
La Sélection des Soldats 3/7 🍋 ✔️
— Où est-ce qu'on va, à la fin ?
— Tu veux déjà rentrer au Beffroi ?
Jaya étira un sourire devant l'air l'espiègle de son mari, assis derrière elle.
— Non, mais on dirait bien qu'il va pleuvoir, et nous sommes attendus. J'ai dis à mon père que je rentrais vite. Tu imagines s'il s'inquiète pour moi ?
— Ils attendront un peu, ce n'est pas grave. Je veux te montrer quelque chose.
Jaya s'était mordu la lèvre lorsque Vadim lui avait révélé son désir de s'évader suite à leur petite aventure dans l'entrepôt. Il aurait dû rentrer sans tarder après la fin de l'entraînement pour faire son rapport à son père, mais au diable les responsabilités ! Il n'avait pas savouré un instant à lui depuis une éternité. Sans hésiter et ne craignant pas les nuages sombres venant du nord, Vadim avait emporté Jaya vers les collines verdoyantes sur le dos de son cheval, longeant les bois durant une vingtaine de minutes.
Il prétendait avoir une surprise pour elle et, folle de curiosité, Jaya avait insisté pour en connaître la source. Elle s'était attiré le rire de son mari ; quelle petite chose impatiente... et en effet, Jaya était très pressée de connaître l'intitulé de ce rendez-vous improvisé à la dernière minute. Vadim était toujours un homme plein de surprises, ce qui, inconsciemment, la faisait sourire comme une enfant.
Dans la forêt régnait un silence apaisant que seuls les pépiements des merles venaient troubler ; le nez en l'air, Jaya était impressionnée. Vadim l'emmenait dans un coin à l'opposé du sentier menant à la plage. Cette partie semblait plus vaste, luxuriante, sans limite et de divers chemins la traversaient. Les arbres étaient hauts et massifs, s'élevaient de tous côtés et un instant, Jaya pensa qu'ils étaient propices à la construction de cabanes. Chênes, châtaigniers, sapins, ifs et noisetiers se côtoyaient dans un foisonnement inextricable de verdure, entourant des grottes et des points d'eau, ainsi que de somptueuses clairières.
Ils s'engagèrent dans un espace un peu plus dégagé de fougères et de buissons de mûres sauvages. Une flore fleurissante, une faune abondante ; elle se surprit à sourire quand elle aperçut un lièvre se promenant au bord du ruisseau, cherchant à se désaltérer.
La nature du sud était splendide, plus verte et vivante que celle du nord. En voir un peu plus à chaque balade lui faisait toujours le même effet incroyable.
— Cette forêt est magnifique, susurra-t-elle, subjuguée.
— Oui, c'est par ici que l'on rejoint les plaines, il y a aussi un chemin pour atteindre le grand pont menant à l'autre bout de la falaise.
— C'est drôle, cette partie de la forêt me rappelle un peu celle qui est retranscrite dans le roman que je suis en train de lire.
— Ah oui ?
— Oui. Un très beau roman d'amour qui s'appelle le Feu et l'Eau.
Vadim grimaça ; la littérature féminine... Toujours une question d'amour à l'eau de rose, niais et mielleux. Déjà qu'il n'était pas très lecture, ce genre de bouquins le faisait doucement rire. Mais Jaya semblait les adorer, elle en avait une étagère pleine à craquer dans leur chambre.
— La forêt y est dépeinte comme grande, avec une arborescence très dense tout en restant lumineuse. Des petits oiseaux sur les branches des arbres, un air humide et une pluie en approche.
— En effet, c'est très ressemblant.
— L'héroïne, Mishana, y va pour méditer, c'est un peu comme son sanctuaire secret. Et c'est ici que le héros, Jon, la verra pour la première fois et en tombera fou amoureux.
— Très intéressant.
Jaya gloussa en repoussant sa tête contre l'épaule de Vadim pour le regarder.
— Je te connais plus habile pour mentir, habituellement. Je sais que ça t'ennuie.
