Son sac de cours sur l'épaule et la tête ronde d'Ilsang dépassant de son épaisse doudoune jaune, Minho marchait tranquillement dans la rue sombre. De nombreux sacs en plastiques sciaient ses doigts, alors qu'il rentrait chez Changbin. 

Il était allé faire les courses avec Seungmin qui avait insisté pour acheter deux-trois vêtements à Ilsang. Il sourit en repensant à cette douce fin d'après midi. Seungmin avait beau jouer les dure, au fond, il restait tout de même un enfant. Et même si il ne faisait que râler, Minho savait qu'il aimait beaucoup Ilsang et Changbin. 

Le brun soupira bruyamment lorsqu'il arriva devant la grande porte de l'immeuble du noiraud. Il posa ses nombreux sacs à terre, étirant quelques instant son dos douloureux. Il se maudit d'avoir prit autant de choses en voyant les escaliers arriver, mais se donna du courage en repensant au joli sourire qu'avait fait Ilsang en voyant ses nouveaux vêtements. Il sourit doucement, avant de pousser un soupir de courage, reprenant ses sacs en main. 

Une fois arrivé sur le palier de l'appartement de Changbin, deux étages plus haut, Minho soupira de soulagement. Il était à bout de souffle et ne sentait plus ses doigts, mais il avait finalement réussi. Il ouvrit la porte, ses talons claquants contre le carrelage de l'entrée, avant de déposer ses courses dans le hall. 

- Binnie, je suis rentré ! S'écria-t-il en retirant ses bottes qui commençaient à le faire souffrir, veillant à ne pas réveiller Ilsang qui s'était endormie. 

Une fois la veste de Changbin raccrochée au porte manteau, il entra dans la pièce principale du petit appartement, pressé de revoir le noiraud. 

- Binnie ? Appela-t-il en lançant un regard panoramique à la pièce. 

- Minho ! Fit le noiraud en se précipitant vers le nouvel arrivant. J-je...

- Ah, il est enfin là. Fit une femme d'âge mur en se levant du canapé, suivie par un homme fin. 

La femme avait un aire des plus sévère, ses cheveux tirés en un chignon sec et le visage fermé. Derrière elle, un grand et maigre homme en costume noir se tenait droit comme un I. Il tenait dans ses mains un calpin et un crayon à papier aussi pointu qu'une dague. Son air aigrie et sévère n'était pas plus accueillant que la femme, et Minho recula d'un pas. À sa droite, Changbin semblait des plus inquiet, tordant ses mains entres-elles. 

- Eh bien, monsieur Lee, nous vous attendions. Fit la femme avec un sourire des plus glacial. 

- Qu'est ce que vous voulez ? Demanda Minho, incertain. 

- Ah oui, suis-je bête, je ne me suis pas présentée. Sourit platement la quarantenaire. Byun Jaehwa. Fit-elle en lui tendant la main. Mais pour vous ce sera madame Byun. 

- Et vous êtes ? Demanda le brun, ignorant sa main tendue, toujours sur la défensive. 

Changbin lui donna un léger coup de coude, et il saisi à contrecœur la main fripé qu'on lui présentait. 

- Je suis inspectrice des familles d'accueil de l'orphelinat de Gwangjin. Je suis venue voir Ilsang. 

Minho se figea. Il porta automatiquement ses mains devant le petit garçon toujours endormie contre son torse. 

- Veuillez nous le remettre, que nous puissions exécuter les examens. 

- Mais... Il dort. 

- C'est pas grave, nous le réveillerons. Dépêchez vous, nous n'avons pas toute la nuit...

Minho détacha à contrecœur le petit garçon qui grogna, mécontent de quitter le torse chaud du futur avocat. Il le donna délicatement à la femme, bien qu'il sentait son cœur se serrer. Il détestait le voir entre les mains d'inconnus, mais encore plus avec ces gens aussi froids que des congélateurs. 

La femme récupéra sans grâce le petit panda, mais à peine le brun l'avait-il lâché qu'il se mit à pleurer. Changbin réagis immédiatement, inquiet au plus haut point, mais la femme se tourna, faisant face à la table de la cuisine sur laquelle trônaient tout un tas d'objets. 

- Bien, commençons par le mesurer. 

Elle posa Ilsang à même le bois de la table, avant de saisir un ruban mesureur et de commencer son examens, le petit garçon pleurant toujours à ses oreilles. Changbin s'approcha de Minho, le visage crispé d'inquiétude, et le futur avocat lui pris la main, tentant de les rassurer tous les deux. 

- Raah, mais c'est pas possible, vous pouvez pas lui donner sa sucette, qu'il arrête de brailler ? Râla la femme en se retournant. 

Les deux jeunes hommes se regardèrent, avant de se retourner vers la femme. 

- C'est que... Il n'en a pas. Fit Changbin.

- Quoi ? Comment ça, il n'en a pas ? 

