Chapitre 37
Lorsque les premiers rayons du soleil effleurèrent mon visage à travers les petites fentes des volets, je me levais. Je n'avais pas beaucoup dormi. Pas assez. Mais comment l'aurais-je pu ? Après tout, c'était ma première nuit dans ce centre. J'espérais du plus profond de mon être que ça ne soit pas le cas tous les jours...
J'enfilais rapidement un t-shirt et un short dans le noir, avant de saisir le petit badge orange sur mon bureau, l'accrochant tant bien que mal à mon haut. En sortant, je remarquais que le garçon tout en noir avait déjà quitté son lit. Je haussais les épaules. Il devait avoir l'habitude de se lever tôt...
Je ne me posais pas plus de questions, sortant de la chambre, refermant la porte sur les deux autre qui dormaient encore profondément. J'eus un peu de mal à me repérer dans le noir, mais finis tout de même par retrouver les escaliers, les descendant lentement avant de sortir du bâtiment.
L'air frais des matins balnéaires s'engouffra dans mes poumons, et je pris une grande inspiration, appréciant cette sensation qui m'avait tant manqué. Je traversais lascivement le grand jardin, observant le ciel encore légèrement orangé et les douces fleurs qui se réveillaient de leur longue nuit.
Puis, je gravis les quelques marches, entrant dans le grand bâtiment de crépi blanc. Une fois arrivé dans le grand hall, je m'engouffrais dans le couloir de gauche, entrant par la porte ouverte dans le grand self comme je l'avais fait la veille pour le repas du soir. Une dizaine de grandes tables s'étendaient dans la grande salle aux murs de verre donnant une vue imparable sur le jardin. L'un des pans de la grande baie vitrée était d'ailleurs ouvert, laissant la possibilité de s'y glisser pour manger le petit déjeuner sur la petite terrasse dehors.
Je m'approchais du fond de la salle où trônaient deux grands buffets couverts de tout un tas de bonnes choses. Je saisis un plateau, avant de poser dessus un bol de riz et une omelette. J'eus un instant d'hésitation en voyant la machine à café, mais je me repris, me servant seulement un verre d'eau comme boisson.
Mon plateau en main, je me dirigeais ensuite vers la baie vitrée, sortant sur la terrasse. Plusieurs personnes étaient déjà entrain de manger en silence. Je pris place sur une petite table deux place dos à la baie vitrée, pouvant observer le jardin à ma guise.
Mais alors que j'encrais le paysage dans ma mémoire, je repérais mon colocataire tout en noir assis sur une table tout au fond, le plus éloigné possible. Il sentait prudemment son bol de riz et son verre d'eau, les sourcils froncés et les yeux cernés de noir.
Un long frisson parcourut ma colonne vertébrale et je me détournais, fourrant un bout d'omelette dans ma bouche en observant les autres qui mangeaient sous le soleil matinale. Vu de loin, ils paraissaient tous normaux. Les plus petits étant encore dans le coaltar, tandis que les plus grands mangeaient tranquillement.
Mais quand on regardait bien, on se rendait aisément compte que quelque chose n'était pas habituel.
Quelque part devant moi, un jeune homme un peu plus grand que moi mangeait en chantonnant ses céréales en forme de dinosaure. Il tenait fort contre lui une grosse peluche en forme de dragon rouge, tandis qu'il se frottait les yeux de son poing fermé. Il était vêtu d'un pyjama en velours bleu électrique, ses crocs cars abandonnées près de ses pieds nus.
Un peu plus loin, une jeune fille regardait droit devant elle, ses lèvres se mouvant rapidement sans que personne ne soit là pour l'écouter.
Quelques tables derrière, un petit garçon se grattait frénétiquement les mains, ses grands yeux brillants de peur.
Et encore plus loin, une jeune fille jouait lascivement avec son omelette qu'elle n'avait pas touché, ses joues creusés et ses mains squelettiques ne laissant aucun doute quant à l'apparence du corps qui se cachait derrière son grand pull.
Je me mordis les lèvres, baissant la tête vers mon bol. Sur la terrasse planait une ambiance lourde. Qu'est-ce que je faisais ici ? Tous ces gens avaient de lourds problèmes. Ils avaient besoin d'aide. Alors qu'est-ce que je faisais ici ? Je n'avais besoin de rien. Absolument rien. Alors pourquoi diable m'avait-on envoyé dans ce centre ?
Je sentis ma respiration se couper, tandis que mon ventre se froissait. Je repoussais mon bol à moitié entamé, mordant mes lèvre et tentant de ravaler la boule qui se formait dans ma gorge. J'appuyais sur ma cage thoracique, essayant en vain de libérer mes poumons. Ma vue commençait à se troubler, et je voyais le monde tourner autour de moi. Plus une once d'air n'animait mes poumons, tandis que mon ventre me faisait affreusement mal.
J'appuyais aussi fort que je pouvais sur ce dernier, tentant de soulager la douleur tandis que je me pliais en deux, le front posé sur la table devant moi. Je me mordis violemment la lèvre, donnant de forts coups contre mon torse dans le vain espoir de respirer à nouveau. Une sensation de vertige me pris soudainement, et je fermais violemment les yeux, ouvrant la bouche sans qu'aucun air n'y entre. Mes ongles se plantaient dans mon avant-bras, tentant de se raccrocher à quelque chose, alors que je me sentais lentement sombrer.
- Innie ! Retentit soudainement une joyeuse voix à quelques mètres de moi.
Je ne bougeais pas, n'en ayant pas la capacité. Un bruit de plateau résonna à quelques centimètres de ma tête, tandis qu'un raclement de chaise fit légèrement trembler le sol de béton.
- Ow, tu t'es endormie ou quoi ? Fit la voix, une main ébouriffant doucement mes cheveux bruns.
L'air afflua d'un coup et je relevais légèrement ma tête, l'appuyant sur mon bras droit. Je continuais d'appuyer sur mon ventre, tandis que je repris mon souffle petit à petit. Lorsque ma vision se déflouta, le souriant visage se Sumin apparut devant moi. Ses cheveux d'ébène flottaient légèrement sous la fine brise, tandis que deux petites fossettes accentuaient son sourire.
Je sentis mes dents se serrer, tandis que ma bouche devenait pâteuse.
Il avait les même fossettes que Chan...
- Ah, bah voilà ! S'écria-t-il en me voyant me relever. C'est bien de se lever tôt, mais si c'est pour dormir sur les table après, mieux vaut que tu restes dans ton lit une heure de plus ! Regarde, t'as même pas fini de manger !
Je ne répondis rien, me contentant de retrouver mes esprits, appréciant la sensation de l'air qui pénétrait à nouveau mes poumons.
- T'as pris qu'une omelette et du riz ? Continua inlassablement Sumin. Pourtant y'avait plein de trucs ! C'est pas tous les matins qu'on peut manger tout ça sans devoir cuisiner ! Y'avait même des tteokbokki, tu te rends compte ?!
Je ne dis rien. Peut-être que si je me contentais d'être passif, il partirait. C'est ce que je pensais. C'est ce que je voulais. Mais je prévoyais hélas très mal les actions des gens...
- Au fait j'ai croisé Draky Chunky en arrivant au self. Il a déjà fini de manger à cette heure ? C'est qu'il est rapide comme une chauve-souris ! Positionna le noiraud, la bouche pleine et les lèvres rougies par la sauce pimentée des gâteaux de riz.
Je me contentais de rapprocher mon plateau de moi, continuant de manger en l'ignorant royalement. Mais il n'y faisait pas attention.
- D'ailleurs je l'ai vue cette nuit. Il s'est relevé dix fois pour vérifier que la porte et la fenêtre étaient bien fermés. Je crois pas qu'il ait beaucoup dormi... Par contre c'est pas le cas de Blondie ! Lui il dort comme une asperge ! Il s'est même pas réveillé quand je me suis habillé alors que j'ai donné un grand coup de pied dans l'armoire en enfilant mon pantalon. Ça m'a fait super mal et ça a résonné dans tout le bâtiment ! Pourtant il dormait encore ! Il faudra qu'il me file la marque de ses boules quies, pasq'avec le boucan qu'il nous fait l'autre Darky, là ! Au bout de trois jours je vais ressembler à un zombie si ça continue !
Je jetais un rapide coup d'œil à son teint frais, ses lèvres légèrement pulpeuses et ses yeux joliment fardés, pas convaincu le moins du monde par le fait qu'il puisse un jour ressembler à un zombie. Je secouais la tête, sortant ces pensées de ma tête, me replongeant dans mon petit déjeuné.
Soudain, Sumin arrêta tout mouvement, avant de lâcher ses baguettes, retirant précipitamment son sweat mauve. Il se trouvait à présent uniquement vêtu d'un large t-shirt jaune décoré d'une grande étoile de mer rouge. Sûrement son pyjama...
- Pouaaaa ! S'écria-t-il en s'éventant de sa main. C'est fou la chaleur qu'il fait ! Il est que huit heures du matin ! Il fait super lourd, en plus ! Il va sûrement y avoir des orages dans les prochains jours...
Je me levais, ayant fini mon bol de riz, et Sumin tourna la tête vers moi, les yeux grands ouverts
- Eh, attends-moi !
Il se pencha au-dessus de son plateau, finissant toute sa nourriture à la quatrième vitesse, avant de se lever précipitamment, courant derrière moi.
- Yah, t'aurais pu attendre deux minutes ! J'ai la bouche en feu, maintenant ! S'exclama-t-il en posant son plateau à côté du miens sur la table de débrasage, s'éventant avidement la bouche.
Je levais les yeux au ciel, avant de sortir du self, empruntant la grande baie vitrée pour quitter le bâtiment. Je me dirigeais vers les jardins, tentant tant bien que mal d'ignorer la présence du noiraud qui me suivait de près.
- Attends ! S'écria-t-il soudainement, me faisant presque sursauter. Il fallait s'habiller avant d'aller déjeuner ?!
Je soupirais, avant de continuer ma route.
- Il faut que j'aille m'habiller ! Continua Sumin en sautillant précipitamment autour de moi. Vas pas trop loin, je reviens tout de suite ! Attends-moi, hein ?!
Et il ne perdit pas une seconde de plus, se retournant pour partir en courant vers le bâtiment du dortoir. Et je le regardais, tandis que sa gracile silhouette s'éloignait derrière les plantes colorés du jardins, son pull mauve à la main. Et, sans que je ne m'en aperçoive, un petit sourire vint soulever mes lèvres. Doucement, sans me brusquer, ce garçon avait pris mon cœur entre ses mains.
Mais j'avais encore bien trop mal pour m'en rendre compte.
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