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En ce dimanche après-midi, le ciel était couvert de nuages gris. Jisung était rentré chez lui après son travail comme à son habitude, bien emmitouflé dans la vieille parka beige que lui avait donné Hyunjin. Le japonais avait des tonnes d'habits qu'il n'utilisait qu'une fois tous les trois ans, et il avait un peu obligé Jisung à accepter de prendre l'un de ses nombreux manteau. Le noiraud avait tenté de refuser, mais sous les jérémiades de son ami, il avait fini par accepter l'offre.

Après avoir récupéré Sunghan chez Félix et pris le temps de discuter un peu avec ce dernier, le jeune père était finalement rentré chez lui. Il avait soupiré de soulagement en refermant la porte derrière lui. D'ordinaire c'était supportable, mais ce jour-là le froid était mordant. Faire du vélo par ce temps était une véritable torture, et il ne sentait littéralement plus ses doigts.

- Il fait froid, hein Sunghan-ah ? Sourit-il en déposant son fils sur le sol tout chaud.

- Roi ! S'exclama le petit enfant avec des yeux brillants en avançant doucement sur les fesses.

- Froid !

- Roi ! Oi !

Jisung sourit doucement, avant de se relever. Il rangea son manteau et celui de son fils dans un coin et partit chercher son livre pour s'installer au beau milieu du salon. Sunghan le regarda de longes secondes, avant de se détourner pour filer vers la table de la cuisine. Il s'accrocha de toutes ses forces aux pieds de bois pour se hisser sur ses deux pieds, observant avec satisfaction le monde de haut. Et puis, lorsqu'il repéra son doudou au loin, il se laissa à nouveau tomber sur ses genoux pour filer récupérer son bien en poussant de petits cris.

Tous deux restèrent ainsi un long moment dans le calme de la petite maison. Les lycéens n'étaient pas là, Seungmin non plus n'avait pas prévu de passer. Seuls les petits gazouillis de Sunghan troublaient le silence ambiant. C'était reposant. Mais alors que Jisung soupirait de soulagement en sentant son corps se détendre, trois coups raisonnèrent soudainement contre le bois de la porte d'entrée.

Le jeune père fronça les sourcils, mais lorsqu'il entendit la voix aiguë d'un enfant à moitié étouffée, un grand sourire grimpa sur son visage. Il s'empressa de se lever pour aller ouvrir la porte, le vent froid le faisant frissonner malgré l'épais pull qu'il portait.

- Minho ! Sourit-il en découvrant le père de famille qui tentait tant bien que mal de retenir ses enfants de grimper aux piliers du perron.

- Ah salut Jisung ! On te dérange ?

- Oh non pas du tout entrez entrez !

Il se recula et la petite famille presque complète vint vite se mettre au chaud.

- Qu'est ce qui vous amène ? Sourit Jisung en partant mettre de l'eau à chauffer pour réchauffer toute cette petite bande.

- Maman veut plus de nous ! S'exclama Minoru avec une moue adorable qui fit pouffer son père.

- Ces deux là étaient totalement insupportables, et comme c'est mon tour de les faire prendre l'air, elle nous a foutu dehors tous les trois ! Expliqua-t-il en retirant ses chaussures, l'air plus amusé qu'autre chose par la situation. Mais bon, il fait froid dehors alors je me suis dit qu'on pouvait passer.

- T'as bien fait. Sourit Jisung, tout de même heureux de voir à nouveau de la vie dans sa petite maison. Vous voulez du chocolat chaud les enfants ?

- OH OUIIIII ! S'écrièrent les deux petits monstres avec des yeux brillants en hochant vivement la tête.

- T'embête pas avec ça... Fit Minho en s'asseyant sur le parquet bien chaud.

- Oh, c'est rien. Je dois faire chauffer le lait pour Sunghan de toute manière, ça me change presque pas.

Le japonais sourit doucement, touché par l'attention de son ami. Il se détourna lorsque Sunghan tapa doucement sur son genoux, son sourire agrandissant encore plus ses bonnes joues.

