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CÉRÈS | CHAPITRE 5
Royaume de Chô-Seon,
ancienne Corée réunifiée,
Jeong-Guk, 10 Avril 1525.
- T -
Des perles perlaient, dégoulinantes, sous les fins tissus de mon haut d'habit. Avachi gauchement sur le futon de la chambre, je contemplais la lumière inconstante de la lanterne qui papillonnait au-dessus de mon crâne fiévreux. Mon souffle s'éreintait, erratique, aux cadences dilettantes de mes hanches soulevées. Mes doigts glissèrent sur le derme de mes cuisses avec une lenteur tentatrice qui hérissait chacun de mes pores, et encerclant ce bout de chair gorgé d'un sang plaisant. Je les tâtai pour en vérifier la fermeté, je les découvris peu à peu, je les caressai sans la cesse, sans jamais ralentir les chuchotis de plaisir qui échappaient à mes lèvres. Je ne me souvenais pas de ce qui m'amena à un déferlement tel de jouissance solitaire mais je savais ô combien mes désirs de combler mes fantasmes primaires devenaient une nécessité. Alors en dépit de l'effort conduit, j'empoignai mon sexe et le malmenai et le tyrannisai sous mon coeur pulsant.
La courbe du pénis cheminait l'air de la tête au périnée. Je soupirai, je grognai, je me pinçai et en redemandai à chaque fois qu'un peu de mon sperme pointait sur le bout de mon gland. Les souvenirs se mêlaient aux attouchements matinaux. Ceux de Tae-Hyung d'il y a vingt années qui jouait incessamment avec sa langue sur sa bouche. Ceux où il articulait encore mon nom dans une respiration difficile et où il contait m'aimer d'une force dépassant l'entendement. Ceux où il hurlait dans mes songes tout ce qu'il ne put me faire au lit, et putain, il n'existait rien de plus bon en ce monde que tout cela. Que sa main confondue à la mienne et cueillant les allers et retours de notre poignet impatient. Que nos doigts patinant au hasard de notre anus rougi de timidité, et que notre sourire essoufflé sous le poids de nos testicules tendus.
À gauche de ma tempe, une coupelle d'eau trônait sur le chevet. Alors je m'en saisis sitôt que je l'aperçus et en dépit de mon dos couché, je la portai à mon bec, accueillant la liqueur à l'intérieur, à l'extérieur et sur mes couches tant j'ignorais comment boire civilement. Je toussai, je m'étouffai mais qu'importait puisque rien n'égalait ce moment d'égarement. Lorsque se vida mon gosier, je relâchai tout, j'amenai l'index, le majeur, l'annulaire de la droite dans le tourbillon de ma salive buccale. Je devais dire que mes gros pouces pénétraient si durement entre mes lèvres que la bave et les mollards dégoulinaient le long de mes membres et mon menton. Je me cambrai à maintes fois à l'émission de plaintes étranglées, j'apparaissais en transe avec mes yeux révulsés et mes jambes tremblantes d'extase à l'attente de la suite.
Revenant au-devant de ma vue, je les étudiais avec une envie luxuriante, imposante, suppliante, et notamment ces longs filets de crachat qui pendouillaient et attendaient docilement leur entrée fracassante. Et ils entrèrent dans l'anus, un à un, dans ce couinement plus haut que les autres, ce gémissement plus intense et ce rugissement d'autant plus rauque.
Dans les échos de la pièce, nous n'entendions que mon ton haletant au même titre que ma poitrine se dresser et se redresser, désespérée et au seuil de l'orgasme. Les doigts coulaient, de façon fluide, dans mon corps apoumonné. Sous la lourdeur de ma silhouette, je sentais le duvet frictionner le tissu de ma robe de nuit relevée au-dessus de ma taille. Elle rappelait les chairs à chairs houleux et rythmés de mon passé, je soupirai de mon aise, et les paupières closes, je frottai à mon tour mon échine contre le coton. Le temps s'allongeait, j'avais bien plus chaud à présent que le soleil se montrait haut aux cieux. Les sons villageois aux alentours ressemblaient à ceux que me susurrait ma guimauve lascive quand le cadre de la lune se prêtait à nos ébats amourachés. Le marché s'animait dans une valse olympienne où les passants passaient devant le poisson grillé que l'on exportait d'InCheon. Son effluve chatouillait mes narines et alors, je pensais au fait que Tae-Hyung n'eut jamais à en manger à sa cour. Les idées à son sujet s'illuminaient et tourbillonnaient encore et encore sur le temps qu'il me restait avant terme.
