- En fait... Commença Sumin en tournant son visage vers la sombre mer qui se confondait avec le ciel étoilé. J'aime les choses qui sont considérés comme '' pour femmes '' par la société. Pas tout, hein ! Jamais tu me verras en jupe ou en robe !

Il rigola en tournant la tête vers moi, ses yeux brillants de malice, mais aussi d'une pointe de tristesse bien cachée. Je souris, puis il se reconcentra sur les flots lointains, avant de continuer.

- Mais j'aime bien le maquillage et les bijoux. Quand j'en porte, j'ai l'impression que je suis protégé du monde et que plus rien ne peut m'arriver.

Mon regard se perdit sur ses poignets couverts de bracelets en tous genre. Voilà la raison de tout ce poids de bijoux qui ne le quittait jamais. Même en nous enfuyant en pleine nuit, il avait pris le temps d'enfiler quelques bracelets...

- Mais en plus d'aimer ce genre de choses, j'aime les hommes. Et-... Bon. Tu te doutes bien que ça n'est pas très apprécié.

Je souris tristement, avant de moi aussi porter mon regard vers l'horizon qu'on ne distinguait qu'à peine.

- J'ai grandi à Mokpo, comme tu le sais. Mais mes parents se sont séparés. J'aurais bien aimé rester là-bas avec mon père, mais ma mère m'a emmené à Incheon. Depuis je vis avec elle. Mais y'a quelques mois, elle a malencontreusement découvert les préférences que je tenais absolument à lui cacher. Eeeet... elle a pas trop apprécié.

Il soupira longuement en repensant à ce souvenir, et je ne sais pour quelle raison, mon cœur se serra doucement.

- Bien sûr, elle s'est fourré dans la tête que c'est une maladie que j'ai attrapé et que je dois guérir. Donc elle m'a emmené voir un psy. Il était sympa, d'ailleurs ! Et lui au moins il avait la tête sur les épaules. Comme il savait que c'était totalement inutile, on a discuté pendant toutes les séances !

Je souris tristement. Pour moi, aller chez le psy n'avait pas été aussi plaisant...

- Mais ma mère voulait toujours plus. Alors, le psy m'a envoyé ici. Il m'a dit que c'était l'endroit le moins pire qu'il avait trouvé et de le prendre comme une colonie de vacances. Moi, ça me vas ! Comme ça je suis loin de ma mère, je découvre Busan où j'ai toujours voulu aller, je suis proche de la mer, y'a plein de jeunes de mon âge, et je fais ce que je veux !

Il tourna la tête vers moi et je lui souris doucement. Je ne trouvais rien à dire. Alors, je ne dis rien.

Un long silence s'installa et dura de longues minutes, avant qu'il ne se tourne soudainement vers moi.

- Et toi ? Sourit-il en inclinant doucement la tête sur le côté.

Je haussais les sourcils, et il précisa

- Pourquoi t'es au centre, toi ?

Mon cœur me piqua, et mes poumons commencèrent lentement à se serrer. En repensant à la raison de ma venue, j'avais envie d'aller les voir. Maintenant. Tout de suite.

Mais je n'en fis rien. Je me contentais de me mordre frénétiquement les lèvres, le regard perdu dans le paysage sombre qui s'écoulait en contrebas. Je sentais le regard de Sumin posé sur ma personne, et mon estomac se tordait un peu plus à chaque secondes.

D'un côté, j'avais envie de lui dire. J'avais envie de me confier à lui comme il s'était confié à moi. Mais... j'avais peur. Infiniment peur. Comme toujours.

Soudain, un long frisson parcourut tout mon corps tandis que je sursautais. Je tournais la tête vers Sumin qui avait délicatement glissé sa main dans la mienne. Il me souriait. Les yeux brillant de bonté et ses cheveux d'azur dansant autour de son visage, il me donnait silencieusement la force de continuer.

À cet instant, mon cœur avait fait un bond dans ma poitrine. Mais ça n'était pas désagréable comme d'habitude. Loin de là. Cette fois, j'avais sentis tout mon corps se réchauffer et mes pommettes prendre une teinte rosée indiscernable à cause de la nuit.

Et ce simple geste m'avait donné, pour la première fois de ma vie, l'envie de continuer. De faire ce que j'avais envie de faire, de dire ce que j'avais envie de dire, et de ne plus me poser de questions. C'est à partir de ce moment, que mon regard a vraiment commencé à changer.

