CHAPITRE 22 : ELLE S'APPELLE HURI
CHAPITRE 22 : ELLE S'APPELLE HURI
À cette époque, ses yeux aussi verts que l'émeraude faisaient émerger la pâleur de son teint. Nul ne pouvait passer à côté du fait que cette enfant était détentrice d'une peau de porcelaine, aussi blanche que de minces flocons de neige se laissant tomber depuis la voûte céleste. Ses cheveux étaient longs, blonds comme le soleil, et la plupart du temps tressés en épis de blé. Quant à ses lèvres, ces dernières étaient d'un rouge profond, aussi vif que le sang.
Elle s'appelait Huri.
À première vue, ce n'était qu'une petite enfant. Une gamine qui courrait à vive allure dans ce parc d'un quartier de Moscou. Elle aimait le froid, et ce n'était pas un effet de ses origines russes. Elle appréciait cette température glaçante. Elle préférait les ciels grisâtres, aux rayons aveuglants et parfois brûlants du soleil. Elle aimait la pureté de la neige.
Elle aimait le froid.
Huri était jolie. Mais lorsqu'on prenait la peine de la regarder de plus près, on pouvait apercevoir ses longues canines. Elle n'avait pas des doigts d'enfants. Ses ongles étaient étranges, un peu pointus.
" Regardez ! Elle a des griffes ! "
" Ne restez pas avec elle ! C'est un monstre ! "
" Mais quel alter effrayant... "
C'était ce genre de paroles que les enfants de l'orphelinat lui lançaient à la figure. Elle savait susciter la peur, elle qui pourtant était si pure.
Un beau matin, en se levant la petite Huri était persuadée du fait que sa journée allait être similaire à celle d'hier. Les murs de l'orphelinat, les regards craintifs, et les remarques horribles. C'était devenu une routine pour la jeune enfant qui n'avait jamais connu ses parents. Elle n'osait pas imaginer une vie paisible, comme celle des personnages de dessins animés. Ils étaient accompagnés de leurs parents, et de leurs amis. Huri, n'avait ni l'un ni l'autre, et en dépit de son très jeune âge elle restait convaincue que le bonheur ne lui ouvrirait jamais ses portes.
Alors quelle ne fut l'étendue de sa surprise lorsque ce matin-là, Madame Adrielle était venue la voir, avec un léger sourire aux lèvres.
- Prépare-toi Huri, je crois que tu vas bientôt nous quitter, lui avait-elle dit.
Son cœur fit un bond dans sa poitrine. Ses yeux verts s'écarquillèrent, et un hoquet de surprise s'échappa de ses lèvres.
- Je... Je vais partir ?
- Oui Huri, tu vas être adoptée. Tes nouveaux parents s'appellent Anastasia et Vladimir, lui expliqua-t-elle. Tu seras la fille des Andropov, et figure-toi qu'ils ont même un fils qui s'appelle David. Tu ne seras plus seule Huri.
- Oh... Ils m'ont bien vue ? Ils savent pour mon... alter ?
- Ils t'ont bien vue ne t'en fais pas ! ria Adrielle. Et ton alter, ils l'apprécient.
Ce jour-là, Huri l'avait enfin aperçu. Elle était persuadée du fait qu'il se tenait enfin en face d'elle, les bras ouverts. Le bonheur.
Entre chacun de ses doigts resserrés en un poing, la jeune blonde possédait des aiguilles minces et aussi tranchantes que les crocs d'une bête. Elle se concentra, et laissa pendant quelques secondes le silence virevolter autour d'elle. Les oiseaux chantaient dans le ciel, les arbres majestueux produisaient de l'ombre, et l'herbe verdoyante à ses pieds laissaient échapper une magnifique odeur naturelle. Ses prunelles émeraudes se centrèrent sur sa cible située à des kilomètres d'elle.
- C'est bon, souffla-t-elle.
Et ce fut en tournoyant sur elle-même, à la manière d'une danseuse qu'elle envoya ses aiguilles coincées entre ses doigts en direction de sa cible accrochée sur un arbre. Une action aussi rapide demandait une ressource d'énergie assez importante, mais les entraînements à répétition avaient suffit à rendre Huri encore plus forte qu'elle ne l'était déjà.
Elle regarda avec intérêt la vitesse de ses aiguilles qui effectuaient avec brio le même chemin. Sa vue supérieure à la moyenne se concentra sur sa cible.
" Maintenant, elles devraient se fixer."
