
𝐄 𝐏 𝐈 𝐒 𝐎 𝐃 𝐄 - 05 : Se Défendre Seule 1/4 ✔️
Le soleil nouveau-né illuminait les campagnes fertiles. Sous la houlette de leur souverain, les troupes de Cassandore se préparaient à partir à la rencontre de Starania. Depuis la colline de la base militaire, les soldats s'activaient pour charger les équipements qui les conduiraient à travers champs et vallées jusqu'à leur destination. Cependant, Jaya, épuisée par les événements de la veille, n'avait pu accompagner le Seigneur Byron et ses fils hors de la tour. Leftheris lui avait offert un baise-main en guise d'au-revoir, elle espérait que cela ne soit pas un adieu. Ils ne reviendraient pas avant au moins une semaine, le temps d'arranger ou d'aggraver les choses.
Une semaine à rester cloîtrée au Beffroi. Une semaine à vivre seule auprès de Vadim. Elle ignorait si elle en serait capable.
Heureusement, elle pouvait compter sur le soutien de Varvara.
Les cinq premiers jours se passèrent sans encombre. Elle n'avait croisé son mari que furtivement au coin de l'escalier. Ils ne s'étaient plus adressé la parole depuis les thermes. Le simple fait de le voir l'insupportait. Elle ne voulait pas le confronter à nouveau pour parler de pureté ou même de Tiordan, cela ne le concernait pas. Pourtant, d'un autre côté, elle se sentait bête d'avoir lâché cette bombe entre eux. Elle s'était mise délibérément en danger en évoquant de tels propos, sachant pertinemment qu'à son âge et à son rang, elle n'était autorisée à connaître que la chair de son époux.
Vadim avait enfin sa revanche. Il avait attendu, scruté la moindre faille, et voilà qu'elle s'offrait à lui. Et il ne se gênerait pas pour s'en servir à l'attaque. Jaya allait payer pour l'avoir traité avec tant de froideur, pour l'avoir repoussé encore et encore, sans une once de remords. Oui... Il le lui avait promis, dans le traîneau : elle regretterait. Et maintenant, face à l'implacable vérité, elle comprenait. Peut-être n'aurait-elle pas dû parler si librement...
Mais cela avait été plus fort qu'elle...
Lorsqu'elle fermait les yeux, elle avait encore la sensation humiliante de ses doigts crispés sur sa mâchoire. Celle empoisonnée de ses lèvres sur sa joue.
Elle ne pouvait lui pardonner.
La nuit, elle dormait seule dans sa chambre et c'était tant mieux. Vadim avait le respect de la laisser tranquille, sachant pertinemment qu'il ne pourrait rien obtenir d'elle pour l'instant. Cela lui permettait de s'adonner à des sorties nocturnes. Jaya le voyait par sa fenêtre partir en douce à chaque soir vers les coups de minuit. Que faisait-il donc ? Les paroles de la villageoise et de Leftheris faisaient échos en elle contre sa volonté...
Et si les rumeurs étaient vraies ? Et si Vadim se mêlait aux créatures de la nuit ? Pour quelle raison le ferait-il ? Dans quel but ? Et si sa simple présence portait réellement malheur à ceux qui le côtoyaient ? Cette hypothèse expliquerait pourquoi la vie de Jaya se déchirait sous ses yeux depuis que Vadim y était entré.
Elle était perplexe et une partie de son esprit, conditionné par son éducation stricte sur les lois interdites, peinait à le croire. Cependant, l'autre partie lui murmurait que ces rumeurs pouvaient bien contenir une certaine part de vérité... Sinon, pourquoi Vadim s'éclipserait-il en pleine nuit sans prévenir personne ?
Elle avait beau se creuser la tête, elle n'arrivait pas à démêler un seul fil de logique. Elle n'avait donc que deux solutions : le suivre pour découvrir où il allait, ou le confronter à ses agissements. Il allait devoir parler, car elle ne supporterait pas d'être assimilée à un homme lié à de telles atrocités.
La seconde option serait la bonne pour commencer.
Avec une détermination sans faille, Jaya se dirigea vers le camp d'entraînement, un bel après-midi. Elle savait que Vadim y serait, comme chaque jour jusqu'au coucher du soleil. L'apprentissage n'avait pas encore repris, les soldats étaient en pause, dispersés un peu partout dans la cour immense. Les yeux glaciaux de la princesse balayèrent la zone, cherchant un visage balafré sans succès. Où était-il ?
