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𝐄 𝐏 𝐈 𝐒 𝐎 𝐃 𝐄 - 08 : Secrets en Sous-Main 1/3 ✔️

Cette nuit, Jaya s'était détraquée à coups d'insomnies, ne trouvant tout simplement pas le sommeil après l'excitation de ces découvertes. Le Risen et Vadim hantaient son esprit, chacun à leur manière. Le premier, tantôt fascinant, tantôt effrayant, représentait l'incarnation même de la nouveauté, tandis que le second, même taciturne, lui avait offert le plus beau des paysages.

Oui... Jaya avait réalisé un rêve d'enfant, malgré la peur et l'appréhension qui l'avaient accompagnée. Elle s'était revue à l'âge tendre de cinq ans, lorsque sa mère lui racontait des histoires féeriques, les yeux brillants.

Elle l'avait en quelque sorte retrouvée chez Vadim...

Ce secret entre eux, cette flamme qu'il avait fait naître dans ses mains... Sous cette lumière, elle l'avait clairement vu. Jaya avait vu son véritable visage et il était loin de tout ce qu'elle avait pu imaginer. Il était une âme déchirée possédée par un animal sauvage. Si intimidante de l'extérieur, mais si tendre de l'intérieur.

Lorsqu'elle y songeait, elle se sentait toute drôle. Comment pouvait-elle ressentir de tels sentiments alors qu'elle le détestait, peu de temps auparavant ? Cela la désorientait, la plongeant dans un abîme de réflexions sans fin. Que lui avait-il donc fait pour qu'elle commence à apprécier sa présence à ce point ?

La jeune femme n'oubliait rien de son passé, il restait ancré en elle, mais... Et si le futur n'était finalement pas aussi sombre ? Et si cette prison à perpétuité évoluait vers une vie magique ? Oui, Jaya croyait en la magie. Elle y avait toujours cru et aujourd'hui, elle en avait la preuve formelle.

Rien tout cela n'était des histoires.

Une semaine s'était écoulée. Par un après-midi grisâtre, alors que le Beffroi respirait calmement après la tempête, Jaya décida de se rendre dans les sources chaudes. Elle espérait ainsi bénéficier d'un peu de chaleur, si le lieu était désert. Les allées de roches de la tour étaient parfois glacées quand le soleil se faisait rare. Portant d'un long et élégant peignoir de satin à son bras comme change, elle priait pour ne croiser personne sur son chemin, surtout pas les Blanchecombe.

Ce n'était pas vraiment une tenue à montrer.

Cependant, dès qu'elle arriva en bas du hall, la belle brune fut prise de court par des voix émanant de l'extérieur. Quel embarras d'être ainsi surprise avec cet accoutrement à la main ! Jaya se mit alors à réfléchir à toute vitesse. Heureusement, le soubassement de l'escalier central était partiellement dissimulé par des grilles de cuivre robustes qui maintenaient l'élégante architecture des marches. Sans plus tarder, elle se précipita derrière l'une d'entre elles, dans le recoin le plus sombre, afin de passer inaperçue.

En regardant plus attentivement à travers la grille, Jaya en reconnut un formellement : le Seigneur Byron.

Ce dernier était accompagné d'un homme âgé au visage orné d'une barbe grise hirsute. Sa tunique religieuse et sa mitre satinée sertie de pierres précieuses ne laissaient planer aucun doute sur son rang : c'était l'archevêque de Cassandore, une haute figure du Haut Conseil Ymosien. Que pouvait-il bien faire ici, au Beffroi ? Aucun des deux hommes ne sembla remarquer la présence de Jaya, qui se trouvait là, témoin involontaire de leur conversation.

— Où en sont les interrogatoires, Sire Byron ?

— Toujours au point mort. Ces hommes de Starania ont visiblement été formés pour supporter la plus solides des pressions. C'est fâcheux, car le temps nous manque. Nous n'avons guère le loisir de continuer à nous amuser avec ces prisonniers.

— Il faut savoir prendre les choses avec patience, parfois. Savoir demander à Ymos l'aide que nous désirons, afin d'apaiser les conflits.