- Mais qui voilà ? Sourit Minho en se penchant vers le bébé, bougeant doucement la tête de droite à gauche pour le faire rire. T'as bien grandi toi, hein ? Ça pousse ça pousse ! Bah oui, faut bien !

Le brun sourit en prenant le fils de Jisung par les mains pour l'aider à se lever sans cesser de jouer avec lui. Le coréen les regarda du coin de l'œil en souriant, avant de se reconcentrer sur son chocolat qui fondait doucement dans sa casserole. Bien vite, une bonne odeur emplie toute la pièce, donnant l'eau à la bouche aux deux enfants qui jouaient au fond.

Jisung s'appliqua à préparer le biberon de son fils tout en faisant infuser le thé. Une fois cela fait, il se concentra sur son chocolat qu'il versa précautionneusement dans les deux tasses de lait qu'il avait préalablement remplies. Il remua le tout pour éviter les grumeaux, et c'est un sourire fier sur les lèvres qu'il apporta leurs boissons aux deux petits monstres.

- Qu'est ce qu'on dit ? Lâcha Minho en toisant ses enfants de loin.

- Merci monsieur Jisuuuung ! Répondirent-ils d'une même voix, les yeux brillants.

- Faites attention, c'est chaud. Se contenta de répondre le jeune père, beaucoup trop attendri par tous ces enfants.

Il leur sourit une dernière fois avant de se relever, retournant à la cuisine pour apporter son thé à Minho et son biberon juste tiède à son fils confortablement installé entre les jambes du japonais. Il fit un dernier aller-retour pour aller chercher sa propre tasse, et il pu enfin s'asseoir avec son ami en poussant un petit soupire.

- Alors, comment ça va en ce moment ? Demanda doucement Minho en soufflant sur son infusion bien chaude.

- Mmh ça va.

- Pas trop dur le travail ?

- Nan, les gens sont gentils. Et puis les horaires sont bien, je travaille pas beaucoup.

- Mmh c'est vrai que c'est pratique. Ça te laisse plein de temps avec Sunghan ! Hein Sunghan ?! Tu passes du temps avec papa, hein ?!

Le petit garçon leva la tête vers Minho sans pour autant cesser de boire. Il aurait voulu lui répondre, mais son goûter était plus important. Alors il avait détourné le regard sans rien de plus, faisant rire les deux amis.

- Et toi alors ? S'exclama soudainement Jisung en se redressant vivement, les yeux brillants de curiosité. Ton voyage avec Atsuko !

- Oh c'est vrai, je t'ai pas dit. Sourit Minho en reposant sa tasse devant lui. C'était super. Vraiment, l'hôtel était top, on a super bien mangé, et les sources d'eau chaude, je te raconte même pas !

- Astuko a aimé alors ?

- Ah ça pour aimer elle a aimé ! Gloussa le père de famille, les yeux brillants. Elle était aux anges. Je te jure ça fait trop du bien. Sans les enfants, juste tous les deux pendant deux jours, le rêve !

- Vous avez bien profité, j'espère. Sourit Jisung avec un petit haussement de sourcils plus que subjectif.

- À qui le dis-tu ! S'exclama Minho en échangeant un regard complice avec son ami. Bien sûr qu'on a profité. Bien profité...

Tous deux pouffèrent de concert, et le noiraud porta sa tasse à ses lèvres pour prendre une gorgée du liquide bien chaud.

- Papaaaa ! S'exclama soudainement Minoru en accourant vers son père, sa tasse bien tendue devant lui. Papa je peux ravoir du chocolat ?!

- T'as déjà fini ? S'étonna Minho en ouvrant de grands yeux.

- Moi aussi moi aussi j'en reveux ! Ajouta Aya en déboulant à son tour à côté de son frère.

- Non non, une tasse ça suffit. Vous allez être malades après et maman va me gronder.

- Mais j'en veux encoooore ! Geignit Minoru en tapant des pieds de mécontentement.

- C'était bon ? Sourit Jisung, attendri.

- Oh ouiiiii ! Monsieur Jisung fais-en nous encore !

- Mais papa a dit non. Moi j'écoute votre papa. C'est lui le chef.

- C'est trop nul ! S'exclama Aya avec une moue boudeuse. Papa il veut jamais rien qu'on ai de toute manière.

- Vous voulez qu'on aille faire une promenade ? Demanda Minho avec un sourire crispé, son regard sombre ancré dans ceux de ses enfants.

- Nonnnn ! Non pas la promenade !

- Alors allez jouez plus loin et arrêtez d'embêter Jisung.

Les deux petits monstres hochèrent rapidement la tête en abandonnant leurs tasses vides sur le sol avant de se dépêcher d'aller se réfugier au salon. Minho poussa un long soupir, la tête penchée de arrière. Entre ses jambes, Sunghan jouait tranquillement avec son biberon désormais vide, s'amusant à le faire tourner entre ses petites mains avec de grands yeux brillants d'innocence.

- Comment ça se fait qu'il soit aussi calme, hein ? Geignit le japonais en caressant doucement les cheveux fins du petit garçon devant lui.

- C'est encore un bébé. Fit Jisung en haussant les épaules, le regard rivé vers son fils.

- Oh je te rassure, à son âge les miens étaient déjà exécrables, hein ! Ils faisaient que de pleurer et enchaînaient déjà les bêtises.

- Au moins tu t'ennuies pas.

- Ah ça non, on s'ennuyait pas... Pouffa Minho en regardant Sunghan se mettre sur ses genoux pour partir explorer les environs.

Jisung observa distraitement les deux enfants qui jouaient au salon, avant qu'une réflexion ne remonte jusqu'à son esprit. Un léger rire lui échappa, et il redirigea son attention vers son ami.

- C'est drôle parce que... Atsuko et toi, vous êtes tout calmes, mais eux alors... Pourtant, ils te ressemblent, hein. Surtout Aya.

- Tu trouves qu'on se ressemble ?

- Mmh. Vous avez le même nez et le même sourire.

- C'est la première fois qu'on me dit ça. D'habitude les gens disent qu'Aya ressemble plus à Atsuko.

Jisung haussa les épaules, et Minho afficha un petit sourire.

- En tout cas ce qu'est certain, c'est que Sunghan vient pas de nul part, hein ! C'est exactement le même. Le portrait craché !

- Pfr... tout le monde dit ça... Pouffa Jisung en détournant le regard.

- Mais parce que c'est vrai ! J'ai jamais vu un enfant ressembler autant à un de ses parent.

- C'est parce que j'ai une tête de bébé. Lâcha le noiraud en tirant sur ses joues bien fournies pour attester ses propos.

Minho éclata de rire, manquant de recracher la gorgée de thé qu'il venait juste de prendre.

- Ah ça doit être pour ça alors ! J'y avais jamais pensé mais maintenant que tu le dis...

Jisung afficha une petite moue en tendant sa jambe pour donner un petit coup de pied au brun qui gloussa de plus belles. Tous deux discutèrent ainsi un long moment en savourant leurs infusions. Les enfants de Minho chahutaient un peu plus loin, créant un bruit de fond empli de vie et de jeunesse. Peut-être était-ce à cause du froid de l'extérieur, mais ils avaient eu encore plus l'impression d'être dans une bulle. Un cocon de chaleur. Et Jisung avait beau aimer être seul, il ne pouvait nier qu'un peu de compagnie était agréable.

Finalement, c'est autour de dix-huit heures que Minho décida qu'il était temps pour lui d'aller rejoindre sa femme. Il avait ramassé ses enfants sous le regard rieur de Jisung, et après s'être correctement rhabillé, il était parti. Dès qu'il avait refermé la porte d'entrée, le calme était instantanément retombé sur la petite maison. Le jeune père avait souri doucement. La journée touchait à sa fin.

Maintenant qu'il se retrouvait seul, Jisung se sentait étrangement lourd. Il était resté étalé sur le plancher, le regard rivé vers le plafond. Une étrange lassitude s'était emparée de lui. Comme souvent ces temps-ci, son esprit était vide. Il n'arrivait à penser à rien. Il n'avait envie de penser à rien. Il se contentait de rester sans bouger, comme si la gravité l'avait soudainement cloué au sol. Autour de lui, tout n'était plus que vide. Il avait comme cessé de fonctionner.

Ce n'est que bien plus tard qu'il avait finalement réussi à se relever. Chaque geste semblait lui demander tous les efforts du monde. Lui-même ne savait pas pourquoi il avait si peu d'énergie. C'est en traînant des pieds qu'il s'était rendu jusqu'à la cuisine pour préparer le repas de son fils. Il n'avait pas envie de réfléchir, alors il avait simplement pelé des pommes de terres pour en faire une purée. Il lui restait encore du blanc de poulet et du chou de la veille, alors ça compléterai le tout.

L'air absent, Jisung réunit toutes ses épluchures dans une passoire d'aluminium. Il s'assura que Sunghan était occupé et enfila vaguement ses baskets sans même faire les lacets. Sa passoire en main, il ouvrit doucement la porte coulissante et se glissa à l'extérieur, frissonnant en sentant le vent froid s'infiltrer dans les fines mailles de son pull. Il se dépêcha de descendre les marches du perron, mais lorsqu'il releva la tête, il se stoppa soudainement.

Malgré l'obscurité de la nuit qui s'installait, il pouvait très clairement distinguer les petits flocons qui tombaient silencieusement autour de lui. Ses lèvres se pincèrent alors qu'il regardait sans un mot le spectacle qui s'offrait à lui. Il avait l'impression que ça faisait des années qu'il n'avait pas vu la neige. À ce constat, son cœur se serra doucement. Un petit soupire souleva son torse, faisant s'élever un léger nuage translucide devant lui.

Jisung baissa la tête, avant de se dépêcher de traverser son jardin pour aller verser ses épluchures au composte. Quelques flocons s'emmêlaient dans ses cheveux sombres, fondant instantanément à leur contact. Pas un bruit ne venait rythmer cette scène. Beaucoup trouvaient ce silence reposant, mais pas lui. Il se sentait oppressé.

C'est les lèvres pincées que Jisung était finalement rentré chez lui. Il prit une grande inspiration, comme s'il avait oublié de respirer. Les mains légèrement tremblantes, il déposa ses chaussures dans un coin pour se laisser tomber au sol. Il abandonna sa passoire par la même occasion, n'ayant pas le courage d'aller plus loin. Mais alors qu'il passait ses mains sur son visage pour se reprendre, la petite voix de son fils s'éleva soudainement dans l'air.

- Pa- Papa ! S'écria-t-il, accroché au pied de la table.

Le noiraud releva doucement la tête, son regard rencontrant celui du bébé qui afficha un grand sourire. Pris de l'envie de rejoindre son père, Sunghan lâcha son unique support, faisant un pas dans le vide en écartant les bras pour se stabiliser. Les yeux de Jisung s'agrandirent d'un coup. Surpris de ne pas tomber, le bébé s'arrêta en tanguant un peu, debout au milieu de la pièce. Il releva la tête vers son père et tenta un pas de plus, puis encore un, et encore un.

Un immense sourire fendit le visage de Jisung alors qu'il se jetait sur son fils pour le prendre dans ses bras, le faisant tourner contre lui avec une joie sans nom. Ses yeux brillaient. Il avait presque envie d'en pleurer. Contre lui, Sunghan rigolait. Il ne comprenait pas l'émoi de son père, mais il était heureux. Tous les deux, ils étaient heureux.

Le noiraud serra un peu plus son fils contre lui avait de se laisser tomber sur les genoux, les yeux humides. Il ne pouvait se réjouir plus. Pourtant, une partie de lui était dévastée. Et alors que la neige recouvrait délicatement le paysage hivernal, la douleur avait à nouveau pris possession de son cœur. Sa coquille se fissurait. Silencieusement. Il avait ignoré son chagrin pendant trop longtemps. À présent, il n'était que plus profond encore. Il le savait.

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