À mesure de mon excitation grandiloquente, mes gestes variaient irrépressiblement, sensiblement. Mes phalanges venaient et repartaient, cognant toujours mes boules et leur voisin, mon pénis. De légères contractions se ressentirent au plus proche de mon urètre, je n'arrêtais rien et poursuivis cette doucereuse torture qui durait. Dans mon tout-moi, le feu avançait, il me consumait comme jamais et j'eus le sentiment d'imploser de mille bouts. Ce qui arriva arriva, dans ce cas où, dans un puissant râle, l'éjaculation quitta mon sexe tout entier.
Je retombai contre la natte de couchage, complètement las, les bras montés en l'air, le sol maquillé de sperme ; j'étais gagné par la somnolence soudaine. Le sommeil m'attrapa au même moment que mon moi tentant de reprendre l'haleine. Il fallut près de dix minutes pour qu'enfin, je me sentis plus assuré, tellement plus calme que tantôt. La maison d'Il-Nam retrouva vivement son silence ponctué des feuillages dansants près de la fenêtre de la salle. Je ne récupérai pas tout de suite une température normale, je devais avoisiner le soixante de chaleur, et je peinais à redescendre. Lorsque je revins à l'assise, j'ôtai le restant de mes vêtements et demeurai nu comme un nourrisson.
Onze heures sonnait. À cet instant, les paroles manquaient afin de décrire ce que je vécus à la matinée, et à toutes les précédentes. Les jours filaient, et de plus en plus, mon appétence calcinait le peu de raison que je gardais. À leur mesure, je faisais défaut de savoir-vivre puisque je ne songeais plus qu'à baiser. Contre toute attente, mon mariage avec Ah-Reum ne m'assurait pas de ce côté-ci. Elle restait ma souveraine, l'épouse de mon amant, la protégée de mes envies, la mère de mon disciple, rien de plus. Ainsi, je trouvais normal qu'un homme de quarante hivers ait à se satisfaire lui-même quand sa libido faisait des siennes.
En somme, j'étais un animal.
Un léger rire désabusé m'échappa sans que je ne cherche à le retenir. Je me remis sur pieds et dès lors que j'enfilai un bas, j'atteignis la rue où siégeait le puits du quartier. Les enfants jouaient, profitant de l'air agréablement printanier tandis que les femmes tissaient, posées sur les marches des hanoks par dizaines. J'approximai le point de rencontres et grâce à la corde, grâce à son seau, je remontai aisément l'eau que, plus tôt, je finis stupidement. Cela réclamait un travail physique auquel je m'acclimatais sans faire fi de mon nouveau statut social. Je bus une gorgée, une deuxième, et puis une troisième, et mon visage mouillé aussi, je remplis quelques tasses pour mon hôte et ma toilette. Un unique dessein me portait, aujourd'hui. Le départ de mon Kim non plus royal. À la croisée de mon reflet dans le fluide, il me remémora le crépuscule sous lequel il découvrit chacune de mes brûlures rouges et thoraciques qui remplaçaient mon ancien moi et signaient le pacte pour la seigneurie Jeon Jeong-Guk. Crétinerie.
Il partirait ce soir.
Je lavai vigoureusement ma face, sourcils creusés avec l'idée ferme que cela m'amenait là. Tae-Hyung prendrait ce bateau. Tae-Hyung prendrait ses bagages. Tae-Hyung irait en Europe, aux Indes, qu'importait. Tae-Hyung ne reviendrait pas. Voilà la réalité, aussi déplaisante soit-elle.
- Vous n'êtes pas tout seul, monsieur. Puis-je me servir de la source, maintenant ?
Une vieille dame s'impatientait à mon derrière et s'horrifia dès que je lui fis face où mes blessures de ma guerre cicatrisaient avec plus de mal. J'offrais toujours un effet tel à tous. Tae-Hyung demeurait le seul qui ne m'enleva pas ma dignité humaine. Même Ga-Ram témoignait un peu plus de compassion que la voisine... Ah, c'était peu dire. Dès qu'il m'aperçut, il y a cinq jours, sur les terres de sa mère, il m'observa longuement sans prononcer le moindre fait. Je pensais déjà curieux qu'il rende visite à Ha-Neul si souvent en dépit de ses connardises mais là, il se foutait tout bonnement de ma pomme. Je lui jurai, jadis, que je lui tirerais une balle entre les deux yeux s'il apparaissait encore devant moi. Or, il apparut bien alors que je me réservais incapable de dégainer la dernière cartouche du pistolet pour lui. Bon sang.