— Père Thésélius, je vous remercie de votre immense sagesse, mais la patience n'est pas recommandée lors des temps de guerre. Aucun conflit ne pourra être réglé si nous ne faisons pas comprendre à l'ennemi que nous ne nous laisserons pas faire. J'ai voulu aborder la chose calmement et lui offrir mon aide, afin de le rallier plus facilement à notre régime, sans succès. Notre proposition de partage des ressources n'a pas été acceptée par le roi Kyos, il a préféré rester borné sur son droit de liberté, vautré avec paresse dans ses habitudes arriérées. Sauf qu'en faisant partie des limites territoriales de Cassandore, il se doit de se ranger ou de périr ! Il faut donc savoir prendre des risques si nous voulons protéger les terres qu'Ymos nous a offert, ainsi que s'accaparer les autres pour évoluer. Tout pour la cité, telle est ma devise. Les traditions désuètes d'indépendance sont arrivées à leur fin. Il faut laisser le présent naître et s'étendre sur Glascalia. Et pour cela, Cassandore est la plus en avance.

— Mon cher Byron, votre voyage sur le continent vous a dévasté...

— Non, mon père. Bien au contraire, il m'a fait réaliser à quel point nous sommes en retard sur le monde extérieur. D'autres voient une cité, moi je vois un empire. Si les autres terres ne veulent se ranger avec moi, ils devront en payer le prix fort. À commencer par Starania. Étant très croyants, nous pensons que ces hommes pourraient être plus sensibles à la parole de foi et ainsi, plus facile à amadouer en présence d'une figure religieuse.

— Et que voulez-vous que je fasse dans cette sombre affaire ?

— Tentez de les raisonner par un concordat... Ou priez simplement pour leurs âmes infortunées.

Se ranger ou périr. Byron Blanchecombe souhaitait réellement envahir Starania pour perdurer et imposer sa modernité ? Était-ce ce que Jaya venait de comprendre ? Starania n'était donc pas celle qui avait frappé la première, mais bien Cassandore. Les Blanchecombe étaient les attaquants contrairement ce qui avait été dit à leur retour du combat. La jeune femme était déconcertée, peinée et terrifiée. Fort de ses améliorations apportées du continent, Byron voulait élargir son royaume et faire adopter à tous son point de vue concernant leur mode de vie hérité des anciens.

Vivre dans la poussière était devenu insupportable pour ce grand roi. Les habitants du continent semblaient avoir compris avant tout le monde l'importance de l'innovation pour améliorer la qualité de vie. Leurs inventions extraordinaires telles que les ascenseurs et les véhicules à moteurs témoignaient de leur avance, alors que les Glascales, enracinés dans leurs pratiques archaïques, perduraient dans cette neige toxique. Il était temps pour l'île de se renouveler et de recouvrer la beauté et l'éclat.

Jaya déglutit. C'était totalement immoral. Jamais il ne pourrait forcer Glascalia à suivre son mouvement. Ils avaient toujours vécu ainsi, pourquoi changer ?

Pourrait-il en faire de même avec Alhora ?

Le seigneur Byron s'engouffra sans hésiter dans l'alcôve menant aux sources sous la tour, suivi avec peine par le père Thésélius. Où allaient-ils ? Les paroles entendues ne présageaient rien de bon et la tension oppressante saisit Jaya à la gorge. Quelque chose se tramait dans les sous-sols de la famille Blanchecombe. Elle les épia jusqu'à ce qu'ils bifurquent à droite, en sens opposé des sources. Après un dernier regard circulaire, Byron posa ses mains sur les trois gravures en soleil creusées dans la roche du mur.

Il actionna la première du haut, celle du bas à droite, puis la gauche. Soudain, un bruit sourd se fit entendre avant qu'un verrou ne s'ouvre sur une porte invisible où ils disparurent.

Une entrée dérobée ? Qui menait où ?

S'aplatissant dans sa cachette, Jaya était perdue, ne sachant quoi faire. Elle était grignotée par l'envie de savoir plus. Pourquoi résister ? Tout ceci lui paraissait trop grave. Si Byron était capable de faire ainsi pour Starania, il pourrait en être de même pour Alhora si son père refusait d'adopter une once de modernité. Ses doigts hésitants retracèrent les mouvements de son beau-père.

Celui du haut... celui du bas à droite... puis le gauche.

Un cliquetis sourd la fit sursauter lorsque la fente s'ouvrit dans le mur. Que devait-elle faire à présent ? Et si elle se faisait prendre, que penserait le seigneur Byron d'elle ? Et que dirait-il ? Ou pire... que lui ferait-il ? Elle ne pouvait pas se mêler des affaires officieuses des Blanchecombe, cela pourrait lui causer de sérieux ennuis.

En tant que princesse, cela ne la regardait tout simplement pas...

Seulement... Jaya tremblait à l'idée de savoir où menait cet antre, qu'est-ce qu'ils comptaient faire là-bas, et pourquoi cette machination clandestine lui semblait si dangereuse. La curiosité était un vilain défaut, mais elle n'en avait cure.

