Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

† NEUF †

Il est dix-huit heures.

Je n'ai pas une minute de retard, pas une seconde. Il était impossible pour moi de louper ce rendez-vous, ni même de le repousser. Le soleil se couche doucement, ses lueurs orangées frappent mon visage impatient et se reflètent dans mes yeux. Je les ferme un temps ; ça fait mal.

Debout devant la bibliothèque, je fais les cent pas, regardant ma montre à chaque nouveau mouvement de l'aiguille. Le temps est une chose si complexe. Si long, mais pourtant si court. Il fait des ravages, apaise les douleurs, soigne les blessures ou encore, détruit des vies. Le temps est un traître, incapable de se ranger d'un côté ou d'un autre. Il est universel, neutre et terriblement long !

Un soupir s'extirpe de mes lèvres. Je commence à en avoir marre. Les minutes passent et je ne vois personne. Je crains que tout ceci ne soit qu'une plaisanterie ou encore un canular de Shayne et ses amis, monté juste pour se moquer de moi. Shayne est assez stupide pour faire ça. Une fois, il s'est fait passer pour un employé de pompes funèbres et a vendu une série de couronnes de fleurs à une vieille dame enterrant prochainement son époux. Il a trouvé ça drôle, ses idiots de copains aussi, mais pas moi...

La mort n'est pas un sujet à prendre à la légère. J'y ai été confrontée et chaque jour, l'amertume du temps passé tente de recoller les morceaux de mon cœur cassé. Certains restent en place, mais d'autres, trop touchés, s'émiettent et partent dans le vent pour ne jamais revenir.

Tic, tac... Tic, tac...

Je n'ai pas la patience d'être patiente. Pas lorsque la tranquillité de mon futur est en jeu. Pas lorsque la solution à mon problème m'a été tendue, telle une carotte sous le nez d'un cheval. J'ai beau me retenir, mais ma colère augmente et me submerge.

Mon ras-le-bol me fait pousser un grand juron qui résonne jusque vers la descente de goudron menant au parking de la bibliothèque. Je m'assois alors sur le banc devant l'entrée, faisant virevolter une feuille morte jusque sur le sol. Je m'y avachis comme une larve, la jambe prise de secousses spasmodiques, signe d'impatience.

Je déteste attendre !

Le vent souffle doucement, il emporte ma chevelure dans son sillage. Son murmure se mélange à un ricanement que je connais que trop bien. Qu'est-ce qu'elle fait encore là, la boiteuse ? Rentre chez toi, ne viens pas me déranger dans ce moment déjà pénible.

Il y a quelqu'un...

La voix de Myrtle se répercute derrière mon crâne tel un soupir. Je bondis, prise d'un hoquet foudroyant, lorsque je remarque un gobelet près de mon visage. Il semble chaud et parfumé, vu la vapeur qui s'en échappe. Le choc du café brûlant et de la fraîcheur de fin de journée.

Une tasse de café ? Pour moi ?

En la détaillant, je remarque un dessin griffonné sur le carton du récipient ; une petite fille grossièrement tracée au stylo bleu à l'air triste. Je suis son cours pour découvrir des doigts fins de pianiste, ornés d'une chevalière estampillée d'une tête d'ours, tenant la boisson. Puis un bras entouré d'une chemise blanche. Le bout de mon observation me montre un homme à la silhouette élancée ; il est grand. Très grand. Des yeux verts et des taches de rousseur embellissent son visage ciselé. Ce qui me cogne le cœur immédiatement, ce sont ses cheveux d'un roux puissant.

Je l'ai déjà vu quelque part.

Lorsqu'il me sourit, de manière détachée, l'évidence me flagelle en pleine face.

— Vous... dis-je, bêtement.

C'est lui. C'est l'homme que j'ai déjà vu une fois, à la bibliothèque. Ce trentenaire avait attrapé le livre hors de ma portée. Je m'en souviens, maintenant. Mon éclat de voix a agi sur lui comme un bouton « On ». Il s'est remis en route et m'a offert un second sourire, cette fois, plus large et franc que le premier.

— Prenez, c'est un cappuccino avec beaucoup de sucre et de crème, m'annonce-t-il, de sa voix profonde qui fait frissonner ma poitrine.

Comme je les aime... C'est exactement la sorte de café que je prends habituellement. Comment a-t-il su ? J'hésite à faire le moindre geste, de peur de... Je ne sais pas, en réalité. J'ignore pourquoi j'éprouve ce sentiment. Est-ce réellement de la peur, au moins ?