Je décalai l'espace afin d'octroyer à mon embêteuse la place nécessaire à ses besoins propres. Un soupir, un second, et je repartis vers mes intérieurs, ce goût âcre sur la langue qui ne m'empêchait guère de grimacer. La situation constituait un dégoût pour moi sans que je ne sache l'expliciter puisque, certes, Ga-Ram me vit enfin mais sachant ses hommes non-loin, il demeura foutrement statique sans un œil hostile. J'y découvris même un soupçon soulagé, un peu de tendresse qui hérissa effrontément mon poil.
La raclure qui séjournait au fond de ma gorge trouva, vite, le par-terre comme un crachat dégoulinant de morve et d'un peu de sperme qui me restait de mes ébats solitaires. Je plaisantais. Pour l'amour du ciel, c'était une image dégueulasse. Et fort heureusement, Ryong-Ho qui tambourinait contre la porte n'en remarqua rien. Je me glissai à son derrière, écoutant les sons incessants de son poing contre le battant en cours de démolition. Les miens dans les poches, j'attendais patiemment qu'il daigne ne plus crier comme un putois, mon nom, et par l'occasion pareille, qu'il n'attire plus l'attention ainsi.
- Gros con de Jeong-Guk... Arrête de faire le sourd, je sais que tu ne veux pas m'ouvrir !
Je creusai les sourcils. À mon tour, je lui fis bien savoir ma présence : j'attrapai son oreille, je ris de sa plainte aiguë et risible, je le contraignis à me faire face, et imbriquant mes pupilles dans les siennes douloureuses, je lui offris un sourire qui se voulut tout sauf le plus sincère. Lorsque Ryong-Ho était content ou souffrait, ses orbes se plissaient tant jusqu'à disparaître sous la rondeur de ses joues grasses. Aujourd'hui ne donnait pas d'exception, davantage dans cet habit rougeâtre qui mettait en relief ses courbes. Néanmoins, plus je le contemplais dans sa beauté généreuse, plus il m'agaçait alors je tirai et tyrannisai son lobe avec le désir sadique de la lui arracher pour son irrespect, la pauvre porte d'Il-Nam qui subit seulement. À mon ouïe, je saisis son timbre implorant, ses petits pieds faire des toc-toc dans le sable noir qui encerclait le bâtiment.
Son grand-père ne rentrerait que dans l'après-midi. Cela laissait libre loisir afin d'observer les progrès du petiot aux mains intranquilles. En pénétrant le palier, je sommai à mon adopté de ne plus bouger et ainsi, je me rendis aussitôt dans la chambre de mes ébats où j'y découvris encore les traces de mes plaisirs secouer mes draps. Un soupir à fendre ma glotte, je tâchai de tout retirer, de retourner le matelas pour ne plus qu'on y voit les spermatozoïdes frétiller sur le sommier. À mon derrière, Ryong-Ho apparut. Je perçus sa présence par le bois craquant du par-terre et par les sons railleurs qu'il sortait de ses nasaux. Cela m'agaça, je me demandais qui donc me donna un enfant si présomptueux.
- On dirait que tu t'éclates bien... Qui est l'heureuse élue ? Elle est déjà partie ? Tu l'as cachée ?
- Je croyais t'avoir dit qu'un futur roi ne pouvait pas s'autoriser ce genre de réflexions...
En écho à mes remontrances, il s'amusa à me singer sans once de compassion. Alors je me raclai la gorge, et me redressant, je lui adressai satisfaction ponctue à ses curiosités obscènes.
- Et pour ton information, l'heureuse élue, c'est moi-même.
- Je crois que je préfère ça plutôt que ce soit avec ma mère... fit-il, il l'imagina, plein d'un dégoût.
Bien qu'épousés, Ah-Reum et moi gardions une cordialité de l'antan, mêlant respect et dévotion pour l'ancienne souveraine. Nous discutions, parfois. Par cela, j'imaginais, sans peine, qu'elle me considérait surtout comme son garde protecteur si on regardait tout ce que je fis pour assurer son être et son bien-être. Je ne lui en voulus pas un sou pour avoir couché avec Tae-Hyung par le passé. Même moi, je compris que la société monarchique était ainsi faite et que je ne demeurais qu'un fou sur l'échiquier de l'amour.
Je contournai mon cadet, je rejoignis la pièce centrale de la maison dans laquelle nous recevions, habituellement, les amis retraités d'Il-Nam. Ryong-Ho suivit, et sans que je ne l'y invite, s'installa sur la chaise à bascule comme un fatigué. Ce garçon irait sur ses vingt-et-un ans dans l'été, bientôt sa légitimité à revendiquer son trône. À l'étudier de plus proche, il ne possédait rien de royal. Ni maturité. Ni manières. Ni élégance. Ni raffinement. Ni dévouement. En somme, il ressemblait bien trop au Jeong-Guk d'Ach-Lys, à la différence que lui, se contrefichait amoureusement de son pays et de son devenir.
- Que fais-tu là ? C'est imprudent de laisser ta maman seule, je remarquai en siégeant en face de lui.
- "Ta maman" ? Arrête de me parler comme à un demeuré, j'ai plus cinq ans.
- Je te traiterai en adulte quand tu agiras en adulte, Ryong-Ho. C'est aussi simple que ça.
- Je te signale, aussi, que t'es censé me voussoyer. Je suis ton roi. Et ça s'appelle du respect.
Grand bien me fasse pour ne pas cogner cet enfant dont la contrariété se lisait sur chacun de ses traits.
- Futur roi, mon cher. Et le respect, ça se mérite donc cesse un peu tes babillages, tu m'ennuies.
Ryong-Ho se tut. Cet échange de bonnes politesses signait notre quotidien depuis des années que je lui révélai ses origines véritables. Autrement dit, j'aurais certainement mieux agi de me taire aussi.
Le fils s'affala, preuve de fond sur mes doutes quant à ses aptitudes au trône de son père. Nous soufflâmes de concert, nous zieutant en chiens de faïence comme si l'un et l'autre ne pouvions survivre sans se cracher dans la patte. Pour ma part, je me fichais un peu de ça puisque rien que le seul fait de renverser Ga-Ram m'importait depuis aussi longtemps. À l'assise en tailleur, je vissai le menton dans le creux de ma paume tandis qu'il considérait déjà un peu mieux ce qui nous entourait, lieu dans lequel il ne venait jamais à l'accoutume. Ses dents mordirent sa bouche pincée, ses billes brillèrent et avec ce mutisme, il était difficile de lire en lui, songer à ce qu'il pensait, à ce qu'il croyait et il ne m'aidait guère, masquant une sensibilité derrière son caractère tempête.
- On s'est fâchés, ma mère et moi... Elle m'a envoyé te retrouver.
Ah-Reum présentait cette irascible attitude de se défaire de ses responsabilités lorsqu'elles l'assommaient de difficultés. Enfin, de mon côté, je me souvenais ainsi que son fils demeurait sous la mienne au-delà des obstacles. Un soupir lourd de sens franchit mes lèvres, il disait de nombreuses pensées, et notamment celle d'un Ryong-Ho aux prises constamment avec son monde. Fichu gamin.
- Et que comptes-tu faire ?
- Profiter de ma liberté. J'ai réalisé que t'avais beau être pénible, mère la reine te surpasse en tous points.
Il restait bien naïf de croire que je lui ficherais la paix, en dehors de nos habitations. Je n'osais que peu lui dévoiler à quel point il tombait mal. Le Kim partirait, à ce jour, et bien que je ne situais encore pas bien le port, je m'y rendrais. Je m'en convainquais ; et j'y parviendrais, advienne que pourra. Je contemplai mon disciple, ses fins balancements d'un pied sur l'autre, et le sac qui accompagna ses pas jusqu'ici. Je désirais le croire lorsqu'il taquinait ainsi les intraitements de sa mère. Cela fit grincer un peu de mes dents qui trouvèrent insultant une comparaison telle, de cette femme - la mienne - à moi. Mon œil s'assombrit un temps puisqu'à ma mémoire revint l'idée que je pouvais être pire, tellement pire que les beuglements de cette mère.
Je me raclai le fond de ma gorge, plein de bavures matinales. Il me fallait un plan. Et avec cet enfant aux pattes, c'était moi qui devenais bien naïf d'en réchapper sans lui.
- Je me mets où, bordel ?
Il questionna, le con, quand je lui offris un coup contre son crâne nul de respect. Il couina, malaxant sa tête douloureuse, et je maudis ce jour où je décidai de prendre un garnement tel sous mes ailes. Je grimaçai, je pointai un coin du séjour de mon doigt, j'indiquai ainsi qu'il dormirait avec son grand-père.
- Tu restes combien de temps ?
- Ça t'intéresse ?
- Pitié, oui... Imbécile, j'ai besoin de savoir combien de temps je vais devoir nourrir cette bouche insolente.
Ryong-Ho m'étudia, suspicieux. Ses épaules roulèrent, l'air de ne rien savoir. Je pinçai l'arrêt de mon nez, plissai les paupières avec vigueur et d'un sang froid sensationnel. Du bout de ses lèvres, je décryptai une confirmation à mes songes. Le temps durerait long, à jongler entre le zèle de mon élève et la démence de Jeon Il-Nam. Le premier quitta son assise au profit d'une errance à travers chacune des pièces de la modeste demeure. Ses bottes traînaient, éraflant la poussière, la terrassant, traînassant ici et là. À cette cadence résonnait sa chevelure aux ébènes qui tintaient, qui sautaient contre son front à ses déambulations diverses. Il installa son couchage tout proche du futon patriarcal. Mon père adorait son petit-fils quand il daignait se souvenir de son visage. Et c'était, à mon sens, une raison suffisante pour que ledit endure ses aléas démentiels.
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Le jour s'étala au milieu des temps changeants du printemps, dans une volonté de le rendre davantage plus vif. Je tentai, à maintes, de me débarrasser de Ryong-Ho qui me collait au train comme un enfant et sa maman. Qu'il était agaçant, ce censé être homme quand bientôt, la couronne il porterait. Je n'hyperbolais rien quand je narrais avoir soupirer, exaltant mon désarroi à toutes les heures d'aujourd'hui, partagé entre les peines pour le gamin et les chagrins pour son pater. Des façons les plus sincères qui soient, je grimaçais toujours un peu lorsqu'il fallait filier ces deux tandis que je fus celui qui donna son nom à l'enfant, Ryong-Ho. Soleil du dragon. Je me souvenais des inquiétudes d'Ah-Reum qui pensa, aussitôt, qu'on pourrait le traquer pour un pareil patronyme. Je me rappelais ses mots et son air tracassé, plein d'un épuisement legit, en un trente-et-un juillet mille-cinq-cent-cinq. Je lui confiai un sourire qui se voulut consolant, et à la suite d'une sommaire caresse sur le sommet de son crâne, je lui dévoilai ceci, prochains.
- C'est moi qu'ils voudront. Je ferais en sorte qu'aucun de ces fils de bâtards ne sache l'existence du nôtre.
Puisqu'un fils de bâtard restait un bâtard, à son tour.
Je tins ma promesse, à peu près, sans en révéler rien au concerné qui grandit dans le secret et l'ultime quête de reconquête. Au désormais, il ne me facilitait guère la tâche, et bien que je ne prévus rien de tout cela, je conclus que ce ne serait pas une si fausse bonne idée de l'emmener voir Tae-Hyung. En fait, c'était véritablement la pire qui demeurait, j'ignorais quel entêtement de mule me traversa, à cet instant. Toutefois, si Ryong-Ho désirait tellement me suivre alors autant constater de son utilité dans mon affaire. Il réclama, à diverses reprises, la destination finale de nos pas si empressés sans savoir que, certes, le temps pressait fière allure.
Tous deux bordions le courant de l'eau après avoir garé nos chevaux sur le chemin. La zone portuaire se noircissait de monde, de commerçants de toutes les sortes qui se mêlaient, le lieu adéquat pour contrebander, somme toute. Mon corps se serra, tout entier, quand il se souvint tristement de ces images blondes où ce Kim démontra son goût fort pour les pactes illégaux. La douce ventée se faufila entre les mèches qui décoraient ses tempes fripouilles. Tae-Hyung, à travers la foule, se distinguait par une élégance événementielle, par ce charme royal, et cette assurance sulfureuse qui le rendaient digne des plus grands jusqu'aux plus petits bandits du pays. Un unique bagage accompagnait ses bottes, à ce sol de dalles grises, tandis que je me rendais soulagé de constater que son bateau n'était toujours pas amarré. De milliers de fourmillements. Je suivis le balancement de ses mains lorsqu'elles vinrent attacher ses cheveux avec un ruban à la couleur de la mélancolie. Le doré lui seyait si bien. Les airs sérieux qui peignaient son visage, à présent, en traduisaient long sur les raisons de son passage là. Son départ précoce mais, aussi, le marchandage d'un sachet que je l'aperçus tenir, au loin, à un autre homme. Un type qui m'inspira de nuances nombreuses, toutes tirées vers un dégoût curieux qui m'irrita franchement.
Une tête grise, pâle, et vieille. Elle souriait, vicelarde, d'une façon perverse qui fit courir les fourmis contre mon échine. Sa barbe ternissait son allure et lui offrait les airs d'un deux fois mon âge avec l'adresse et la tenue d'un davantage plus jeune. Chacun de mes membres se raidit dès lors que la crapule approcha le Kim pour un peau contre peau, un bouche contre bouche qui me donna le mal de crâne, une envie furieuse d'arracher le sien. Néanmoins, je ravisai cette partie explosive, sanglante, trop intense de moi-même lorsque je remarquai la manière dont le receveur ne rendit pas ce chaleureux baiser. Précisément, il ne bougea pas, acceptant ce cadeau empoisonné comme une soumission redoutable. Avec ces colères qui grimpaient de mon ventre à ma gorge, cela me coupa dans ma contemplation intempestive des lèvres mielleuses de Tae-Hyung qui jonglaient, avec une sensualité déconcertante, avec la salive de la bouche de l'autre. Ciel.
Ma trachée rebondit, mes sourcils se creusèrent, mes dents mordirent ma chair, et je saisis le poignet de Ryong-Ho dont je me rappelais l'existence, soudain. Je respirai lourdement et avec un peu de bravoure, je parvins à mon intéressé. Je fis plus que cela puisque, sans crier gare, je marchai, traversai, et scindai le couple, feignant de n'avoir rien vu de ma route. Je perçus les râles bougons de l'étranger, et les yeux curieux du blond sur ma silhouette agacée, embarrassée.
- Oh navré, je ne vous avais pas remarqué.
- Jeong-Guk ? C'est toi ? réclama l'infidèle guimauve.
Je libérai mon disciple de ma prise, et toujours dos à tous, je secouai vivement de mon chef. Cela causa un léger rire à mon demandeur.
- Si, c'est bien toi... Qui d'autre que Jeon Jeong-Guk pour se mêler de mes affaires ?
Ces dires ne sonnèrent pas comme un reproche, j'y sentis un soupçon de tendresse dans son timbre, j'en ris. Doux-amer.
- Qui est-il ?
L'indésiré interrogea, je pivotai de moi à lui, toisant son attitude de mal éduqué. Mon regard s'arrêta sur ses babines rosies par un effort naguère, et afin d'éviter que des grossièretés ne quittent le domaine de ma pensée, ma langue poussa l'intérieur de ma joue, nerveuse. Quel amusement, je me posais exactement la même chose à son sujet, putain.
- Personne, Hua, Tae-Hyung répondit. C'est juste un pauvre fou qui se persuade de me connaître, je n'ai rien à voir avec lui.
Je pensais qu'il me présenterait, au moins, comme un ami. Abruti. Sur le côté, je maudis le gloussement éjaculé par mon gamin aux réparties de celui qui se trouvait être son véritable père. Un sourire contrit, difficile, s'afficha sur moi, et de plus belle lorsque je réalisai, l'un auprès de l'autre, la ressemblance flagrante entre eux. Ils avaient un pareil regard, celui qui signifiait une volonté ardente et un désir urgent de vivre.
- Qu'importe. Embrasse-moi encore, papillon.
Je singeai de concert avec Ryong-Ho, nous demeurions pleins d'écoeurement. Cette fois-là, il me similait davantage. La situation restait étrange, je le devais à cet homme qui demandait un autre baiser comme s'il n'avait pas été le principal instigateur du dernier. Rien de particulièrement sain se jouait, ici. Et tandis que l'interpellé s'apprêtait à répliquer par un ultime baiser, je fis la route inverse, coupant, de pleine conscience, ce moment jugé inutile à mes yeux. Le nommé Hua s'indigna, curieux de connaître à quelle sorte de jeu je m'amusais alors que Kim Tae-Hyung, lui, ne retint pas son contentement.
- Jeong-Guk a raison, on ne peut pas faire ça devant son fils et lui, qui est notre aîné. Ce ne serait pas correct, et je dois y aller.
- C'est justement ce que je suis venu te dire. Ne pars pas, Tae-Hyung... S'il-te plaît.
Je pinçai ma lippe, je lui parus comme un bébé boudeur qui articulait un caprice. C'était presque ainsi malgré mon âge. Pourtant, j'ignorais s'il compatissait avec cet embarras marquant son visage. À mon ouïe, j'entendis les cruels "ne me fais pas honte" de l'enfant ingrat qu'était mon disciple. Or, les années m'apprirent que je devenais ce type de parent, celui d'un genre pénible où j'agissais à mon bon vouloir afin d'inculquer la vie et ses expériences, mauvaises surtout, à ce malchanceux de Jeon Ryong-Ho. Un soupir, je m'approchai, et saisis les mains glacées de l'unique Kim qui me scrutait, méfiant. Il s'écoula de longs temps durant lesquels aucun ne syllaba le moindre de nos maux. Mes pupilles orageuses parcoururent son faciès, de la racine de ses cheveux à la pointe de son menton, glissant de ses billes brillantes, oranges, à son nez droit, sa bouche mince et les milliers de grains de sa beauté qui ornait son grain de peau. Il ne me repoussa pas ; un ouragan sillonnait son esprit par vagues. Je ne démordai guère lorsqu'il fallut rendre des comptes à l'inopportun qui mitraillait nos doigts enlacés. Une profonde respiration me secoua, entier, et dès lors que je redressai le chef, les mots qui suivirent bondirent plus hauts et plus forts que des échos retenus infiniment en moi.
- Ne m'engueule pas, et écoute-moi... Je ne veux pas que tu partes, j'ai besoin de toi.
- Combien de fois dois-je me répéter ? rétorqua-t-il, distant et anxieux.
- Autant de fois que tu le voudras parce que, moi, je te répondrai, à nombre égal, à quel point je t'aime.
Silence. L'incompréhension les flattait aisément.
- Sérieusement, ça me rend dingue. Je ne sais toujours pas ce qui a bien pu se passer mais je suis sûr d'une chose : ton cœur appelle sans cesse le mien, je ne peux pas lutter, et c'est ce qui me convainc que je ne me leurre pas.
- T'es malade...
- Et tu es Kim Tae-Hyung. Je le sais, je le ressens, ça fait bizarre dans mon corps comme à chacune de ces fois où tu me taquinais, où tu protégeais mes arrières quand j'étais censé protéger les tiennes. Fais revenir celui qui m'a fait tant haïr et tant aimé, à la fois, celui qui... qui m'a appris à braver la mort et à lutter contre le temps.
Ses billes étincelaient d'un éclat qui criait se passer quelque chose d'au-delà du naturel en lui. Je ne compris rien, pas même une esquisse quand il souffla que je devais simplement être bête. L'instant ne dura guère. Un envoyé parvint à nous, un courrier à la patte qu'il me remit aussitôt avant de filer, sans un dire. Le Kim, troublé, quitta ma prise et me laissa découvrir le message, d'un œil suspicieux.
"Je me suis reprise tes mots quand tu revins des célébrations de DaNo... Tu demandais si je croyais en la réincarnation, je répondis que ce n'était le cas. Pourtant, cela me tracassait alors j'ai souhaité vérifier quelque chose.
L'urne était vide... Rentre vite à la maison.
- Tendrement, Ta Ah-Reum".
Je ne compris pas le propos. Je ne compris non plus quand Tae-Hyung s'adressa à Ryong-Ho ; lorsque celui-ci répliqua que je n'avais pas toute ma raison depuis des années. Mon muscle cardiaque se resserra en ma cage au thorax, c'était foutrement douloureux mais douloureusement soulagé, je me sentis. Mes paupières se fermèrent, sûrement, et avec l'assurance ferme que je ne me trompis pas en dévoilant si maladroitement mes sentiments. Je froissai le papier dans ma poigne. Or, ce fut lorsque je me croyais plus vivant que jamais que je perçus des pas, reconnaissables parmi tous. L'armée centrale faisait tinter sa légère artillerie, au pas de course. J'ouvris le regard et ce fut à la suite d'un fort "il est là", ponctué d'un accent, que je saisis qu'eux, ils étaient là pour moi.
- Merde, jura le méché.
Je bousculai Ryong-Ho qui chuta à l'eau dans un son sourd, sous la stupéfaction des autres. Néanmoins, je ne songeais pas davantage, et le bras de Tae-Hyung avec moi, je nous entraînai, vifs, sur les quais du port en dépit de ses protestations. Je ne savais pas ce que je fichais, précisément. J'aurais pu fuir seul. À dire la sincérité, mes membres réagissaient, autonomes, aux situations familières de l'antan. Et à présent, je me voyais, à nouveau, à balader le royal dans les corridors de la cour dans le Graal d'échapper à Ach-Lys.
- Qu'est-ce que tu fabriques ? Lâche-moi, je peux courir sans ton aide !
- Vous lâcher, Votre Altesse ? Hors de question, riotai-je.
Les soldats à nos trousses, je nous conduisis entre les sentiers, entre les semelles de gens auprès de qui le Kim s'excusait à chacune de mes poussades, je franchissais les virages, à droite, à gauche parfois, et un peu hystérique, je nous fis grimper sur la planche d'un bateau, semblant vide de quelqu'un. Les militaires s'égosillaient sur mon nom tandis que je leur riais au nez. Je m'allongeai contre les planches et invitai le boudeur à en faire de même, quelle lenteur. Nos poids couchés contre le bois s'aimantaient, s'accueillèrent, et se touchèrent presque, flanc contre flanc, le souffle court. Mes billes cheminèrent encore sur son visage las, blasé et agacé, et ses pupilles tombèrent dans mes pupilles. L'émotion me gagna en terrain. Où diable avais-je trouvé un si bel enfoiré ? À la cour. Vraisemblablement, ils venaient tous de là, telle une ruche ou une fourmilière, un nid de géants où naissaient les hypocrites, les corrompus, les pervers, et les peureux. Tae-Hyung appartenait à cette catégorie dernière, autrefois. Au désormais, je ne la ressentis pas ainsi, je croirais même voir le courage, un peu de fascination dans ses yeux en or. Et cela ne changea pas au moment où le navire tangua. À mesure que s'écoulaient les minutes, les bruits s'amenuisaient, se rendaient lointains, et d'autres plus précis mais aucun ne se leva par la crainte d'un piège quelconque.
- C'est silencieux... Ils sont peut-être partis... Bien joué, Jeong-Guk.
Un piège dans lequel je nous piégai moi-même sans oser l'avouer. Les encouragements de Tae-Hyung hochèrent ma tête redressée et constatant que, certes, le bateau bougeait, mais c'était pour la bonne raison qu'il nous éloignait de la terre. Mon compagnon le réalisa, je me fis tout petit-minuscule, et il finit par exploser d'un second "bien joué !", prononcé à l'ombre d'une rage justifiée. La grimace, encore, je me laissai glisser de nouveau, le soupir. Le capitaine, chapeauté, nous rencontra, surpris autant que nous de nous voir dans une posture pareille.
- Bon, alors ! Vous allez la payer votre place à bord ?
La bouche pincée, je regrettai profondément de ne pas avoir attrapé ma bourse en sortant alors je m'en remis au contrebandier qui me tuait cent fois dans sa tête, à coups de couteau, de marteau, de pistolet, de baïonnette.
- Donne-lui tes sous du voyage... Je te rembourserai, tu as ma parole.
- Ta parole, tu peux te la mettre...
J'interrompis ses élans de vacheries, je m'adressai au vieux marchand qui sondait nos comportements et ne tarderait pas à nous jeter à la mer si on ne se hâtait pas.
- Quel est le port le plus proche auquel nous nous rendons ?
- Nous allons à Fukuoka, sur l'île japonaise de Kyūshū.
Je blêmis, le premier et l'unique même, puisque Tae-Hyung paraissait retrouver une dangereuse tranquillité. Je me crispai, je me remis sur pieds, je frappai les mille pas, je me maudis un million de fois, et je cognai mon crâne contre le mât, désirant en secret que cela règle mes milliards de soucis. Et surtout, le plus crucial. Mon aimé, présent ici, devait me détester du point le plus élevé.
CÉRÈS | CHAPITRE 5
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Hello ! Ça faisait super longtemps que je n'avais pas updated Cérès. J'avais mis sur pause l'écriture en attendant de sortir des rattrapages de partiels et puis, les vacances sont arrivées et je me suis consacrée à Asclépios (mon autre roman en cours).
J'essaie de reprendre un rythme en publiant à nouveau régulièrement mais je ne vous garantis rien ahah. J'espère que ce chapitre vous a plu, et que votre rentrée s'est bien passée <3
DES BISOUXXXXX
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