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Pour toi, Fruit des Neiges 4/7 ✔️

Au même moment, déambulant dans le village, Jaya se fondait parmi les corps en pleine reconstruction. Ce matin-là, après une longue nuit éveillée dans les bras de Vadim, elle avait réfléchi : c'était décidé, elle voulait plus que tout quitter Cassandore et ne plus y revenir. Tant que son époux était là avec elle, elle aurait la force de relever la tête et d'affronter à nouveau la vie. Cette balade en ville était le premier pas vers la convalescence.

Sa dernière promenade dans le village.

Avant que Vadim ne parte vers les écuries royales, le départ avait été choisi : ils prendraient la route d'Alhora d'ici trois jours le temps de mettre le convoi en place et de prévenir Byron.

Jaya savait que son beau-père piquerait une crise en voyant son fils partir dans une telle situation de guerre encore si vive, mais Vadim lui avait confié tout son désintérêt par rapport à cela. Son père avait déjà bien assez dicté sa vie et ses choix, le prince ne lui laisserait plus jamais l'occasion de le faire. S'il devait dorénavant vivre dans la froideur mordante d'Alhora pour que sa femme retrouve sa joie de vivre, Vadim le ferait sans hésiter. Ensemble, ils réécriraient leur futur si tant rêvé, celui que la guerre et la violence avait tristement gommé.

Des échos de marteaux résonnaient à chaque coin de rue, ponctués d'ordres et d'algarades. Des hommes s'affairaient, suant pour reconstruire un semblant de vie dans le village de Cassandore, cruellement touché, contrairement aux hauteurs des quartiers nobles. Les stigmates du dernier assaut de Starania restaient gravés dans chaque brique, et certaines habitations demeuraient irrécupérables, effondrées sous l'explosion des grenades ennemies. Le sentiment de désolation et de tristesse qui planait parmi les cœurs parvint à Jaya qui se sentit emportée par la détresse du peuple.

Elle se souvenait de sa première balade sur le marché. Il y avait tant d'animation, de joie et de rires. Les marchands criaient en cœur pour happer le chaland sous un soleil radieux. Aujourd'hui, quasiment plus rien ne subsistait. Le désert était total. Plus d'enfants jouant à la balle, plus de rires, plus de soleil ; juste quelques braves personnes outrepassant le malheur pour déballer leurs miettes de marchandises en espérant gagner de quoi nourrir leur famille.

Le stand de coquillage était toujours là, courageusement.

S'y approchant, Jaya pensa à Monsieur Jackar, le gentil vendeur âgé. Elle espérait tant que lui et sa famille n'aient pas été touchés par l'invasion. Abaissée sous la table, elle voyait une silhouette fouiller dans de grosses boites en bois.

— Monsieur Jackar ?

Elle s'attendait à le voir surgir et lui offrir un sourire disgracieux comme il en avait l'habitude, mais derrière l'étal, seul son fils émergea, les mains chargées de coquillages. Le quadragénaire au visage buriné écarquilla de grands yeux. Voir la princesse ici était surprenant, cela faisait longtemps que personne ne l'avait aperçue, elle qui, pourtant, adorait flâner sur le marché. Les rumeurs concernant son mal-être étaient donc manifestement fondées, et il en était navré.

— Oh, bonjour, lui dit-elle. Vous allez bien ?

L'homme, touché que la princesse en personne s'inquiète pour lui, jeta rapidement ses coquillages sur la table avant de s'incliner respectueusement.

— Oui, ça peut aller, je vous remercie. J'espère que... vous aussi, votre altesse.

Elle baissa les yeux.

— On avance sans avoir le choix.

— Oui. Je... Je voulais vous présenter mes condoléances, ma famille et moi-même avons appris pour le petit prince. C'est un immense malheur.

Sa gorge se noua à ces mots. Jaya garda cependant la face en retenant ses larmes coincées au bord de ses yeux.

— Je vous remercie.

En parler était encore trop difficile, elle préféra changer de sujet. Il était hors de question de pleurer ici.

— Et votre père ? Comment va-t-il ?

Cette fois, ce fut le marchand qui baissa la tête avec chagrin. Comme un geste de respect, il retira son chapeau de paille qu'il frictionna entre ses mains.

— Mon... mon père est décédé dans la dernière attaque que Starania a perpétré sur la ville. Son pauvre cœur n'a pas supporté et... du coup, c'est moi qui reprend le flambeau en son honneur.