Sa main peu assurée poussa la fausse porte, révélant un espace sombre qui descendait dans les entrailles du Beffroi. Chaque jour, elle découvrait de nouveaux endroits, ici, mais celui-ci était à la fois incroyable et inquiétant. Un escalier taillé dans la pierre s'offrait à elle, et bien que l'incertitude la taraudait, elle fit preuve de courage en s'engageant dans le tunnel, la gorge serrée. L'obscurité était totale, l'air imbibé d'une humidité écoeurante. L'héritière avançait avec précaution, évitant de faire le moindre bruit pour ne pas signaler sa présence. Au fur et à mesure qu'elle descendait, des sons étranges émergeaient, comme des murmures portés par l'horizon.

En contrebas, un faisceau de lumière très pauvre lui indiqua du mouvement. Elle continua prudemment, lorsque des cris lui parvinrent avec exactitude.

De terribles cris de douleur...

S'arrêtant juste en bas des marches de ce qu'elle pensait être le centre de la terre, Jaya glissa un œil de l'autre côté du mur avant de se pétrifier.

Quel était cet endroit horrible ?

Une lanterne à peine allumée révélait ce qui semblait être une salle de torture, où trois hommes étaient enchaînés par de lourdes chaînes. Torse nu, ils étaient sales, affamés et tordus de douleur. Des larmes avaient creusé des sillons sur leurs joues émaciées, brunies de crasse et de sang séché.

Les prisonniers staraniens...

Face à eux se dressait le seigneur Byron, impassible, en compagnie de l'archevêque qui serrait son manuscrit sacré entre ses mains, perturbé par la scène qui se déroulait sous ses yeux.

Soudain, sortant de derrière les trois prisonniers, une troisième silhouette se faufila. Tel un corbeau maléfique enroulé d'une cape, Horngrad se dévoila. Son visage fermé portait un dégoût inhumain à l'égard de ces hommes retenus comme des animaux. Dans sa main, il fit claquer un grand fouet recouvert d'un liquide poisseux.

Jaya avait peur de savoir ce que c'était réellement...

— Avez-vous décidé de coopérer, messieurs ? lança Byron, d'une voix qui résonna dans la totalité des esprits.

Les trois hommes gardèrent un silence affligeant qui déplut fortement au roi.

— Je vous laisse une dernière chance. Je ne demande pas grand chose, simplement quelques informations sur les manœuvres de votre roi et son armée. Comptent-t-ils se rendre aux frontières pour faire barrage ? Ou une invasion à l'égard de Cassandore est-elle en cours de parlement ?

Les captifs s'échangèrent un regard chargé de sens ; nul mot ne franchit leurs lèvres. D'un soupir résigné, Byron lança un regard appuyé à son bras-droit qui comprit instantanément ce qu'il devait faire. Ce dernier se positionna derrière eux et brandit son fouet avant de l'abattre avec une violence inouïe sur leurs dos dénudés. Les cris déchirants de douleur qui en découlèrent glacèrent le sang de Jaya, qui bondissait à chaque impact.

Sous les morsures du fouet, les chairs s'ouvraient tels des fruits trop mûrs déversant leur suc.

Cette atrocité atteignait des sommets insoutenables. La bile remontait aux amygdales de la princesse qui n'osait même plus regarder. Se pressant contre le mur, elle fuyait lâchement la scène. Comment pouvait-on infliger une telle torture à des êtres humains ? Byron Blanchecombe était un tyran impitoyable, prêt à tout pour arriver à ses fins. Elle avait toujours su qu'il était hypocrite et sévère, avec ses sourires préfabriqués, mais elle n'aurait jamais imaginé qu'il puisse être à ce point cruel.

Lorsque les coups s'arrêtèrent, seuls les lamentions restaient. La voix de l'archevêque les seconda :

— Mes frères, pour l'amour d'Ymos, veuillez prendre en considération les demandes du roi. Puisse Ymos vous guider vers la rédemption et vous ouvrir les yeux sur le futur. Il en sera bien mieux pour votre santé et celle de votre nation. En tant que seigneur de l'ordre, de la connaissance et de la discipline, Ymos peut parfois se montrer sévère envers les dissidents à son régime spirituel. Ne provoquez pas sa colère, je vous en prie. Une alliance saine dans un parti sain, c'est tout ce que souhaite notre dieu et son vœu de paix.

Le flottement était lourd, l'air irrespirable par l'électricité palpable des lieux. L'un des malheureux se décida enfin à briser le silence, reprenant bravoure au nom de ses pairs.

