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𝟐.

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C'est à ce souvenir plus que pénible que Taehyung ouvre une paupière avant d'être aveuglé par le néon suspendu juste au-dessus de lui. Sa pupille s'empresse d'examiner l'environnement qui l'entoure avec méfiance, comme un besoin de s'assurer qu'il n'est plus sur cette autoroute, prisonnier d'une voiture en proie aux flammes. Des murs roses pâles qui commencent à dépérir, une fenêtre salie par la pluie donnant vue sur le terrain vert entourant le lieu, une minuscule télévision dernier cri accrochée au mur face à lui où deux hommes en costard semblent débattre de l'approche du bug de l'an 2000 et de toute la paranoïa qui l'entoure, des draps blancs le recouvrant...

Pas de doute possible, il est en sécurité, cloué sur l'un des nombreux lits de l'hôpital Severance. Tout va bien, il peut respirer tranquillement et son cœur peut enfin battre à un rythme correct sans frôler l'infarctus, il s'est juste assoupi.

Enfin, Tae sait qu'il est loin, très loin d'être tiré d'affaires et que le pire reste à venir.

Voilà des mois entiers qu'il est hospitalisé ici, à contempler le vide et à se contenter de la nourriture sans saveur de l'établissement. Il ne les compte plus, le temps avance bien trop lentement à son goût, de même que pour sa guérison. Combien de temps encore devra-t-il rester entre ces murs ? Tant de projets l'attendent à l'extérieur. Trop qui ne lui permettent pas d'étendre son séjour dans ce lit immaculé. On lui avait promis un grand avenir, un contrat alléchant qui le projettera au sommet de sa carrière à seulement l'âge de vingt ans, des collaborations exceptionnelles encore jamais vu auparavant.

Mais ça, c'était avant que la vie ne lui rappelle de la plus vicieuse des manières que l'on ne peut pas tout posséder.

Pas un jour ne passe sans que Taehyung cauchemarde de cet accident qui avait bien failli lui coûter la vie. Chaque nuit, son esprit traumatisé repasse la mélodie macabre des sirènes des camions de pompiers et des ambulances ; une musique qu'il n'est point prêt d'oublier. Chaque nuit, l'odeur de brûlé mêlée à celle de l'essence empeste ses narines au point de lui filer la nausée. Chaque nuit, la déchirure de son derme lui rappelle qu'il avait échappé in extremis à la lame tranchante de la Mort. Chaque nuit, son cerveau rejoue toute cette séquence choquante qui le replonge dans le même état que lors de ce moment tragique : trouble et incompréhension...

Maintenant accompagnée par une frustration grandissante, alors qu'il repense à tout ce qu'il a accompli, tout ce qu'il n'aura sans doute plus.

Kim Taehyung, un jeune coréen lambda devenu du jour au lendemain le mannequin que toutes les marques du moment désiraient avoir pour muse. Depuis tout petit, il savait que sa place était sur les podiums, sous les projecteurs, devant les flashs interminables des photographes assoiffés de clichés parfaits et sur la une des magazines de mode.

Après toutes ces émissions vues et revues sur l'imposant tube cathodique dans le salon familial le soir et les fascicules people qu'il piquait dans le dos de sa mère, Tae avait su qu'il mettrait au service son apparence pour les plus grandes marques. Toute cette admiration à l'égard de celles et ceux qu'il considère à présent comme ses idoles, tous ces mots doux complimentant leurs apparats, tous ces jolis vêtements qui soulignent leurs courbes...

C'était ce métier là qu'il voulait absolument exercer et pas un autre. La lumière, les strass, il désirait plus que tout les toucher du bout des doigts.

Plus d'un lui avait rabâché qu'il n'y arriverait jamais. Que c'était de la pure folie, qu'il devait être plus réaliste. Que c'était un milieu fermé et puant la fausseté, que poser devant les caméras n'était pas un vrai métier. D'autres lui avaient ri franchement au nez et ne s'étaient pas empêchés de lui cracher qu'avec un physique aussi disgracieux que le sien, il n'irait pas bien loin. Ses parents étaient les premiers à s'être opposés fermement à ce choix d'avenir qu'ils jugeaient d'un très mauvais œil. Tout ce que madame et monsieur Kim attendaient de la part de leur progéniture, c'était d'obtenir de bons résultats à l'école, qu'ils fassent de grandes études pour ensuite décrocher un emploi stable et de longue durée. Qu'il ait une vie bien rangée, à l'ombre de toute décadence. Ils y avaient veillé au doigt et à l'œil, parfois en utilisant des méthodes peu orthodoxes qui donnent encore des suées à Taehyung, même adulte, rien que d'y repenser.