Jaya fut sincèrement peinée d'apprendre la disparition de Monsieur Jackar. Il était si aimable, si avenant. Elle ne conservait que de bons souvenirs en se remémorant le sourire radieux de ce vieil homme qui avait été le premier Cassandorien du peuple à l'accepter et à la respecter. C'était épouvantable, la guerre anéantissait des foyers, et elle en était douloureusement consciente.

— La revente de coquillages était toute sa vie. Il... Il aimait les gens, c'était un homme formidable et toujours très agréable. Il a toujours été présent pour sa famille et m'a appris les rouages du métier avec patience, ainsi que le devoir de travailler pour que notre famille ne manque de rien. C'est grâce à ses conseils si mes enfants peuvent manger aujourd'hui. Il a toujours été plus courageux que moi, malgré son âge. Je... Je ne pensais pas que ce serait si difficile sans lui...

Le fils de Monsieur Jackar essuya brièvement son œil où Jaya avait clairement vu le scintillement d'une larme. La peine de l'homme résonna en elle et, pensant pouvoir l'apaiser d'une once, Jaya chercha rapidement sous sa cape. Elle en sortit une bourse de gallons d'or qu'elle lui tendit. Le vendeur sursauta.

— Prenez, mon brave, cela pourra vous aider dans cette passe difficile.

— Oh non, non, non, votre altesse... Je ne peux pas accepter un tel cadeau.

— Je vous en prie, j'insiste. Perdre un parent, je connais cela aussi. Je sais comme c'est dur. C'est dans ces moments que l'on aimerait recevoir une aide quelconque pour nous remonter.

Une véritable larme glissa sur la joue tannée de l'homme qui finit par accepter.

— Merci, princesse... Merci infiniment pour votre bonté. Vous êtes un exemple pour nous tous, un exemple pour la royauté. Tenez, prenez cela en retour.

Il lui donna un coquillage, une jolie spirale ressemblant à la toute première qu'elle avait achetée ici, des mois auparavant. Elle l'observa avec nostalgie quand elle la prit entre ses doigts.

— Ce n'est pas grand chose, mais vous pourrez l'offrir au petit prince, si vous le souhaitez.

Ce serait une très belle idée, un si beau présent pour son petit garçon. Il aurait adoré les coquillages, elle en était persuadée. S'il avait survécu, elle aurait pu l'emmener sur la plage en chercher. Serrant la nacre sur son cœur, elle déplora la réalité. Elle ne pourrait jamais le faire, malheureusement. Retenant ses larmes à grande peine, Jaya préféra partir après avoir remercier le fils Jackar, avant d'exploser.

Autant retourner au Beffroi, cette promenade avait assez duré. Elle avait besoin d'être au calme.

Empruntant une petite ruelle isolée plus courte sur le retour, Jaya s'immobilisa au beau milieu pour relâcher une dose de son chagrin. Ses sanglots emplirent l'allée de moitié assombrie par les toitures en vis-à-vis. Ici, personne ne la verrait, personne ne remarquerait qu'elle n'était pas aussi courageuse que les gens du village le pensaient.

C'était bien trop difficile de l'être dans ces circonstances.

Essuyant ses yeux d'un revers de manche, Jaya renifla et lava d'un pouce tremblant la larme ayant coulé sur le coquillage encore présent dans sa paume. Danil l'aurait tant aimé... Elle irait le poser sur le mausolée avant de partir pour Alhora.

Dans son instant de réflexion, elle n'avait pas remarqué qu'une ombre se mouvait derrière elle.

Une silhouette enroulée d'une cape noire se faufila par derrière des tonneaux de graines, guettant la princesse d'un œil avisé. Elle était seule ; c'était parfait.

S'approchant prudemment sans faire le moindre bruit, le danger humain s'éleva derrière Jaya qui ne remarqua qu'au dernier moment ce corps menaçant se tenant dans son dos. Ses yeux larmoyants n'eurent le temps de le supplier qu'elle se retrouva saisie contre son gré par une poigne infernale.

La panique s'empara d'elle ; des flashs de son enlèvement par les staraniens lui revinrent et la poussèrent à hurler de peur.

— Non ! Lâchez-moi ! Pitié ! À l'aide !