— Nul ne sert de parader, mon père... Nous avons un devoir... un secret à maintenir pour sauver nos terres... et nos familles... Starania ne cédera pas... Jamais...

C'était dit... ils ne coopèreraient pas. La colère fit trembler le poing de Byron. Son visage se déforma de rage.

— Très bien... Dans ce cas, vous avez fait votre choix, messieurs. J'ai fais le mien. Si vous ne voulez pas coopérer, alors vous ne me servez à rien. Horngrad, Père Thésélius, demain sera prononcée l'exécution de ces hommes. Faites le nécessaire aux préparatifs. Je veux que leurs corps se balancent au bout d'une corde, en place publique. Et... Horngrad, n'oubliez pas de ramener les têtes. Nous les enverrons au roi Kyos afin de lui faire passer un message.

Horngrad étira un sourire malveillant. Voilà quelque chose qui lui plaisait, un peu d'action. Il commençait à s'ennuyer à force de tenir compagnie à ces trois chiens. Or, pour Jaya, s'en était trop. Ses jambes ne l'écoutaient plus et sa raison lui commanda de fuir loin de cette geôle de l'horreur.

Jaya avait pris la décision de partir en ville pour se dégourdir les jambes et prendre un peu de recul. Après ce qu'elle venait de voir au Beffroi, elle avait besoin d'un grand bol d'air frais pour se ressourcer. Elle n'avait même plus envie d'y retourner, sachant que trois hommes y étaient emprisonnés et allaient être exécutés au lever du soleil. Cette idée lui portait au cœur. Elle avait entendu dire que les Blanchecombe étaient des hommes d'une cruauté sans pareille, mais elle ne s'attendait pas à en voir l'ampleur de ses propres yeux.

Les gardes, informés du message, avançaient de manière déterminée en formations bien organisées en direction du Temple Ymosien du Haut Conseil, où ils avaient pour mission de rassembler les évêques suffragants de l'archevêque Thésélius afin qu'ils récitent des prières saints lors de l'événement, prévu pour le lendemain. L'édifice, majestueusement dressé sur les hauteurs est de la ville, était visible depuis le centre-ville, malgré le nombre important d'habitations. D'impressionnantes colonnes soutenaient un toit immense et pointu, veillé par une gigantesque statue en pierre représentant un homme barbu vêtu d'une toge. Les mains de ce dernier étaient prises d'une faux cristalline, semblable à de la glace, et sa tête était couronnée de stalactites.

Dans le symbolisme glascale, Ymos était représenté à l'image de ce vieux père protégeant ses fidèles de sa faux divine. On racontait que c'était avec elle qu'il coupait le fil de vie des impies. Il y avait la même statue à Alhora, dans l'Église Ymosienne du Haut Conseil religieux. C'était un emblème de ce culte.

Les yeux de Jaya se détournèrent de ce lieu attisant son ennui lorsqu'un tollé attira son attention. À quelques mètres d'elle, des cris s'élevaient dans l'allée commerciale. Des gardes patibulaires siégeaient près du stand du vendeur de coquillages.

— Monsieur Jackar, par ordre du roi, tous les commerces doivent fermer à ce jour pour l'exécution des prisonniers staraniens. Vous n'avez pas le choix d'obéir.

— Ayez pitié, je ne peux pas me permettre de perdre une journée de travail. Je suis un pauvre vieil homme, messieurs... Je vous en prie.

— Aucune discussion ne sera possible, remballez-moi cet attirail !

Le garde frappa un coup violent dans la table tordue du commerçant qui cria lorsque ses articles tombèrent au sol. Des coquillages se brisèrent, comme le cœur du vieillard.

— Bande de criminels ! N'avez-vous donc pas de cœur ? clama le marchand en les pointant du doigt.

— Silence, vieil homme ! Ayez du respect pour vos supérieurs !

L'un d'eux frappa un coup de matraque dans les mollets de Monsieur Jackar. Celui-ci, faible de ses jambes maigres, chuta aussitôt sur le chemin de terre. Il hurlait sa douleur tandis que le deuxième garde rejoignait son comparse contre l'homme âgé. Personne autour ne bougeait, pétrifiés, regardant la douleur de ce malheureux sans se dresser devant l'autorité, par peur de récolter le même traitement.

Le fils de Monsieur Jackar arriva au même moment et, le sang ne faisant qu'un tour, se rua sur les gardes pour les dégager de son vieux père. Il reçut lui aussi un coup de bâton en plein visage.

Cette fois, Jaya ne pouvait rester là sans rien faire. D'un cri, elle courut vers le rassemblement.

— Arrêtez ! Arrêtez tout de suite ! Vous allez le tuer !

