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Noir.

Il faisait noir lorsque c'est arrivé. Nuit noire. Je ne sais pas ce qui m'a pris de me lever, ce soir-là, je l'ignore encore aujourd'hui. Une enfant de sept ans craint toujours la noirceur et les ténèbres qui entourent son cercle protecteur, formé par l'aile rassurante de ses parents et ses nombreuses peluches. Une vérité bien plus terrifiante se cache derrière ces ombres que beaucoup pensent inoffensives.

J'y ai goûté... et j'y goûte encore et encore.

Le son strident de la sonnette d'entrée de ma minuscule maison de banlieue a retenti, me réveillant en sursaut. L'air gravitant autour de moi est glacial ; ça me surprend, car le mois de juin arrive en grandes pompes. J'hésite à me lever, alors que la clochette s'entête à me tirer du lit. Mon doudou serré à ma poitrine, je me sens comme attirée par une force occulte. Elle me traine vers la porte. Ma respiration se fait pauvre, saccadée, j'ai peur d'alerter mes parents qui dorment à côté. Je suis d'ailleurs étonnée que mon père ne se soit pas déjà levé pour s'enquérir de la situation. Il a le sommeil très léger.

Je n'ose pas me rendre dans leur chambre. J'ai peur de me faire gronder pour être sortie de mon lit. J'attends quelques secondes, espérant tout de même voir mon père ou ma mère arranger ce problème et ramener la paix dans notre logis. Mais rien ne se passe.

J'ai l'impression d'être la seule à entendre cette sonnerie. La seule à pouvoir l'arrêter et à faire partir la personne qui s'amuse à nous déranger.

Le couloir est d'une obscurité totale. Mon petit corps d'enfant tremble par le froid et la crainte qui monte en crescendo. Pourquoi la température est si basse ? Mon cœur s'opprime alors que mes pas discrets habillent le silence troublé par ce trille. Pourquoi quelqu'un vient sonner à la porte, à une heure si tardive ? L'angoisse me prend aux tripes, me glace le sang, alors que mon chemin vers le salon s'achève. J'observe le vestibule, une ambiance macabre y règne. Je ne comprends pas. Le temps semble presque arrêté... L'horloge est bloquée sur trois heures trente-trois du matin. Ses cliquetis habituels sont morts ; tous les bruits alentours le sont, hormis la clochette. Je presse mon chat en peluche un peu plus fort contre moi, afin de me rassurer, mais mon souffle laborieux se perd un peu plus à chaque centimètre.

Je ne veux pas y aller, seulement, mes jambes ne m'écoutent pas.

Lorsqu'enfin, je m'immobilise devant la porte, la sonnette s'interrompt brusquement. Une pause terrifiante fait trembler mes os et je m'engloutis dans la pénombre.

— Sephora...

Une petite voix sinistre traverse la porte et vole jusqu'à mes oreilles. On dirait un jeune garçon. Il m'appelle. Une première larme glisse sur ma joue, alors que ma main frémissante déverrouille le loquet. Je tourne lentement la poignée ; elle grince, de concert avec les joints mal huilés. Ma gorge s'assèche lorsque je découvre quatre personnes sur mon perron. Ce sont des enfants ; le plus vieux semble adolescent. Je ne les connais pas, mais leur style retient mon attention. Ils sont habillés d'une bien étrange manière, très ancienne. Leur peau est d'une pâleur cadavérique qui me donne froid dans le dos, ils ressemblent à des fantômes. Seulement... ce qui attise ma terreur jusqu'à m'en faire verser des torrents de larmes, c'est leurs yeux.

Ils sont noirs. Complètement noirs, tels des gouffres sombres et magnétiques.

— Peut-on entrer, Sephora... ?

Cette nuit. Cette peur... C'est ce que j'ai vécu, des années avant.

Je n'aurais jamais dû ouvrir cette porte.