Une main gantée se pressa à sa bouche pour l'empêcher de crier. À cette allure, elle allait ameuter tout le quartier. Autant se replier. Sans un mot, la silhouette emporta la jeune femme gesticulante vers une porte présente dans un renfoncement de la ruelle. Celle-ci, préalablement ouverte, déboulait sur ce qui semblait être un vieil appartement délabré et sombre.

La porte refermée, l'assaillant relâcha Jaya. Elle avait vécue le pire et refusait catégoriquement de revivre cela. C'était sa vie et ou la sienne ! Ce pourquoi, malgré l'importance de la silhouette lui faisant face, la brune n'attendit pas une seconde pour se défendre. Elle frappa son adversaire de toutes ses forces en criant pour qu'on la laisse partir. Ses poings s'agitaient devant le visage encapuchonné, sans le toucher. Il esquivait avec brio, finissant par saisir le poignet de la jeune sauvage en plein vol.

Elle saisit cette opportunité pour mettre à profit sa main libre, qu'elle projeta vigoureusement contre le menton de son adversaire. Ses phalanges serrées heurtèrent brutalement l'os, arrachant une plainte à son ravisseur qui recula par réflexe. Sa mâchoire était toute engourdie.

Or, avant qu'elle ne le contourne pour fuir, il se ressaisit et plaqua ses deux mains en avant.

— Jaya ! ... Arrête.

Dans sa frénésie assoiffée de liberté, Jaya peinait à respirer et à discerner son environnement. L'obscurité était si dense en ce lieu. Mais cette voix... Elle la reconnaîtrait entre mille. Le cœur trépidant, elle recula d'un pas. Les mains tendues dans sa direction, avec une lenteur calculée, attrapèrent la capuche qu'elles repoussèrent en arrière.

Ces cheveux bruns foncés en bataille, ces yeux presque noirs, ce visage ciselé...

— C'est moi, Jaya...

Oui, c'était lui... C'était vraiment lui.

— Tiordan... murmura-t-elle.

Un fardeau se leva de sa poitrine, apaisant ses craintes. Dans un sanglot, elle se précipita vers lui et se blottit dans ses bras qui se refermèrent sur elle. Cela faisait si longtemps qu'il ne l'avait pas touchée, si longtemps qu'il ne s'était pas approché d'elle d'aussi près. Si longtemps... qu'il n'avait pas humé son parfum. Tiordan ferma les yeux, enfouissant son nez au creux de son cou.

Enfin, il l'avait retrouvée.

— Tu n'as rien à craindre, Jaya. Tu es en sécurité.

Il se détacha d'elle, prenant délicatement son visage entre ses mains pour mieux la contempler. Les joues rougies par les larmes, elle était toujours d'une beauté saisissante. Dans un élan qu'il ne put contenir, Tiordan se laissa envahir par ses émotions et embrassa Jaya avec tout l'amour qu'il portait en lui. Celle-ci, d'abord figée par ces lèvres si tendres qu'elle connaissait pourtant si bien, finit par le repousser d'une main sur la poitrine. La confusion dans son regard lui fit prendre conscience de l'audace de son geste.

Elle était mariée maintenant... et elle ne l'aimait plus. Du moins, pas comme avant...

Et comme un idiot trop amoureux, il s'était laissé emporter et l'avait mise mal à l'aise...

Il recula de deux pas en déglutissant. La salive gluante eut du mal à passer dans sa gorge. Se pinçant les lèvres sur les sensations fantômes laissées durant ce court échange, Jaya se referma comme une huître. Le tremblement de ses mains et de sa voix revenait en force.

— Mais... Tiordan, qu'est-ce que tu fais là ?

— Rah ! Tu es vraiment un idiot, Tiordan ! J'ai tout vu par la fenêtre ! Tu aurais pu t'y prendre autrement, elle est terrifiée !

Agrippant l'attention du duo, une seconde voix émana des escaliers derrière eux. Une silhouette en descendit pour réprimander le jeune homme qui rétorqua sèchement :

— Ça va, qu'est-ce que tu voulais que je fasse ?

— J'sais pas, peut-être ne pas la capturer comme un sauvage et l'entraîner dans une maison délabrée sans explications ? On est pas à la chasse ici.

Cette voix aiguë... Cette silhouette élancée et athlétique. Jaya la reconnaissait. Ce ne fut que lorsqu'elle émergea complètement de l'obscurité, révélant deux nattes tressées avec nonchalance, que la princesse étouffa un cri mêlant surprise et joie.