- Et bien, d'habitude il ne pleure pas beaucoup, ou alors Minho ou moi se débrouille pour le calmer. Il n'a jamais pris son pouce non plus, alors on en a déduit que ça n'était pas nécessaire...

- Bien sûr que si, c'est primordiale ! Assurez-vous de lui en acheter pour la prochaine inspection. Et faites-le taire, par pitié !

Minho allait répliquer, mais Changbin lui pressa doucement la main, avant de la lâcher pour aller se placer aux côtés d'Ilsang. Il plaça sa main au dessus du bébé qui lui attrapa les doigts, arrêtant instantanément de pleurer. Le femme fronça les sourcils. 

- Vous semblez vous être beaucoup attaché à lui. N'oubliez pas qu'il doit être adopté. Vous devez veiller à ne pas occuper son cœur, laissant la place à ses futur vrais parents. 

Les deux jeunes hommes accusèrent le coup, bien qu'ils sentirent leurs cœurs se serrer. Ilsang était tout, pour eux. Alors entendre cette femme sortie de nulle part leur annoncer que ce dernier allait les quitter pour d'autres parents et ne devait pas s'attacher à eux était on ne peut plus douloureux. 

La femme se retourna vers Ilsang, son chien d'assistant inscrivant tout dans son mini carnet, le visage de marbre. Elle tira une grande balance en métal devant elle, saisissant le bébé qui s'accrochait fermement au doigt de Changbin. Elle commença à le déshabiller, sous les yeux grands ouverts du noiraud. Pourtant, il ne dit rien. 

Une fois Ilsang uniquement vêtu de sa couche, elle le porta et s'apprêta à le déposer sur la balance. 

- Attendez ! S'écria Changbin. Vous allez le poser comme ça ? Nu sur le métal froid ? 

- ça ne sera que pour quelques minutes. Il ne faut pas fausser le poids. 

Et sur ces mots, elle posa le bébé dans le bac en métal froid, ne faisant pas attention à ses pleurs. 

- Vous lui donnez bien quatre repas par jours, dont deux de purées d'aliments ? Demanda-t-elle en vérifiant le poids d'Ilsang sur le petit cadrant de la balance. 

- Oui. Répondit Changbin. Il mange bien et de tout. 

- Bien. Il n'a pas de problème quelconque ? Difficulté à parler ? Retard de croissance ou d'agilité ? ça rendrait plus difficile son adoption.

- Et bien, non. Rien de flagrant. Il commence à faire ses premières dents. 

- Seulement maintenant ? S'étonna la femme, ouvrant en grand la bouche du bébé qui se plaignit bruyamment. Il a un peu de retard, en effet. Assurez vous de tout faire pour qu'il ne prenne pas plus de retard que ça. 

- C'est pas si grave... Intervint Minho.

- Bien sûr que si ! Il doit être parfait si il veut avoir ne serait-ce qu'une chance de se faire adopter.

Changbin baissa la tête, et la femme reprit Ilsang, lui faisant passer tout un tat d'examens tout en posant des milliers de questions plus personnelles les unes que les autres. Changbin répondait à chacune d'elles, sans broncher, sous le regard brisé de Minho. 

Puis, au bout d'un temps qui leur parut une éternité, la femme déclara qu'elle avait assez d'informations. Et, après un dernier regard méprisant sur le studio du noiraud, elle partit, son assistant sur les talons. 

Changbin soupira, serrant Ilsang contre lui.

- Chuuut, c'est fini, Ilie. Lui souffla-t-il en le berçant doucement. C'est fini...

Minho pinça ses lèvres entre elles, rejoignant les deux hommes de sa vie. Il passa derrière le noiraud, enserrant délicatement sa taille de ses bras, le menton sur sa tête. 

Ils restèrent ainsi un moment, savourant leurs présences si réconfortantes. Puis, Changbin se dégagea délicatement, partant coucher Ilsang qui s'était endormi, entouré des deux jeunes hommes. Minho partit chercher deux bières dans le frigo, avant de s'asseoir sur le canapé. Lorsque Changbin le rejoignit, quelques minutes plus tard, il lui tendis une cannette. Sans rien dire, le cadet la saisi, s'asseyant lourdement sur le divan. 

Aucun d'eux ne parlait. Ils réfléchissaient, profitant de la boisson glacée qui traversait leurs corps, les yeux dans le vague. Dans le salon sombre et silencieux, ils essayaient de donner un sens à leurs pensées, épuisés par le temps. 

- Minho... Commença Changbin. Je-... On peut plus continuer comme ça... Ilsang-

Sa voix se brisa, et une larme brilla le long de sa joue. Le brun se tourna vers lui, le prenant dans ses bras alors que ses membres commençaient à trembler. Tout en caressant lascivement ses cheveux, il lui chuchota des mots doux, autant pour le rassurer lui que pour se rassurer lui-même. 

Cette nuit là, aucun des deux ne put dormir. Mais c'est aussi cette nuit là qu'ils prirent la plus heureuse décision de leurs vies.