CHAPITRE 23 : LES TALENTS D'ASTA
( N'hésitez pas à accompagner votre lecture par la musique mise en médias ! )
CHAPITRE 23 : LES TALENTS D'ASTA
Posté derrière sa fenêtre, Asta fixait d'un œil émerveillé les flocons de neige qui se déversaient sur Tokyo. Un tel décor était resplendissant, et le saisissait jusqu'au plus profond de lui-même. Il était fasciné par un tel spectacle naturel. De somptueuses couches de blanc venaient recouvrir les toits de la ville, la couleur du ciel dansait entre le bleu et le gris, et depuis sa fenêtre il avait une vue parfaite sur les premiers sapins de Noël qui venaient décorer les rues. Il aurait aimé être dehors à cet instant même. Il aurait aimé aller au lycée, et profiter de ce temps qui laissait deviner la venue imminente d'une belle période de l'année, même si cette dernière avait le don de dépouiller son portefeuilles.
Un soupir s'échappa des lèvres de l'adolescent. Il en avait plus qu'assez d'être malade. Le jeune homme n'avait pas fermé l'œil de la nuit, et le résultat était que dès le matin il avait été victime d'une fièvre horrible. Une quinte de toux l'assaillit, et il se décida à rejoindre son lit.
- À croire que je tombe tous les jours malade, ça en devient chiant..., grogna-t-il.
Au même moment le cliquetis familier que produisait la porte de sa chambre retentit dans la pièce. Il leva rapidement la tête, juste assez pour voir que l'invité surprise n'était autre que sa mère.
- Asta, tu vas mieux ? s'enquit-elle.
- Non, mais je te promets que demain je pourrai courir comme une gazelle.
- Dommage alors... Y a une amie à toi qui veut te voir, dit-elle. C'est Akane, tu m'as vaguement parlé d'elle, mais...
En quelques secondes, Asta fut sur pieds. Il attrapa le premier sweat qui fut à sa disposition, enfila ses pantoufles et dévala les escaliers sous le regard interloqué de sa mère. Le fait de savoir qu'Akane l'attendait sur le perron de sa porte parvenait à le motiver à se lever de son lit, et à faire abstraction de sa migraine.
- Asta ! hurla sa mère. Veille à ne pas la contaminer !
Il ne pût faire attention à ses dernières paroles, car son regard venait tout juste de percuter celui d'Akane.
- Bordel de merde Akane ! hurla-t-il. Je peux savoir pourquoi t'as raté une semaine de cours ?
La jeune fille haussa des sourcils, et en dépit de son état Asta parvenait à être beaucoup plus énergétique qu'elle.
- Allé entre il caille !
- Je voulais juste savoir comment tu vas, dit-elle d'un ton ennuyé.
- Fais pas chier et entre !
- Wow, je me sens agressée.
Néanmoins, l'adolescente entra dans la petite maison d'Asta. Elle retira son bonnet, et secoua en un geste vif sa chevelure. Pendant ces quelques secondes, son ami la détailla du regard sans même en être conscient. Elle n'était pas jolie Akane. Elle possédait des cicatrices qui laissaient deviner ses activités sportives tout de même un peu dangereuses en dehors du lycée. Elle possédait des prunelles vairons, et ses yeux avaient cette touche charbonnée. Elle était mystérieuse. Silencieuse, solitaire et discrète. Non, Akane n'était définitivement pas jolie.
- Elle est belle, termina de penser Asta à voix haute.
- Hein ? T'as dit quoi ?
- Quoi, j'ai dit quoi ? s'affola Asta tandis qu'une teinte rouge parvenait à colorer son teint hâlé.
- T'as dit, "elle est belle", lui répéta Akane en lui lançant un regard suspicieux. De quoi tu parles ?
- De ta nouvelle doudoune !
L'adolescente lança un coup d'oeil à son vêtement.
- Ah... Je la trouve pourtant basique. Elle est... Noire.
- Mais faut croire que le basique, c'est beau parfois.
- Merci. J'aime beaucoup ton sweat, il est à l'effigie d'un film de science-fiction ?
- Comme d'hab', répondit-il aussitôt.
Et ce fut place au silence. Pour Asta, le silence n'existait pas. Le silence était la mort. Le silence était ce qu'il y avait après le vide, après la fin. Grâce à son alter, le jeune homme était presque capable d'entendre les battements cardiaques d'Akane. Il percevait le bruit de l'air, il entendait les sons rythmés et calmes de leurs respirations. Lorsqu'il en eut assez, l'adolescent ouvrit la bouche prêt à déballer une parole qui saurait mettre en place un sujet intéressant. Mais, la jeune fille à ses côtés le devança, ce qui eut le don de causer sa surprise.