— Symphorore ! C'est toi !

L'appelée, une lampe à huile à la main, lui offrit son plus beau sourire.

— Yep. Ça me fait plaisir de te revoir, Jaya.

Relâchant Tiordan, Jaya ensevelit son amie sous un déluge d'affection. Sa petite sœur de cœur, elle aussi, était vivante et apparemment en bonne santé. La princesse s'écarta légèrement pour mieux l'observer. Elle avait maigri depuis la dernière fois qu'elle l'avait vue. Ses joues, autrefois rondes, portaient les traces de la famine. Tout comme son frère, elle avait dû vivre des épreuves épouvantables.

— Je croyais ne plus jamais te revoir, Symphorore.

— C'est sympa, dis donc, ça montre comme tu as confiance en moi.

— Non, c'est que... Je n'arrive pas à y croire. Vous êtes là... tous les deux. Et tu l'as retrouvé, Symphorore. Tu n'as pas quitté Alhora pour rien.

— Oui. J'ai eu du mal, mais je l'ai fais. La joie se fane parfois, mais la famille reste. C'est une longue histoire, ce voyage, j'te raconterais. Et après Tiordan, c'est toi qu'on a cherché. Fallait bien ramener le troisième membre de notre groupe à la maison.

— Oui, ajouta le seul homme du trio. À vrai dire, ça fait des semaines qu'on te recherche plus... ardemment. Depuis l'invasion de Starania.

Il n'avait rien lâché depuis leurs retrouvailles. La revoir avait réveillé en lui l'envie de se battre et de traverser des montagnes, même s'il savait cela perdu d'avance.

— Tu as réussi à t'échapper...

— Évidemment, j'ai vu la ville en feu et le combat pour rejoindre la forêt. Je savais qu'on avait un petit camp établi dans une grotte en bordure de frontière, et j'y ai retrouvé Symphorore. Mais... c'était pas facile. On peut dire que le grand gars qui est venu te chercher à donner un étrange coup de pouce à tous les prisonniers, ce soir-là. Il a ouvert les portes sans même les toucher, toutes les portes de la prison. C'était... C'était ton mari, n'est-ce pas ?

Venant de lui, cette question la chamboula au point où elle dut tourner plusieurs fois sa langue dans sa bouche avant de répondre. Pourquoi ? Elle-même n'en savait rien. Aborder son mariage avec Tiordan lui faisait un drôle d'effet, bien plus désagréable qu'elle ne l'aurait imaginé. Celui-ci lui lançait un regard presque suppliant, comme s'il attendait de la voir contredire ses propos.

Or, en baissant la tête, elle ne pouvait se résoudre à mentir ou même éviter le sujet.

— Oui... C'était Vadim.

Cet homme effrayant était donc son époux... pensa Tiordan, avec aigreur. C'était un vrai monstre... Comment Jaya avait-elle pu s'enticher de lui ?

— Le fils Blanchecombe... songea Symphorore. On peut dire qu'il nous a sorti une franche épine du pied. Ça faisait des semaines qu'on essayait de trouver un moyen de libérer Tiordan de la prison staranienne. On peut donc le remercier, ce Vadim.

Tristement, Jaya baissa la tête. Le souvenir de ce jour dans cette prison la poignarda une infime seconde, mais bien assez pour réveiller la douleur. Tiordan remarqua rapidement son attitude, tandis que sa sœur allumait la lampe à huile. Il baissa les yeux sur le ventre de Jaya et vit que la bosse qu'elle portait n'était plus là. La jeune femme le remarqua et entoura son abdomen entre ses bras.

— J'attendais un enfant de lui. Mais... je l'ai perdu à cause des traitements qui m'ont été infligés à Starania.

Elle l'avait donc perdu ? Tiordan accueillit cette nouvelle avec une peine qu'il n'aurait jamais soupçonnée. Elle avait dû tellement souffrir, et encore maintenant, son timbre de voix tremblant laissait deviner son envie de fondre en larmes... Tout cela à cause de ce maudit Zeph. Si seulement il avait pu s'échapper de sa cellule, il aurait pu l'aider, terrasser ce général pervers et la libérer de ses griffes. Mais, mort de culpabilité, Tiordan déplorait son inutilité face à cette tragédie.