— Voyez-vous ça, la petite princesse d'Alhora se ramène encore sur notre terre...
La concernée fronça les sourcils de confusion à ces mots. Cette voix... Seule féminine de ce cirque masculin. Pivotant sur sa droite, Jaya rencontra Aube, assise sur le bord du muret de pierres, ses jambes, entourées d'un pantalon de toile, ballantes dans le vide.
— Nous étions si bien au soleil. Votre arrivée a amené le vent du nord, votre gracieuse altesse... Brrr... Un vrai froid de gargouille !
— Je vous demande pardon ?
Aube la narguait de son petit air supérieur. Jaya n'en revenait pas, quel outrageux comportement devant une princesse de son rang ! Les regards haineux de cette apprentie, la dernière fois, n'étaient donc pas suffisants ? Relevant le menton, elle se nippa d'un masque d'indifférence à son égard. La combattante insista, bondissant de son perchoir :
— L'air se raffermit drastiquement en votre présence. C'est profondément désagréable, si vous voulez mon avis... Vous devriez peut-être rentrer dans votre tour, hors des lieux qui ne vous sont pas autorisés. Vous êtes ici sur une terre de combattants, non sur votre territoire de mineurs de cristaux. Il serait dommage d'abîmer vos si jolies mains ou votre robe si élégante.
Lui demandait-elle catégoriquement de partir ? Jaya pensa tout d'abord à une plaisanterie, avant de déchanter lorsque Aube commença à rétrécir l'espace vitale les séparant, tournant lentement et sournoisement autour d'elle.
— Et vous, vous devriez songer à vous vêtir d'un autre ton en ma présence. Savez-vous à qui vous vous adressez ?
La voix de Jaya reflétait le volcan qui enflait en elle. Aube se gaussa à son nez, pas le moins du monde impressionnée.
— Évidemment. Maintenant, tout le monde sait qui vous êtes. La petite princesse ingénue venue d'un royaume à l'agonie pour se marier avec le cadet de la célèbre famille Blanchecombe. Mais moi, je me fous de toutes ces simagrées envers la noblesse. Je ne retiens qu'une chose...
Elle s'arrêta enfin face à la jolie brune, l'œil brillant de dédain.
— Alhora a profité du précieux patrimoine de Cassandore et vous, chère princesse, n'êtes ici que dans votre intérêt royal. Vous tentez d'impressionner Vadim avec votre beauté et vos fausses connaissances de la guerre...
— Impressionner Vadim ? J'ignore ce que vous voulez dire, mais je ne suis pas ici pour l'impressionner, bien au contraire. Et puis, ça ne vous regarde pas que je sache. De quel droit vous mêlez-vous des affaires des hautes familles ? Vous devriez songer à rester à votre place, mademoiselle, et à respecter la noblesse, si vous tenez à votre place dans l'armée.
Aube se moqua à gorge déployée, faisant davantage grandir la colère de Jaya. Leur échange houleux commençait à attirer l'attention. Des yeux curieux guettaient de loin.
— Quelle naïveté ! Vous n'avez aucun pouvoir ici. Ce n'est pas parce que vous couchez avec Vadim que vous faites partie de la famille Blanchecombe. Vous n'êtes rien à Cassandore.
— Je ne couche pas avec lui pour votre gouverne.
Un hoquet d'hilarité s'échappa à nouveau de la bouche mauvaise d'Aube.
— La reine des montagnes est encore vierge, voyez-vous ça. Si j'étais à votre place, je n'aurais pas attendu. Vadim déteste attendre ce genre de choses. Il aime les vraies femmes, celles qui prennent des risques avec lui.
— Vous semblez en savoir beaucoup sur les préférences de mon mari. Suis-je face à la jalousie, ou à une piètre ribaude de passage ?
Le visage de la combattante se durcit et blêmit, mais Jaya n'en avait cure. Si elle s'écoutait, elle la renverrait des soldats sans le moindre scrupule ! Si cette fille avait une dent contre elle, elle allait devoir se la limer rapidement si elle ne voulait pas avoir de problèmes. L'héritière ne tolérait pas une telle impertinence envers sa personne.
Autant partir à la recherche de Vadim afin d'écourter ce spectacle ridicule.
— Je vous propose un duel !
Jaya s'arrêta, figée devant l'énormité qu'elle venait d'entendre. Lentement, elle se retourna et gratifia Aube d'un œil hébété.
— Un duel ? Qu'est-ce que vous racontez ? Je n'ai pas le temps pour ça...
— Si vous en avez le courage, alhorienne, venez m'affronter. Une princesse connaissant si bien le domaine de la guerre comme vous doit savoir se battre, non ? À moins que vous soyez l'une de ces greluches fardées bien trop faibles et délicates pour oser lever le petit doigt.
Son air venimeux s'exposa par bravade. Aube ne respectait aucunement l'autorité, surtout pas venant de cette maudite étrangère. Jaya songea qu'elle mériterait une bonne remise à l'ordre. Or, elle ne savait pas se battre.
— Un duel, ici et maintenant. Juste vous et moi, princesse.
— Je n'ai pas le temps pour ces bêtises. Ça suffit !
— Vous vous dégonflez vite à Alhora, dites-moi... Je vous fait si peur que ça ?
Cette fois, la comédie avait assez duré. Elle ? Avoir peur de cette pouilleuse coureuse d'hommes ? Jamais de la vie ! Jaya en avait tué d'une flèche des bêtes bien plus dures qu'elle. D'un pivot, elle ne put retenir l'éruption sévissant en elle et désagrégeant chaque cellule de son corps. Le volcan des glaces explosa, brûla et noircit son cœur au point d'en oublier son noble rang et la raison pour laquelle elle était venue ici, à la base.
Si cette effrontée voulait la guerre, elle allait l'avoir ! Cassandore devrait la respecter autant qu'elle l'était à Alhora et cela n'aurait rien à voir avec les Blanchecombe. Elle ferait voir à ces insolents dans quel blizzard ardent elle avait grandi et s'était endurcie.
À commencer par cette très suffisante fille...
Aube saisit rapidement l'intention de Jaya et arbora un sourire satisfait tandis qu'elle défaisait l'enrubanné de sa robe crème pour dévoiler un long saroual soyeux, en dessous. Ainsi, la princesse serait en mesure de bouger avec plus d'aisance.
— Enfin un peu d'action. Voyons voir ce que vaut la nouvelle protégée des Blanchecombe.
Aube adopta une posture d'attaque face à son adversaire. Jaya ignorait comment s'y prendre, elle n'avait aucune expérience de combat, même si Tiordan lui avait montré quelques astuces pour survivre face à un animal sauvage agressif. Jouer de l'esquive était la clé pour perdurer. Elle devait suivre ces conseils jusqu'à ce que l'apprentie se fatigue et qu'elle puisse lui renvoyer ses coups.
Du moins, tenter de lui renvoyer...
Le pied de la combattante glissa légèrement en arrière, comme si elle voulait se stabiliser pour mieux sauter. Autour d'elles, les soldats intéressés se rassemblèrent, assistant avec surprise ou enthousiasme à cet affrontement de dernière minute. Jaya essaya de les ignorer, régulant son souffle et son rythme cardiaque.
Enfin, Aube s'élança.
Ses mouvements étaient comme les bonds d'un cerf, alliant agilité et puissance. Le poing de l'assaillante filait telle une comète, manquant de peu Jaya qui se baissa promptement pour l'éviter. Le cœur de la princesse battait à tout rompre, refusant de se calmer. Le corps de la soldate virevolta au-dessus de sa tête, telle une danseuse, espérant l'atteindre d'un pied. Mais l'instinct de Jaya l'incita à se jeter en arrière, glissant sur son postérieur avant de se redresser, chancelante.
Ça allait trop vite...
La jeune héritière, à peine debout, subit son premier coup de plein fouet : un bouquet de phalanges dans l'estomac. Elle recula en gémissant. Un serpent de douleur s'insinua dans son abdomen et lui coupa le souffle. Avant qu'elle ne puisse s'en remettre, une cheville vint la faucher, la projetant sur les dalles tel un pantin désarticulé. Un râle étouffé mourut entre ses dents.
— Déjà battue, princesse ?
La souffrance affectait l'entièreté de son corps. Jaya exulta une quinte de toux, étranglée par sa chute. Elle n'était pas habituée à tant de violence. Aube la narguait, la regardant de haut en jonglant d'un pied à l'autre en souriant. Les rires et les voix des soldats se mélangeaient aux ricanements de son adversaire. Elle ne pouvait pas abandonner... Ce serait une honte pour le nom des Northwall.
Lentement, reprenant un filet d'air douloureux, Jaya se releva avec difficulté. Ses jambes tremblaient, menaçant de lâcher sous son poids, mais la jeune femme le leur interdisait. Pendant ce temps, Aube se délectait de voir sa victime s'épuiser lentement. Avec un grand sourire, elle revint à l'assaut. La tension s'ajouta au corps de la belle brune, plus glaciale que la mort elle-même.
Aube tenta de lui faire perdre l'équilibre en la molestant sous la rage de ses poings, avant que son pied chaussé de botte ne vienne la repousser en pleine poitrine. Le dos de Jaya s'écrasa brutalement contre un abri de bois d'où tombèrent des armes d'entraînement. Poignards, flèches et autres épées s'éparpillèrent autour d'elle dans un vacarme métallique.
À bout de souffle et littéralement épuisée, Jaya ne pouvait plus continuer. Son esprit criait à l'abandon. Pourquoi avait-elle succombé à la provocation ? Pourquoi avait-elle été si imprudente et confiante ? Chaque inspiration était de plus en plus difficile, la jeune femme avait l'impression de perdre conscience à chaque seconde. Aube, quant à elle, chargea de nouveau, poussant un cri de guerre qui résonnait comme une sentence. C'était le dernier. Si elle ne réagissait pas, elle ne se relèverait pas.
Elle devait reprendre ses esprits et agir au plus vite.
Comme frappée par un éclair d'agilité, l'héritière bondit sur sa gauche, échappant ainsi à sa violente rivale. Ses réflexes la devancèrent. Son corps frêle roula avec une dextérité qu'elle ignorait posséder, pour saisir une arbalète tombée peu de temps auparavant de son socle.
Jaya pointa l'arbalète vers Aube qui se figea dans son élan. Pantelante, ses longs cheveux lisses coulant sur la moitié de son visage, la princesse la foudroya des yeux. Si cette traînée faisait le moindre geste, elle n'hésiterait pas à tirer. À cette distance, elle serait aussi facile à abattre qu'un wolpertinger blessé.
— Qu'est-ce qui se passe, ici ?
Un rugissement retentit, faisant taire la cohue. L'œil trouble de Jaya ne distinguait que des ombres, mais elle réagit rapidement lorsque Vadim entra en scène. Lui qui pensait surprendre deux soldats immatures se chamaillant pour une histoire de force, il fut grandement surpris de voir son épouse au milieu de l'arène. Son premier regard fut pour elle. Du choc à la colère, il mua vers l'urgence et la précipitation.
Il ne fallut qu'une seconde à Vadim pour arriver à sa hauteur et poser sa main sur l'arme.
— Tout doux... Baissez ça, Jaya...
Aube la toisa avec un mépris non dissimulé, comme si elle n'était qu'un animal sauvage se débattant dans sa cage. Un silence ardent s'installa. Pourquoi continuer à se donner ainsi en spectacle ?
C'était terminé.
Jaya baissa son arbalète, l'arrachant d'un geste vif à la poigne de Vadim. Son ultime regard alla à Aube.
— Tu as gagné. Je ne sais peut-être pas me battre... mais je sais tirer.
Levant à nouveau son arbalète sous le nez de son époux, Jaya tira une flèche au-dessus des têtes. La pointe siffla et fila pour atteindre la corde tenant un pot de fleurs en hauteur, accroché sur les auvents. L'objet se détacha et tomba lourdement sur l'épaule d'Aube qui brailla de douleur. La poterie brisée avait transpercé sa peau mise à nue, une entaille sanglante y était apparue.
Tout le monde sursauta, bouche bée devant cet acte inattendu. Aube se tenait le bras, scrutant Jaya avec une haine palpable, qui était réciproque. Qu'ils continuaient tous de la toiser et de la juger, ça lui était égal ! Jaya ne pensa pas utile d'ajouter quoi que ce soit, ils n'en valaient pas la peine. Elle se débarrassa de l'arbalète avant de tourner les talons et de s'en aller.
Elle avait besoin d'être seule pour se calmer. Or, il ne passa pas dix secondes que les pas de Vadim s'enchaînèrent dans son dos.
— Jaya ! Attendez !
Malheureusement pour elle, avec ses longues jambes, il la rattrapa rapidement et la bloqua à la sortie du camp. L'héritière le pourfendit du regard.