- C'est beau la neige, souffla-t-elle.
Asta aurait aimé lui répondre, mais se ravisa aussitôt en réalisant que cette fille d'ordinaire si silencieuse allait enfin parler. Le ton de sa voix était doux et en même temps brisé.
- Grand-père et maman aimaient bien la neige. Quand j'étais petite j'adorais regarder les flocons déferler du ciel ça me faisait croire en cette magie de Noël.
La main blanche et délicate d'Akane se posa contre la vitre que contenait la salle de séjour des Amane.
Ses beaux yeux vairons tentaient de suivre chaque flocon.
- Je me souviens de ces moments où je courrai dans la neige. Maman me regardait en riant, parce que apparemment je n'avais vraiment pas peur de trébucher...
Asta écoutait avec attention les paroles de son amie. Les yeux du grand brun détaillaient chaque parcelle du visage de l'adolescente. À cet instant, le malheur de cette dernière le percuta de plein fouet. Elle était dotée d'une tristesse, d'une mélancolie sans nom qui la rendait aussi fascinante et émouvante qu'un beau poème lyrique.
- Je crois que..., finit-elle par dire en se retournant vers Asta. On vit avec nos souvenirs.
Le jeune homme les aperçut. Il les vit scintiller à la manière de deux pierres précieuses dans l'obscurité : les larmes d'Akane.
- Je..., murmura-t-il, c'est trop nul que je ne puisse même pas te réconforter à cause de mon système immunitaire en carton...
- Pas la peine de te fatiguer le malade ! réussit-elle à dire en un léger sourire.
Asta fut surpris de voir avec quelle vitesse Akane était parvenue à sécher ses fines larmes. L'adolescent s'approcha de son amie, cette dernière le regarda toujours munie de ce léger sourire qui savait embellir son visage.
- Tu sais Asta, c'est pas une petite grippe qui va me faire peur.
- C'est toi qui l'aura voulu Akane.
Le jeune homme prit son amie dans ses bras, et sentit un millions d'émotions positives l'entourer. En sentant Akane accepter son étreinte il ne pût s'empêcher de sourire. Elle ne sentait aucun parfum particulier. Elle sentait... La nature. Le non-artificiel.
En dépit de ses désirs, Asta dut se résoudre à relâcher la jeune fille peu désireux de lui transmettre son virus.
Il sourit en la regardant. Elle était beaucoup plus petite que lui, mais il ne doutait pas sur le fait qu'elle était bien plus forte que lui. Il passa sa main dans le carré de l'adolescente avant de secouer sa chevelure brune aux reflets argentés.
- Hé ! s'exclama-t-elle en reculant.
- Je suis peut-être malade mais on peut jouer à un jeu vidéo darling !
- Roh si tu veux ! râla-t-elle. Mais promets-moi d'aller voir un médecin !
La brune le menaça avec son petit index, et Asta partit en un rire avant de tousser à trois reprises.
- Ouais, ouais, promis.
- Je plaisante pas !
- Sans blagues.
- Asta !
Et la neige continuait à tomber tandis que les deux amis se chamaillaient en empoignant leurs manettes de jeu.
Asta n'avait pas menti. Il s'était décidé à aller chez le médecin. Résultats des courses : il se retrouvait assis dans cette chaise inconfortable, obligé d'attendre pour une simple prise de sang. C'était son médecin qui le lui avait recommandé, jugeant cela nécessaire. Asta était agacé, mais en même temps rassuré. Une fois cette prise de sang effectuée, il aurait des résultats positifs et serait enfin libre de retourner au lycée et de se prêter à toutes ses activités quelles soient sportives ou intellectuelles.
N'étant pas de nature patient, Asta secouait frénétiquement sa jambe gauche tout en lisant une tonne d'articles relatant des faits scientifiques.
Ce fut seulement au bout d'une heure qu'il pût enfin effectuer cette prise de sang. Il avait grimacé légèrement en recevant la piqûre, mais ce n'était autre qu'une petite douleur qu'il était persuadé d'oublier dès le lendemain. Il fut même heureux en dégustant les délicieux gâteaux qui lui avait été offert afin de récupérer du sucre. Il ne lui restait plus qu'à attendre les résultats afin de rassurer ses parents et Akane. Attendre. Il avait l'impression de ne faire que ça.
Au bout de quelques jours, le jeune homme reçut enfin un courrier lui disant de se rendre immédiatement chez son médecin afin que celui-ci puisse lui délivrer les résultats.