Malgré leur sévérité et leurs remarques incessantes sur son manque de tenue, de sériosité et tout un tas d'autres choses qui lui étaient un peu passé par dessus la tête en grandissant, ça n'avait pas stoppé les ardeurs de ce dernier. Pire encore : plus l'intransigeance de ses parents s'intensifiait, plus son désir de devenir la nouvelle coqueluche des marques de mode durcissait. Et pour parvenir à ses fins, Tae avait dû songer à des tas de sacrifices.

Des sacrifices qui l'ont conduits dans une chambre aux couleurs mornes, où l'odeur aseptisée typique des hôpitaux empeste l'air et rappelle constamment que la Faucheuse n'est jamais très loin, tapie quelque part sans être vue et attendant de frapper au moment opportun.

On toque alors à sa porte, ce qui l'extirpe de ses pensées. Une femme couverte de blanc de la tête aux pieds entre avec ce qui semble être un dossier dans les mains et s'approche doucement de lui. Taehyung la reconnaît à ses traits délicats, cette petite bouche en forme de cœur et sa longue natte brune. Elle s'occupe de lui depuis son arrivée ici, lui apporte les repas et supporte sa morosité plus qu'évidente tous les jours. Elle est bien courageuse à endurer son apathie et son manque de conversation, ce petit bout de femme.

— Monsieur Kim, c'est le grand jour ! annonce-t-elle avec entrain. Nous allons pouvoir retirer vos plâtres dès aujourd'hui !

Taehyung la contemple en silence, attendant qu'elle poursuive. Il peut sentir ses pulsations cardiaques s'exciter dans sa poitrine à cette nouvelle inespérée. On va enfin le débarrasser de ces merdiers encombrants !

— Vos radios effectuées hier démontrent des résultats très satisfaisants ! Les os de votre jambe et de votre bras se sont remis en place, votre organisme s'est accommodé aux tiges que le docteur Choe a placées durant l'intervention de votre colonne vertébrale– sans parler de la rééducation que vous avez suivi au cours de ces derniers mois ! poursuit-elle, tout en parcourant les documents sous ses yeux. Il n'y a que votre clavicule gauche qui se montre encore capricieuse mais vous êtes sur la bonne voie ! On pense vous garder encore quelques jours de plus en convalescence et vous pourrez enfin sortir.

Tae acquiesce doucement à cet enchaînement d'annonces réjouissantes. Cependant, une question lui trotte en tête. La partie la plus importante de son anatomie n'a pas été évoquée. Est-ce normal ? Cette interrogation lui démange, lui brûle les lèvres comme pas permis. Il doit savoir. Impérativement.

— Qu'en est-il de mon visage ?

La demoiselle répondant au doux nom de Hae, d'après la petite carte sur son chemiser, relève la tête et le regarde longuement. Son expression joviale se fane, perd de sa couleur et ne reflète plus qu'une profonde préoccupation. Elle semble hésiter. Les longues secondes de mutisme qui viennent de s'écouler en sont la preuve. Taehyung le voit bien et cela ne fait que renforcer ce qui l'assaille.

— Monsieur Kim... Je ne suis pas sûr que vous soyez prêt pour cela.

— Pourquoi donc ? Ça fait presque une éternité que je croupie dans cette chambre sans avoir vu une seule fois de quoi j'ai l'air.

Malgré la tonne de bandages qui cache toute sa tête, sa visibilité réduite et les plâtres, Tae n'a pas perdu de son aplomb. Il se redresse du lit, confrontant un peu plus de son œil son aînée. Quand Taehyung veut quelque chose, il ne lâche pas le morceau et l'obtient coûte que coûte.

Il l'a prouvé de nombreuses manières, à commencer par ce casting auprès de l'agence Némésis Corporation alors qu'il n'avait même pas la majorité. Il avait bravé la contestation tenace de ses parents, les quelques kilomètres qui séparaient Séoul de Seongnam par les transports en commun et en séchant une journée de cours juste pour cette occasion. Il avait tout donné pour cette audition qui l'obsédait et l'angoissait jusqu'à la moelle épinière sous les yeux des juges experts. Après des jours d'entraînement à défiler en cachette dans sa chambre désordonnée ou dans la cour de son lycée sous le regard de ses copains de classe, à calquer au millimètre près la démarche de ceux qu'il considérait comme de véritables divinités vivantes et travailler son expression faciale devant son miroir, Taehyung s'était dit que ça devrait être simple de décrocher cette place au sein de leur agence.

Depuis ce fameux jour, ils ne peuvent plus se passer de lui. Ses managers demandent toujours un peu plus de sa personne, toujours un peu plus de son regard d'acier qui désarçonne et perce l'âme, toujours un peu de son visage sculpté par on-ne-sait quelle déité qui l'a gratifié dès le berceau. Taehyung a su faire ses preuves et démontrer qu'il mérite sa place au sein de leur entreprise. Poser devant les objectifs en fonction des thèmes imposés, les soirées prestigieuses, les plateaux de télévision ; son train de vie mouvementé lui manque énormément.

Et pour s'assurer de son bon retour sur les podiums, Taehyung devait s'assurer que son visage va mieux. C'est un besoin vital de connaître l'état de cette moitié de faciès momifiée qui avait bien pris cher lors de l'accident. La souffrance ressentie lors de l'extraction de son véhicule en feu, il s'en souviendra pour le restant de ses jours.

— Je veux que vous me virez ces bandages. Si vous ne le faites pas, c'est moi qui le ferai.

Malgré le calme apparent de sa voix, le top model s'impatiente. Un certain agacement commence peu à peu à ruisseler dans ses veines. Il ne déconne pas : si personne ne se bouge pour lui ôter ces affreux bandages, lui-même les enlèvera même si les médecins ne le veulent pas. Ce ne sont pas eux qui stopperont ses ardeurs. Personne n'a à dicter ce qu'il doit faire.

— Je comprends votre impatience, mais...

— Hae. Ma gueule, c'est ce qui me permet de vivre, se défend le plus jeune. C'est mon putain de gagne pain. Sans ça, je possède rien et je suis que dalle. Alors pour l'amour du ciel, enlevez-moi ces trucs. J'en ai marre de ressasser les mêmes questionnements encore et encore dans mon crâne et de remettre en doute mon retour chez Némésis Corp'.

La plus âgée le sonde quelques secondes du regard. Un ange passe puis elle finit par soupirer, signe qu'elle abdique. Cela ne sert à rien de tergiverser avec un homme aussi têtu que Kim Taehyung. Il sait ce qu'il veut et n'en démordra pas.

— Très bien. Je vais chercher l'appareil de découpe et reviens. Heureux ?

— Amplement satisfait, même, répond t-il avec un sourire en coin.

Hae lève les yeux vers le ciel puis s'éclipse un instant de la chambre. Un silence religieux plane à nouveau dans la pièce tandis que Taehyung jubile, toujours en position assise. Cependant, son excitation se retrouve vite balayée par cette appréhension lui labourant les entrailles, le cerveau avec. Cette angoisse qui a germé en son sein depuis son premier jour à Severance et qui n'a cessé de fleurir jour après jour, nuit après nuit, cachée derrière son fidèle masque d'impassibilité. Il l'a bien entretenu en se torturant mentalement, en se créant des scénarios qui le dépassent et imaginant le pire qu'il puisse lui arriver.

Ses questions tournent en boucle tel un disque rayé, s'entrechoquent entre les recoins de son esprit. Elles gagnent en volume sonore. dansent en ronde de leur sabots maléfiques, s'imposent un peu plus que les aiguilles du temps passent...

À quoi vais-je ressembler ? Est-ce que la chirurgie réparatrice aura eu son effet escompté ? Toute trace de ce jour-là aura-t-elle disparue ? Plairai-je encore aux yeux des autres ? Peut-être que je n'inspirerai que la répulsion... ? Est-ce que mon existence prendra fin dans quelques minutes ?

Est-ce normal d'être obsédé et effrayé à ce point à l'idée de perdre sa beauté ? De voir un reflet qui nous est étranger chaque matin ? De douter du jugement d'autrui ?

Le « clac » familier de la porte de sa chambre retentit alors. À ce son, Taehyung chasse ses voix intrusives, secoue la tête et masque une nouvelle fois son visage de sa fidèle imperturbabilité. Celle qui le rend inaccessible, mystérieux, qui fait barrière à ses émois les plus profonds : ce que toute l'industrie et ses fans désirent de lui. Moins expressif il est, plus l'idolâtrie sera grande. Et Taehyung avait désespérément besoin de cette attention constante rivée sur lui. Pour toujours.

Hae s'avance vers la table face au lit, un petit appareil posé contre son calepin avec une paire de ciseaux et une grande pince. Elle pose le tout avant de se diriger vers lui.

— Je vais vous aider à sortir du lit. Accrochez-vous bien à moi.

Avec cette perpétuelle douceur à son égard, elle le guide jusqu'à la chaise face au lit, non sans qu'il manque de chuter à cause du plâtre imposant ceinturant sa jambe gauche.

Taehyung ne tient plus en place. Dans quelques minutes, il sera enfin libéré de toute cette merde qui l'empêche de bouger comme il le souhaite depuis des mois entiers. Comme il a hâte de retrouver son train de vie !

— Je vais commencer par la découpe de celui de votre bras, explique l'infirmière alors que la machine émet un bruit semblable à un rasoir électrique. Je vous rassure, ça ne coupe pas la peau.

Lorsque son bras est étendu à plat sur la surface en bois, cette dernière fend en deux avec concentration le plâtre sous son regard attentif et à la fois troublé. Il ressent des vibrations un peu partout dans son corps, l'impression est étrange mais pas au point d'être dérangeante. Ensuite munie de la pince, Hae écarte le plâtre puis vient le couper avec la paire de ciseaux. Puis vient la délivrance. Quand Taehyung tente de lever son bras, il exécute ce geste avec une facilité qui était encore impossible quelques semaines auparavant. Il le tourne, agite son poignet dans tous les sens, comme s'il testait la tenue d'un objet acheté dernièrement en magasin. Malgré le manque de force apparent dû à une longue absence d'action et une peau asséchée, la sensation de pouvoir être de nouveau libre de ses mouvements est euphorisante.

C'est au tour de sa jambe gauche d'être extraite définitivement de son plâtre. Taehyung répète les mêmes mouvements, ravi de retrouver sa mobilité d'antan. Bientôt, il pourra de nouveau parader sur les podiums sous les yeux pétillant d'adoration de ses admirateurs.

Hae se met derrière lui puis pose ses mains sur ses épaules. Elle les presse doucement comme s'il s'agissait d'un geste de soutien silencieux à son égard.

— Vous êtes vraiment sûr de le vouloir ? Vous pouvez encore changer d'avis, monsieur Kim.

Un minuscule miroir sur pied trône sur la table juste en face de lui. Il lorgne ce visage enveloppé de bandages médicaux, qu'il peine à reconnaître ; le palpitant commençant sa symphonie infernale. Ce visage inconnu, qui ne lui dit trop rien, qu'il esquive dès qu'il le peut depuis qu'il a ouvert l'œil quelques heures après son accident de la route.

Accident qu'on avait conclu à une défaillance de sa part et qui avait été rapidement classé par les forces de l'ordre, lors de l'enquête lancée.

Conclusion qui avait laissé Taehyung avec un goût amer.

Il est certain que ses freins étaient parfaitement fonctionnels avant cette effroyable collision sur l'autoroute et les tonneaux engendrés alors qu'il se rendait au photoshoot prévu ce jour-là. Avait-il manqué de vigilance ? Cela ne fait qu'un an qu'il a passé le permis de conduire, mais tout de même. Il était un minimum vigilant et loin d'être con à propos de la sécurité routière. Mais oublier de vérifier un détail, ça peut arriver parfois. N'est-ce pas ? Alors pourquoi, au fur et à mesure que les jours passent, voit-il le mal partout ? Ça relève de la paranoïa, il doit se rendre à l'évidence.

— Finissons-en maintenant, prononce-t-il froidement sans quitter des yeux son reflet.

Hae se penche pour prendre la paire de ciseaux et démarre alors l'attente la plus interminable et stressante de toute son existence. Un silence pesant s'invite dans la chambre, ponctué par les coups de ciseaux minutieux de l'infirmière. Chacun d'entre eux le rapproche de la révélation, intensifie cette appréhension qui lui noue l'estomac. Il ne peut s'empêcher de trépigner sur sa chaise, de se masser la mâchoire et la gorge avec insistance de sa main valide. La nervosité est là, resserre son étau ; plus imposante que jamais. Les pansements tombent un à un, la peau se révèle peu à peu. Le résultat semble passer pour le moment. Ses cheveux châtains ont bien poussé, un tour chez le coiffeur ne lui fera pas de mal. Quelques cicatrices peu profondes apparaissent doucement juste au-dessus de la naissance de son cou. Puis d'autres, plus marquées, oscillant entre le rouge et le blanc. Les muscles de Taehyung se tendent à cette vue. Cela n'augure rien de bon. Quand un autre morceau de peau se retrouve découvert, tous les sens du mannequin s'agitent et ce dernier regrette de suite sa décision. Son entêtement le perdra, un jour. Il puise alors dans ses ressources pour ne pas perdre pied face à cette image d'horreur qui lui fait lentement face.