Il avait essayé et s'était brisé les ailes dans l'espoir de les lui donner. Mais un oiseau en cage n'avait aucune chance de fuir si la porte était fermée.

Une lumière rassurante naquit dans l'habitacle, une main se glissa sur l'épaule de Jaya. Symphorore lui offrit une moue pleine de compassion.

— Tiordan m'a expliqué. Je suis tellement désolée pour toi, Jaya... Tu as dû vivre un véritable enfer...

Si elle savait tous les détails... Symphorore ne s'en remettrait pas. Or, l'héritière n'eut le temps de lui répondre qu'un fracas fixa l'attention de tous sur la porte d'entrée. S'ouvrant sur une troisième silhouette encapuchonnée qui, relâchant un souffle fourbu, claqua brusquement le passage derrière elle.

— Eh bien, mes aïeux ! C'est un vrai parcours du combattant de se faufiler en ville sans être vu par les gardes. Y en a partout ! Mais, rassurez-vous, les amis...

Se dévêtant de sa cape, le jeune garçon sous le linge se retourna et brandit tout un sac de provisions.

— On va pouvoir passer à table ! ... Oups.

Soudain, il remarqua que ses compagnons n'étaient pas seuls. Et pas des moindres ! Comment oublier ce si beau visage ?

Jaya demeura bouche bée. Elle reconnaissait ce jeune garçon à la chevelure mi-longue et ébouriffée. Comment oublier la cavalcade qu'il leur avait imposée, à elle et Vadim ?

— Amaros ?

— Tiiiiiiiens, si c'est pas la charmante épouse de mon cousin. Je savais que vous viendriez. Princesse Jaya, votre humble serviteur que je suis vous salue avec grâce, fanfaronna-t-il en faisant une courbette.

Mais que faisait-il ici ? Ils l'avaient laissé près d'Alhora, il y a des mois de cela... Cependant, Jaya saisit rapidement la raison de sa présence en ces lieux. Amaros leur avait mentionné des compagnons avec qui il cheminait dans la montagne. Tiordan et Symphorore étaient ces fameux compagnons ! Si elle avait su cela auparavant, elle aurait pu prendre de leurs nouvelles et être rassurée, plutôt que de se ronger les sangs.

— Attend... Son mari est ton cousin ? s'insurgea Tiordan au nez d'Amaros.

— Eh bien, ouais...

— Wow, tu es noble, du coup... grimaça Symphorore, presque amusée. Quand on te connais pas, on ne pourrait pas le deviner... Même après, disons le.

— Tu nous a jamais dit que tu étais de famille avec les Blanchecombe !

— Nuance, face de bûcheron, je n'ai pas de lien de sang avec la famille Blanchecombe, la mère de Vadim était ma tante. On peut dire que j'ai hérité du sang le plus honnête.

La fille aux nattes ricana.

— Pas le plus riche, en tout cas...

— On t'a sonnée à toi, couette-couette ?

Symphorore lui tira la langue pour toute réponse. Ce gamin était barbant... Bondissant sur ses longues jambes graciles, Amaros reprit aussitôt :

— Mais tant que vous êtes là, princesse, c'est très bien ! J'ignorais quand votre arrivée allait se produire, donc je suis heureux que ce soit aujourd'hui.

— Mais de quoi parlez-vous ? Comment ça « mon arrivée » ?

Tirant un tabouret pour s'y asseoir, Amaros soupira.

— Vous attendiez un enfant de Vadim, n'est-ce pas ?

Décontenancée, Jaya se glaça à ces mots. Comment le savait-il ? Il n'était pas là quand elle en avait parlé.

— Et vous l'avez perdu ?

— Oui... mais...

— Je l'ai vu, il y a un peu plus d'un mois. Comme une sorte de flash où je voyais le souffle d'un bébé mourir et s'évaporer. Au début, je ne savais pas ce que cela signifiait, mais j'ai compris ensuite quand vous êtes apparue. Vous pleuriez. J'ai donc su que ce bébé était le vôtre.

Il avait eu une vision ? Jaya ne se souvenait plus de ce détail avant qu'il n'en reparle. Il était vrai que le Risen d'Amaros était différent de celui de Vadim. Il était ce que son époux avait nommé un « prophète » et pouvait donc voir le futur.