- On sera enfin fixés ! fit remarquer son père tandis que son fils prenait place sur le côté passager.
- Roh tu parles comme si j'avais la crève ! plaisanta Asta en levant les yeux au ciel. Franchement papa, il faudra que tu penses à rassurer maman parce qu'elle flippe à mort je te jure ! Tu sais quoi ? Elle voulait même pas que j'aille au lycée cette semaine !
- Comprends là, elle te voit avoir mal tous les jours, lui expliqua son géniteur en posant sur lui un regard aussi ébène que le sien.
- Je n'ai pas mal, c'est juste que mon système immunitaire est un peu ramolli ces derniers temps. Mais je me sens super bien aujourd'hui.
Asta avait conscience de la fausse véracité de ses propos. Le garçon essayait de relativiser en se disant que dans une telle situation, mentir n'était pas un crime. C'était un art, et Asta était un artiste. Il était doué, et excellait dans plusieurs domaines. Peut-être était-ce la raison pour laquelle il parvenait à sourire en dépit de son immense fatigue. Il riait même, et réussissait avec des efforts non-négligeables à étouffer ses toux. Et enfin, il avait réussi avec brio à dissimuler sa perte de cinq kilos en un mois. Il n'avait fait part à personne de son anxiété en ce qui concernait le courrier qu'il tenait entre ses mains. En règle générale, les résultats d'une prise de sang étaient directement divulgués par lettre. Dans son cas, il s'agissait plus d'une convocation qu'autres choses.
- Hé tu descends ? lui fit remarquer son père en quittant lui-même le véhicule.
- Oui, oui.
- Finalement tu m'as l'air préoccupé Asta...
- N'importe quoi, je pensais juste à un devoir de maths. Il est super compliqué et demande de la réflexion même aux moments les moins appropriés.
Le jeune homme pût lire une lueur de tristesse dans le regard de son père. Ce dernier fourra ses mains dans ses poches et avança aux côtés de son fils.
Lorsqu'ils furent chez le médecin, Asta savait qu'il n'était pas là pour une simple visite médicale. Ce fut en prenant place sur le siège en cuir et en détectant le léger pli anxieux sur le front de son médecin qu'il comprit que la situation ne serait pas aussi paisible qu'il pensait. Il s'imagina aussitôt un scénario terrible, tellement horrible que peu importe le verdict, il serait forcément soulagé.
- Alors monsieur Amane, vos prélèvements sanguins nous ont permis d'établir un bilan de votre état, commença le médecin du haut de sa voix qui était légèrement basse.
" D'ordinaire il a une voix qui porte. En plus, d'habitude, il aime bien me parler de plusieurs trucs qui n'ont rien à voir avec ma santé, comme les études par exemple... "
- Je vais éviter d'user de mots très techniques messieurs, fit remarquer le médecin. Alors, vos prélèvements sanguins ont révélé une production anormale de globules blancs et de globules de rouges.
Asta encaissa les propos du docteur tout en priant intérieurement pour qu'il lui déballe la conclusion. Il osa lancer un coup d'oeil en direction de son père, qui commençait déjà à passer ses mains sur son visage. Il se mordait la lèvre inférieure, et cela le fit penser à Akane.
- Vous l'aurez compris..., termina le médecin. En dépit de toutes les choses exceptionnelles dont nous sommes aujourd'hui capables... Je... J'ai le regret de vous annoncer que vous avez une vieille maladie qui est devenue rare au cours du temps.
Asta hocha de la tête, et attendit avec un calme exemplaire que le médecin lui dise enfin ces mots.
- Asta, vous souffrez d'une leucémie aiguë.
Et ce fut la première fois que le jeune homme l'entendit enfin : le silence. Le silence de la mort. Il était dur et poignant. Il broyait son cœur et ligotait sa gorge.
Il regarda son père, qui n'avait pas bougé d'un cils. Alors, fidèle à lui-même, Asta donna une petite tape au bras de ce dernier qui sursauta.
- Bon bah finalement je crois que c'est mort pour rassurer maman, dit-il en faisant descendre son pouce vers le bas en signe de défaite. Non en fait, tu sais quoi ? Je crois qu'on peut essayer de lui faire croire qu'un cancer du sang ce n'est pas si grave que ça !
Et il sourit.
Il dissimula sa peine derrière un léger sourire qui semblait dire que tel était le cycle de la vie. Tel était le destin. Il dissimula son déchirement intérieure parce que peu importe la situation, Asta était et demeurerait un artiste.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro