Chapitre 12
- OUAAAA ! LESGARSLESGARSLESGARS ! S'écria soudainement Yuri, les yeux dirigés vers la grande vitre à droite de notre table. IL NEIGE ! IL NEIGE EN AVRIL !
Je tournais la tête vers la fenêtre, une mine des plus interloquée sur le visage. En effet, à travers la vitre salle du Goujat, de petits flocons se déposaient doucement sur le bitume mouillé par les précédentes pluies.
Nous étions un début d'après midi d'avril, et Eunji, Yuri, Sunhi et moi avions décidé de nous rejoindre comme à notre habitude autour des tables du Goujat.
- Ouaaa... C'est incroyable... Laissa échapper Sunhi, reposant son verre presque vide sur la table.
- Oh non, ça va faire mourir toutes les fleures... Soupirais-je une petite moue inquiète sur les lèvres.
- Y va y avoir de la boue partout... Râla Eunji en se renfonçant sur la banquette.
- Yah ! Fit Yuri en lui donnant une petite tape sur la tête. C'est trop bien la neige ! Arrêtes de toujours voir le mauvais côté des choses !
- C'est pas de la neige, c'est du crachat ! Répliqua l'aîné, cherchant volontairement à énerver son cadet.
Yuri se jeta immédiatement sur le garçon aux trois millimètres de cheveux, le rouant de petits coups de poings sous le rire de ce dernier. Sunhi commença à pouffer des faits de leur mini-dispute, et je fis de même, portant ma limonade près de mes lèvres.
- En fait. Commença soudainement la seule fille du groupe, attirant l'attention vers elle. Yuri c'est un petit garçon qui aimerait bien être grand, et Eunji c'est un grand garçon qui aimerait bien être petit.
Les deux garçons se regardèrent en haussant les sourcils, avant de pouffer.
- C'est peut-être vrai... Soupira l'aîné en reprenant une position convenable, un petit rictus affiché sur les lèvres.
- Bien sur que c'est vrai ! Affirma Sunhi.
- J'approuve la description. Souris-je.
- Et toi Sunhi, S'exclama Yuri, t'es une fille rebelle qui aimerait bien être aimée !
Un sourire triste éveilla les lèvres de mon aînée.
- C'est bien vrai... Souffla-t-elle.
- Et Jeongin ? Questionna le cadet.
- C'est un garçon fatigué qui aimerait bien disparaître. Répondit Eunji, le regard rivé vers la vitre.
Je pinçais mes lèvres entre elles. Fatigué ? Juste ça ? Cette description de moi m'avait beaucoup étonnée. C'était vrai que ces derniers temps, j'étais plutôt fatigué, mais je ne me voyais pas du tout comme cela.
Quelques années en arrière, Eunji m'avait décrit comme un petit rayon de soleil. Nous avions donné une émotion à chacun de nous, et j'étais la joie. Alors, pourquoi ? Pourquoi maintenant j'étais seulement fatigué à leurs yeux ?
Le soleil que j'étais avait laissé place à un petit nuage gris. Mais était-ce si mal ? Avais-je vraiment tant changé ? Pourtant, moi, je me voyais toujours comme étant un garçon joyeux et souriant. Alors pourquoi pas les autres ?
Ce que je n'avais pas compris à cet époque là, c'était que derrière ce petit nuage se trouvait toujours un rayonnant soleil. Il était juste caché, bien au fond de moi, et j'étais le seul à pouvoir le voir. Pour tous les autres, je n'étais qu'un petit nuage gris, passif et fatigué.
- Je-J'ai un cour, je vais y aller. Bégayais-je en commençant à me lever.
- A bon ? S'étonna Yuri. Je pensais que tu ne reprenais qu'à 14h.
- J'avais oublié que j'ai un cour à 13h. On se voit plus tard. Fis-je en vidant mon verre de limonade avant de sortir précipitamment du Goujat, mon sac sur mes épaules.