- En fait... Commençais-je prudemment, ma main libre triturant nerveusement le bas de mon sweat. M-moi aussi, je suis allé voir un psy. Enfin, mes parents m'y ont obligé. Disons que j'ai tendance à... parler tout seul...

Il me regarda d'un air étonné, et je m'empressais d'ajouter

- J-je suis pas malade ! C'est juste que... Ben...- ... C'est difficile à expliquer...

- Alors ne l'explique pas. Sourit doucement le garçon d'océan, les quelques étoiles qui brillaient dans le ciel se reflétant dans ses yeux. Raconte-moi.

J'ouvris de grands yeux, tandis que des milliers de petits picotements parcouraient mon corps. Puis, je pris une grande inspiration, avant de faire le saut dans le vide qui me terrifiait tant.

- Ils sont sept. Je sais plus comment ils sont arrivés, mais ils sont là. Tous les sept. Et ils sont presque tout pour moi. ... Ils sont tous très différents, mais je les aime tous autant. Ils me font rire, ils prennent soin de moi, et j'aime passer du temps avec eux plus que tout au monde. Mais... je n'en ai pas le droit. Et c'est pour ça que je suis ici. Je suis pas malade. Mais le psy voulait me faire changer d'air et prendre un peu de distance. Alors, il m'a envoyé dans ce centre.

Je tournais la tête vers Sumin, et il jeta sur moi un regard bienveillant mêlé à quelque chose que je ne saurais décrire.

- Comment ils sont ? Tous les sept...

Sa question me surpris, mais je souris, reportant mon attention vers les lointaines lumières de la ville.

- Ils sont... gentils. Ils sont comme une grande famille. Ma grande famille.

Je souris, et Sumin resserra sa main dans la mienne.

- J'imagine que le psy t'a dit de ne plus les voir pendant le séjour ?

Je hochais doucement la tête à l'affirmative.

- Ils te manquent ?

- Beaucoup... Soupirais-je, ma gorge se serrant tandis qu'une lourde larme que je m'empressais d'essuyer tombait le long de ma joue.

- Tu veux bien me les décrire ? Demanda-t-il en se tournant vers moi, un grand sourire illuminant son visage.

J'hésitais quelques secondes, avant de me racler la gorge, me tournant vers le bleuté bien que mes yeux restaient rivés sur le sol près de ses converses azurés.

- Et bien... D'abord, il y a Chan. C'est le plus âgé, et c'est un peu comme notre papa à tous. Il sait ce qui est bien ou mal, et il nous soutient dans tout ce qu'on fait.

Je levais rapidement les yeux vers Sumin, avant de les rabaisser immédiatement, mais son regard intéressé me donna le courage de continuer.

- Ensuite, il y a Félix. Félix, c'est... - C'est un soleil. Il réconforte mieux que personne et il apporte la joie partout où il passe. Je l'aime... vraiment beaucoup.

Mon cœur se compressa, mais je continuais, ravalant la boule qui se formait dans ma gorge.

- Après, il y a Changbin. Changbin, il aime les trucs mignons et tout doux. Il paraît tout gentil, mais il se met en colère rapidement. Et quand il est en colère, il est capable de tout détruire. Il y a aussi Minho. C'est un espèce de chat rebelle qui passe son temps à dormir ou à dire des bêtises. Et il aime beaucoup Jisung. Jisung, c'est un enfant. Il aime bien manger et faire des blagues nulles, et il passe son temps à crier.

Je pouffais à ce souvenir, levant discrètement la tête vers Sumin qui m'incita à continuer, curieux de la suite.

- Et après y'a Hyunjin. Il a énormément confiance en lui et je l'admire pour ça. Il est aussi très beau et sait comment se mettre en valeur. Et il aime Seungmin par-dessus tout. Et Seungmin, justement, il est tout l'inverse ! Il est discret et dans son monde. Il aime pas trop être avec beaucoup de monde, et il passe son temps à lire ou à étudier.

Je souris, avant de relever la tête vers Sumin, soulagé de voir que son regard envers moi n'avait pas changé. Je ne savais pourquoi, mais être avec lui m'apaisait. Au début, je faisais tout pour le repousser, mais à présent, je ne savais même plus si le séjour aurait été supportable sans lui. Ça me faisait mal de l'admettre, mais je l'appréciais beaucoup. Beaucoup plus qu'il n'aurait fallu...