borne comme le blondinet ? Il sursauta furieusement en sentant son cellulaire vibrer entre ses cuisses. Ses battements de cœur s'affolèrent encore une fois à une allure folle. Il battait si vite que Tae crut l'entendre, au creux de ses oreilles, à l'intérieur même de son crâne. Encore un petit peu et il serait victime d'un infarctus.
Pris de légers soubresauts, il galéra à prendre correctement en main son téléphone. Quand il lut la notification... Il crut qu'il allait souffler la veilleuse pour de bon.
✉️ Jungkook
>> Mon ange, tu chantes si bien... Si bien pour moi. Je t'ai toujours dit que ta voix est un don du ciel.
Ce n'était pas possible. Son frère ne pouvait pas l'avoir écouté, encore moins être présent dans cette baraque. Encore une fois, il émit tout une liste d'hypothèses toutes aussi farfelues les unes que les autres, brusqué par ce qui était en train de se passer. Un hacker avait certainement dû le pirater et pouvait le percevoir depuis sa caméra frontale, c'était ce qui semblait le plus probable selon lui. Une ribambelle de vibrations successives arriva mais Taehyung n'avait plus assez de force ni la détermination pour les affronter.
Il se laissa renverser lourdement vers l'arrière et ferma les paupières, après une énième soirée riche en émotions.
Son cerveau fusait à plein régime tandis que son corps tentait en vain de se reposer pour la première fois en cette période houleuse. Il n'y eut plus aucun bruit au sein du foyer et le silence quasi religieux l'invita à s'allonger de tout son saoul pour ensuite voyager au travers de rêves aussi doux que du coton. L'air ambiant de la pièce se refroidit vite et de la pluie fine se mit à s'abattre contre les carreaux de la chambre.
Un vent glacial s'éparpillait peu à peu sur son corps, caressait ses tibias pour remonter lascivement jusqu'à ses cuisses bien proportionnées et déposer des baisers papillons de-ci de-là son épiderme sensible à tout toucher. Sensation étrange. Agréable et troublante à la fois. Surtout qu'aucune fenêtre n'était ouverte.
Grelottant et recroquevillé sur lui-même, Taehyung s'endormit pour de bon contre son oreiller duveteux aux sons des gouttes s'échouant contre sa porte-fenêtre, une froideur inconnue l'étreignant dans son entièreté, comme on enlacerait un amant à l'heure du coucher.
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