Malheureusement pour l'adolescente, ce qu'elle avait prédit ne se déroula pas. Une silhouette noire s'était imposée en un éclair devant sa cible. D'un geste de la main, il fit apparaître une mince lumière bleue qui suffit à stopper les aiguilles. Ces dernières tombèrent aussitôt au sol.
- Quoi ? Mais pourquoi faut-il qu'il vienne...
- Bouh, souffla une voix taquine à son oreille.
En se retournant, elle ne fut pas surprise de voir derrière elle Zachariel. Il arborait un sourire énigmatique, et semblait fier de son coup.
- Est-ce que tu réalises que tu viens de ficher en l'air mon travail ? J'espère que t'as une bonne raison.
- Pas la peine de s'énerver la pompeuse de sang, dit Zachariel en levant les yeux au ciel. Plus sérieusement, c'était un joli coup que t'allais faire.
À ses mots, il fixa l'horizon en face de lui, en plaçant sa main horizontalement au dessus de ses yeux. Il laissa échapper un souffle d'ébahissement.
- Ta cible était super loin dis donc ! Mais dommage pour toi ! J'aime toujours surgir aux moments où les gens ne veulent pas du tout me voir. C'est... Magique !
Huri fixa pendant quelques secondes son éternel coéquipier. Presque une dizaines d'années les séparaient, et pourtant, il lui arrivait parfois de penser que peut-être son cerveau n'avait pas suivi la croissance de son corps.
- Bon, ton but c'est de me faire rager ou m'expliquer la situation ? J'étais en train de m'entraîner, je te le répète encore une fois, oui !
- Réunion du Conseil de la Némésis.
Huri s'abstint de répondre quoi que ce soit. Son sang fit un tour dans ses veines, et son coeur loupa un battement. Ces simples mots suffisaient à glacer la totalité de son corps.
Elle avait assisté à une seule réunion du Conseil de la Guilde. La pression, et l'atmosphère qui régnaient étaient tellement étranges et pesantes, qu'elle n'avait plus envie de participer à une seule de ces rencontres. Puis, il y avait ce chef. Henael.
- D'accord... Je dois venir ?
- Bien-sûr idiote, sinon je n'aurais pas pris la peine de te déranger.
- Henael sera là ? Y aura Ken aussi j'imagine ?
Zachariel haussa les sourcils, surpris par ces deux questions.
- Ça t'effraie ?
- Je n'ai pas dit ça.
- Huri, regarde-moi.
Le grand blond attrapa avec une tendresse surprenante la petite mâchoire de la jeune fille. Forcée, Huri affronta ses yeux d'un bleu nocturne. Elle serra les dents, et se fit violence pour ne pas craquer. Il sentait le sang. Mais pas le sang qui la répugnait. Celui qui l'attirait. C'était le sang d'un corps plein de vie, rempli de force et de ressources d'énergie.
" J'ai beau être une vampire, le sang ne m'a jamais autant attirée... "
Elle laissa ses yeux verts descendre jusqu'à son cou. Huri s'imagina enfoncer ses canines dans cette peau blanche. Celle de Zachariel.
Ce dernier approcha le visage de la blonde du sien. Il positionna ses lèvres à quelques centimètres des siennes, et esquissa un sourire taquin. Il la regardait de haut, et ce simple fait agaçait Huri.
- C'est Henael ? commença-t-il. Il te fait aussi peur que ça Huri ? Je suis...
Ses lèvres étaient roses. À chacun de ses combats, il arrivait à les faire saigner, Huri pensa qu'il devait avoir le don de cicatriser très vite.
Le cœur de l'adolescente battait avec une vitesse affolante. Elle aurait aimé le faire taire par tous les moyens.
- Lâche-moi Zach' ! hurla-t-elle en se libérant de son emprise.
Elle se retourna, et eut le plaisir de ne plus voir son regard. Ses mains tremblaient.
- Désolé... Je me suis emportée. Mais tes airs taquins là... Ils me mettent hors de moi !
Zachariel explosa de rire. Cela eut le mérite d'apaiser Huri.
- Bon OK. Si ça te dérange tant d'aller à cette réunion, t'as qu'à faire comme si on allait quelque part d'autre. Une soirée pyjama, c'est beaucoup plus cool tu ne penses pas ?
Elle était peut-être énervée. Apeurée. Mais pas même ces multiples émotions ne pouvaient l'empêcher de ricaner à une énième bêtise de ce grand blond si spécial.
Postée aux côtés de Zachariel, Huri fixait avec ses iris vertes l'immense édifice qui se dressait en face d'eux. Aux yeux des autres, ce n'était qu'un vieux bâtiment délabré que personne n'aimait fréquenter. Mais cette vision était en réalité un beau sort crée de toutes pièces par Jill. Cette jeune femme aux longs cheveux violets avait pour Alter la création d'illusions. Grâce à ses dons, seuls les membres de la Guilde, possesseurs de la marque, pouvaient clairement apercevoir ce bâtiment qui faisait penser aux châteaux des temps antiques.
"La marque..."
Huri tâta avec crainte la petite trace noire à son poignet. Elle s'efforça de ne plus penser à elle, afin d'oublier la douleur que lui avait provoquée l'application de celle-ci.
Le ciel était gris.
C'était tout ce qu'elle aimait.
Elle n'avait rien contre la pluie diluvienne qui venait s'abattre sur eux, et mouillait leurs longues vestes noires à capuche.
- Huri, on y va.
L'adolescente hocha de la tête. Elle tira sur sa capuche avant de suivre la silhouette noire de Zachariel qui venait de se poster en face de cette porte en bois. Cette dernière s'ouvrit aussitôt, et les deux alliés entrèrent. Les lieux étaient d'un calme malaisant. Huri sentit ses cheveux se dresser sur sa nuque alors qu'elle retirait son couvre-chef.
- Vous voilà. Vous en avez mis du temps, soupira une voix féminine.
- Tu sais comment je suis Jill. Et Huri est mon associée, alors c'est sans surprise que ma nature de retardataire vient de déteindre sur elle.
- Bonjour Huri, dit Jill en lançant un regard hautain à l'adolescente.
Ses yeux noirs semblaient désireux de sonder chaque parcelle de la jeune blonde. Or, cette dernière avait appris très jeune qu'il ne fallait pas se laisser intimider par la nature des regards qui se posaient sur nous.
- Je ne comprends toujours pas Zachariel, cracha la magicienne. Pourquoi avoir refusé qu'elle soit sous la tutelle de l'Institut, comme tous les jeunes gens qui veulent intégrer la Guilde ?
- Je voulais juste éviter à Huri de se coltiner des adolescents avec les hormones en plein effervescence.
L'adolescente serra des poings en entendant la mention de ce fameux "Institut". C'était d'ailleurs en ce lieu qu'ils étaient en ce moment même. Pour les plus jeunes, devenir un membre de la Guilde Némésis demandait un long cheminement, un apprentissage qui s'apparentait à l'enfer. Huri ne savait pas comment remercier Zachariel de l'avoir dispensée de ces années de réclusion dans ce sombre institut.
- J'imagine que les Apprentis sont tous dans leurs chambres ? devina Zachariel.
- Oui, lui confirma Jill. Ken a donné l'ordre ce matin même. Interdiction pour eux de sortir tant que la réunion du Conseil de la Guilde ne s'est pas achevée.
- Bien, c'est mieux ainsi.
Les deux adultes se mirent à avancer et Huri n'eut d'autres choix que de les suivre. Son regard était hésitant et se posait sur chaque objet qu'elle venait à rencontrer sur les couloirs sombres de cet Institut. En montant les escaliers en colimaçon, elle sentit son cœur cogner contre sa poitrine. Sa gorge devint sèche. Elle avait peur.
Une porte à double battants sur lesquelles on pouvait voir plusieurs illustrations faites de peinture, se dressaient en face d'eux. Zachariel accorda un hochement de tête à Jill, et celle-ci ne se fit pas prier pour ouvrir les portes, tandis qu'Huri retenait son souffle.
Les lieux étaient sombres. La seule source lumineuse provenait des bougies bleues assemblées en un cercle, sur cette immense table. Face à un tel décor, la jeune blonde déglutit. Elle sentit de nouveau la douleur lui courir sur son poignet.
- Il ne manquait plus que vous.
- Je sais on a eu un peu de retard, dit Zachariel. Je te prie de nous excuser Henael.
Même lorsqu'il se retrouvait en face d'un tel homme, Zachariel parvenait à demeurer aussi nonchalant.
- Installez-vous. La réunion peut commencer.
Les trois derniers membres de la Némésis prient place sur les immenses sièges disponibles. Autour de cette table, quelques individus entièrement vêtus de noir se regardaient sans prononcer le moindre mot. Huri fixait avec intensité Henael. Seules ses prunelles rougeâtres pouvaient s'apercevoir dans cette pénombre bleutée.
- Si je vous ai réunis c'est bien pour établir un bilan, commença Henael. Nous avons beau exister, les activités criminelles deviennent de plus en plus cruelles, elles s'intensifient et envahissent le globe terrestre à la manière d'un virus.
- Alors, tu crois que c'est le moment de mettre en marche un de nos plans ? s'enquit Jill.
- Vous m'excuserez, les interrompit Zachariel, mais de quel plan parlez-vous ?
" Zachariel, t'es pas sérieux ! " s'exclama Huri à l'intérieur d'elle-même. "
- Sanguinaire et imbécile, lâcha une voix. C'est bien deux mots qui te vont à merveille mon cher Zachariel.
Ce dernier laissa échapper un léger ricannement, fidèle à lui-même.
- Vas-y Sirius, le grand stratège, fais-toi plaisir et éclaire la situation.
- Le plan auquel Henael fait référence, répondit le brun sans prêter attention aux paroles provocantes de son interlocuteur, c'est la véritable instauration de la Terreur pour accéder à la paix. Les super-héros, dit-il d'un ton amer, ne sont autres que de piètres clowns avec des costumes ridicules. Ce ne sont pas eux qui sauront faire office d'obstacles à de grands criminels. Il est temps d'attaquer.
- Vous voulez attaquer..., osa commencer Huri. Si je comprends bien, c'est le moment pour nous de montrer que l'on existe ?
- Exactement gamine, lança Jill.
- Quelle sera la première opération ? s'enquit un autre membre.
- La première opération, répondit Henael de sa voix sombre, aura lieu dans deux jours, dans les environs de une heure du matin. Quatre membres de la Guilde iront s'infiltrer dans une prison, et exterminer une liste précise de criminels. Vous avez l'interdiction formelle de tuer une quelconque personne ne figurant pas sur cette liste. Dans le cas contraire... Je préfère ne pas y penser.
- Il est évident qu'un tel acte sera beaucoup médiatisé, conclut Jill.
- Jusqu'à maintenant, les autorités pensaient être confrontées à un tueur particulièrement doué, fit remarquer Sirius. Nos actions sont vues comme de simples imitations de celles de Ken : l'Ombre Vengeresse.
- Eh bien il est temps de leur faire comprendre que s'ils avaient peur de Ken, alors ils se feront dans leur froc avec nous, lâcha Zachariel en fronçant des sourcils.
La réunion se poursuivit, et Huri écoutait avec attention les directives d'Henael. Au fond d'elle, la jeune fille comptait chaque seconde qui la séparait de la fin de ce Conseil. Ce fut seulement au bout de ce qui parut durer une heure, que la voix d'Henael prononça cette phrase qu'elle attendait tant :
- Vous pouvez disposer.
Les quelques membres se levèrent et quittèrent la salle, aussi silencieux que des ombres. Huri s'apprêtait à suivre Zachariel lorsque la voix d'Henael la stoppa dans sa lancée.
- Huri. J'ai deux mots à te dire.
- Oui ? dit-elle non sans avoir déglutit.
- Tu vas être heureuse. J'ai une mission pour toi. Une mission que tu devras accomplir sans Zachariel.
Ses yeux verts s'écarquillèrent. Un souffle de stupeur s'évada de ses lèvres contre sa volonté.
- J'imagine que tu connais mon alter, poursuivit-il. Tu sais en quoi il consiste. Nous ne sommes pas si différents que ça toi et moi, dit-il en la fixant du haut de ses yeux rouges.
- Oui. Mais que voulez-vous ? Comment puis-je servir la Guilde ?
- Nous allons bientôt émerger, ce qui signifie que ma puissance devra augmenter. Nos ennemis deviendront plus nombreux.
- J'ai compris. C'est d'elle que vous avez besoin : Akane Isayo.
Un silence s'installa, et Huri demeura dans le doute. Cette attente devenait insupportable.
- La fille de Ken est la pièce maitresse de mon échiquier. Elle est la reine. Mais là, à l'instant même où je te parle j'ai besoin de quelqu'un d'autre. Le fils d'Endeavor.
Les mains d'Huri se mirent à trembler.
" Le fils d'Endeavor... Il ne veut quand même pas que je..."
- Il vous faut les alters de Shoto Todoroki.
- Exactelent. J'ai en ma possession l'eau. Mais, pour atteindre mon but il me faut les autres éléments. Et je vais pouvoir en trouver deux chez ce jeune garçon. En tout cas Huri, je constate que tu as un esprit perspicace ! Je commence à comprendre pourquoi Zachariel place autant d'espoirs en toi.
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