Le dernier morceau de pansement est retiré. Ce portrait dans la glace est difficilement supportable. Ce portrait qu'il devra assumer à partir de maintenant est une honte, une laideur sans nom. Une ignominie dont il vaut mieux que personne ne voit.

Ce visage – s'il peut encore le désigner ainsi – déformé, suintant, couvert de balafres...

Ce bout de chair qu'il ne sent plus, qui ne ressemble plus à rien avec ce trou gorgé de sang là où se trouvait son œil...

Aucun fond de teint, aussi épais soit-il, ne pourra camoufler cette monstruosité.

— Voilà pourquoi je voulais vous ménager et éviter toute déception de votre part. Votre derme, épiderme et hypoderme ont été sévèrement touchés lors de votre accident à cause des nombreux débris de verre et de métaux qui sont rentrés dans votre chair. Nous avions voulu tenter en premier lieu une autogreffe pour reconstruire la partie détruite de votre faciès. Malheureusement votre peau est bien trop fine, vous n'avez pas assez de matière pour le permettre. On a donc opté pour un plan B pour réaliser la greffe de peau totale : l'allogreffe. Tout ne s'est pas déroulé comme prévu et c'est ce qui est à prévoir dans ce genre d'opérations. Votre corps a rejeté la greffe et–

Accablé et agonisant. Ce sont les bons termes pour désigner l'état d'esprit de Taehyung dont la vue se brouille seconde à après seconde, dont l'intérieur des joues se fait broyer entre ses molaires tant il se retient de hurler. Tous ses rêves viennent de partir en fumée, son avenir et son ego avec. Il n'écoute plus les explications de l'infirmière, ça n'a plus d'importance. Tout ce qu'il y a à retenir est que cette tentative de sauvetage pour préserver sa beauté fut un fiasco total et qu'il n'y a plus rien à faire pour sauver cette partie si chère à son cœur de son anatomie.

Assis sur cette chaise, l'âme en vrac, Tae se sent mourir pour la troisième fois. C'est une souffrance, bien plus forte comparée à celle ressentie lors de son accident, qui se répand en lui, qui lui monte à la gorge au point de l'enflammer. Qu'a-t-il fait pour mériter ça ? Lui, l'étoile montante de Némésis Corporation ? Lui qui ne possédait rien au départ et qui était prêt à conquérir le monde entier pour qu'on retienne son nom ? Lui qui s'apprêtait à décrocher ce contrat somptueux pour la marque italienne Versace ?

— Sortez, ordonne faiblement le top model, l'œil larmoyant.

Tous ces efforts en vain...

Rien ne se passe comme lui le souhaite. Comme un rappel au fait qu'il n'arrivera jamais à atteindre son but. Comme si le hasard donnait raison à tous ces gens, surtout ses exécrables géniteurs, qui n'avaient cru à aucun moment en lui.

— Monsieur, je suis désolée...

Et cela le met particulièrement hors de lui.

La façade de Taehyung se fend pour de bon. La carapace est brisée, son mal-être déployé.

— Quittez cette chambre tout de suite !

Tout en tonnant ces mots de sa voix grave, dans un geste incontrôlé, il saisit le miroir et l'envoie valser sur le côté dans un fracas retentissant qui fait fuir Hae en trombe de la chambre. Des insultes peu fleuries fusent dans sa tête tandis que sa douleur grandit, que sa colère prend trop de place et peine à être contenue. C'est un cocktail d'émotions contradictoires et ingérables qui le submerge, le cloue net sur son siège. La tempête s'évapore, le silence reprend ses droits au son des sanglots de Taehyung.

Le clap de fin imaginaire de sa courte carrière dans le mannequinat retentit et Tae se dit qu'il aurait préféré qu'on le laisse s'éteindre sous la carcasse de sa voiture, quelques mois plus tôt. Car son avenir, qui semblait tout tracé, est désormais criblé d'incertitudes et les voix malfaisantes dans son crâne anxieux prennent déjà un plaisir sadique à le torturer.

Celui dont les journalistes de mode surnomment « L'Adonis des Podiums » peut tirer sa révérence et enterrer ce surnom qu'il n'est plus digne de porter.

Miroir, très cher miroir brisé... entonne-t-il dans sa tête, la pupille braquée sur les morceaux de glace brisés jonchant le sol. Assure-moi que je suis et reste le plus radieux de l'empire Némésis, même avec cette disgrâce pour éternel portrait !

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