Son mouvement d'insistance dans ma direction me pousse à chasser ces idées et à saisir le breuvage chaud qu'il me tend, en lui marmonnant un remerciement. Dans son autre main, il en a un pour lui. Lorsqu'il s'assoit à côté de moi, sans un mot, il en sirote quelques gorgées. Je ne sais pas quoi faire. Peut-être est-ce qu'il attend que je brise ce silence pesant ? Peut-être est-il timide ? Je fais claquer mes ongles autour de mon café, sentant sa chaleur se répandre dans mes paumes gelées. Allez, Sephy... C'est à toi de jouer.

— Euh... C'est... C'est vous mon... interlocuteur secret ?

Quelle question idiote ! Il ne semble pas réagir immédiatement. Il regarde le nuage de lait flotter sur la surface de sa boisson, son coude libre posé sur le dossier du banc. De profil, son nez long ressemble presque au bec d'un oiseau allant s'abreuver dans l'eau claire d'une rivière. Son silence de réflexion semble durer des heures pour mon esprit trop ardent. Je m'apprête à récidiver, lorsqu'il me répond, me faisant légèrement sursauter :

— Oui, c'est bien moi.

Mon cœur bat la chamade. J'ai même l'impression que mes doigts tremblent autour de mon gobelet. Calme-toi, Sephora... Je fais glisser une mèche de mes cheveux derrière mon oreille et ajoute, cette fois, plus franche :

— Quel genre de malade vous êtes pour dessiner des inconnues sur des feuilles cachées dans un bouquin sur le paranormal ?

Ma question le fait légèrement rire. C'était quasiment imperceptible, mais je l'ai distingué.

— Il y a des questions qui doivent rester muettes, parfois, car les réponses le seront également.

Il tourne ses yeux vers moi, introduisant toute sa couleur dans la mienne. Ce regard me met mal à l'aise, j'ignore pourquoi. Il est perçant, perforant. Je n'arrive pas à lui tenir l'œil, c'est plus fort que moi.

— Qui êtes-vous ?

Ce sont les seuls mots que je suis capable de lui sortir, après ça. Je le vois poser son café sur un morceau libre du banc et plonger sa main dans sa sacoche noire, accrochée autour de lui. Toujours silencieux, il déloge un livre qu'il pose lentement sur mes genoux.

— La réponse se trouve ici.

Sa voix me glace. En lui appuyant un œil méfiant, je pose mon café intact et inspecte ce bouquin. La couverture sombre et la police rouge me tapent dans l'œil. Je la connais.

Les Légendes d'Outre-Tombe...

Il ne me faut qu'une demi-seconde pour réaliser qui j'ai en face de moi ; qui est cet homme à la chevelure incendiaire ; celui qui a hanté mes dernières nuits avec ses messages secrets.

— Vous... Vous êtes Lehb Epgor... L'écrivain de ce livre ?

Mon interlocuteur étire un sourire en coin.

— Mademoiselle est perspicace. Mais je ne suis pas qu'écrivain, je travaille aussi dans cette bibliothèque.

— Ah bon ? Je ne vous y ai jamais vu...

— J'y travaille depuis peu. La vieille bibliothécaire avait besoin d'un remplaçant.

— C'est donc pour ça que vous étiez là, ce jour-là...

— Je suis là lorsqu'il le faut. Lorsque quelqu'un a besoin de moi.

Je retombe les yeux dans le fond de ma tasse de café. C'est complètement fou... Or, une série de questions me taraude et je ne me fait pas attendre pour les poser.

— Comment saviez-vous que j'allais revenir à la bibliothèque ?

Sans paraître étonné, il reporte son gobelet à sa bouche et avale une gorgée de café. Il pince ses lèvres, comme s'il désire garder l'arôme amer si apprécié plus longtemps sur ses papilles. Je plante mes yeux froncés sur lui, avide de réponses.

— Comment pouviez-vous juste savoir que je remettrais un jour les pieds dans cette bibliothèque ? Comment saviez-vous quoi dessiner sur vos pages mystères ? Comment savez-vous quel genre de café je bois ?

Ma série de questions fait naître un gloussement chez lui. Il me trouve drôle ? Je n'ai pas vraiment envie de rire.

— Vous m'avez suivie ?

Cette fois, il plante ses orbes verts dans les miens, son petit sourire énigmatique greffé à ses joues où deux fossettes se forment.

— Disons que j'aime bien en savoir davantage sur mes lecteurs.

— C'est carrément effrayant ce que vous venez de dire... Mais l'effrayant ne m'effraie plus.

— Je peux comprendre votre état d'esprit. Sachez que j'ai été intrigué par vous. Vous êtes la première à avoir prêté attention à mon manuscrit, depuis sa mise en rayon. J'ignore pourquoi, mais j'ai senti que vous étiez dans le besoin.

