Je poussais doucement la porte, débouchant dans une petite pièce lumineuse. Je fus instantanément soulagé. Grâce à la fenêtre, Pilo aurait assez de lumière. Une fois mon émotion passée, je scrutai la petite chambre, l'analysant dans le moindre de ses détails.

La pièce aux murs blancs était totalement symétrique. Collés aux murs de droite et de gauche se trouvaient deux lits superposés aux draps bleu gris délavés par le temps. Dans leurs continuités se trouvait une armoire simple, suivi d'un bureau et d'une deuxième armoire similaire à la première. Les deux derniers bureaux se faisaient face sous la fenêtre, formant comme un îlot au fond de la petite pièce.

Je tournais lentement sur moi-même, observant panoramiquement la petite chambre que j'allais côtoyer quotidiennement pendant ce long mois, avant de sursauter, étouffant un cri de stupeur dans ma gorge.

À ma droite, un jeune homme aux yeux sombre me scrutait, la capuche de son sweat noir rabattue sur ses cheveux ébènes. Il était assis sur le matelas du bas du lit superposé de droite, sa valise à ses pieds. Il ne bougeait pas et était plus bas que moi, pourtant, je sentis tout mon être s'écraser sous son aura sombre. Je baissais immédiatement le regard, me tournant pour m'installer sur le lit de gauche.

Je sortis Pilo de sa sacoche, le déposant sur le bureau qui constituait la partie gauche de l'îlot centrale, étant au plus proche de la fenêtre. J'arrangeais un peu ses feuilles en batailles à cause du trajet, glissant un peu d'eau dans la terre seiche de ses racines.

Ce n'est que lorsque je sentis le poids d'un regard sur ma personne que je me souvins de la présence du garçon tout en noir. Je me retournais, mon regard croisant celui de charbon de mon colocataire.

- Euuu... B-bonjour. Fis-je en m'inclinant légèrement, mon corps entier se glaçant.

Mais l'autre ne dit rien, se contentant de me fixer intensément, augmentant la gêne qui m'habitait. Je pinçais mes lèvres entre elles, avant de me diriger vers ma valise, commençant à la vider en essayant de faire abstraction du regard pesant qui était constamment dirigé vers moi.

Soudain, la porte s'ouvrit. Je me retournais précipitamment, la silhouette d'un jeune homme se découpant dans l'encadrement de la porte. Il s'avança, et lorsqu'il entra dans la chambre, la lumière l'éclaira.

Il s'agissait d'un jeune homme au visage fin d'à peu près mon age. Ses cheveux sombres retombaient au-dessus de ses yeux, tandis que quelques longues mèches apparaissaient derrière sa nuque, tombant sur la base de ses épaules. Il portait un large t-shirt rayé qui laissait ses clavicules découvertes cachés seulement par les lanières qui venaient accrocher le pan avant de sa salopette en jean bleu claire. Ses longues jambes se finissaient par une paire de converses azurés, leurs lacets plus très blancs noués à la va-vite sur le devant. Ses poignet étaient ornés de bracelets en tous genres, tandis qu'une longue boucle d'oreille sombre tombait de son oreille droite. Enfin, un grand sourire étirait ses lèvre légèrement pulpeuses, faisant se plisser ses yeux bruns aux paupières joliment fardés.

- Bonjour ! S'exclama-t-il en poussant sa lourde valise devant lui. Où est-ce que je peux me mettre ? Questionna-t-il en s'approchant du garçon tout en noir qui lui lança un regard aussi sombre que l'orage. Oula, pas là à ce que je vois ! Sourit-il en reculant, portant ses mains au niveau de ses oreilles en signe de paix.

Il se retourna, et son regard s'illumina lorsqu'il aperçut le lit à hauteur vide.

- Oh, je me mets en haut ! S'exclama-t-il en abandonnant sa valise, sautant sur le lit au-dessus du mien. Ouuuu... Les matelas laissent à désirer...

Je levais les yeux au ciel, avant de me retourner vers ma valise, continuant de trier et ranger mes affaires.

- Oooh, t'as une plante ?! S'écria le jeune homme à la salopette en se penchant par-dessus la rambarde du lit, les yeux grands ouverts. Elle est trop mignonne !

