La Reception 3/8 ✔️
La nuit enveloppa Cassandore de son manteau sombre. Telle une étoile, le Beffroi rayonnait, créant un halo lumineux dans son périmètre. La noblesse, déjà présente dans la cour extérieure, arborait des tenues raffinées pour cet événement si spécial. Queues-de-pie et crinolines se mariaient harmonieusement aux gants de soie.
Cela faisait une éternité que Byron Blanchecombe n'avait pas organisé de réception, et tous les nobles de Cassandore s'étaient empressés de répondre présents. Ils savaient combien la famille souveraine adorait déployer faste et splendeur pour épater l'île. Un moyen idéal de briller et s'attirer l'œil de tous.
Depuis sa fenêtre, Jaya contemplait les élégants carrosses apparaître et être guidés par les soldats de garde, veillant à maintenir la voie et l'accès au Beffroi dégagés. Aucun traîneau orné du flocon à épées n'était encore en vue. Son père accusait visiblement un léger retard. La princesse avala sa salive. La foule était déjà impressionnante, bien que les festivités n'aient pas encore débuté. Elle n'osait imaginer l'affluence dans quelques heures. Les Blanchecombe avait un véritable ascendant sur leur peuple, ils scintillaient de popularité.
Beaucoup de jeunes femmes arrivaient dans d'énormes champignons leur servant de robe. Dans la sienne, si fine et près du corps, elle allait attirer le regard.
— Regardez, princesse. Celui-ci irait parfaitement avec votre robe.
Près de la coiffeuse, Varvara dévoila délicatement une somptueuse parure de saphirs, nichée dans un écrin. Le collier diffusait d'éblouissants reflets bleutés, créant un effet envoûtant. Monté sur une armature d'or pur, les joyaux s'alignaient telle une rivière scintillante, s'épanouissant sur la poitrine. La servante l'extraya avec précaution, le présentant à son propre buste pour révéler toute sa splendeur à Jaya.
— Il est sublime, pas vrai ? C'est encore l'un des cadeaux du prince Vadim, vous en avez de la chance. Il vous gâte !
Jaya pouffa de rire avec légèreté. Il était vrai que récemment, Vadim lui avait fait apporter de nombreux présents : des robes cousues main, des bijoux brillants de mille feux, des livres incroyables, des étoffes de soie luxueuses pour l'hiver et des corbeilles de fruits frais au goût de miel. Il ne manquait plus que des bouquets de roses pour parachever cet éventail d'attentions qui la comblaient autant qu'elles l'intriguaient. Elle cultivait l'idée que c'était une manière pour lui de se faire pardonner de son absence depuis plus d'une semaine. Peut-être pensait-il qu'elle se sentirait moins seule, moins délaissée en recevant toutes ces belles choses.
Même sans ces cadeaux, elle ne lui en aurait jamais voulu d'être absent. Il travaillait si dur pour la cité et s'efforçait de remplir avec honneur son double rôle de prince et d'instructeur qui, elle le savait, pesait malgré tout dans son existence.
— Qu'est-ce que vous en pensez ? On met celui-là ?
Jaya pencha la tête sur le côté en analysant cette énorme rivière de saphirs. Avec ça, elle aurait l'impression de ressembler à une enfant s'étant servie dans la boîte à bijoux de sa mère. C'était bien trop et la princesse témoigna son choix d'un mouvement de la tête.
— Non, il est très beau, mais je préfère la simplicité avec une robe ouvragée comme je porte.
Varvara arqua un sourcil en rabaissant le lourd bijou de sa poitrine.
— Vous n'êtes pas comme les autres nobles dames, dites-moi. La plupart des filles de haute famille adorent les bijoux voyants et surtout les montrer sur elles.
— Un seul suffira ce soir.
Marchant vers le lit conjugal, Jaya ouvrit le tiroir de la table de chevet et en retira une petite boîte en bois. Une fois ouverte, elle en libéra la Larme de Leolan qu'elle attacha soigneusement autour de son cou. Ressemblant à une goutte d'eau suspendue entre ses seins, elle se tourna pour la présenter à son amie. Ses immenses yeux noirs se remplirent d'étincelles.
— Oh, que c'est beau...
— Merci. C'est Vadim qui me la offerte. Elle appartenait à sa mère, la reine.
— Eh bien, c'est un merveilleux cadeau qu'il vous a fait. Très précieux.
— Oui... Il... Il ne veut pas que je la retire. Il m'a dit que... Je méritais de la recevoir, car j'étais sa femme...
Une douce rougeur monta aux joues de la princesse à cette pensée. Cette nuit dans les thermes... Elle ne pourrait jamais l'oublier. Autant pour ce cadeau que par l'amour qu'ils avaient si intensément échangés. Une fois parmi tant d'autres, mais qui l'avait marquée par ses circonstances et par les mots forts de son mari. Le goût d'un abandon si particulier. Leur premier « je t'aime ».
Silencieuse, Varvara l'observait, son sourire grandissant avec tendresse. Caressant la larme d'un pouce, Jaya semblait lointaine, perdue dans un monde inconnue à ses yeux.
— Vous l'aimez, n'est-ce pas ?
Sa bulle de songe éclata. Relevant un regard vers la domestique, l'héritière sourit, presque timidement.
— Nos conflits se sont arrêtés depuis quelques semaines, maintenant. J'ai réalisé que j'avais eu tort de le fuir et que... les autres aussi ont tort de le juger sans le connaître. Il n'est pas du tout comme les ragots le décrivent. Il n'a rien de monstrueux, il a simplement été trop rejeté, trop longtemps incompris. Dans la vie, il faut se méfier des apparences, car les choses sont plus que ce qu'elles semblent être. L'important, le primordial est souvent caché, ce sont les choses que l'on ressent profondément, non pas ce que l'on voit en surface. La beauté du coeur va plus loin que celle physique. Il faut aller au-delà pour trouver le trésor... Vadim est un homme bien, un homme beau, si attentionné et... Oui... je l'aime. Et il m'aime aussi.
Ayant eu la réponse à sa question, le cœur de Varvara se réchauffa devant cette fille gorgée d'amour. Ses mains saisirent les siennes pour raccrocher son attention.
— Je suis si heureuse de vous voir ainsi, princesse. Vous qui avait été si triste dans les débuts, j'espère que le prince saura prendre grand soin de vous, une âme bonne comme la vôtre mérite tout le bonheur du monde.
— Tu le mérites aussi, Varvara. Plus que quiconque.
La concernée perdit lentement son sourire, son esprit virant vers le visage de Leftheris hantant ses pensées. Méritait-elle autant d'amour ? Autant que Jaya pouvait en recevoir de son époux ? Leftheris pourrait-il l'aimer de la même manière ? Il l'avait délaissée depuis des semaines, sans la moindre visite, juste quelques sourires au coin d'un couloir ; elle avait refermé sa porte, bien trop effrayée à l'idée que sa mère puisse découvrir que sa serrure était ouverte pour lui. C'était si difficile de faire une croix sur ses sentiments.
Il n'était jamais revenu, n'avait posé aucune question quant à cette distance...
Une claque viscérale ramena Varvara à la réalité. Un écho de la gifle de sa mère.
Elle se mordit la lèvre inférieure, coinçant le souvenir de la douleur et de la honte au creux de sa poitrine. Jaya ne devait pas déceler son instant de faiblesse.
Lentement, Varvara osa prendre le pendentif de son amie pour le regarder d'un peu plus près.
— Il... Il appartenait donc à la reine... C'est un objet d'une inestimable valeur. Plus tard, vous le donnerez à votre enfant pour qu'il reste à tout jamais dans votre foyer.
— Mon... mon enfant ?
Son exclamation, nimbée d'innocence et de confusion, apporta une moue rieuse à la roturière.
— Eh oui... En étant mariée, vous devrez offrir une descendance au prince pour perpétuer la famille Blanchecombe.
Jaya baissa les yeux, pensive. Elle n'y avait encore jamais songé. C'était idiot à y penser, sachant qu'ils laissaient venir les choses naturellement lors de leurs rapports, au plus brut de leur désir primitif. La jeune femme esquissa un doux sourire.
Un petit enfant, fruit de leur amour, le parfait mélange d'elle et lui... Ce serait si merveilleux, mais également si effrayant. Elle ne savait pas encore si elle était prête à franchir le seuil de cette autre réalité. La vie ne serait assurément plus la même.
— Vous êtes magnifique, princesse. Une très grande dame.
Ajustant une dernière fois les perles d'or dans la chevelure arrangée de Jaya, coulant comme une constellation sur toute la longueur de l'ébène, Varvara termina en replaçant délicatement une mèche derrière son oreille, où pendaient des boucles fines. La robe sublimait Jaya à la perfection, avec une légère échancrure au dos et au buste. Elle l'enviait tant, non seulement pour sa beauté et sa gentillesse, mais surtout pour l'amour et l'attention qu'on lui portait.
Des frappes soudaines résonnèrent à la porte de la chambre. Léontine fit son apparition, ses cheveux blonds ébouriffés. Elle donnait l'impression d'avoir couru un marathon.
— Princesse ! Votre père est arrivé !
Son cœur bondit, exultant de liesse. Enfin ! Encouragée par le regard bienveillant de Varvara, Jaya souleva légèrement les pans de sa robe et quitta la chambre à la hâte. Le voile finement brodé attaché à l'arrière de sa tenue effleurait le sol tandis qu'elle s'élançait. Elle se devait de l'accueillir en bonne et due forme. Toutefois, la jeune tête brûlée ralentit son allure en apercevant, depuis la passerelle, le Beffroi grouillant des premiers convives. C'était la première fois qu'elle voyait autant de personnes rassemblées dans cette tour, d'ordinaire si calme et déserte.
Que penseraient ces nobles en la voyant galoper ainsi comme une enfant immature ? Ce soir, c'était pour elle l'occasion de bien présenter devant la société aristocratique cassandorienne. C'était sa première apparition publique officielle en tant qu'épouse du prince Vadim. Elle ne devait pas faire honte aux Blanchecombe et à son père.
Sois digne, princesse...
En descendant, le menton haut et la démarche altière, Jaya croisa d'innombrables visages distingués aux étages, accrochant leurs regards à sa délicate personne. Qui donc était cette jeune femme si raffinée ? Son incroyable beauté éblouissait, forçant certains à se décaler pour la laisser passer. Elle sortait indubitablement des standards habituels, ne revêtait l'allure d'aucune autre.
Un être venu d'ailleurs attisant un grand intéressement sur son chemin.
Une mélodie de violon enveloppait l'atmosphère festive. Parvenue dans le hall qui se remplissait progressivement, Jaya ne discerna aucun visage familier. Elle se demandait où Vadim en était dans ses préparatifs. S'il avait seulement eu le temps de s'habiller pour la rejoindre. Une fois encore, elle ne l'avait pas aperçu de la journée et l'attendait avec autant d'impatience que son précieux père. Se frayant un chemin à travers la foule, elle repéra le seigneur Byron près de l'entrée, échangeant une poignée de main virile avec un vénérable duc avant de l'accueillir, lui et sa famille, à franchir le seuil. Jaya alla le rejoindre.
Lorsqu'il la vit, la somptueuse teinte bleu roi de sa parure contrastant avec les nuances fades des autres convives, l'œil de Byron s'arrondit.
Quelle belle petite... pensa-t-il.
Un sourire se dessina dans sa barbe blanchâtre en lui tendant une main qu'elle saisit presque à contrecœur. Malgré sa façade chaleureuse, la rigidité de sa poigne qui l'attira présageait qu'il ne l'aurait pas laissée hésiter, ni partir.
— Ah ! Cher duc Vecturio, laissez-moi vous présenter ma superbe belle-fille, la princesse Jaya, fille du roi Frost Northwall d'Alhora.
Des yeux se greffaient encore à elle... Elle devait garder son calme et une image nette, hypocrite, comme elle avait tant l'habitude de revêtir en société.
— La fameuse princesse ? Mes aïeux. Permettez-moi de m'incliner devant vous, votre altesse.
Le vieil homme fit une courbette et déposa un baiser râpeux sur le dos de sa main. Elle se composa un sourire de façade, les saluant avec politesse ; conserver une once de mystère dans son attitude princière, la clé pour impressionner son prochain.
— Princesse, je vous présente le duc Archibald Vecturio, un ami intime de la famille Blanchecombe. Il compte parmi les membres privilégiés du cercle restreint de mon conseil royal et est l'un des majors les plus précieux de mon armée. Voici son épouse, Willanda, son fils, Cléon et sa fille, Ophénia.
— Enchantée de vous connaître.
— De même. Ce qu'on dit de vous est donc vrai, vous êtes d'une beauté subjuguante, princesse. Leftheris doit être si heureux et comblé de vous avoir pour épouse.
Qu'avait-il dit ? Elle se sentit pâlir, tout autant que son beau-père qui corrigea aussitôt le duc. Il gardait au fond de son œil un éclat amer.
— Elle n'est pas l'épouse de Leftheris, mais de Vadim.
Soudain, le noble changea d'expression, passant de la félicité à la gêne en un éclair. Jaya crut même voir son épouse lui abattre un discret coup de coude dans le bras.
— Oh... Je... Veuillez m'excuser. Je perds la tête...
— Ce n'est rien, voyons. Je vous en prie, cher duc, vous pouvez emmener votre famille vers la salle de réception. Nous vous rejoignons plus tard.
Acquiesçant, le duc Vecturio s'éloigna, sa femme, sa fille et son jeune fils sur les talons. Jaya se sentit envahie par un profond malaise, au point que son estomac se tordit. Pourquoi tous ces gens ne pensaient-ils qu'à Leftheris ? Pourquoi toutes les conversations tournaient-elles autour de lui, de sa personne... même ce mariage ? Nul ne prononçait le nom de Vadim, comme s'il n'existait pas. Comme si la mort les frapperait s'ils osaient prononcer ces cinq lettres.
Byron ne s'expliqua pas, ne s'excusa pas, l'œil ouvert sur la jeune femme dardant un regard accusateur sur la famille Vecturio. Soudain, un fait sauta aux yeux du roi. Son œil glissa sur le buste de sa belle-fille, dégagé par le décolleté de sa bien jolie robe. Une goutte le frappa, coincée au creux de son balconnet.
Il eut une sueur froide. Que faisait-elle ici, sur elle ?
Attirant l'attention de Jaya, Byron se positionna devant elle, la dominant de sa grandeur dont ses fils avaient hérité. Il lui semblait si impressionnant, son regard intense ne quittant pas sa poitrine mise en valeur, au point de la faire rougir. Elle était sur le point de claquer des doigts pour le ramener à la réalité lorsqu'il recueillit délicatement la larme dans ses doigts.
— Où avez-vous eu ça, Jaya ?
Sa voix ferme, malgré le tumulte aristocratique, transperça le cœur de la jeune femme.
— Vadim me l'a offert.
Il relâcha la larme pour l'observer plus profondément qu'à l'accoutumée. Jaya lui tint bravement le regard, refusant de plier devant cet homme faux.
— Je vois... C'est un bien inestimable de notre famille.
— Je le sais. Je sais a qui il a appartenu.
Ysilda... Revenir à son souvenir faisait à nouveau fleurir de bien tristes époques pour Byron. La mort, le déni, le devoir et le règne dans la solitude. Ses fils en avaient beaucoup souffert, tout autant que lui... Il n'avait pas vu cette larme depuis des années, Vadim l'avait toujours gardée jalousement depuis tout petit, ne laissant personne la toucher, pas même son frère. Il était même capable de se battre avec lui pour la protéger des doigts qu'il jugeait sales et indignes de la frôler.
Et là... Il l'offrait de lui-même à cette fille.
Byron accueillait cette nouvelle avec étonnement et une douceur qu'on ne voyait jamais chez lui. Jaya se surprit à voir naître un sourire, petit mais sincère, au coin de sa bouche fine. Le premier dans son imputrescible façade préfabriquée.
— Très bien, dans ce cas, prenez en grand soin. Si Vadim vous l'a offert, c'est qu'il vous pense digne de le porter. Et... Pour ma part, je suis heureux de le revoir sur quelqu'un.
Malgré elle, Jaya lui rendit sa moue. Pour la première fois, il lui avait parlé avec sincérité, montrant qu'il n'était pas qu'un homme cruel et sans pitié se cachant derrière une voix doucereuse. Il avait réellement une part tendre lui rappelant celle de Vadim. Pensif, lointain, amarré sur un passé qui semblait le toucher dans l'âme.
— Le roi Frost Northwall. Laissez passer ! Faites place au roi !
Un fort énoncé, crié par un soldat à l'extérieur, annonça l'arrivée d'un nouvel invité prestigieux arrivant par la grande porte. Byron et Jaya s'y tournèrent immédiatement, intéressés par la cohue.
— Ah, voilà votre père, ma chère.
Des étoiles scintillant dans ses yeux, la jeune femme vit les convives s'écarter pour laisser passer la montagne. Escorté par les gardes, le roi Frost posa enfin les pieds dans le Beffroi après un long périple. Ignorant les convenances, Jaya délaissa son beau-père et se précipita dans les bras de cet homme si cher à son cœur. Ses gestes l'avaient emportée avant qu'elle ne puisse adopter une attitude conforme à son rang face à la mondanité. Au vent les codes ! Être soi-même était le primordial.
Toujours aussi impulsive, pensa le roi. On ne pouvait changer les graines d'un si précieux fruit.
Arrivant derrière eux, Byron les héla.
— Bien le bonsoir, cher Frost. J'espère que vous avez fait bon voyage ?
Le roi des glaces relâcha sa progéniture pour saluer son hôte prestigieux.
— Pour le mieux, merci. Nous avons été légèrement bloqué sur les flancs montagneux à cause de la neige, les chevaux avaient du mal à avancer, mais passé cela, tout s'est parfaitement déroulé.
— Heureux de l'apprendre. Nous n'attendions plus que vous pour commencer la réception. Oh tiens, voilà enfin mes chers fils.
Fringants, Vadim et Leftheris se détachèrent de la foule, avançant côte à côte vers le cercle royal. Le cœur de Jaya s'emballa lorsqu'elle aperçut son époux. Revêtu d'un pourpoint en brocard et d'une élégante cape écrue drapée sur son bras gauche, il ressemblait à un véritable prince, si beau et distingué. Cela contrastait avec son allure habituellement sauvage et indomptée. Son masque dissimulait son visage et elle en devinait la raison. La présence d'une telle foule, ce soir... Ses cicatrices ne seraient pas les bienvenues, ce qu'elle regrettait profondément.
Une beauté polaire tapa dans l'œil de Vadim, si intensément qu'il crut en perdre la vue. Comme si le temps s'était suspendu, son regard charmé glissait sur elle, sans contrôle. Son sourire était le soleil, rouge tel le crépuscule, même au cœur de la plus sombre tempête qui grondait en lui. Face à cette étoile dont les cheveux abritaient des constellations, sa contenance légendaire s'était envolée.
Tout comme celle de Leftheris qui restait derrière son frère.
Arrivant à leur hauteur, son regard s'était aussitôt agrippé à elle, le cœur comme pris dans un étau. Sa beauté lui arrachait les tripes par son intensité. La courbe accusée de son dos moulé dans cette maudite robe affriolante, ses lèvres sanguines, ces brillants sur son corps et sa chevelure ; aucun n'était plus aveuglant qu'elle. Elle était indescriptible, même Ophénia Vecturio, elle aussi présente, faisait pâle figure à côté de Jaya. Vadim clochait tellement à son bras.
Elle ne lui accorda aucune attention, tous ses battements de cils étaient pour son cadet...
— Bien, maintenant que tout le monde est là, rendons nous à la salle de réception pour lancer les festivités. Cher roi Frost, veuillez me suivre, je vous prie.
La voix de Byron ranima Leftheris qui sursauta en suivant de près son père et leur illustre invité, fuyant à contrecœur les époux avant de perdre patience. Ces derniers, les suivant à l'arrière, se retrouvèrent comme pour la première fois. Jaya enlaça le bras de son mari qui, nourri de fierté, lui murmura à l'oreille :
— Tu es magnifique, Madame Blanchecombe.
— Merci, tu l'es aussi.
Il ricana.
— Je n'y crois pas une seconde.
— Tu doutes de ma parole ?
— Jamais de la vie.
— Alors ne commence pas, s'il te plaît. Mieux vaut déplaire au monde tels que nous sommes plutôt que plaire avec des masques imparfaits.
Elle était tellement dans le vrai, il avait presque oublié ce précepte qu'il lui avait lui-même enseigné. Elle ne se lasserait jamais de le remettre en lumière, pour lui rappeler à quel point il était précieux.
— Je suis heureux d'être avec toi... et je m'excuse de ne pas avoir pu l'être durant ces jours.
Elle lui sourit, attendrie.
— Tout ce qui compte, c'est que tu sois là.
Sa moue se répercuta sur lui, si fier d'être au bras d'une femme aussi incroyable.
— J'ignore si je dois me prosterner à tes pieds, là tout de suite, ou t'embrasser follement.
— Les deux sont tentantes, mais je préfère la seconde.
La douceur de son timbre l'incitait à l'embrasser de tout son être, il en mourrait d'envie, juste pour lui prouver qu'il serait toujours présent pour elle. Il se contenta de déposer ses lèvres sur le dos de sa fine main, des yeux étaient partout autour d'eux. Les règles demeuraient strictes dans la royauté ; l'amour se faisait caché.
Et il aurait du mal à se contenir à l'égard de Jaya.
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