— Non, tant que c'est toi qui raconte, ça ne m'ennuie pas.
Il écrasa un baiser sur sa tempe, puis sourit. Le rire cristallin de Jaya était la plus belle symphonie qui soit à ses oreilles.
— Et quand est-ce qu'on arrive ?
— C'est là, on y est presque.
Vadim fit arrêter le cheval avant de descendre pour aider à son tour Jaya. Elle ne comprenait pas, ils étaient en plein milieu d'un long sentier bordé de verdure semblant sans fin. Amusée par la situation, Jaya posa un œil de côté à son mari qui attachait sa monture à un arbre.
— Puis-je savoir, Monsieur Blanchecombe, pourquoi on s'arrête ici ?
— On va continuer à pieds.
— Pourquoi ?
Il se retourna légèrement vers elle, une franche ligne de dents exposées.
— L'effet de surprise ?
Une fois son travail fini, il rejoignit Jaya qui, soudain, se revoyait des années avant, dans son adolescence. Des courses sans fin et des rires explosifs durant des parties de cache-cache interminables dans les bois avec Tiordan et Symphorore. Elle avait connu un tel sentier déjà... L'image nostalgique de ses amis lui courant après dans la neige pour l'attraper, leurs visages joyeux et insouciants fit ressortir sa part enfantine au centuple.
Ses yeux braqués vers la ligne d'horizon, Jaya esquissa l'ébauche d'un sourire malicieux.
— C'est tout au bout de ce chemin, lui dit Vadim.
— D'accord... eh bien, j'ai envie de te dire... le premier arrivé a gagné.
Un instant, les sourcils de Vadim se froncèrent de confusion, avant que la surprise ne s'empare de lui en la voyant s'élancer tout droit en courant. À mesure que les pas vifs de la jeune femme foulaient le sol, les premières gouttes tombaient du ciel, offrant un réconfort humide à la terre desséchée par l'été. D'abord figé, Vadim arbora un sourire stupéfait.
— A-Attends-moi ! Mais quel âge as-tu pour jouer à ça ?
Elle lui envoya un pied de nez, ce qui l'exacerba dans sa petite mise en scène. Elle voulait jouer ? Dommage pour elle, il était très joueur. Sa conscience aurait voulu lui rappeler combien il était déraisonnable, voire idiot d'agir ainsi, mais Vadim était bien trop las de l'écouter. Il la fit taire d'un majeur pointé vers les cimes.
Le rire cristallin de Jaya redoubla d'intensité alors que les enjambées du prince se faisaient plus rapides et plus longues, la talonnant de près. Il réduisait dangereusement l'écart entre eux. Un cri aigu jaillit d'elle lorsqu'il l'attrapa finalement par le jupon pour la ramener à lui et la coincer dans ses bras.
Essoufflé, Vadim réalisa qu'elle était fendue de rire.
— Tu trouves ça drôle ?
— Plus que tout !
Il se joignit à son rire si contagieux.
— Tu n'es vraiment qu'une gamine, Jaya.
— Et je suis fière de l'être.
Il devait admettre que ça ne lui déplaisait pas. L'espace d'un instant, il avait replongé dans les méandres de l'enfance, voire encore plus loin, car il ne se souvenait pas avoir goûté à un tel plaisir lorsqu'il était petit. La pluie prenait de plus en plus d'ampleur, le soleil avait presque complètement disparu et le couple commençait à ressentir l'humidité sur leur peau.
— On devrait se dépêcher, on va être trempés, dit Vadim.
— Oui... Alors, où est ta surprise ?
Le sourire du prince prit davantage de brillance.
— Juste derrière toi.
Brûlant sur place, Jaya se retourna et fit quelques pas hors du sentier. Un instant, elle ne vit rien de spécial hormis du vert, mais quand elle s'approcha du léger nivelé, sa respiration se bloqua.
Arrosé par la pluie, un immense champ de fleurs blanches s'étendait à perte de vue en contrebas. Toute une plaine recouverte de milliers, de millions de pâquerettes et de coquelicots valsaient dans la brise comme un ciel étoilé sur la terre. Elle retint un souffle, puis fit un nouveau pas ; les brins d'herbes humides effleurèrent ses chevilles.
Son cœur s'emplissait de bonheur à cette vue idyllique, tellement qu'elle ne prenait plus cas à l'averse froide inondant ses cheveux. La beauté de cette nature périssable atteignait la sublimité à ses yeux constamment enneigés.
Quelle vue époustouflante !
Derrière elle, Vadim s'accouda sur le tronc d'un arbre, légèrement à l'abri de l'eau. Elle ne disait rien, comme pour ne pas troubler le calme cérémonial de la plaine. Il l'admirait dans son dos, attendant un geste, un mot.
— Tu n'avais jamais vu de champs de fleurs... Heureusement, j'en connaissais un. Dommage qu'il pleuve, quand il y a du soleil c'est encore plus beau.
— Non, c'est... C'est bien plus beau que ce que je m'étais imaginé.
Elle projeta un œil reconnaissant sur lui, son sourire reflétait toute la joie et l'innocence du monde. Un rayon de soleil dans la grisaille.
— Tu aimes ?
— Tellement, oui...
Cette vue la gorgeait d'une soudaine montée d'euphorie. Les plus petites fleurs mêlaient leurs odeurs aux vagues parfums de pétrichor. Ça lui donnait envie de bondir et courir dans ce champ pour se faire un joli bouquet qu'elle mettrait ensuite dans sa chambre. Son rire habilla la plaine.
— Tu sais, le roman d'amour que je lis... Il y a un champ similaire aussi. Mais ce sont des pissenlits.
— Ça pique un peu plus, le pissenlit.
— Probablement. Et... tu sais ce que fais l'héroïne ?
Le faisant arquer un sourcil, Jaya se retourna pour lui faire face. À quelques mètres l'un de l'autre, la brune recula de trois pas pour entrer dans le champ sous les yeux interrogateurs de son mari. Il subodorait l'arrivée d'une bêtise, sa moue de voyoute et ce grand sourire ne lui disaient rien qui vaille.
— Elle danse... sous la pluie.
Levant ses bras au-dessus de sa tête, Jaya commença à faire de lents mouvements circulaires qui capta l'attention du mâle sur sa silhouette. Désormais mouillée, sa robe de soie lui collait à la peau. Elle tournait, tournait, tournait comme une girouette et son rire grimpait, grimpait, grimpait jusqu'au ciel. Elle n'avait plus cure de rien, ni de la pluie, ni des problèmes, ni de perdre la tête, elle vivait un moment magique.
Et Vadim ne pouvait qu'admirer les charmes et la beauté si mystérieuse de sa jeunesse.
Quand elle cessa de tourbillonner, elle le jaugea de sa place. Haletante, elle mesura l'expression hilare et à la fois attendrie de son époux.
— J'ai toujours rêvé de faire ça ! gloussa-t-elle. Comme Lady Mishana.
— C'est bien l'attitude d'une héroïne de roman à l'eau de rose, ça.
Son regard sur elle était digne d'une bravade. Jaya le lui renvoya au centuple.
— Mais, ce qu'elle ne fait pas par contre, c'est ça...
D'une main délicate, la princesse saisit les attaches maladroitement nouées de sa robe et les tira. Ses doigts écartèrent les pans de tissus. De sa place, Vadim ne la quittait pas des yeux, se demandant ce qu'il était en train de se passer.
— Je peux savoir ce que tu fais ?
Une première épaule fut libérée.
— J'ose, Monsieur Blanchecombe.
Puis une deuxième, avant que la robe entière ne glisse aux pieds de la belle. Elle leva la tête vers le ciel, les yeux clos. Si elle avait dû se sentir vulnérable, Jaya avait seulement la sensation que les choses suivaient leur cours dans cette nouvelle vie hors du commun. C'était plus agréable que ce qu'elle s'était imaginé. Elle accueillait les gouttes sur son visage et son corps avec un bonheur infini. Vadim restait bouche bée.
Nue dans un champ de fleurs ; une plus belle image pouvait-elle exister ?
Ses yeux, rivés à nouveau sur lui, brillaient à travers les rideaux de pluie. Elle repoussa sa chevelure trempée en arrière. Elle était dingue, inconsciente, mais si authentique. Folle de la vie, de cette vie de liberté loin de ses montagnes emprisonnantes. Tout d'elle lui parlait, ses folies cajolaient son âme en secret et faisait naître son sourire. Minuscule d'abord, puis immense, admiratif de sa légèreté. Aimer à loisir, aimer à mourir, elle était une si belle mélodie respirant d'une joie de vivre multicolore. Le soleil mouillé de gris frappait son corps par endroit, il y voyait la naissance d'une délicieuse chair de poule.
Elle était inspirante, gratifiante, délirante et ses courbes divines l'attiraient avec passion.
— Tu es complètement barge, ma belle...
Le rire clair de la jeune femme pénétra l'écrin de verdure et se répercuta sur le blond qui se redressa enfin de contre son arbre.
— Tu vas te faire piquer le derrière par une abeille.
— Les abeilles ne piquent pas.
— Détrompe-toi. Si elles se sentent menacées, elles attaquent.
— J'ai l'air menaçante, ainsi ?
À cet instant, elle paraissait tout sauf menaçante ; surprenante, attirante, affligeante, délurée, intéressante, obnubilante, excitante et encore tant d'adjectifs qu'il pourrait lui servir sans faiblir. Sa fine main glissait sur son abdomen, sur ses seins, faisant perler l'eau comme des diamants. Sa nudité ne la gênait plus, plus que jamais elle l'acceptait en temps que femme. Avec délice et ivresse.
Elle tournait encore comme une toupie, comme le temps qui ne ralentissait jamais. Surtout lorsqu'il était avec elle. Le temps passait toujours trop vite. Le temps des charmes, le temps de la séduction et de l'intimité qui ne le laissait jamais de marbre.
Lui tournant le dos pour s'enfoncer dans le champ, il lorgna sa vertigineuse chute de reins pour s'arrêter sur son incroyable fessier. Il accrocha un sourire béat à ses joues.
— Tu ne m'as pas déjà assez tenté comme ça tout à l'heure, dans l'entrepôt ?
Pivotant légèrement vers lui, elle lui fit signe d'approcher d'un index audacieux. Si l'effronterie portait un nom, elle porterait celui de Jaya. Ce geste et la façon dont elle se mordait la lèvre inférieure réveillait le trublion, le fauteur de trouble, le voyou romantique qu'il était.
Un sourire coquin accompagna le saut de sa chemise et du bouton de son pantalon.
Jaya poussa un cri d'amusement quand il la chargea et la décolla du sol pour la faire tournoyer dans ses bras. Il n'avait pas fallu grand chose pour le faire entrer dans son jeu grotesque de nudité. Enlacés, ils tournaient, tournaient, tournaient jusqu'à en avoir la nausée. La tête virevoltait, la raison aussi, aliénée par le contact gelé de leurs peaux serrées l'une à l'autre.
Un vertige vint les prendre et ils tombèrent à la renverse, le fou rire de Jaya plus sonore que jamais.
Allongée sur le torse de Vadim étendu sur le dos à même le sol, la jeune femme se remettait doucement de ce moment d'égarement, même si son hilarité peinait à disparaître. Le voir si heureux, si détendu lui faisait un bien fou. Jamais elle ne l'avait encore entendu rire aussi vigoureusement. Si sincèrement.
Il avait un sourire magnifique.
Le menton posé sur son pectoral, Jaya se redressa légèrement sur lui pour coincer une petite pâquerette au coin de son oreille. Vadim la laissa faire, même s'il se savait ridicule. Pour elle, il accepterait n'importe quelle folie, même celle de danser nu sous la pluie.
Profitant de l'étourdissement de son mari, Jaya prit les devants et monta à califourchon sur lui pour le surplomber.
— Je n'arrive pas à croire ce que je suis en train de faire. Si jamais quelqu'un nous voit...
— Eh bien... il verra deux lunes dansantes sous la pluie, ça peut être drôle à regarder.
Un nouvel éclat de rire de la part de la brune. Lentement, Vadim rehaussa son torse vers elle pour la serrer au plus près de lui. Ses mains badines couraient sur ses cuisses jusqu'à ses hanches dans un ballet tendre et sensationnel. Leurs bouches n'étaient plus qu'à un baiser d'être réunies.
Mais il refusait de la lâcher du regard.
Cette beauté vagabonde, il parcourrait mille déserts au bout du monde pour assouvir ses moindres désirs. Le soleil couchant, au ras des nuages de pluie, revêtait les champs et leurs corps d'or et d'argent.
— Tu es complètement hors de toute logique, Jaya... Mais qu'est-ce que je peux t'aimer.
Elle sourit contre son visage. Sa voix chaude l'enveloppait et la réconfortait.
— Tu me ferais faire n'importe quoi. Littéralement perdre la tête.
Il fit courir ses doigts dans ses longues mèches imbibées d'eau. Il ressentit le besoin inconditionnel de goûter ses lèvres charnues devenues pâles par la fraîcheur. Oui, il en perdait ses esprits tant leur saveur d'amour l'emportait vers des mondes plus beaux.
Ses mains escaladèrent les vallées abruptes de son dos, pianotant sur ses omoplates. Il soupira contre sa bouche ; la sentir ainsi, si proche, fleurie comme ce moelleux lit de pâquerettes sous eux, animait la flamme sous l'eau.
Et Jaya le sentit formellement contre sa cuisse. Ses joues se rosirent, mais la vraie réaction physiologique se produisit plus bas. Bien plus bas.
— Je vois que la pluie te fait de l'effet.
— Ce n'est pas que la pluie.
D'un regard, ils se mirent d'accord sur la suite des événements. Vadim enfonça son nez plus en profondeur dans la peau de Jaya, embrassant fiévreusement sa clavicule pour descendre à ses seins dressés pour lui. Le dos de l'alhorienne se cambra, suspendue aux gestes du mâle, à ses prunelles qui l'embrasaient. Elle se retrouvait humide, non pas par la pluie, mais par son contact.
Par l'émotion, par les sensations, par plaisir.
Le repoussant d'une main sur son buste d'acier, Jaya força son amant à s'allonger à nouveau dans l'herbe. Elle voulait lui prouver qu'elle aussi pouvait mener la barque. Sur ses coudes, Vadim l'observait, son regard caressait ce corps dénudé sur le sien. Les doigts de Jaya tracèrent un chemin connu d'elle seule sur sa poitrine proéminente, tout en se redressant d'une miette, en équilibre sur ses pieds afin de se mettre accroupie par dessus lui.
Il bouillonnait face à ses belles jambes ouvertes, le feu palpitait et se répandait de manière incontrôlable dans la totalité de son bas-ventre.
Ils échangèrent un regard si tendre qui le rendit encore plus fébrile, plus envoûté.
Quand elle s'empala sur lui en douceur et que son premier gémissement s'extirpa de sa gorge, elle grippa la totalité de son attention. De son cœur, de ses yeux et de son désir sauvage. Il ne fallait plus réfléchir, juste ressentir. Ressentir la pluie tombant sur leurs peaux, ressentir le claquement répétitif quand elle s'emplissait de lui dans une chevauchée céleste.
Plus rien ne comptait pour eux à cet instant, même être observés n'auraient pu faire redescendre cette passion qui les engouffrait. Ils flottaient dans ce monde parallèle fait de pur instinct ; ce monde qui était le leur et où eux-seuls existaient, où leurs âmes s'absorbaient l'une dans l'autre pour ne former qu'un unique être.
Elle gémit son prénom, fondant entre ses doigts comme de la cire.
Redressant sa musculeuse poitrine vers elle pour ravoir le dessus, il s'aventurait et se retirait sans relâche. Sa main s'accrocha à ses reins qui bougeaient et se tordaient pour lui, leurs bouches se trouvèrent avidement. Ses muscles l'enlaçaient et le plaisir montait, montait, montait... Jaya eut l'impression d'être perdue à cet instant où l'orgasme s'intensifiait au climax, juste avant d'exploser. C'était si jouissif qu'elle en avait cessé de respirer une seconde. Elle jouissait, corps et âme, au creux de ses bras.
Ce fut si fort, si intense que Vadim se déversa en elle, peu après, râlant contre le velours de son cou.
Ils restèrent pantelants, dépourvus de souffle, riant sans avoir besoin de formuler quoique ce soit. Un geste, un baiser suffisait pour parler du plaisir insensé qu'ils venaient de prendre, là, sous cette pluie d'été.
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— Bonté divine ! Mais d'où arrivez-vous trempés de la sorte ?
Le regard fuyant, Jaya esquivait l'œil perçant du seigneur Byron, qui se tenait devant eux dans le hall. Sa posture, droite et les bras croisés, accentuait davantage son allure imposante. Ils étaient revenus au Beffroi dans un état pitoyable : trempés jusqu'à l'os, la princesse avait encore des brins d'herbes dans ses vêtements et le prince des pâquerettes dans les cheveux.
— Vous avez raté le dîner ! De plus, le roi Frost était à deux doigts de faire appelle à la garde pour partir à votre recherche !
— Je vous prie de nous excuser, père, nous avons été surpris par la pluie durant notre balade.
— Une balade ? Crois-tu que c'était le moment de faire une balade ? J'attendais ton rapport ainsi que votre présence pour le dîner de ce soir, mais je n'ai eu aucun des deux ! Savez-vous dans quel embarras vous me mettez ? C'est affligeant ! Vadim, tu n'es qu'un inconscient ! Et vous, princesse, vous l'êtes tout autant que lui ! J'espère que cela ne se reproduira plus !
Le cadet soupira, épuisé de se faire enguirlander comme un enfant. Il en avait passé l'âge.
— Du calme, mon roi... Ce n'est pas comme si nous étions sortis nous pavaner nus sous la pluie.
Jaya lui jeta un regard en coin, chargé de sous-entendus. Elle réprima si fort un nouveau fou rire qu'elle crut s'être brisé deux côtes. Elle cacha tant bien que mal le trouble à ses lèvres en inclinant la tête discrètement.
— Surveille ton langage, je te prie ! Ai au moins le respect de la princesse, si tu n'en a pas pour ton père !
Byron suffoquait dans sa barbe devant ce comportement impoli et révoltant ! Vadim ne changerait donc jamais, il resterait cette maudite tête brûlée qui se moquait ouvertement du règlement. Or, le roi réajusta son col et souffla un coup pour calmer sa montée de tension.
Ils étaient sains et saufs, déjà... c'était le plus important.
— Bon... Princesse, je vous en prie, allez rassurer votre père, il vous attend dans la salle des repas.
Son ton autoritaire n'acceptait aucune contradiction. Jaya n'aurait pas eu la bravoure d'en faire, de toute façon.
— O-oui... Excusez-moi...
Lançant un dernier regard complice à Vadim, Jaya se pinça les lèvres en s'éloignant. Lorsqu'elle leur tourna enfin le dos, elle s'octroya un large sourire. Il était probable qu'ils subissent des réprimandes et soient taxés d'insouciants, de joyeux drilles sans vergogne, mais cela importait peu à leurs yeux, car leur cœur était empli d'un bonheur rieur et délibéré.
Ça valait le coup.
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