— Mais si nous sommes là aujourd'hui, princesse, c'est parce que j'ai vu autre chose il y a peu. Je me devais de vous prévenir. Vous ou Vadim, mais en l'occurrence, c'est tombé sur vous.

— Qu'est-ce que tu as vu ?

Amaros ferma les yeux une seconde, comme s'il se replongeait dans son subconscient, à la merci des images anarchiques fleurissant sous ses paupières.

— J'ai vu... des ailes de Risen... d'un bleu majestueux, mais gorgé de colère survoler la ville. Un homme de pierre qui détruisait tout son passage. Des cris, les pleurs d'une femme et beaucoup de sang. Tout était flou et je ne voyais pas bien ce qu'il se passait, mais j'ai reconnu trois choses formellement. Cassandore et son temple Ymosien... et vous, princesse. C'était vos pleurs que j'entendais.

Un frisson lui parcourut l'échine.

— C'est pourquoi nous sommes venus vous prévenir. Vous devez le dire à Vadim, car un très grand malheur va bientôt frapper Cassandore. C'est tout proche. Et je crains... que tout cela ait un rapport avec lui.

— Comment ça avec lui ? C'est...

— Jaya.

L'appelée sursauta sous la voix douce de Symphorore, son cœur s'accéléra dangereusement.

— Ne t'inquiète pas, Tiordan et moi connaissons le Risen. On ne le manie pas, mais nous ne le craignons pas. Amaros nous a dit pour ses pouvoirs, tu n'as pas lieu d'avoir peur d'en parler devant nous. Si ton mari le manie aussi, tu peux nous le dire.

— Avec ce qu'il a fait aux portes de la prison, je n'en ai aucun doute, pour ma part, assura le chasseur.

— Je n'ai pas peur du Risen, ce n'est pas une énergie négative, mais j'ai peur de ce qui pourrait encore arriver. Je dois partir tout de suite et prévenir Vadim !

Prenant tout le monde de court, Jaya s'élança vers la porte de sortie. Une main sur la poignée, elle sentit qu'on la retenait par l'autre main. Faisant volte-face, elle croisa le regard de Tiordan.

— On... on va occuper cet appartement abandonné pendant quelques temps. Si tu as besoin, tu sais où nous trouver. On sera toujours là pour toi, Jaya.

Tiordan... Il dégageait tant de sincérité. Cette sincérité qu'elle lui connaissait depuis toujours et qui le personnifiait. Même si son corps ne bougea pas, son âme embrassa la sienne. Il aurait presque pu la sentir, là, posée sur sa peau.

— Merci...

Le jeune chasseur, le cœur lourd, consentit finalement à la laisser partir. Sans un regard en arrière, Jaya était entièrement absorbée par sa mission. À bout de souffle, elle traversait la ville, ses pensées bouillonnant à toute allure. Il était possible que Vadim se trouve encore près des écuries royales ; si elle se hâtait, elle pourrait peut-être le rejoindre et tout lui expliquer. Le temps était compté, et tandis qu'elle progressait sur sa route folle, un cortège d'esclaves enchaînés traversa la large voie de terre claire, séparant le poste pénitencier du cœur du village. Jaya fut contrainte de s'arrêter, bloquée par leur passage.

Des soldats cassandoriens les menaient vers les différents points de rénovations, des cris menaçants plein la bouche. Regardant à travers eux afin de trouver une brèche où se glisser, Jaya croisa le regard d'un homme attaché à la chaîne humaine.

Elle se pétrifia, son cœur rata un battement.

Ce visage... ces yeux verts perforants. Non, ce n'était pas possible...

Zeph.

Il était toujours en vie... parmi les esclaves. Comment cela pouvait-il être ? N'aurait-il pas dû être exécuté en tant que haut dignitaire de l'armée ennemie, tout comme l'avait été la famille royale ? Sa barbe avait poussé, et il semblait affaibli par les sévices infligés par Cassandore. La nuit où il l'avait violée refaisait surface, provoquant en elle une nausée insoutenable. Son souffle se devint erratique tandis que cet homme ignoble la dévisageait. Il la fixait... sans relâche, la déshabillant du regard. Comme cette nuit... quand il lui avait volé sa vie.

Ce regard... Elle ne pouvait le supporter plus longtemps.

Courant à contre-courant, elle emprunta une autre rue et mit le cap sur le Beffroi en espérant croiser Vadim avant de perdre la raison.

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