À peine avais-je franchis la porte qu'une bourrasque de vent mêlée de minuscules flocons de neige fit voler mes cheveux bruns dans tous les sens. Je refermais mon manteau près de mon corps, avant de me mettre à marcher.
J'avais menti. Il me restait bien une heure avant mon prochain cour. Seulement, j'avais soudain ressentit le besoin de sortir.
Sentant ma poitrine toujours lourde et mes émotions commencer peu à peu à envahir mon cœur, je sortis mon téléphone et vissais mes écouteurs dans mes oreilles, lançant ma playlist à la lettre B.
- Allez, on sort ! S'écria Chan en ouvrant la porte de la maison. Tout le monde dehors !
La musique inonda mes oreilles, et je souris instantanément. Je pris une grande bouffée d'air, libérant totalement ma poitrine de son fardeaux.
Les rues étaient presque vides, le vent, la neige et le froid dissuadant quiconque d'aller s'y balader. Un plus grand sourire encore étira mes lèvres, alors que j'accélérais le rythme, mes vieilles converses rouges foulant le bitume mouillé.
Je chantais inaudiblement, hochant la tête de droite à gauche au rythme de la musique. Une fois arrivé au passage piéton du haute de la côte, je me penchais exagérément au dessus de la chaussée, vérifiant qu'aucune voiture ne pointait le bout de son nez, avant de traverser en sautillant la route éclairée par la lumière rouge du feux.
J'avançais en sautillant, faisant de temps en temps des tours sur moi-même, un éclat de rire franchissant la barrière de mes lèvres. J'étais en pleine euphorie, seul au monde. À ce moment là, seul moi importait. Il n'y avait plus que moi.
J'arrivais finalement au parc au dessus de mon lycée. Les pelouses vertes étaient désertes et les jeunes feuilles des arbres étaient recouvertes de goûtes d'eau froides. Je traversais le parc verdoyant, souriant à la vue des fleurs qui recouvraient le sol et les arbres.
- Innie ! S'écria soudainement Félix en sautillant à ma droite. Cris !
Mon regard s'illumina, tandis que le vent et la neige soufflaient toujours plus fort autour de moi.
- AAAAAAAAAAH ! Criais-je.
- Plus fort !
- AAAAAAAAAAAAAAAAAAAH ! M'égosillais-je, hurlant tout ce que j'avais sur le cœur.
- AAAAAAAAAAAAAAAH ! Cria le blond à son tour.
Je me mis soudain à rire, ma voix se brisant en éclats d'euphorie. Dévalant le parc en courant, je rejoignis la route humide. Je recommençais ma marche décousue, les yeux brillants et un sourire incontrôlé sur les lèvres. À vrai dire, j'avais l'air d'un fou. Mais peut-être étais-ce ce que j'étais. Fou. J'étais fou. Il ne me manquait qu'une fleure sur l'oreille.
Mes yeux firent un repérage panoramique, avant de repérer une petite fleure jaune sur le talus de l'autre côté de la route. Je me penchais à nouveau au dessus de la route, regardant à droite, puis à gauche, puis à droite, puis à gauche, puis une dernière fois à droite, puis encore une fois à gauche, avant de traverser en sautillant la chaussée trempée.
- Innie, regardes-moi ! M'intima Félix en cueillant la petite fleure jaune.
Il glissa ensuite délicatement le petit végétale derrière mon oreille, éclairant un sourire sur mon visage.
Je repris alors ma marche chaotique, chantant silencieusement et dansant sur la musique qui criait dans mes oreilles. Maintenant, j'étais vraiment fou. Souriant exagérément. Parlant tout seul. Titubant imprévisiblement entre les ruelles. Riant alors que le vent me fouettait le visage. Cette petite fleure jaune à la tige verte brillant au dessus de mon oreille. J'étais fou.
Fou de fatigue.
Fou de joie.
Fou de rage.
Fou de la réalité.
Fou de tristesse.
Fou de bonheur.
Fou de moi.
Fou.
J'étais fou.
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