Je lui jetais un rapide regard, avant de replonger à mes occupations, préférant ne pas avoir à tenir une conversation. Mais le noiraud n'était apparemment pas de cet avis...

- Moi c'est Sumin ! Sourit-il. Et toi ?

Je le regardais du coin de l'œil, hésitant pendant de longues secondes, avant de souffler

- Jeongin...

- Oh, c'est mignon ! S'écria-t-il. Jeonginnie ! ... Je peux t'appeler Innie ?

Mon sang se glaça, et je lâchais la pile de vêtements que je tenais.

- Non ! Répondis-je catégoriquement.

- Oh, allez, c'est mignon ! Insista le dénommé Sumin, une adorable moue collée au visage.

- Non.

Il fronça les sourcils, avant d'hocher les épaules, se retournant vers le garçon en noir.

- Et toi, comment tu t'appelles ? Sourit-il, ses bras appuyés contre la rambarde de métal.

Le garçon le foudroya du regard, mais sa bouche resta scellée. Sumin cligna plusieurs fois des yeux, en attente d'une quelconque réponse, avant de lever les yeux au ciel.

- Ouais bon, tu t'appelles Chunso, je sais. Je l'ai entendu quand le vieux croûton t'a appelé. Faut dire qu'habillé tout en noir avec un sweat par cette chaleur, tu passes pas inaperçu... Tu dois étouffer là dessous !

Le dénommé Chunso baissa la tête, assombrissant encore plus son regard, et je me demandais comment c'était possible de garder le sourire devant une aura aussi écrasante. Mais Sumin n'avait pas l'air de s'en préoccuper, agissant comme bon lui semblait.

Puis, la porte s'ouvrit encore une fois, laissant apparaître la longue silhouette du dernier jeune homme qui partagerait avec nous cette petite chambre.

Ses cheveux blonds aux reflets roux formaient des milliers de petites boucles leur donnant un incroyable volume contrastant avec la maigreur alarmante de son visage. Ses yeux inhabituellement clairs détonnaient sur sa peau légèrement bronzée, et ses fines lèvres se soulevaient en un discret sourire. Son long et maigre corps était uniquement couvert d'un t-shirt à manches longues orange et d'un jean large aux extrémités décousus.

- Bonjour... Souffla-t-il. Il reste une place ?

- Oui, bien sûr ! S'écria Sumin, se penchant un peu plus au-dessus du vide. Il reste le lit au-dessus de celui de Chunso !

Le nouveau venu sourit légèrement, avant d'entrer dans la chambre, refermant la porte derrière lui. Il déposa sa valise près du lit qu'il partagerait désormais avec le garçon en noir, semblant un peu gêné par le regard insistant que ce dernier lui lançait.

- Moi c'est Sumin ! Sourit le jeune homme à la salopette, faisant se retourner vers lui le grand frisé. Le dark c'est Chunso et le tout timide c'est Jeongin. Et toi ?

- Oh, enchanté. Souffla-t-il. Moi c'est Minki. Pan Minki.

- Enchanté Pan Minki ! J'espère qu'on s'entendra !

- Euu... De même...

Sumin parut ravi, et il sauta de son lit, prenant sa valise pour commencer à la défaire. Les deux autres firent de même, et on s'attela tous les quatre au rangement de nos coins respectifs au sein de cette petite chambre.

Je mis la mauvaise humeur de Chunso et l'agitation de Sumin sur le compte de notre récente arrivée, espérant que les prochains jours seraient plus calme. J'appréhendais beaucoup la cohabitation, sentant mon intimité menacée. Tous ces regards posés sur moi m'angoissaient, et mon corps était tout crispé. Le garçon en noir me faisait peur, tandis que l'autre était beaucoup trop intrusif.

Ce soir-là, j'eus beaucoup de mal à m'endormir. Savoir autant de gens autour de moi me déstabilisait. À ce moment-là, j'avais peur. Vraiment peur. Roulé en boule dans le noir, dans ce lit que je ne connaissais pas, entouré de personnes que je venais de rencontrer, j'avais l'impression d'être jeté au milieu d'un violent typhon. Seul. Totalement seul.

Mais finalement, peut-être que j'avais besoin de ça...

Pour avancer.