— Tout ce que je veux, c'est en savoir plus sur ce que je recherche. Et vous le savez.

Je ne suis même pas étonnée par les mots de cet homme. N'importe quelle personne sensée aurait déjà pris la fuite. Or, j'ai l'intime conviction que lui seul peut m'aider à trouver la solution.

— Évidemment que je le sais. Votre intérêt pour mes témoignages m'a mis la puce à l'oreille. Vous êtes tourmentée par quelque chose qui dépasse l'entendement. Quelque chose que vous ne pouvez pas expliquer. Ni vous, ni personne. Je peux ressentir... la peur... La curiosité... Le désir... et la haine en vous. Ils brûlent et vous hantent depuis bien trop longtemps ; c'est pour ça que vous vous êtes tournée vers mon livre. Vous cherchez la paix, le repos dans votre vie trop épuisante.

Les larmes me montent presque aux yeux. Il a mis le doigt sur le juste point sans me connaître. Je suis à cran, sensible comme une balsamine ; si on touche trop à mes émotions, elles explosent. Ce Lehb Epgor n'est pas qu'un simple écrivain ou bibliothécaire, peu importe... J'ai l'impression qu'il est plus que ça. De ce fait, ma bouche ne coopère plus avec mes actions et susurre malgré elle :

— Qu'est-ce que vous êtes, au juste ? Un médium ? Un mage noir ? Vous voyez des fantômes ?

Il ricane avec nonchalance.

— Non, je suis simplement un érudit passionné qui sait voir la détresse des autres. Il y a des choses sur Terre qui mériteraient une réflexion plus poussées par le commun des mortels. S'ils ne le font pas, alors c'est moi qui le ferais.

— Dans ce cas, parlez-moi des « Black Eyed Kids ».

Il se tourne dans ma direction, m'offrant la vue de son visage joliment tacheté. Il glisse sa main libre dans sa chevelure ondulée qui reluit sous le crépuscule, la ramenant lentement en arrière. Il me dit alors :

— Que voulez-vous savoir ?

— Comment m'en débarrasser, lançai-je, de but en blanc.

— Ces enfants vous suivent ?

— Depuis mes sept ans... J'ai eu le malheur de les faire entrer chez moi. Je... Rah ! Vous devez me prendre pour une dingue !

Je pose mon gobelet de café, de peur de le jeter au sol, prise de folie. J'ai pas envie de me faire remarquer, mais tous ces souvenirs m'empoisonnent et me rongent. J'accroche mes mains à mes cheveux, tirant sur mes racines dans l'espoir de me calmer. À mes côtés, Lehb ne bouge pas. Il m'observe en biais, tâtant son menton de façon méditative. J'ai l'air ridicule... Pourquoi suis-je venue à ce rendez-vous ?

— Sachez que la folie vit en chacun de nous. Un fou n'en est un que lorsqu'il est persuadé de ne pas en être. En l'occurrence, vous n'êtes pas folle.

Lentement, il se rapproche de moi. Ma respiration se bloque devant notre proximité.

— Je vous crois, car comme vous le savez, j'ai déjà croisé des gens ayant rencontré ces enfants aux yeux noirs. Leurs témoignages m'ont aidé à monter un pan de leur dossier. Or, j'ai quelques lacunes, je ne suis pas sorcier. Ce que je sais, néanmoins, c'est que peu d'enfants ont survécu après les avoir fait entrer chez eux.

— Qu'est-ce que ça signifie ? Pourquoi moi et pas les autres ? Pourquoi suis-je la seule à les voir ?

—Si vous voulez mon avis, la réponse que vous cherchez se cache probablement dans les méandres de votre vie, de votre existence même. La vérité est le point faible des êtres surnaturels.

La vérité ? Que voulait-il dire par là ? Quelle vérité ?

— Trouvez votre vérité et vous saurez comment prendre le dessus sur ces enfants.

Sur ces mots nébuleux, l'écrivain se lève en époussetant son jean brut. Son élégante silhouette s'éloigne alors, me laissant littéralement en plan. Non, je refuse qu'il parte ! Désespérément, je m'élance du banc pour le rattraper.

— Attendez ! Où est-ce que vous allez ?

— Je dois m'en aller, j'ai à faire. Nous nous reverrons, Sephora.

Sa voix me transperce. Abêtie, je le laisse partir, le regardant rouler des épaules jusqu'à ce qu'il disparaisse derrière le parking entouré d'arbres, en contre-bas. Il ose m'abandonner comme ça, dans le flou ? Dans la fange de l'incompréhension ? Je ne sais même pas par où commencer, ni même ce que je dois faire. Je suis perdue. Or, un fait soudain m'interroge...

Comment connaît-il mon prénom ?

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro