CHAPITRE 4 : RENCONTRE GLACIALE
CHAPITRE 4 : RENCONTRE GLACIALE
Shoto fixait d'un œil neutre cette chevelure de jais aux reflets argentés se laisser malmener par le vent. Le silence tournoyait autour d'eux, et le temps semblait s'être suspendu dans les airs. La froideur de sa glace s'était répandue dans les lieux, et quiconque aurait pu apercevoir la buée qui sortait des lèvres de l'adolescent. Il avait veillé à doser sa force à une très faible quantité, peu désireux d'infliger une quelconque blessure à cette brunette.
Le jeune homme fronça des sourcils, et avança sans ciller en direction de celle qu'il venait de piéger. Cette adolescente semblait avoir un lien étroit avec l'homme le plus recherché du pays. En voilà une information qui intéresserait bien son père, mais il était hors de question qu'il la partage avec lui. L'adolescent menait ses propres recherches de son côté, laissant son géniteur se débrouiller avec toute son équipe constituée de supers-héros d'élites.
— Todoroki.
La voix de cette jeune fille était aussi sèche et cassante que du verre. Son immense frange noire empêchait de distinguer clairement son regard, mais Shoto fut tout de même en mesure de remarquer qu'à son instar, elle possédait des yeux vairons.
— Il est formellement interdit d'utiliser son alter sur des civils si l'on n'est pas un héros. Je suis outrée par le fait qu'un brillant élève de Yuei transgresse cette règle.
— Je ne te connais pas, j'ignore tout sur ton identité, mais tu ne penses pas que tu es mal placée pour parler de règles ?
— Pourquoi m'avoir piégée ? demanda la jeune fille, ignorant la question de son interlocuteur.
— T'as un lien avec l'homme que les plus grands héros traquent depuis des années. C'est une raison pour moi de t'arrêter, pour au moins te soutirer des informations.
— Mais à ma connaissance, tu n'es pas un héros. C'est ton père qui l'est.
À l'entente de cette réplique, Shoto sentit un pincement se loger dans son cœur. Il ne s'y attarda pas plus que ça, et se focalisa de nouveau sur cette adolescente. Le garçon qui n'était pas le moins du monde mal à l'aise, tenta de remarquer un quelconque signe de nervosité ou de stress chez cette fille. Il ne voulait pas l'effrayer, et encore moins la blesser. Mais paradoxalement, il était impossible pour lui de se comporter en prince charmant alors qu'il venait de l'immobiliser le pied. L'idéal était donc de rester fidèle à lui-même, en l'occurrence, neutre.
— C'est mon pied gauche que tu as gelé, remarqua-t-elle.
— Je suis au courant pour tes alters, rétorqua aussitôt l'apprenti héros.
Son côté gauche lui permettait de contrôler le feu, telle fut la raison pour laquelle il avait envoyé sa glace dans ce côté là. S'il en croyait les paroles qu'elle avait dites à l'Ombre Vengeresse, elle était incapable d'utiliser ses alters. Par conséquent, elle resterait à sa merci, ne pouvant pas se délivrer à l'aide de ses flammes qu'elle ne contrôlait pas. Cependant, la chaleur innée dégagée par le côté gauche de son corps allait l'empêcher de succomber au froid suscité par l'attaque de Shoto.
— Mais, tu n'es pas au courant de ça.
À ces mots, Shoto vit la glace qu'il avait crée se briser en mille morceaux. Pour éviter que les débris ne l'attaquent, l'adolescent eut le réflexe de créer une déferlante de glace qui le protégea.
Il serra des dents en sentant le froid se répandre partout dans les lieux. Il lui en fallut peu pour comprendre qu'elle venait d'utiliser son second alter : l'air. Lorsque le brouillard fut dissipé, Shoto aperçut le visage de son assaillante. Elle se dressait en face de lui, les yeux écarquillés.
— Pourquoi avoir fait ça ? demanda-t-il simplement en époussetant ses vêtements, comme si cette attaque n'avait pas sollicité un seul de ses efforts.
— Qu'est-ce que tu crois ? Je ne voulais juste pas me laisser faire Todoroki ! cracha-t-elle en serrant les poings. Qu'est-ce que tu me veux ?
Shoto fut dans un premier temps surpris par la rage que laissait voir son regard. Il se concentra sur cette fille, sur le contraste entre ses deux prunelles, sur la posture déterminée qu'elle arborait en face de lui. Il était le fils d'Endeavor, elle en avait parfaitement conscience et contre toutes attentes cela ne semblait pas l'intimider pour autant. Il se demandait qu'elles étaient ses réelles motivations. Il l'avait entendue raconter son histoire à cet homme, lui dire qu'elle voulait devenir une héroïne. Or, pourquoi osait-elle s'adresser à un criminel si tel était son rêve ?
— Qui est l'Ombre Vengeresse pour toi ?
Il lui avait posé cette simple question, et pourtant au fond de lui il savait qu'elle n'allait pas y répondre.
— Il n'est pas le criminel que tout le monde pense, souffla-t-elle en fuyant son regard. Est-ce que tu sais réellement ce qu'il fait ? Est-ce que, ta perception n'a pas été influencée par la vision de ton père ?
— Cet homme est un criminel, un vilain. Il est ce que tu livreras aux forces de l'ordres plus tard, si tu deviens une héroïne. Et autre chose : je n'ai pas besoin de mon père pour me dire ce qu'est le bien ou le mal.
Son ton virulent avait été incontrôlé. C'était plus fort que lui, Shoto était incapable de conserver ce calme si olympien lorsque l'on évoquait son père.
— Je vois, lâcha-t-elle en un rire amer. Tu penses œuvrer pour la justice c'est ça ? Mais qu'est-ce que c'est réellement ? Tu sais, même dans un monde où il y a des super-héros j'ai l'impression de ne toujours pas saisir le vrai sens de la justice.
Ses yeux brillaient et perçaient cette couche opaque d'obscurité naissante comme deux diamants scintillants dans le noir. Shoto ne voulait pas batailler plus que ça. Ce n'était qu'une gamine après tout. Une brunette aux pensées révolutionnaires. Mais, malgré tout elle parvenait à éveiller sa curiosité. Pourquoi un vilain s'intéressait autant à elle ? Pourquoi la suivait-elle ?
— J'ai bien peur qu'il soit parvenu à t'engrainer dans ses filets. Apparemment ce vilain semble recruter de jeunes gens au sein de son parti. Tu ne devrais pas le laisser t'influencer, dit-il en se retournant, prêt à repartir de son côté. Tu possèdes un véritable potentiel qu'il serait à mon avis bon de mettre au service de la paix.
Il commença à s'en aller, laissant cette mystérieuse jeune fille derrière lui. Au fond de lui, Shoto espérait qu'il ne regretterait pas de ne pas avoir forcé plus que ça. Après tout, il n'avait pas le droit de traquer ce vilain. Ce n'était pas ses affaires.
Il soupira, et ne put s'empêcher de lancer un regard furtif derrière lui. Ses cheveux noirs, son regard pénétrant. Elle n'était pas comme les autres, elle différait en un point qu'il n'aurait su nommer. Un point x, une inconnue qu'il peinait à trouver aussi facilement qu'en mathématiques. Son âme semblait contenir une souffrance obscure, une peine qu'elle devait extérioriser d'une manière ou d'une autre mais qu'elle s'efforçait de contenir au fond d'elle. Une image poétique et sombre se matérialisa dans les tréfonds de l'esprit de Shoto.
Ce fut après un trajet assez long que l'adolescent fut de retour chez lui. Il posa ses affaires dans le silence le plus complet, prit un jus d'orange dans la cuisine avant de lancer un regard interrogateur en direction de son frère Natsuo, plongé dans une discussion téléphonique ayant pour sujet un nouveau jeu video.
« Tu n'es pas du même monde qu'eux. »
La voix de son géniteur surgit dans ses pensées. Il constata à quel point il avait raison. Alors que ses frères entretenaient des activités de jeunes gens ordinaires, il passait son temps à s'intéresser au criminel le plus recherché du pays. Il avait faillit obtenir des informations ce soir, mais cette fille...
— Peut-être que c'est une folle fanatique ? suggéra-t-il à voix basse en posant son verre de jus d'orange.
— Shoto t'étais où bon sang ? Ne me dis pas que t'étais encore à la bibliothèque ? s'indigna sa grande-sœur Fuyumi en surgissant de nulle part.
L'adolescent sortit de ses pensées, et plongea ses yeux dans ceux de son interlocutrice.
— Oh oui, monsieur Aizawa ne cesse de nous charger de devoirs en prévision de notre stage en entreprises, mentit-il avec brio.
— Je m'en doutais, t'es toujours en train de bosser... D'ailleurs, en parlant de stage tu comptes intégrer quelle agence héroïque ? C'est vrai, tout le monde te court après depuis la fin du tournoi.
— Celle de papa bien-sûr.
— Quoi ? Mais tu plaisantes t'es aussi demandé qu'une rock-star ! Tu peux te diriger vers un tout autre univers, quitter la ville pour un mois même !
Shoto haussa des épaules. Il regarda sa sœur qui le fixait avec deux prunelles qui laissaient deviner l'étendue de son ahurissement.
— Malgré tout, je suis forcé d'accepter que papa est le numéro deux des super-héros. Bon, j'y vais je n'ai pas fini mes devoirs pour demain.
Il s'éclipsa, entra dans sa chambre et sortit un cahier de son sac. Son ego s'entêtait à dire que ce n'était pas un journal intime qu'il possédait. Après avoir lancé sa veste sur son lit, il retira sa chemise blanche derrière laquelle il n'avait qu'un simple débardeur noir. Le jeune homme soupira et se laissa tomber sur son matelas moelleux, un stylo coincé entre les dents.
D'ordinaire, sa mère restait maîtresse de ses pensées, puis ce n'était sans oublier tous ces devoirs qu'il devait faire pour le lycée. Il n'avait jamais le temps de méditer sur autres choses, et pourtant, une jeune fille au regard vairon parvenait à ouvrir la porte secrète de son esprit, d'une manière qu'il n'aurait su expliquer.
— Roh t'es pas drôle aujourd'hui ! se plaignit Takara.
La cour de récréation était bondée, l'ambiance était joviale, Akane était accompagnée de ses deux meilleurs amis et pourtant elle n'arrivait pas à laisser échapper un seul rire sincère. Rien ne parvenait à la détacher du flux tortueux de ses pensées. Elle avait essayé. Franchement. Mais le résultat était abominable.
— Désolé les gars, mais je suis hyper crevée, dit-elle en laissant échapper un soupir.
— Ta grand-mère t'a exploitée hier soir ? plaisanta Mike.
Takara et lui échangèrent un sourire complice tandis qu'Akane roula des yeux. En réalité, l'adolescente ne parvenait pas à oublier les événements de la veille. Elle se questionnait à propos de ce mystérieux justicier, et surtout, de cette étrange manie qu'il avait de se retrouver à chaque fois sur son chemin. Elle commençait à exclure la possibilité du hasard. Quelque chose ne tournait pas rond dans toute cette histoire, et sa rencontre imprévisible avec Shoto Todoroki avait suffit pour lui provoquer une insomnie. Elle pensa de nouveau à cette attaque, à ce geste spontané qu'elle avait fait avec sa main droite. Elle avait maîtrisé son pouvoir, mais malheureusement à cet instant elle se sentait incapable de reproduire un tel geste.
— Mike t'abuses un peu quand même, je suis sûre que le vert rehaussera la couleur de mes yeux ! s'exclama Takara qui était une nouvelle fois plongée dans un débat capillaire.
— Tu ressembleras à une plante, soupira-t-il. Dis-lui Akane.
— Je suis vraiment obligée de prendre part à votre énième débat ? demanda-t-elle en esquissant une grimace. Je préfère arborer le statut neutre de la Suisse pour cette fois.
— La neutralité n'existe pas, fit remarquer la seconde fille du groupe, c'est juste un moyen hyper pourri pour éviter d'écoper de certaines responsabilités. D'ailleurs...
— Et c'est reparti pour un tour, la coupa Mike. Vraiment, va falloir que tu apprennes à réguler ton flot de paroles un de ces quatre.
Akane se surprit à envier ses amis qui riaient spontanément. Elle observa du coin de l'œil Mike passer sa main dans sa chevelure brune. Son regard azuré avait la spécificité de s'illuminer, il était tout simplement heureux. Elle pensa de nouveau à leur première rencontre. Ils étaient au collège, et le garçon s'amusait à déplacer les objets par l'intermédiaire de son alter. Cela avait suffit à le rendre cool à ses yeux, tandis que Takara ne pouvait pas supporter ce jeune homme aux aspects rebels.
— Ma chérie je crois bien que ta mamie tente de te joindre, fit remarquer son amie en désignant son téléphone.
Akane sursauta, et décrocha sans plus attendre.
— Mamie ? Tout va bien ?
— Hum, ma petite j'ai une nouvelle à t'annoncer.
Le ton de sa voix trahissait une certaine angoisse. Akane fronça des sourcils, tandis que ses deux amis avaient mis un terme à leur conversation.
— Ton père m'a appelée hier soir. Il veut que tu ailles vivre chez lui dès demain. Avant de me faire ta crise de petite rebelle, pense au fait que c'est l'occasion pour toi de renouer des liens avec ton papa. Puis, tu sais aussi bien que moi que c'est de lui que tu tiens un de tes pouvoirs. T'as toujours rêvé de le maîtriser aussi bien que lui.
Elle était restée muette pendant quelques secondes.
— Si c'est une mauvaise blague tu peux cesser, c'est vraiment pas mon jour !
— Ma chérie, je pense que c'est pour ton bien.
L'adolescente sentit son cœur se compresser au fond de sa poitrine. Le monde semblait avoir cessé de tourner à ses pieds. Elle se mordit la lèvre inférieure, et pendant un instant elle pria pour se réveiller allongée sur son lit. Mais tout semblait réel. Une boule terrible se logea aussitôt dans son ventre. Elle aurait aimé envoyer le monde valser. Elle n'était plus en mesure de supporter cet empilement de situations désastreuses et par dessus tout, incompréhensibles. C'était comme si tout était lié, tout paraissait se liguer contre elle.
Malgré son envie irrépressible d'hurler contre le monde, Akane déglutit avant de répondre tout simplement :
— D'accord.
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