La jeune femme s'accrocha au bras du soldat et s'y pendit de tout son poids, si bien qu'il ne parvint pas à s'en défaire même lorsqu'il tenta de la repousser. Sa voix ne portait pas, ces hommes n'en avaient rien à faire.

— Reculez ! Ne vous mêlez pas de ça !

Cette fois, il réussit à lui faire lâcher prise. Elle valsa en arrière, mais ne comptait pas abandonner ici.

— Arrêtez ça, tout de suite ! C'est un ordre de la princesse Jaya !

Ces mots apportèrent les yeux ronds de l'assemblée. Même le vieillard, meurtri et roulé en boule, osa lever un œil sur elle. La princesse ? La fameuse épouse du Prince Vadim ? Que faisait-elle ici, mêlée à la plèbe ?

— Laissez ces hommes tranquilles !

— Votre altesse, mais qu'est-ce que vous faites ici, seule hors du Beffroi ?

— Ça ne vous regarde pas ! Je vous ordonne de laisser ces hommes !

— Nous devons faire respecter la loi imposée par le Seigneur Blanchecombe.

— En tabassant un vieil homme sans défense à coup de bâtons ? Vous appelez ça la loi ?

Débordante de rage, la jeune femme dépassa les deux soldats pris de court. Elle s'accroupit au chevet de Monsieur Jackar, dont les parties visibles du corps commençaient à bleuir. Jaya décocha un regard noir aux gardes qui l'entouraient, pendant que les villageois, guettant depuis leur porche, échangeaient des murmures de bouche à oreille.

— Je ne cautionne pas cette loi. Vous pouvez aller le dire au roi ou ses fils, ça m'est égal. Mais avec moi, cette loi immorale ne marche pas ! On ne résout pas les problèmes par la violence !

Le garde se mordit la lèvre de colère. Impossible pour eux de poursuivre leur travail avec cette empêcheuse de tourner en rond qui rôdait dans les parages. Autant battre en retraite ici, car ils avaient déjà enseigné la discipline à ce vieux contestataire. Prenant soin d'écraser un autre coquillage sous sa semelle, il s'éloigna avec les autres soldats royaux.

Sitôt fut-il tourné que la haine dans l'œil de Jaya vira en inquiétude à l'égard de Monsieur Jackar. Avec l'aide de son fils, elle l'aida à se redresser en position assise.

— Vous allez bien, monsieur ?

— Oh, mon dos... Ça pourrait aller mieux...

Malgré les bleus, l'homme hors d'âge était sain et sauf. Son fils, un quarantenaire au visage creusé par le sel de mer, porta un œil humide de reconnaissance envers la belle brune.

— Merci. Merci d'être intervenue... votre altesse.

— Je n'ai fais que mon devoir. Qu'est-ce qui leur a pris d'agir ainsi ? Qu'ont-ils donc contre les gens malheureux ?!

Jaya fulminait. Tout ça pour leur stupide histoire de pendaison ! Voyant très bien la détresse émotionnelle de cette jeune fille, Monsieur Jackar posa sa main sur la sienne pour la calmer.

— Ma chère enfant, vous ne pouvez corriger seule les erreurs des lois imposées par nos dirigeants. Il en est ainsi depuis des décennies. Cassandore possède des traditions autre qu'à Alhora... et l'autorité nous oblige à y céder.

— Je comprends bien, oui. Mais il n'y a personne pour les empêcher d'en venir à de telles extrémités, personne n'a bougé. Je ne peux tolérer cela, mon brave. C'est grâce au peuple qui cultive et la font vivre que Cassandore peut s'enorgueillir de nager dans le luxe et la beauté. Elle devrait respecter son peuple !

— Certes... mais, nous n'y pouvons rien. Nous ne pouvons que prier. Si vous le faites, vous aussi, il y aura peut-être quelqu'un qui entendra votre humble appel tout la haut et qui pourra nous aider. Même une petite prière suffit. On dit souvent que le fil du tapis ne voit pas son utilité dans le grand canevas du dessin. Pourtant, il est là, bien présent parmi les autres... et il compte, tout comme votre voix. Ymos est bon...

— Prier ne sert à rien s'il reste sourd. Les actes immédiats sont beaucoup plus efficaces, si vous voulez mon avis.

Quel caractère ! L'homme n'osa pas répondre face à la prestance involontaire de cette jeune tête brûlée aux idées perchées. Malgré tout, il sentait un cœur bon et juste battre sous cette apparence dure.

Cette jeune fille ferait encore longtemps parler d'elle dans les rues modestes de Cassandore.

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