— Laissez-moi passer ! lui clama-t-elle. Vous n'êtes même pas intervenu ! Votre rôle est de prendre la défense de votre épouse, vous qui êtes tant accroché au sens du « devoir conjugal » !
— D'après ce que j'ai eu le temps de voir, c'est vous qui aviez l'arme, très chère.
Il osait l'accuser ? Jaya nageait en pleine folie.
— Je n'y crois pas ! C'est moi qui ai cherché l'affrontement peut-être ? Sottise ! C'est elle qui m'a manqué de respect et qui m'a provoquée en duel !
— Et vous avez accepté. Lorsqu'on a des bras aussi frêles que les votre, il ne vaut mieux pas jouer les durs. Même si on sait tirer à l'arbalète.
Vadim secoua le biceps de sa femme d'un doigt, apportant de l'emphase à son discours. Ce geste condescendant l'irrita bien davantage.
— Très bien, si vous pensez que je suis la fautive et votre apprentie de malheur la victime, libre à vous ! Je n'en ai cure ! Quelle garde vos faveurs pour elle ! Je n'en ai pas besoin personnellement. J'ignore ce qu'il y a eu entre vous et cette harpie sournoise, mais elle semblait très bien vous connaître.
— Vous êtes jalouse ?
— Pas le moins du monde. J'ose vous rappeler que malgré notre union devant Ymos, nous n'avons rien d'un couple.
— C'est certain, surtout si un autre homme occupe constamment vos pensées.
Jaya se pétrifia, une sueur froide glissa sur sa colonne vertébrale. Tiordan... Non, elle ne devait pas prêter attention à ses provocations ! C'était pour l'atteindre. Insensible, elle frappa l'air de ses cheveux lorsqu'elle lui tourna le dos pour reprendre sa marche. Le feu monta à ses joues, rouge comme le sang bouillonnant dans ses veines. L'arrogant ricanement de Vadim s'éleva.
Qu'il continue de se moquer d'elle et de jouer avec ses nerfs. C'était lui qu'elle aurait dû viser...
— Puis-je savoir où vous avez appris à tirer comme ça, à l'arbalète ?
Interpellée par sa question, Jaya s'arrêta net pour lui offrir un quart de son profil. Il n'était qu'à quelques pas, les bras croisés et un sourire ravageur aux lèvres. Elle avait tellement envie de lui dire que c'était l'homme qu'elle aimait qui lui avait appris cela... Mais elle se garda et opta pour une voix glaciale.
— Pourquoi vous le dirais-je ?
— Votre justesse est incroyable. La flèche n'a touché que la corde, rien d'autre autour. C'est un exploit et je pense que ce n'était pas dû à la chance. Vous avez de l'expérience dans le domaine.
Il fit un pas dans sa direction sous son mutisme accusateur.
— Si cela vous intéresse, j'ai un marché à vous proposer. Apprenez-moi à tirer comme vous le faite et je vous apprendrai peut-être à vous battre.
Elle se tâta à deux fois avant de se récurer l'oreille, pensant avoir mal entendu. Sa mâchoire se décrocha contre son gré. Lui apprendre à se battre ? Ce n'était pas sérieux, n'est-ce pas ? Mais à voir son sourire ourlé de mystères, il semblait l'être.
Que nenni ! Elle n'était pas d'humeur à s'associer avec cet homme détestable. Une seule réponse, cinglante et trempée d'acide, lui vint à son égard.
— Lorsqu'on a des bras aussi musclés que les votre, on devrait savoir manier les armes, non ?
Vadim ne s'attendait pas à cette réponse et ricana jaune. Elle avait du cran pour un si petit bout de femme. Aucune ne lui avait jamais parlé de la sorte, de même qu'aucune n'avait jamais eu le courage de venir ici pour combattre Aube, qui était connue pour être une fière combattante –parfois plus que certains hommes. Il imputait cela à la jeunesse de Jaya, l'âge où l'on cherche à prouver sa valeur par des actes parfois stupides. L'immaturité guidait parfois sur des chemins biscornus.
Ou alors, elle était réellement courageuse.
Elle s'en alla pour de bon, le laissant mariner sur cette question. Elle n'avait plus rien à faire ici, ni avec Aube, ni avec Vadim...
Si elle devait apprendre à se défendre, elle le ferait seule.
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